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Réflexions sur la crise des migrant.e.s

Les étudiant.e.s mcgillois.e.s se mobilisent pour les réfugié.e.s.

Luce Engérant | Le Délit

Samedi 3 février, les murs de McGill ont accueilli quatre invité·e·s de qualité pour participer au Global Development Forum, une initiative des étudiant·e·s pour recueillir idées et expériences liées à la crise des réfugié·e·s.

Une multitude d’intervenants

Denise Otis, conseillère juridique du Haut Commissariat pour les Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), a ouvert la conversation en rappelant les plus gros problèmes entourant la crise des réfugié·e·s. Plus de la moitié des réfugié·e·s étant des enfants, la question de l’éducation de ces jeunes et de leur intégration sociale sur le long terme est essentielle. La vision positive associée aux terres d’accueil s’est également largement détériorée d’après Otis. En effet, si les Canadien·ne·s étaient extrêmement fiers il y a 31 ans de recevoir la prestigieuse médaille Nansen, remise à ceux qui œuvrent en faveur des réfugié·e·s, les élections en Occident sont, d’après elle, aujourd’hui souvent prétexte à fermer un peu plus ses portes aux populations déplacées. Cependant, elle a souligné l’importance de répondre aux peurs et aux préoccupations de la population, et d’y répondre afin de transformer l’ignorance et les craintes qui en découlent en empathie.

La deuxième intervenante, Nadia Naffi, professeure à Concordia, a expliqué le rôle des jeunes sur les réseaux sociaux. Elle pense que la jeunesse a un véritable pouvoir virtuel pour contrer la propagande et la diffusion de fake news à l’encontre des réfugiés. Ainsi, d’après elle, il suffit de poser les bonnes questions afin de faire évoluer les mentalités. Elle a aussi dénoncé l’utilisation d’images sorties de contextes par certains partis politiques comme UKIP (UK Independence Party, soit le parti pour l’indépendance du Royaume-Uni, ndlr) afin de propager une image péjorative des réfugié·e·s.

Abdulla Daoud, directeur exécutif de Devbloc au Centre des Réfugiés de Montréal, a ensuite proposé aux étudiant·e·s des statistiques et définitions pour mieux comprendre les enjeux liés aux réfugié·e·s. Il a par exemple souligné que le Canada était à la fois un des pays occidentaux les moins endettés et les plus riches, et l’un de ceux qui reçoivent le moins de réfugiés. Il a ensuite présenté le projet d’intelligence artificielle LUNA. Cette dernière fonctionne comme un chat virtuel avec leréfugié·e, mais le logiciel collecte à travers ce dialogue les informations nécessaires pour remplir le dossier de demande d’asile, ce qu’elle remplit automatiquement après les avoir traduites. Cela permet aux réfugié·e·s d’éviter de passer des heures à remplir des formulaires souvent complexes et dans une langue étrangère.

La dernière intervenante n’était autre que Gabriela Ramos, directrice de cabinet et Sherpa de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques, ndlr) au G20. Elle a présenté le fossé entre les mythes liés aux réfugiés et la réalité. Les sondages faits auprès de nombreux citoyens européens ont ainsi démontré que leur perception de la part des migrant·e·s dans la population totale est erronée. De nombreuses statistiques confirment son affirmation : par exemple, d’après une étude du Humanitarian Index faite en 2016, les Allemand·e·s et les Françai·e·s croient avoir accueilli un nombre de réfugié·e·s 5 fois supérieur au nombre réel. Madame Ramos a évoqué d’autres problèmes liés à l’intégration (resettlement, ndlr) des réfugié·e·s dans leur pays d’accueil, comme l’islamophobie : 55% des Anglai·e·s pensent qu’il faut cesser l’immigration de personnes en provenance de pays musulmans. D’après elle, plusieurs solutions pourraient permettre une meilleure intégration des réfugié·e·s : de nouveaux outils éducatifs pour une société plus tolérante, et une implication du secteur privé dans l’insertion professionnelle des réfugiés.

Réalité vécue

Les étudiant·e·s ont ensuite été invité·e·s à participer à une activité de simulation de crise. Divisés en trois groupes, ils ont dû résoudre les défis d’une guerre civile fictive en Turquie qui complexifierait et empirerait l’actuelle crise des réfugié·e·s en l’espace d’une heure seulement, sous l’œil avisé de Mme Ramos. Les réponses proposées par les étudiant·e·s traduisaient souvent le besoin d’une Europe plus unie politiquement, de résolution de crises prises directement à la source du problème dans les pays en guerre, et soulignaient le potentiel des nouvelles technologies pour rendre le processus de migration forcée plus efficace et organisé —et donc plus humain.

Une foire des OGN a ensuite eu lieu autour de dégustations de fromages et de vins. 6 organisations étaient représentées : Opération Evac, dédiée à l’amélioration des conditions de vie des réfugiés Syriens à Montréal ; Say Ça !,  qui accompagne les réfugié·e·s et les migrant·e·s dans des programmes d’apprentissage leur permettant de développer des relations humaines et un rapport plus serein à leur nouvel environnement ; Alternatives Action and Communication Network for International Development, qui promeut les droits de l’Homme, la démocratie, la justice sociale et environnementale et la solidarité internationale ; WUSC, ou McGill Students for World University Service of Canada, qui connecte les étudiants avec des leaders et des initiatives sur les campus universitaires à travers le pays ; McGill Students for Amnesty International, qui dénonce les violations aux droits de l’Homme, et McGill Students for UNICEF, qui collecte des fonds et travaille en étroite collaboration avec UNICEF Canada.

Sujet novateur ?

Sarah Herlaut, une des étudiant·e·s en charge de l’organisation de l’événement, explique le choix du thème du forum de cette année : « on trouvait qu’il manquait des évènements qui abordaient la question des réfugiés avec un angle plus orienté vers l’action […] et la perception projetée par les médias ». Les sujets plus souvent évoqués, comme les conditions de vie dans les camps, ne permettent pas «[de] comprendre comment mieux aider ». Le forum a ainsi permis de créer un espace pour tenter de comprendre les différentes facettes de la médiatisation de la crise des réfugié·e·s et du soutien aux réfugié·e·s dans un contexte familier aux étudiant·e·s —les réseaux sociaux et la ville de Montréal.

 


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