Décidément, les conflits et coups de théâtre en tous genres deviennent une tradition des Conseils Législatifs.
Après la dispute opposant les Vice-président·e·s (v.-p) exécutifs à la Présidente Muna Tojiboeva, c’est au tour de la Société de Publication du Daily (SPD, ou DPS en anglais, ndlr), organe responsable du financement de Délit et du McGill Daily, d’être la cible de tous les débats et litiges.
Une première partie dans le calme
Premier contraste avec le Conseil précédent, celui du jeudi 2 novembre semblait plutôt vide. En plus du public qui n’était pas au rendez-vous, de nombreux Conseillers étaient également absents —certains avaient prévu un remplacement, d’autres non. De plus, deux v.-p de l’Association des Étudiants en premier cycle de l’Université McGill (AÉUM, ndlr) laissèrent un siège vide : le v.-p. à la Vie étudiante Jemark Earle, et la v.-p. aux Affaires internes Maya Koparkar.
Ces absences furent d’ailleurs vivement critiquées par plusieurs membres du Conseil, notamment celle du représentant de la Faculté de Management Mutoko, manquant pour la troisième fois sans excuse et sans remplaçant.
Second contraste discernable : après la démission du Président du Conseil Jad El-Tal, c’est une organisatrice avec moins d’expérience qui modèra la réunion pour la première fois, et avec moins de succès.
Malgré ces quelques difficultés, le Conseil avança sans encombres dans les premières minutes. La v.-p. aux Affaires externes, Connor Spencer, ajouta quatre motions de dernière minute à l’ordre du jour, dont une particulièrement intéressante : « la motion concernant le soutien de la SPD dans la question du référendum ».
La v.-p. Connor Spencer procèda ensuite à une présentation de Notre Tour (Our Turn en anglais, ndlr), association luttant contre les violences sexuelles et genrées sur les campus. Elle rappela tout d’abord le rôle de l’organisation, qui comprend la prévention et le soutien aux survivant·e·s, et annonça que McGill avait obtenu une note de 61% concernant sa politique contre les violences sexuelles —sur une moyenne de 64% dans les autres Universités.
Après quelques annonces concernant principalement les évènements à venir sur le campus, la dernière Assemblée Générale (AG), et des plaintes concernant l’accessibilité des motions par les Conseillers et les médias, le Conseil passa à l’ordre du jour.
« Les débats concernaient principalement une consultation avec l’UdeM et l’UQAM, avant de tenter de faire pression au niveau du gouvernement fédéral ou provincial contre la loi [62] »
La question qui divise
La sérénité du début de la réunion perdura pendant encore un temps. Une première motion passa sans débat et sans difficulté : celle de créer un Comité pour la Représentation Provinciale, dont le rôle serait la diffusion d’informations concernant l’Union Étudiante du Québec (UÉQ, ndlr) et l’Association pour la Voix Étudiante au Québec (AVÉQ, ndlr) avant que l’AÉUM choisisse quelle association rejoindre.
Une seconde motion fut également approuvée avec une large majorité, mais cette fois non sans débat : la contestation de la loi 62, et sa non-application sur le campus.
Les débats concernaient principalement une consultation avec l’UdeM et l’UQAM, avant de tenter de faire pression au niveau du gouvernement fédéral ou provincial contre la loi. Finalement, c’est la v.-p. Spencer qui sera chargée des négociations avec les autres Universités, comme son mandat le prevoit.
C’est avec la motion suivante que le Conseil retrouva cependant une atmosphère similaire à celle du précédent.
En effet, tous les cinq ans, la SPD se doit de réaliser un référendum d’existence auprès des étudiants, afin de savoir si ses publicatins pourront continuer de recevoir le financément des mcgillois, jusqu’au prochain référendum.
À la dernière échéance, le Conseil Législatif accorda le soutien de l’AÉUM à l’organisme, et encouragea les étudiants à voter « oui » au référendum afin que le Délit et le McGill Daily puisse continuer d’être publiés. Cependant, les choses furent un peu différentes cette fois-ci. Prenant fermement position contre le McGill Daily Muna Tojiboeva et d’autres représentants du même avis, tels que le Conseiller Fodor, s’opposèrent à la motion.
Le représentant de la Facultés des Arts et Sciences Fodor insista sur le manque de « standards d’intégrité journalistique de la SPD », et reprocha un possible conflit d’intérêt des journalistes du McGill Tribune, du Délit et du McGill Daily qui votèrent aux différentes moions de la dernière AG, alors que ceux du Bull and Bear s’abstenèrent.
Les critiques du McGill Daily se firent nombreuses et acerbes, provenant parfois de la Présidente Muna Tojinoeva elle-même. Un autre Conseiller fit remarquer que le McGill Daily prenait fermement position contre l’État israélien et pour BDS, et qu’il lui semblait donc « absurde de forcer les étudiants de confession juive à payer pour le financement du journal ».
Le Conseiller Lametti, représentant de la Faculté de Médecine, nota quant à lui qu’il voyait un clair conflit d’intérêt dans le soutien d’une institution politique telle que l’AÉUM à une institution médiatique. Le représentant de la SPD, Xavier Thomas, répondit que l’AÉUM montrerait aux étudiants, en approuvant la motion, qu’ils soutiennent les médias libres, qui forment un contre-pouvoir, et qui forcent le gouvernement étudiant à rendre des comptes.
Lametti rétorqua alors qu’il votera « oui » au référendum, mais que ce n’est pas le rôle de l’AÉUM de pousser les étudiants à un certain choix.
Les seuls à venir ouvertement à la défense de la SPD sont le Conseillers des Services sociaux Savage, les représentants de la Faculté d’Arts, et la v.-p. aux Affaires externes Connor Spencer.
« Les seuls à venir ouvertement à la défense de la SPD sont le Conseillers des Services sociaux Savage, les représentants de la Faculté d’Arts, et la v.-p. aux Affaires externes Connor Spencer »
L’hommage au goût doux-amer
Notons que pour toutes les critiques accordées au McGill Daily, le Délit obtint de nombreuses motions favorables, y compris de ceux hostiles à la motion —comme le Conseiller Lametti.
Les commentaires portaient souvent sur le fait que le Délit était le seul journal francophone de McGill, et qu’il serait dommage de le perdre. La Conseillère Chan de la faculté des Arts, par exemple, affirma:« Si la SPD cesse d’exister il y a déjà une voix minoritaire qui ne sera pas entendu et c’est la voix de la francophonie ».
Après près d’une heure de débats clivants, le Conseil passa au vote. Résultats : deux abstentions, dix en faveur, douze contre. La motion échoue donc de peu, et contrairementa ala dernière fois, l’AÉUM ne soutiendra pas le « oui » dans le référendum d’existence du Délit et du McGill Daily.
Suite et fin
La motion suivante pour appeler une période spéciale de référendum, proposée par Connor Specer et trois Conseillers, fut rapidement reportée au prochain Conseil.
Celle qui suivit concernait la lutte contre les stages non-rémunérés, illégaux au Québec, mais pour lesquels on trouve pourtant toujours des annonces sur le campus. La proposition passa sans débat, et sans résistance de la part des différents représentants, avec une nette majorité.
Enfin, les divers Comités, Conseillers et membres de l’exécutif présentèrent leurs rapports, avant de clore la réunion aux alentours de 23h.
Ce dernier Conseil Législatif dura donc un peu plus de cinq heures, nettement moins que le Conseil précédent, qui s’était achevé à 0h30, après un total de sept heures de délibérations laborieuses.