Milk & Bone est un groupe montréalais composé de Laurence Lafond-Beaulne et de Camille Poliquin. Sorti en mars 2015, leur premier album — Little Mourning — a rapidement rencontré du succès. Leur style s’apparente à de la pop électro dans laquelle le mélange de voix, de sonorités et de rythmes est un calcul précis. Les tendances rêveuses et intimes de leurs chansons peuvent ressembler à celles d’autres groupes comme Wet ou bien HAUTE si l’on veut rester plus mcgillois.
CHANSONS EN RAFALE
Ta chanson préférée ?
Grande question, Days of Candy de Beach House je pense car c’est une chanson qui nous touche vraiment Camille et moi.
La chanson que tu détestes ?
I’m Blue de Eiffel 65. Ça je suis pas capable, ça me donne des frissons dans le dos puis j’ai envie de frapper tout le monde autour de moi. (rires)
Celle en te réveillant pour le déjeuner le matin ?
Should have known better de Sufjan Stevens. C’est vraiment drôle car Camille et moi on a choisi la même sans le savoir.
Celle pour te coucher le soir ?
Je suis incapable de m’endormir sur de la musique en fait, ça prend trop de mon attention.
Celle pour faire l’amour ?
Mon dieu, je ne vais pas y aller avec un cliché. C’est rare que ça arrive mais quelque chose qui pourrait être beau, je pense que du Lana del Rey, dans le genre un peu romantique.
Celle pour faire la fête ?
Never Leave You de Lumidee, vraiment une cool toune.
Celle pour te relaxer ?
Sufjan Stevens, c’est quelque chose qui m’apaise vraiment beaucoup.
Et celle de ton enfance ?
Crazy Mama de J. J. Cale, ça c’est la chanson de mon enfance.
Le Délit (LD): Natalie, votre dernier morceau a fait pas mal de bruit (déjà près d’un million d’écoutes sur Spotify en un mois), vous avez récemment fait une tournée aux États-Unis, vous multipliez les collaborations, on dirait que tout vous sourit en ce moment. C’est votre sentiment aussi ?
Laurence Lafond-Beaulne (LLB): C’est sûr qu’on est hyper contentes de tout ce qui se passe. Mais la réalité c’est qu’on vit tout ça assez différemment parce qu’on est tellement dans le travail et dans « Bon c’est quoi la prochaine chose à faire ? Qu’est-ce qu’il faut améliorer ? » C’est sûr que tout ça c’est vraiment des belles tapes dans le dos, pis c’est agréable comme sensation de savoir que le gens sont réceptifs et aiment ça. C’est sûr que ça donne envie de continuer. Je pense que de toute façon on continuera parce que on a du plaisir à travailler ensemble, on a besoin de faire de la musique ensemble. Mais oui c’est sûr que tout ce qui s’est passé depuis le lancement de l’album c’est vraiment une grosse surprise pour nous.
LD : La renommée que vous gagnez progressivement vous fait-elle peur ? Est-ce que par moments vous vous demandez ce qui vous arrive ?
LLB : Je ne sais pas si Camille c’est exactement la même chose que moi, mais je ne pense pas qu’on le ressente vraiment. Je pense qu’on reste quand même assez underground si on veut. Ce n’est pas comme si on passait tout le temps à la radio pis à la télé. Donc on n’est pas des stars. Notre musique nous permet de voyager et de faire des spectacles, mais on arrive quand même à être assez low-key pis vivre notre vie très normalement (rires). C’est sûr que si ça grossit la perte d’intimité va peut-être m’inquiéter un peu, mais on n’en est vraiment pas là, il n’y a pas de problèmes avec ça pour le moment.
LD : Quels artistes écoutez-vous aujourd’hui ou du moins, quels sont vos artistes favoris en ce moment ? Lesquels vous inspirent le plus ?
