L’être humain a un trait bien particulier : il lui est extrêmement difficile de sortir de sa zone de confort. L’attrait de la routine, du monde connu et prévisible, semble irrésistible et ce, dans toutes les facettes de la vie. L’exploration, la nouveauté, ou pire encore, l’inconnu, nous fichent une trouille incommensurable. Pourquoi sortir des sentiers battus alors qu’il est tellement plus simple et réconfortant de ressasser les mêmes idées, les mêmes valeurs, les mêmes goûts ? À l’ère d’Internet et des télécommunications, il est paradoxalement de plus en plus difficile d’être confronté à cette nouveauté. En effet, si les nouvelles technologies de l’information donnent aujourd’hui accès à une variété de contenu inégalée, elles ont une fâcheuse tendance à uniformiser ce qui est visionné ou consommé. Les moteurs de recherche tels que Google classent leurs résultats par ordre de popularité, et on ne parle dans le monde artistique que du box-office, des livres les plus vendus de la semaine, des « dix chansons les plus demandées de la journée. » Vous avez une allégeance politique particulière, un goût marqué pour un style musical spécifique ? Vous trouverez assurément une chaîne de télévision ou encore un site Web partageant exactement vos valeurs et vos goûts, et qui jamais ne vous brusquera dans vos convictions personnelles.
Comment contrer les effets pervers de ce confort borné et de cette technologie centralisatrice ? Osez ! Il n’y a pas trente-six façons de s’en sortir. C’est dans cet esprit que je vous présenterai dans les prochaines semaines une chronique essentiellement dédiée à la musique, plus particulièrement à la musique classique. Car oui, la musique dite « classique » ne se limite pas à ce qu’on peut entendre au 99,5 FM, Dieu merci ! Derrière cette musique destinée aux intellectuels, douce, proprette et surtout plate à en mourir pour les jeunes que nous sommes, se cache une musique riche et vivante qui n’a rien à envier en énergie et en émotion au death metal ou aux derniers hits populaires de la radio. Je partagerai avec vous mes coups de coeur musicaux et vous ferai part de mes découvertes personnelles. Je m’efforcerai de sortir moi-même des sentiers battus et de vous présenter une musique à la fois accessible et originale.
Voici à votre attention, chers lecteurs, un petit exercice qui saura vous sensibiliser à ce problème d’uniformité dans les goûts musicaux, et pourra donc mieux vous préparer aux découvertes musicales qui viendront. Allez quérir votre ordinateur. Ouvrez votre logiciel de gestion de musique favori ‑iTunes, Winamp ou autre- et classez votre musique selon le nombre de fois que vous avez écouté chaque morceau. Étonnant, n’est-ce pas ? Toute cette belle musique que vous avez choisi de télécharger, et que vous n’avez même pas pris la peine d’écouter une seule petite fois. La prochaine fois que vous brancherez votre lecteur mp3 dans cet ordinateur, faites-donc un peu de place pour cette musique méconnue ou carrément oubliée. Vous pourriez avoir de belles surprises. Et, de grâce, prenez la peine d’écouter les albums au complet : il y a toujours une idée, une intention derrière chacun d’eux. Aux plus hardis d’entre vous, je propose d’écouter Le Sacre du printemps d’Igor Stravinsky, un de mes compositeurs préférés. Vous aurez ainsi un aperçu du sujet de ma prochaine chronique.