Le ou la Principal(e) de l’Université McGill est censé(e) répondre périodiquement aux questions de la presse étudiante. Suzanne Fortier ne rompt pas la tradition et a accepté de rencontrer, le vendredi 21 mars, des journalistes de chaque publication du campus. Dans les locaux de l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM), nombre d’enjeux liés à la vie étudiante ont été abordés, des projets d’associations à la transparence, en passant par l’espace universitaire.
Brisant cette fois la coutume, Madame Fortier a tout d’abord tenu à faire un discours. « La dernière chose que j’aimerais voir, commence-t-elle, serait que McGill devienne plus similaire à d’autres grandes universités au Canada […]. Nous devons nous rendre compte des caractéristiques qui rendent McGill unique, et continuer de construire dessus ». La Principale salue tout particulièrement les initiatives étudiantes. Elle définit cinq priorités pour la suite de son mandat : créer un environnement d’apprentissage avec plus d’opportunités, étendre l’enseignement et la recherche à tous les domaines intellectuels, connecter McGill à sa communauté et aux autres universités, rendre l’administration plus efficace, et, enfin, améliorer le campus, en le rénovant et en le rendant plus technologique. La Principale de McGill a ensuite répondu aux questions des journaux étudiants.
McGill Tribune (MT): Quels résultats positifs considérez-vous avoir atteint cette année ?
Suzanne Fortier (SF): Mon but premier a été de faire partie de cette communauté et de construire une relation de confiance et de respect avec elle. Cela veut dire travailler directement avec les différents acteurs de notre communauté, dont les dirigeants étudiants, les étudiants eux-mêmes, les employés. [Un autre but] a été de me connecter avec la communauté locale, puisque je n’avais pas vécu à Montréal depuis un certain nombre d’années. Je pense que c’est important pour McGill de faire partie de cette communauté. Il faut donc créer des liens avec nos collègues dans d’autres universités.
The McGill Daily (MD): Récemment, vous parliez de la recherche à McGill. Demilitarize McGill a finalement obtenu une réponse à leur requête d’accès à l’information de la part de l’Université, mais les documents sont toujours très protégés. D’autre part, il y a eu une controverse sur le fait que certaines recherches de McGill soient financées par l’armée, mais l’Université affirme qu’elles ne sont pas à des fins militaires. Qu’avez-vous à en dire ?
SF : Le rôle de l’armée est aussi de protéger les citoyens en situations d’urgence telles que les catastrophes naturelles. Il y a beaucoup de recherches à faire avec l’armée qui sont très importantes.
MD : Mais s’il n’y a rien à cacher, pourquoi protéger ces documents ?
SF : Je pense que dans le cas que vous mentionnez, les recherches sont totalement publiques.
MD : L’accès est bloqué.
SF : Non, nous ne parlons pas des résultats de la recherche, mais des contrats. Il y a des lois très strictes au Canada qui nous contraignent en termes de protection de la vie privée et d’accès à l’information. Nous devons respecter les deux et ce n’est pas toujours simple.
« On a un souci de protéger la langue française. C’est une richesse qu’on a ici […] au Québec. Je pense qu’on doit offrir à nos étudiants des occasions d’apprendre le français, de profiter de l’environnement bilingue de Montréal. »
Le Délit (LD): Au long de votre mandat, on a vu une vraie évolution de la place du français au sein du campus, notamment par des conférences entièrement en français et la création d’une troupe de théâtre. Étant francophone, comment pensez-vous avoir mené cette évolution au sein de votre administration ?
SF : De plus en plus, on travaille dans les deux langues. Je travaille beaucoup en français avec les gens de mon bureau. On a un souci de protéger la langue française. C’est une richesse qu’on a ici […] au Québec. Je pense qu’on doit offrir à nos étudiants des occasions d’apprendre le français, de profiter de l’environnement bilingue de Montréal, mais je ne crois pas que cela soit une bonne idée pour McGill de devenir une université où la langue d’instruction est en français. C’est un choix que même les étudiants de langue française ont fait ; ils viennent ici pour recevoir un enseignement en anglais.
MT : Étant donné le plan gouvernemental de réinvestir dans les universités, quelles sont vos priorités en termes de distribution des fonds ?
SF : Beaucoup d’argent sera consacré à l’amélioration de l’environnement d’apprentissage et le conseil aux étudiants, pour lequel la communauté pense que nous avons besoin de plus de ressources humaines. Hélas, avec les élections à venir, rien n’a été confirmé. Nous devons attendre pour savoir si les fonds que nous avions anticipés seront disponibles.
LD : On a beaucoup entendu parler du désinvestissement des énergies fossiles ces derniers mois, par exemple par le choix de l’Association Étudiante de renoncer à ces investissements, par les interventions répétées de Divest McGill ou encore par l’incident qui s’est produit lors des conférences Pétrocultures. L’Université continue-t-elle la réflexion par rapport à cet enjeu et est-elle dans l’optique de se désinvestir ?
SF : Il y a eu un impact. On allait faire la révision d’un comité qui conseille l’Université en question d’investissement en regardant le volet de responsabilités sociales. Pour la première fois dans toute l’histoire de l’Université, plutôt que de faire le travail à l’intérieur du Conseil des Gouverneurs, on a décidé d’avoir une communication avec la communauté [étudiante], ce que l’on a fait la semaine passée. Divest McGill a demandé à ce que l’on intègre dans le processus un élément de recherche ; je pense que cela pourrait être possible.
« Beaucoup d’argent sera consacré à l’amélioration de l’environnement d’apprentissage et le conseil aux étudiants, pour lequel la communauté pense que nous avons besoin de plus de ressources humaines. »
MT : Avez-vous pensé à travailler avec des groupes tels que McGill Spaces Project ? Parce que vous parliez de financement du campus…
SF : Oui bien sûr ! Vous devez savoir que nous aurons un espace vide sur le site de l’Hôpital Royal Victoria en 2015. Pour nous, c’est un projet de développement urbain. Nous voulons également intégrer des notions de développement durable dans la reconstruction de ce site. C’est par contre peut-être un peu tôt pour mobiliser la communauté étudiante. C’est un projet qui dépasse McGill, nous avons besoin de partenaires et attendons les propositions du gouvernement.
MD : Pensez-vous que McGill est une université accessible ?
SF : Oui. On peut toujours faire mieux, mais c’est l’université canadienne avec le plus de bourses. Ça a toujours été une de nos priorités.
Suzanne Fortier est principale de l’Université McGill depuis maintenant plus de six mois. Elle dit apprécier son rôle au sein de la communauté et entend bien mener à terme les objectifs qu’elle s’est fixée. La semaine prochaine, dans votre Délit, un retour sur son premier mandat.