Amnistie Internationale a organisé, le 9 septembre 2015, un événement de solidarité sur l’esplanade de la Place des Arts de Montréal. Les manifestants, regroupés sous la bannière «#RéfugiésBienvenue » dans le centre-ville de Montréal, ont formé une chaîne humaine constituée de plusieurs centaines de personnes pour apporter leur soutien à cette cause. Pour Béatrice Vaugrante, directrice générale d’Amnistie Internationale Canada Francophone, l’enjeu de cet évènement était certes d’être solidaire envers les réfugiés mais surtout « d’offrir un espace public où les gens peuvent s’indigner de la situation actuelle, mais aussi montrer leur volonté d’accueillir les réfugiés avec la pétition ».
Les intervenants de l’événement ont en effet insisté sur le fait que cette mobilisation n’était pas uniquement de la charité. Amnistie Internationale (plus de 3 millions de membres dans 150 pays différents) enverra une pétition au gouvernement de Stephen Harper dans deux semaines lui rappelant ses obligations juridiques devant l’article 14 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et proposant des changements dans la politique migratoire. La pétition est composée de sept points, demandant notamment de supprimer les nombreux obstacles à l’immigration au Canada pour les réfugiés. Par exemple, les réfugiés syriens obtiennent en Turquie un statut de réfugiés particulier, que le Canada ne reconnaît pas. De ce fait, il est extrêmement difficile pour les 2 millions de personnes précairement installées en Turquie d’obtenir le statut de demandeur d’asile. La pétition propose aussi de mettre en place un programme de réinstallation de 10 mille réfugiés syriens supplémentaires au Canada. Présentement, la pétition n’a que 2200 signataires, ce qui n’est pas encore suffisant : l’objectif est d’atteindre 5000 signatures.
Ce ne serait pas la première fois que des actions comme celles ci parviennent à impliquer les chefs d’états. Mme Vaugrante a expliqué qu’en janvier 2014, suite à une conférence de presse, le gouvernement avait accepté, en réponse aux pressions d’Amnistie, d’accueillir 10 000 réfugiés sur 3 ans. Quelques mois après, elle avoue que « c’est aujourd’hui loin d’être assez ». Lucas Snaije, étudiant en anthropologie à McGill, trouve que les événements comme ceux-ci sont « efficaces en terme de visibilité, car ils augmentent la prise de conscience de la population à propos de la crise humanitaire qui est en train de se produire et ultimement peuvent pousser les gouvernements à dépasser les barrières économiques et sociales ainsi que les préjugés pour prendre des décisions davantage morales et éthiques. »
D’après le dernier rapport de la Commission Européenne datant de juillet 2015, le conflit en Syrie qui dure depuis quatre ans aura déclenché « la plus grande crise humanitaire que le monde ait connu depuis la Seconde Guerre Mondiale ». Plus récemment, c’est devant l’agitation médiatique de la photographie du petit Aylan Kurdi que le monde s’est ému. Depuis, plusieurs mois déjà, les associations à but non lucratif comme Amnistie Internationale documentent les conditions de vie et de voyage des réfugiés, et sont motrices dans la prise de conscience générale de leur situation. Il reste à voir où mènera la campagne d’Amnistie et des autres organismes impliqués dans l’accueil et les droits des réfugiés. Est-ce que les rassemblements de solidarité, qui se font de plus en plus nombreux, pousseront la communauté internationale à revoir ses programmes concernant les migrants ? Avec un sujet aussi brûlant, on peut s’attendre à ce que cette crise soit abordée et discutée par tous les partis dans le cadre des élections fédérales canadiennes.