LLB : En ce moment, y’a le dernier Bon Iver qui est sorti, sur lequel on capote les deux vraiment vraiment vraiment beaucoup. C’est comme tout le monde, le dernier Frank Ocean aussi on n’arrête pas de l’écouter. Sinon , moi ces temps-ci, j’ai découvert un label qui s’appelle Enchufada, c’est beaucoup d’artistes électro avec des thèmes de musique latine, donc de la bachata et des trucs comme ça, mais assez house en général. Pis y’a un album où c’est une chanson de chacun des artistes du label, j’écoute beaucoup ça. J’ai découvert ça et ça me fait vraiment beaucoup triper.
LD : Camille a lancé un album solo avec KROY, est-ce que tu composes de ton côté aussi ? Et, si oui, est-ce que l’on va entendre ce que tu produis ?
LLB : Ben moi je compose sans cesse de mon côté parce que j’ai besoin de le faire pis j’ai envie de le faire. J’ai pas vraiment le désir de présenter un truc solo. C’est quelque chose qui m’a jamais appelé, je pense que je suis quelqu’un qui travaille plus en groupe, en band, en équipe.
Donc oui je compose toute seule de toute façon pis après y’a des trucs qui vont aller pour Milk & Bone et d’autres pas, je vais les travailler quand même pour le plaisir.
LD : Est-ce que vous avez commencé à travailler sur un nouveau projet d’album ?
LLB : Ben tranquillement. C’est sûr que là en ce moment on est complètement focus. On donne notre dernier spectacle de la tournée le 10 novembre donc ça clôt l’année et demie pendant laquelle on a voyagé. En ce moment, on revisite complètement le spectacle, on ajoute des nouvelles choses : on va avoir un décor, une scénographie, des projections, tout est nouveau. Donc on a la tête complètement là-dedans, on pratique pour ça et on travaille avec des collaborateurs exceptionnels, donc ça prend toute notre énergie. Dès que ça sera terminé, on s’en va directement en écriture et en studio puis on va commencer le deuxième album. On a vraiment hâte.
LD : Par rapport à l’importance de la chanson engagée aujourd’hui : est-ce que tu penses qu’aujourd’hui, dans une société comme la nôtre où l’on prend rarement le temps de réfléchir, la chanson engagée peut encore avoir la même valeur ou la même place ?
LLB : Ben oui certainement. Être engagé•e, il y a plusieurs manières de l’être. Je pense qu’il y a une manière de le faire, comme Koriass, qui dénonce beaucoup plus des enjeux sociaux. Je pense qu’il y a des chansons engagées sans le vouloir intentionnellement aussi. Écrire des chansons puis être un artiste en général c’est un peu dépeindre le temps dans lequel tu vis pis les enjeux que tu rencontres. Moi pis Camille, on ne prétend pas faire de la chanson engagée mais je pense qu’on se limite pas, pis on se prive jamais de dire quelque chose. Il y des chansons qui parlent d’adultères, des chansons qui parlent de sexualité, puis on est deux femmes, on comprend tout ça. On ne s’est jamais empêchées de dire quoi que ce soit parce que ça pourrait ne pas être acceptable. Au contraire, je pense que tout ce qu’on a envie de dire, tout ce qui sort — que ça soit beau ou laid —, c’est vrai et on va le dire.
Mais oui je pense qu’il y a encore plein d’artistes qui sont engagées. Être engagé•e, côté texte en tout cas, je pense que ça peut être dans de la subtilité aussi.
LD : En continuant sur ce sujet, le clip semi-animé de Coconut Water, c’est une manière pour vous de ne pas mettre de tabous ?
LLB : Ouais, je pense qu’on a jamais voulu se bloquer à rien. Donc ouais, ça a fait réagir parce que y’avait des gens qui étaient comme : « Mais qu’est-ce qui se passe à la fin ? Y’a des pénis volants, pis des seins, des bikinis, voyons ! » (rires) Mais pour nous c’était complètement drôle, pis c’est une chanson un peu d’amour, un peu sensuelle, donc on voulait y aller à fond. Je pense que pour nous y’a pas de tabou qui existe du moment qu’on arrive à le mettre en mots joliment. Tout ce qui est important c’est de raconter quelque chose qui vient d’un endroit réel et qui soit vrai. Quand c’est vrai, ça va passer, peu importe ce que c’est.