Milk & Bone est un groupe de musique alternative formé de Camille Poliquin et de Laurence Lafond-Beaulne. La formation montréalaise lançait son premier album Little Mourning le 17 mars dernier et les semaines qui ont suivi ont donc été un tourbillon de publicité et de critiques enthousiastes pour les harmonies et mélodies envoûtantes des deux jeunes artistes. Le Délit a eu l’occasion de discuter par téléphone avec la moitié du talentueux duo, Laurence Lafond-Beaulne, qui a répondu avec chaleur et un enthousiasme palpable aux questions posées au sujet du projet déjà très bien lancé qu’est Milk & Bone.
Le Délit (LD): Pouvez-vous raconter comment votre band est formé ?
Laurence Lafond-Beaulne (LLB): C’est formé de Camille Poliquin et moi, Laurence Lafond-Beaulne. En spectacle, c’est seulement nous deux avec nos claviers. Pour l’album, on a travaillé avec Gabriel Gagnon, notre réalisateur. Il a beaucoup aidé à trouver une direction au projet et aussi au son. On a vraiment travaillé les trois en studio pour ce qui est de l’album.
LD : Comment est-ce que vous êtes arrivées à ce son, assez particulier ?
LLB : Au départ toutes nos chansons sont piano-voix, ou ukulélé-voix. Nos influences à Camille et moi sont sensiblement les mêmes, donc ça a pas été trop difficile de savoir où on voulait s’en aller avec ça. Deux choses qui étaient claires pour nous c’était qu’il fallait que les voix soient pas mal à l’avant parce que notre instrument principal aux deux, c’est la voix. C’est ce qu’on maîtrise le mieux et ce avec quoi on a le plus travaillé, donc on savait qu’on voulait utiliser énormément les vocales, comme mélodies et comme lead. On savait aussi qu’on aimait vraiment beaucoup les synthétiseurs, toutes les couleurs que donnent les sons des synthétiseurs, en ajoutant nos voix et quelques fois des éléments acoustiques. C’était assez évident où on s’en allait avec ça en fait.
LD : Quelle formation musicale est-ce que vous avez eu respectivement avant de commencer le band ?
LLB : Les deux on a beaucoup étudié en musique. Camille a étudié le piano classique dès un très jeune âge, et elle a aussi étudié le violoncelle à l’école primaire. Ensuite elle a fait une audition pour le Cirque du Soleil pour faire le rôle principal de la petite fille dans Quidam et elle a été choisie. Elle a fait la tournée à 12 ans, donc des spectacles à chaque soir, elle a beaucoup voyagé avec ça, ça lui a donné pas mal d’expérience. Ensuite elle est allée au cégep St-Laurent où les deux on s’est rencontrées. Les deux, on était en chant, mais elle avait fait le profil composition, donc elle arrangeait pour des bands et des orchestres. Pour ce qui est de moi, j’ai plus commencé au secondaire, à Joseph-François-Perrault, je faisais du trombone classique, assez sérieusement, je travaillais comme une folle et j’étais très impliquée. J’étais surtout dans le classique et rendue au cégep j’ai décidé que j’étais un peu tannée ; je suis allée en jazz pour voir ce que c’était, parce que ça m’intriguait et j’avais envie d’essayer autre chose. Pis après une session j’ai décidé que j’étais tannée du trombone (rire) et j’ai fini ma technique en interprétation chant-jazz à St-Laurent. C’est là que j’ai commencé à jouer de la basse électrique aussi. À partir du cégep j’ai commencé à jouer dans des bands, avec David Giguère où Camille était aussi, elle était choriste et moi je jouais de la basse ; c’est là qu’on s’est vraiment rencontrées. J’ai aussi joué avec Fanny Bloom. Je suis rentrée à l’université un an en chant jazz et interprétation, pis j’ai lâché parce que je commençais à avoir trop de spectacles.
LD : Quelle est la chose la plus intéressante que vous avez apprise en accompagnant d’autres artistes ?
LLB : La première chose je pense, c’est que la job d’une bonne choriste c’est de réussir à se mouler à la voix du chanteur principal et je pense aussi que c’est une des raisons pourquoi on a de la facilité à chanter ensemble ; c’est qu’on sait comment se coller à la voix d’une autre personne. Pis on est chanceuses parce que nos timbres vont naturellement bien ensemble. L’expérience de tournée aussi c’est quelque chose d’assez important, d’avoir voyagé beaucoup, on sait à quoi s’attendre. Ça nous fait pas peur de penser qu’on sera pas souvent à la maison, qu’on va vivre dans nos valises. C’est sûr que c’est un plus.
LD : Votre vidéo pour New York est vraiment magnifique et c’est même un « vimeo staff pick ». Comment s’est passée la réalisation de la vidéo ? C’était quoi le concept ? Qui était votre directeur ?
LLB : On a travaillé avec Mégane Voghell, c’est la réalisatrice, et en fait c’est ma meilleure amie du secondaire. C’était pas mal son premier vidéoclip. C’est tout son concept à elle, elle voyait notre esthétique, où on voulait s’en aller et c’est vraiment ses idées à elle. On lui a donné carte blanche, et quand elle est allée avec ses idées à elle on était tellement contentes. On a tourné ça en studio, avec une petite équipe, pas beaucoup de budget pis finalement ça a donné un clip assez merveilleux, on est vraiment, vraiment contentes du résultat.
LD : Comment êtes-vous venues à chanter en anglais ?
