La course à la chefferie du Parti Québécois est bel et bien commencée. La date limite fixée au 30 janvier pour rassembler les 2 000 signatures et collecter les premiers 10 000 dollars approche à grands pas. Seuls deux candidats sur les six ont récolté les signatures et l’argent nécessaires à l’officialisation de leur candidature, soit Alexandre Cloutier et Pierre-Karl Péladeau. Ce dernier, grand favori, a fait une démonstration de force en ramenant plus de 5 000 signatures moins de cinq jours après le lancement officiel de sa campagne le 30 novembre dernier, devenant le premier candidat à officialiser sa candidature. Les autres candidats affirment avoir les signatures mais ne les ont pas encore déposées.
Malgré le « lancement officiel » de la campagne fin janvier, le comportement des candidats démontre clairement que les choses sont réellement commencées. Jean-François Lisée a lancé les premières flèches vers PKP en le qualifiant de « bombe à retardement », faisant référence à son empire médiatique Québecor. Plusieurs membres à l’intérieur du PQ ont vu cette déclaration comme inutile, les libéraux et caquistes ayant déjà attaqué PKP en l’appelant à vendre ses actions. Peu après cette déclaration, le Parti libéral du Québec (PLQ) et la Coalition Avenir Québec (CAQ) ont adopté la motion « PKP » à l’Assemblée nationale pour étudier les cas de députés qui possèdent une entreprise médiatique. Du côté de Péladeau, on garde le cap : s’il est élu chef, il mettra ses actions dans une fiducie sans droit de regard mais pas question de vendre la compagnie que son père lui a léguée. Jean-François Lisée refuse d’abdiquer et martèle à répétition le même message : « Avec moi, il n’y a pas de langue de bois. Quand on me demande s’il est normal que le chef du Parti Québécois contrôle le principal média au Québec, ma réponse est non ! », a‑t-il déclaré à La Presse.
Jusqu’à aujourd’hui, la chefferie a été l’affaire de Pierre-Karl Péladeau. Favori à plus de 50% dans certains sondages, son passé d’homme d’affaires et sa détermination sur la question nationale lui procurent un large avantage sur les autres candidats. Le PQ tente encore de se remettre de son humiliante défaire électorale du 7 avril dernier et PKP est un nouveau visage qui jouit d’une immense notoriété dans le monde des affaires et aux yeux de la population. Pour PKP, la chefferie est à perdre : tant qu’il restera sans se prononcer sur les enjeux importants, sa place de favori dans la course ne sera pas en danger.
Les autres candidats doivent donc redoubler d’efforts pour attirer les projecteurs et les éventuels votes. Alexandre Cloutier est jusqu’à maintenant la surprise de la course. Le député du Lac-Saint-Jean révèle de réels talents d’orateur et offre un nouveau visage à un parti qu’on qualifie souvent de « parti de baby-boomers ». Son dossier sur l’éducation risque de séduire plusieurs jeunes péquistes : il propose qu’un gouvernement du PQ investisse un demi-milliard dans l’éducation. Les autres candidats ne se sont pas encore prononcés formellement sur le dossier.
La Charte des valeurs, projet controversé du gouvernement Marois, fait encore des vagues. Alexandre Cloutier et Jean-François Lisée ont pris leurs distances vis-à-vis du projet tandis que son porte-étendard, Bernard Drainville, reconnaît qu’une nouvelle charte se devrait plus rassembleuse. Il sera intéressant de voir si les autres candidats l’utiliseront pour attaquer M. Drainville.
Bernard Drainville, Martine Ouellette et Jean-François Lisée devraient être en mesure d’officialiser leurs candidatures avant la date fatidique, tandis que Pierre Céré aura plus de difficultés en raison des 10 000 dollars à ramasser avant la date limite.
Les prochains mois jusqu’au 15 mai seront cruciaux pour le PQ. Après la pire performance de l’histoire du PQ et la quasi-disparition du Bloc Québécois, le projet de la souveraineté semble en être à ses derniers souffles. On est à la croisée des chemins au PQ.
Le parti a besoin d’un leader, d’un rassembleur pour le diriger, sans quoi il pourrait être relayé au rôle de deuxième opposition avant de s’effacer progressivement de la scène politique québécoise.