Le dimanche 7 octobre, à la place Émilie-Gamelin, des milliers de Montréalais·es se sont rassemblé·e·s pour marcher en protestation contre le racisme. Le 12 novembre 2017 avait eu lieu le même événement pour lutter contre la montée d’un discours xénophobe au Québec.
Un an après, le discours a pris de l’ampleur et pour cause : le parti Coalition avenir Québec a remporté la majorité des sièges et François Legault est devenu le premier ministre du Québec. Accusé par certain·e·s de racisme et de xénophobie, il a lancé, moins de deux jours après sa victoire, une nouvelle proposition de loi visant à interdire des signes religieux dans la fonction publique pour les juges, enseignant·e·s, agent·e·s de la paix et gardien·ne.s de prison. Il a aussi annoncé son désir de réduire le nombre annuel d’immigrant·e·s de 52 000 à 40 000 dès l’an prochain.
Rester uni·e·s face au nouveau gouvernement
Le cortège, placé sous le signe de la solidarité, part de la place Émilie-Gamelin pour se rendre jusqu’au boulevard Saint-Laurent. Dans la foule, des Québécois·e·s de toutes origines, de tous milieux et des slogans qui font réfléchir : une femme tient fièrement une pancarte avec le slogan « La laïcité de Legault porte un voile arbitraire ». Une jeune femme voilée a aussi fabriqué une pancarte avec un long voile en tissu rouge pour symboliser le tout.
Plusieurs militant·e·s et activistes s’expriment avant de laisser la foule défiler dans la rue : la militante antiraciste Safa Chebbi dénonce le « non-respect des droits et des libertés par l’utilisation des clauses nonobstant ». Cette dernière déclare qu’« il est inacceptable qu’encore une fois les luttes féministes soient utilisées pour des fins racistes », rappelant que François Legault souhaite interdire le port du voile au sein de la fonction publique (en position d’autorité) et regrettant que « le discours sur l’égalité homme-femme soit détourné pour stigmatiser une partie d’entre elles ».
Une autre intervenante ajoute que certaines enseignantes vont subir les conséquences de la nouvelle loi alors que ce sont des « enseignantes à part entière » et que la dépersonnalisation des femmes voilées va être « cruelle ».
La militante Marlihan Lopez , femme autochtone et membre de la Fédération des femmes du Québec, s’exprime à son tour en dénonçant les problèmes rencontrés par les personnes racisées. Elle témoigne de la difficulté de grandir loin de sa culture de naissance, ayant été adoptée par une famille québécoise. La militante condamne le racisme systémique auquel font face les personnes autochtones. Elle est rejointe par le militant Al Harrington , membre du Wolf Pack Street Patrol, une organisation qui lutte pour les droits des Autochtones de l’Ontario.
« Monsieur Legault, vous n’êtes pas mon premier ministre »
Une jeune femme prénommée Yacine, une poète engagée, fait son apparition. Portant la voix du comité Féministes racisé-e‑s uni-e‑s et solidaires (FRUeS), son poème est un hommage aux immigrant·e·s et aux personnes victimes de racisme. « Nous sommes fatigué·e·s, nous voulons guérir », déclame-t-elle, faisant référence à sa situation de femme de couleur adoptée par des parents blancs, étant obligée de voir ses idéaux et ses problématiques incomprises . Elle achève son poème par une phrase inspirée de l’élection américaine de Donald Trump : « Monsieur Legault, vous n’êtes pas mon premier ministre ».
La marche prend fin au boulevard Saint Laurent et laisse des interrogations quant à la suite des événements, avec la formation du nouveau cabinet ministériel qui sera annoncée le 18 octobre.