Une crise économique, un tsunami, un Printemps Arabe et un printemps Érable, un lac au Pôle Nord et une excursion martienne… Ça en fait une liste ! Et pourtant celle-ci n’est que le sommet de l’iceberg, le seul au monde à ne pas être en train de fondre.
Parlons par exemple de la situation politique de cette chère ville de Montréal dans laquelle nous vivons… D’abord, notre Mafioso préféré Gérald Tremblay se voit accusé de fraude et démissionne. Suit son remplaçant, le preux chevalier Applebaum, abattu par quatorze coups, une flèche par scandale de corruption. Un conseiller municipal a mis le doigt dans le mille en s’exclamant que la politique montréalaise était une histoire à faire sautiller Kafka dans sa tombe. Un système qui ne fait qu’empirer, poussant un politique après l’autre à s’impliquer dans les eaux profondes de la corruption, peut-être même sans le savoir.
Il faut dire que nos voisins anglo-saxons ne sont pas mal non plus, avec Rob Ford, maire de Toronto, lié à une affaire de drogue plus effrayante que pittoresque. Monsieur Ford devrait peut-être arrêter ses obscurités, ou tout au moins ne pas se faire prendre en photo avec ses partenaires de crime s’il ne veut pas finir dans le groupe peu privé des politiciens déchus et ridiculisés. Il pourra cependant prendre place entre Dominique Strauss-Kahn, ce vieux coureur de jupons, et de Bush, qui termina sa présidence laissant les États-Unis endettés et en pleine invasion pour aller peindre des tableaux de ses chiens.
Ces quelques personnages, à l’allure bizarre d’enfants gâtés, sont les pionniers d’un nouveau coup d’État ‑celui de la médiatisation qui transforme chaque politique en célébrité. Nous avons vu tellement d’imbéciles au pouvoir que la presse (habituée à les suivre à la trace pour avoir le prochain scoop) a aujourd’hui dépassée son mandat de dénonciateur.
Aux États-Unis bien sûr, cela fait longtemps que la vie privée du Président est tout aussi importante que sa vie politique. Bill Clinton a beau avoir été un bon président (le dernier à avoir terminé avec un surplus économique d’ailleurs), il ne fallut qu’un scandale extra-conjugal pour qu’il perde son poste.
Mais maintenant ce n’est plus seulement aux États-Unis : DSK avait beau être un des seuls du Parti Socialiste français à savoir tenir un budget, et d’ailleurs à faire un travail exemplaire au Fonds Monétaire International, il fallut une savonnette et une femme de chambre pour détruire à tout jamais son poste et ses ambitions présidentielles. On me dira que ce n’était pas la première fois que DSK s’impliquait dans une affaire de la sorte, et qu’un homme immoral ne devrait pas avoir de pouvoir, mais ce n’est pas sa personne que je défends.
Ma lutte se trouve contre tout abus de pouvoir, et si la presse peut rendre une affaire privée tellement publique qu’elle mène à la ruine d’un officiel gouvernemental avant même qu’il ne soit déclaré coupable, je me battrai contre cet abus de pouvoir.
Le risque de laisser la presse dicter qui sera notre politicien préféré, c’est de créer une nouvelle classe de politiciens ‑non-pas un groupe d’individus qui cherchent de mener à bien un gouvernement, mais plutôt un amas d’egos maniaques et de sociopathes, tous prêts à n’importe quoi pour gravir les échelons et finir en haut de la hiérarchie. Cette nouvelle classe nous laissera donc avec un groupe qui sait très bien parler, se coiffer, choisir ses costards, ses chiens, ses sports et ses compagnes, mais qui n’aura ni l’envie, ni les capacités pour gouverner. La France a eu pendant longtemps la réputation d’un pays dans lequel la vie privée des politiciens n’avait pas grande importance sur leur vie publique. On disait en rigolant d’ailleurs, que si un président français n’avait pas plusieurs maitresses, il n’était peut-être pas assez multitâche pour le poste. Il fallut Monsieur Sarkozy, avec ses Ray-Bans, ses Rolex, ses fêtes privées et sa femme mannequin-chanteuse-actrice-philantrope, pour qu’enfin Paris Match commence à parler de politique.
Même François Hollande aujourd’hui a du mal à passer inaperçu quand il sort avec sa compagne (qui travaille d’ailleurs à Paris Match), et cela me donne des frissons… Si on s’intéresse plus à la vie privée d’un politicien qu’à sa fonction et à ses motivations publiques, nous commençons alors un nouvel état. Un état démagogue, dans lequel les journaux parleront de la cravate d’Obama durant sa déclaration de guerre, de quelle montre porte Netanyahu quand il arrive en retard aux prochaines négociations de paix, et qui sait, du joueur préféré de Trudeau durant la séparation du Québec…