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Déterrer le virtuel

Le Centre Canadien d’Architecture dévoile la deuxième partie de l’exposition « Archéologie du numérique ».

Centre Canadien d'Architecture. © NOX

C’est dans la continuité de l’exposition développée sous le commissariat de Greg Lynn au mois de mai 2013 qu’« Archéologie du numérique : Environnements virtuels, objets interactifs » réside au CCA depuis le 21 mai. À l’image de la première étape de ce « projet de recherche », tel qu’elle est définie par Lynn, l’exposition étudie l’évolution de la relation entre l’architecture et la technologie depuis les années quatre-vingt. Une relation très particulière, adoptée différemment par chaque architecte, en regard des débats sur l’aliénation de la conception architecturale par la technologie.

Pour cette exposition, les architectes ont choisi leur camp. Les œuvres présentées par Karl Chu (Metaxy), Lars Spuybroek (NOX), Kas Oosterhuis (ONL), Mark Goulthorpe (dECOi Architects) et Lise-Anne Couture & Hani Rashid (Asymptote), sont de celles qui ont adopté la technologie en l’intégrant pleinement dans le processus créatif. Le plus parfait exemple de cette prise de position est peut-être celui de l’architecte Karl Chu et de son installation « Catastrophe Machine » (ndlr, machine à catastrophes). L’algorithme derrière cette machine à dessiner se base sur des théories mathématiques complexes visant à représenter des concepts de structure et de croissance. La non-linéarité du trait dessiné illustre l’aspect spontané de la réalisation et relègue le rôle de l’architecte à celui d’ingénieur de la machine qui, elle, devient l’auteur de l’œuvre.

Également issu d’une fascination pour les mathématiques, le projet « Hyposurface » de dECOi Architects interpelle par sa singularité et ses caractéristiques futuristes. Cette installation, présentée par le professeur d’architecture au Massachussetts Institute of Technology (MIT) Mark Goulthorpe, génère un mouvement dynamique qui capture « l’ambiance digitale » d’une pièce, d’un endroit. On retrouve cet objet étrange dans les stades, festivals, casinos, boîtes de nuit et autres lieux propices à l’expérimentation audio-visuelle. Car c’est bien d’expérimentation qu’il s’agit à travers tous ces projets ; et, loin de jouer un rôle destiné à contrôler l’expérience, la technologie accompagne et stimule l’innovateur.

« Archéologie du numérique : Environnements virtuels, objets interactifs » nous permet également de découvrir le travail de l’agence « Asymptote » et sa restructuration du New York Stock Exchange (NYSE), notamment due à l’apparition des nouvelles technologies dans le monde de la finance au cours des année quatre-vingt dix. L’exposition met en lumière un espace singulier, allant de pair avec l’environnement virtuel dans lequel évolue les traders. Enfin, Lars Spuybroek dévoile le travail de recherche ayant donné lieu au pavillon H2Oexpo, aux Pays-Bas. L’architecte s’est servi d’un logiciel nouvellement développé « Autocad 11 », pour dessiner une structure fluide et coulante, à l’image du thème choisi par le commanditaire : l’eau. H2Oexpo offre un espace intérieur interactif proposant une expérience multi-sensorielle, à l’image de celle que l’on peut vivre dans un environnement aquatique.

Le lendemain du vernissage, une table-ronde avec les artistes exposés était animée par Greg Lynn au théâtre Paul Desmarais du CCA. M. Lynn y insista notamment sur la « fluidité, le mouvement et le dynamisme de la technologie » qui nous a permis de « rompre avec le caractère statique du modernisme ». Bien qu’un certain hermétisme entourait les discussions — à caractère tantôt technique, tantôt philosophique — l’aspect informel de l’événement et la richesse des propos tenus ont largement séduit l’audience ainsi que la direction du CCA, en la personne de Mirko Zardini, qui s’est dit heureux de clôturer l’inauguration de sa nouvelle exposition sur cette note.


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