Le militantisme, ou promotion d’un engagement politique, a trouvé sa place en ligne. Du bouche-à-oreille, à la radio, à la télévision et jusqu’à Internet, la raison de ces changements de territoire demeure la même : la volonté de toucher le plus grand nombre. Quoi de plus efficace que Facebook ? Avec 1,49 milliard d’utilisateurs réguliers, le réseau social est en route vers l’universalité.
L’activisme se développe sous toutes les formes et pour toutes les causes. Groupes dédiés à un parti politique, des vidéos YouTube partagées, des images choquantes et articles engagés envahissent nos fils d’actualité. Que faut-il en retenir ?
Il est difficile de départager le « bon » du « mauvais » activisme. Pour beaucoup, la liberté d’expression devrait être reine, même dans un monde où la peur grandissante des uns se traduit en haine violente de l’Autre.
Une propagation exponentielle
De Black Lives Matter à Beyoncé qui a « brisé Internet » avec sa performance revendicatrice lors du Super Bowl 2016, de nombreux mouvements politiques ont été découverts majoritairement grâce à Facebook. L’organisation de manifestations en Pologne pour le droit à l’avortement a pris de l’ampleur au moyen du développement d’un mouvement international sur Facebook en soutien à ces femmes réclamant le pouvoir sur leurs corps.
Sans Facebook, et sans l’influence démesurée des réseaux sociaux, tous ces mouvements, et une kyrielle d’autres, auraient sûrement été mort-nés.
Le revers de la médaille
Cependant, cette visibilité accrue des mouvements sociaux sur internet est à double-tranchant.
Le premier revers de la médaille, c’est que les groupes célébrant l’Humanisme, l’acceptation de l’Autre, ou même la protection des bébés phoques ne se développent pas seuls. Le succès inattendu de la campagne de Donald Trump, l’apparition de groupes racistes, misogynes, ou même néo-nazis sur Facebook, sont des conséquences du développement de l’activisme. De plus, ils donnent un outil de rassemblement à des individus qui auraient pu demeurer isolés de la validation de quelconque groupe haineux pour le restant de leur vie.
D’autre part, quand on sait que seulement 7% de la population africaine et 5% de celle d’Asie du Sud est active sur Facebook, l’idée du militantisme contre la pauvreté, la faim dans le monde devient assez paradoxale. Oui, il est important de sensibiliser les masses à ce qui se passe dans le monde. Il serait néanmoins plus légitime de demander aux principaux intéressés quelle image d’eux ils souhaitent voir diffusée, comme le mentionne Mallence Bart-Williams dans son Ted Talk au Berlin Salon.
La contre-productivité des bonnes intentions
Enfin, le militantisme sur les réseaux sociaux se traduit trop souvent en slacktivism (militantisme paresseux, ndlr). Le très récent déferlement de check-in dans la réserve autochtone de Standing Rock, dans l’état du Dakota aux États-Unis, est une de ces manières de manifester son militantisme en un clic. Ces check-in tiennent lieu de marque d’opposition à l’établissement d’un gazoduc au sein de la réserve. La cause est importante, et les check-in permettent à une plus grande audience d’être informée et sensibilisée sur les événements dans la réserve, tout en affirmant leur opposition à leur tour. Toutefois, l’impact concret de ce type de militantisme demeure faible. Entre satisfaire sa conscience personnelle et agir de manière efficace, il y a un monde. C’est par les actes que le changement est initié, et comme le disait Mahatma Gandhi, « Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde ». Le militantisme sur les réseaux sociaux, s’il est utile dans une certaine mesure, est loin d’être suffisant, et peut même décrédibiliser la cause qu’il promeut. Il la réduit à un élément banal dans le flot d’informations qui inonde notre fil d’actualités Facebook. Peut-être faut-il mieux choisir ses combats et investir son temps et son énergie pour provoquer ce changement : la conscience collective est un premier pas, mais il reste à la traduire en faits.