Nectar, d’Adrien Pierre
La vie est une coupe de nectar
Dont on ne se sert qu’un verre.
Prends garde terrestre fêtard !
Le courroux divin plane dans l’air.
L’aveugle jeunesse, à grandes gorgées
S’imbibe de la boisson sacrée.
Le fond du verre est encore loin,
Tandis que la santé bat son plein.
Désaltéré, le buveur marque une pause.
Sur la table, le cône de cristal est posé,
Encore humide de la dose
Que le temps vient d’avaler.
Aussitôt la soif revient, véritable infamie.
La faute peut-être au soleil étouffant
Qui luit sur les visages adolescents.
L’horizon est serein ; trinquons amis !
De nouveau rassasiées, des lèvres fripées
Relâchent péniblement le lâche verre
Qui en un clin d’œil s’est vidé :
Du nectar, il ne reste qu’un fond clair.
Dans un instant, la marée sera basse
Et jamais ne remontera. Hélas !
Le ciel se couvre, l’orage gronde,
L’Éden est déserté en une seconde.
Assoiffé par la tempête sans pluie,
En un éclair la coupe est finie,
En un éclair elle se brise contre le sol
Suivie d’un corps mou, sans boussole.
Il y a moins de nectar que l’on croit
Dans le verre cristallin qu’on reçoit.
Délectez-vous de chaque rasade
Jouissez à en être malade
Enivrez-vous tel Baudelaire !
Afin de ne rien regretter
Si ce n’est
Un autre verre.
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Gagnant.e du concours d’écriture créative de la Francofête (Français seconde langue)