LLB : Ça pas été tant un choix que davantage une évidence. Quand on a commencé à chanter ensemble, c’est venu naturellement en anglais. Nos influences, du plus loin qu’on se souvienne, toute la musique qu’on écoutait quand on était jeunes était en anglais. J’ai grandi dans un quartier anglophone donc j’entendais autant d’anglais que de français quand j’étais petite. Camille a habité deux ans en Australie, les deux on a un bon anglais. On a déjà écrit en français mais les chansons sonnent vraiment pas pareil.
LD : Est-ce qu’on va vous entendre en français un jour ?
LLB : Pas pour ce projet-là, je pense pas. Mais on est ouvertes à plein de projets, on accompagne plein d’artistes francophones, et on écoute beaucoup de musique d’ici.
LD : Votre lancement au centre Phi était vraiment bondé, est-ce que vous vous attendiez à tant de monde ? Quelle a été votre réaction ?
LLB : On avait vu sur les réseaux sociaux qu’il y avait beaucoup de gens qui étaient « attending » mais en même temps des fois… tu sais jamais ce que ça veut dire. On s’attendait à, oui, que nos amis soient là, et quelques personnes qu’on connaissait pas, mais je pense pas qu’on s’attendait à une aussi grande réponse. Il y avait une file incroyable dehors, les gens étaient de bonne humeur. C’était magique en fait, on retombe doucement de cette soirée-là…
LD : Vous avez récemment joué au festival à South by South West (SXSW)? Comment a été votre expérience ? À quoi ressemble l’ambiance du festival ?
LLB : C’était malade ! En fait SXSW, c’est un show de showcases comme on appelle, comme Rideau par exemple. C’est des mini-spectacles de trente minutes. Tu vas là-bas, pis y’a des gens de la business qui sont là qui viennent pour essayer de recruter des nouveaux talents. Mais y’a aussi des gens qui achètent leur passe, un peu comme à Osheaga, donc il y a des plus gros spectacles, et des gens qui viennent juste découvrir de la musique. Donc c’est un festival de mélomanes. Y’a aussi une partie cinéma, mais moi évidemment j’ai plus erré dans la scène musicale. C’est cool parce que tu te promènes dans les rues et tous les bars sont transformés en salles de spectacle pour le festival, tout le monde marche dans la rue, tout le monde a un instrument de musique avec lui. C’est vraiment spécial comme ambiance, mais c’est tripant. On a rencontré plein de gens. Moi je pense vraiment que c’est un festival que tu dois vivre au moins une fois dans ta vie quand tu trippes sur la musique.
LD : Êtes-vous excitées à l’idée de jouer à Osheaga ?
LLB : On est vraiment, vraiment excitées pour Osheaga ! On croisait fort les doigts pour être invitées cette année. On a hâte et on a envie de monter des nouveaux arrangements pis peut-être une nouvelle chanson pour le festival, quelque chose d’un peu plus exclusif. Juste de faire partie de cette programmation-là c’est vraiment un honneur, on est vraiment contentes !
LD : À quoi va ressembler votre spectacle à cette occasion ?
LLB : Le spectacle c’est vraiment juste nous deux. Ce qu’on a fait en studio avec Gabriel c’est pas mal des trucs qu’on est capables de recréer nous-mêmes. Donc oui on veut garder le spectacle à deux, parce qu’il fonctionne bien comme ça à date, donc ça va être pas mal la même formation, mais peut-être qu’on va travailler ça un peu, pour rendre le son plus « festival ».
LD : Est-ce qu’il y a un artiste que, personnellement, vous avez plus hâte de voir chanter au festival ?
LLB : Oui ! Moi j’ai vraiment, vraiment hâte de voir jouer Kendrick Lamar. Je suis vraiment, vraiment fan de Kendrick, je suis un peu énervée de pouvoir le voir ! Je pense pour Camille qu’il y a Father John Misty qui vient. Je sais qu’elle trippe beaucoup pour lui.
LD : Des deux filles, qui joue quel rôle dans le band ? Êtes-vous très différentes ou est-ce que vous vous ressemblez ?
LLB : On est vraiment à l’opposé l’une de l’autre et je pense que c’est une bonne chose en fait. Dans la vie on est des meilleures amies déjà, et dans le band on a pris nos rôles assez naturellement. Camille est peut-être meilleure sur le côté business, le côté des réseaux sociaux, des images, pour calculer toutes ces choses-là. Alors que moi j’ai peut-être le côté un peu plus humain, pour aller parler aux gens, établir des contacts, c’est plus dans mes facilités à moi. Pour ce qui est de la création, on travaille vraiment à deux là-dessus, on a chacune nos forces mais y’a personne qu’est vraiment poche dans quelque chose et l’autre qui est vraiment bonne. Je pense qu’on s’équilibre vraiment bien en studio, et dans nos idées et quand on compose ensemble.
LD : Quelle est la chose dont vous parlez le plus ensemble à part de la musique ?
LLB : Hum… Je suis obligée de dire les garçons (rire), comme tout le monde ! On parle de tout, tout, tout Camille et moi, on s’appelle pour n’importe quoi. C’est sûr qu’on parle beaucoup du projet parce que là on baigne là-dedans, ça va bien et tout. Mais on prend beaucoup de temps aussi pour nous… On se dit souvent qu’on est comme un vieux couple, il faut qu’on se fasse des dates pour pas parler du projet et se parler de nos vies. ξ