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De l’esprit à l’encre

« Eden in Stasis », nouvelle exposition de l’artiste et étudiante Amy Goh

Webmestre, Le Délit | Le Délit

« Personne n’écoute les artistes », confie Amy Goh lors de son exposition multimédia à la galerie Coatcheck le 16 février, « c’est pourquoi je compte sur Jo (la directrice de la galerie) pour superviser le projet ». Mais la réaction du public à son œuvre lui a pourtant prouvé le contraire : le travail d’Amy Goh remet en question tout ce qu’on entend, tout ce qu’on voit ; en bref, tout notre rapport à la réalité. L’artiste ouvre l’espace clos de la galerie en projetant les images d’un jardin sur un triptyque de dessins à l’encre, sa marque de fabrique. Ces dessins représentent la lune, l’océan, un serpent. Grâce à une ambiance sonore à la fois tranquille et angoissante, on entre dans le labyrinthe de l’esprit de cette artiste surréaliste, sublime, et tout à fait stupéfiante.

L’exposition « Eden in Stasis » explore le thème de la naissance, qu’elle soit littérale ou figurative. On apprend de la complexité de son art que le moindre détail peut changer le sens d’un tout. Les images en mouvement projetées sur les murs contrastent avec les dessins et leurs existences figées. Amy s’intéresse aux « états transitoires », un motif très important dans son travail. Elle a décidé de présenter ses dessins avec des images en mouvement et une ambiance sonore parce qu’elle aime la façon dont ces éléments modifient le rapport du public aux dessins. Une esthétique presque apocalyptique se crée quand l’image de la lune passe lentement sur le dessin d’une figure attachée à un cordon ombilical. La naissance et la mort sont alors juxtaposées, comme un résumé de la totalité de son œuvre. 

Amy a commencé à dessiner sérieusement il y a deux ou trois ans seulement. Aujourd’hui, elle diversifie son travail et s’attaque aussi bien au dessin qu’aux livrets de poésie et à la photographie ; elle expose lors d’expositions internationales, et elle est officiellement représentée par la galerie Coatcheck à Montréal, où « Eden in Stasis » va rester toute la semaine. Des copies de ses dessins seront aussi vendues. Quand elle était petite, elle était fascinée par les dessins d’animaux et par la texture de la fourrure. Cette attention à la texture apparait toujours dans ses travaux récents et dans l’importance qu’elle donne à la tridimensionnalité. Son art est toujours référentiel, tout en présentant un catalogue de symboles religieux et philosophiques ; elle construit une nouvelle mythologie qui juxtapose les traditions religieuses de l’Est et l’Ouest. Cette juxtaposition culturelle interroge l’idée même de l’origine : « Je suis fascinée par l’idée que la violence fait partie inhérente du phénomène de création », dit Amy.
Son génie est manifeste dans le dédale d’«Eden in Stasis ». L’exposition a lieu pendant la célébration de la nouvelle année chinoise, ce qui correspond parfaitement à son travail. En effet, le calendrier chinois est luni-solaire et s’accorde aux grands thèmes de l’exposition. De plus, l’année 2013 est l’année chinoise du serpent, un animal qui revient souvent dans l’imaginaire d’Amy. La salle est devenue son propre Éden, les spectateurs sont dans un univers isolé de la réalité et de l’hiver : une expérience elle-même transitoire, mais encore fixe. Les images suspendues au plafond et projetées sur les murs interrogent les grands mystères du monde, de la création et de l’art à travers le regard de cette jeune artiste brillante, qui ne demande qu’à être écoutée. 


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