Après Nomade et Rain nous arrive Nebbia, le dernier volet d’une trilogie créée, en collaboration avec le Cirque Eloize, par le metteur en scène italien Daniele Finzi Pasca. Avec Nebbia, qui signifie brouillard en italien, il nous propose un voyage dans son propre passé.
Il y a sans doute autant de façons de raconter Nebbia qu’il y avait de spectateurs sur les sièges du TNM. Je vous en propose une. Dans un petit village italien, à trois cents kilomètres de la mer, le brouillard s’abat parfois sans prévenir. Pour l’oublier, les gens du coin parlent, dansent, chantent et s’amusent. Mais cette masse épaisse et blanchâtre envahit et pénètre aussi bien les rues et les maisons que les esprits des habitants. Le brouillard laisse place à l’imaginaire et permet un mélange des genres des plus farfelus. C’est ainsi que, parfois, des bateaux échouent sur la place du village ou que des anges descendent du ciel en jouant de la musique.
Les personnages, on les reconnaît tous. Il y a l’ancêtre, le fou du village, les amis, les adolescents, les amoureux et, bien sûr, le boucher. La troupe de Nebbia, composée de onze acteurs venant des quatre coins du monde, interprète avec brio cette ribambelle de personnages, laissant le spectateur en liesse. En effet, en plus d’être polyvalents —ils jouent de la flûte et chantent des airs italiens— les acteurs sont davantage que des artistes de cirque : ils arrivent à partager avec le spectateur une histoire remplie d’émotions. Tout au long de la pièce, une atmosphère de gaîté et d’allégresse est ainsi créée et transmise au public.
Le résultat : une suite de tableaux épurés tous plus époustouflants les uns que les autres. Des scènes dont on a parfois du mal à comprendre la logique, mais qui sont reliées les unes aux autres grâce au talent d’un clown, qui amuse le spectateur pendant que les artistes préparent le nouveau décor. Ce dernier change à chaque tableau, mais reste toujours trouble, comme si ce n’était qu’un rêve. À la manière d’un diaporama qui montrerait plusieurs photographies d’un même endroit, le décor change tout en restant le même. En revanche, les éclairages, véritables piliers du spectacle, font appel à des clairs-obscurs très sophistiqués qui accompagnent les performances des acteurs. À cela s’ajoutent des objets qui, de temps en temps, traversent en volant l’espace scénique, quelques mannequins robotisés qui viennent se perdre sur scène, et une pluie de bouchons de liège des plus inattendues.
Une musique spectaculaire vient accompagner la performance des artistes, une trame que l’on doit à Maria Bonzanigo du Teatro Sunil. Alternant d’une bande-son symphonique tous décibels dehors à des chants improvisés à la manière des guinguettes italiennes, elle parvient à créer une atmosphère musicale particulièrement enjouée. Un couple de rockeurs exécute également une improvisation au xylophone et nous transmet, là encore, une joie indescriptible.
Ce qu’il faut retenir de Nebbia, c’est avant tout le sentiment d’allégresse qu’il crée et qu’il transmet à tout va. Nebbia, ce n’est pas seulement l’étalage d’habiletés artistiques, mais avant tout la transmission d’émotions, le tout traité avec un humour constamment présent, qui rend le spectacle tout à fait unique. À la fois théâtre et cirque, cette pièce de théâtre contemporaine montre bien qu’un mélange des genres est à la fois possible et souhaitable.