Qu’importe que le temps file, il est si bon de flotter
Dans la rivière des jours et des nuits ôtées,
On voudrait s’arrêter pour se noyer, que dans la lagune du temps on se sente choyé,
Mais rien ne le peut
— Non, rien —
Tu coules comme de l’eau, sur des galets polis et glacés, qu’ils roulent sur ta peau impalpable comme tant de froides douceurs, de ces dures rondeurs,
Ils te pénètrent de leurs dents de pierre, mais tu ne peux rien faire
— Que de tourner —
Et regarder au-dessus de toi, la surface élastique du monde,
Qui bouge, bouge, bouge dans un kaléidoscope de couleurs, qui n’a jamais de forme
Qu’un écran plat que tu contemples en voulant le crever
De la pointe acérée de ton ongle blanc,
Mais tu ne fais que passer en sentant rouler les galets sur ton dos,
Et il tourne, tourne le monde à en vomir,
Que toi tu le regardes, l’œil écarquillé, en ayant l’impression de tourner en rond.
Le temps – Esther Laforge
Noeud simple.
Il se noue facilement en deux boucles et protège de façon éphémère deux côtés de la rupture. Il se faufile entre leurs failles, et les force doucement à se rejoindre à l’unisson. Mais les noeuds ne restent jamais simples, et la vie non plus d’ailleurs. Souvent pour durer, il faut doubler. Les joies, les peines, les noeuds. Tout vivre mais deux fois plus.
Noeud double.
Les deux bords s’enlacent mais ne s’en lassent pas.
Le noeud ne se défait pas et le lacet semble consolider une union improbable, résistant à chaque intempérie.
Le lacet n’est qu’un lien faible, une minuscule ficelle qui arrive à joindre deux bouts. Un point commun, en quelque sorte, qui les relie l’un à l’autre.
Et tout ne tient qu’à un fil.
Une fois, le lacet a orné une guitare, et semblait de nouveau unir deux entités en une douce onde :
l’Homme et la musique, pour n’en faire plus qu’une.
Le Lacet – Louisane Raisonnier