Quelque 200 personnes se sont rassemblées devant l’hôtel Reine Elizabeth où George W. Bush est venu faire une allocution jeudi dernier. Plusieurs collectifs et associations avaient appelé à la manifestation qui a duré environ trois heures. Les protestations se sont déroulées dans un calme relatif, encadrées par une escouade anti-émeute, des policiers à cheval et à bicyclette, ainsi que des chiens policiers, qui ont formé un mur devant l’entrée de l’hôtel.
« Retourne dans ton ranch » et « George Bush tu nous entends, Montréal te dis vas-t-en », n’étaient que quelques-uns des cris que scandaient les manifestants. Ces derniers s’étaient déplacés pour protester contre « la présence de George W. Bush à Montréal, mais aussi pour rejeter le courant d’idées qu’il représente et qui nous menace encore », pouvait- on lire sur des tracts distribués par des membres du collectif Échec à la guerre.
Selon Marie-Claire, membre de ce collectif, « la Chambre de commerce [de Montréal] n’aurait pas dû inviter » M. Bush. Un autre manifestant, William Sloan, avocat et président de la section canadienne de l’Association américaine de juristes, a déclaré le président Bush comme « persona non grata », jugeant tout bonnement que George Bush « ne devrait pas avoir accès au territoire canadien ». Faisant écho à de nombreuses pancartes brandissant des slogans peu flatteurs, Bernard Beaulieu, de Québec solidaire, et M. Sloan ont dit considérer « George Bush [comme] un criminel de guerre ».
Charles Lemieux, porte-parole du collectif Échec à la guerre, a déclaré qu’il « ne déplore pas, [mais qu’il] dénonce » la venue du président américain. M. Lemieux s’est reporté à 2003, lorsque « des dizaines et des centaines de milliers de Montréalais marchaient ici même pour s’opposer à la guerre d’agression que [l’administration Bush] a déclenché contre l’Irak », qualifiant l’invitation de la Chambre de commerce de Montréal d’«affront ».
Le porte-parole du collectif a dressé un bilan très critique des huit années de présidence de « W ». Il a énuméré religieusement les accusations portées contre le quarante-troisième président des États-Unis, qui à ses yeux représente « le déclenchement de deux guerres illégales contre l’Afghanistan et contre l’Irak, l’autorisation de la torture à grande échelle, l’autorisation de détentions arbitraires, les attaques contre les libertés civiles aux États- Unis, la détention d’immigrants aux États-Unis sans justification et sans procès, la négation des évidences scientifiques sur la question environnementale, le non-engagement dans Kyoto, les politiques néolibérales et tant d’autres ».
Outre ces accusations, M. Lemieux a surtout voulu « attirer l’attention sur la signification politique » de cette invitation. D’après lui, « le cercle de dirigeants à Montréal […] et le milieu de l’industrie militaire de toute évidence redemandent des idées de George Bush ». « De quoi se parlent-ils en ce moment entre deux bouchées de caviar », a‑t-il lancé, poursuivant que « les gens fortunés du Canada se payent George Bush non [pas] comme une curiosité, mais comme un porte-parole d’idées rétrogrades que des gens ici veulent réhabiliter ».
À l’écart de la manifestation, certaines personnes dénonçaient la manifestation elle-même. Alain Doucine, ancien élève en informatique à McGill et actuaire de formation, était de ceux-là. Il a qualifié les manifestants de « gens dangereux », de « fan club de Saddam Hussein » et d’«humanistes sélectifs » parce qu’ils « dénoncent Guantanamo, mais oublient les prisonniers politiques du régime de Castro ». M. Doucine a par ailleurs estimé que les manifestants auraient plutôt dû manifester contre le fait que « le Québec exporte de l’amiante chrysolite, une arme de mort massive à déflagration lente et cruelle, vers des pays abusant des libertés civiles » et d’autres torts semblables au lieu de s’en prendre à « l’alliance du monde libre ».
Les forces de l’ordre ont dû parer des chaussures lancées par des manifestants à plusieurs reprises. La manifestation s’est soldée par quelques arrestations et par la mise à feu du Star Spangled Banner et d’un pantin à l’effigie de George W. Bush par des manifestants quelque peu surchauffés.