Louise Archambault reprend dans son troisième film — une adaptation du roman de Jocelyne Saucier, Il pleuvait des oiseaux (XYZ, 2011) — une histoire d’amour atypique, comme elle l’avait fait avec brio dans son second long-métrage, Gabrielle, qui nous avait émus en 2013. L’humanité et la sensibilité propres à la réalisatrice se prêtent avec justesse à l’écriture touchante de la romancière.
« Un mot vaut mille images »
L’adaptation au cinéma d’un livre s’avère toujours une tâche de taille, surtout lorsque celui-là a eu autant de succès que Il pleuvait des oiseaux, qui a remporté le prix Ringuet en 2012. Le film, à l’instar du roman du même nom, raconte l’histoire d’un trio de reclus qui cherchent à tout prix à se faire oublier. Rapidement, leur existence paisible se vit bousculée par une série d’événements et de destins insolites. D’emblée, l’aîné des ermites, Ted Boychuk (Kenneth Welsh), s’éteint de belle mort dans sa cabane, laissant derrière lui un nombre incalculable de tableaux, dont on ne sait pratiquement rien, sinon qu’ils représentent de manière abstraite les grands feux qui lui ont volé sa famille. Ce personnage – même s’il disparaît dès les premières scènes du film – représente la pierre angulaire des relations qui se tisseront au fil du récit entre des gens qui paraissent de prime abord tout à fait éloignés.
Naviguer entre les écueils
Le film ne déçoit pas même s’il prend inévitablement de petits raccourcis que permettait d’écarter le temps long du roman. Certains personnages paraissent escamotés, sans toutefois que la faute ne revienne aux acteurs, et quelques éléments de la trame narrative s’effacent partiellement. On se doit d’ailleurs de souligner les performances remarquables de Gilbert Sicotte et Rémy Girard qui incarnent respectivement Charlie et Tom, les deux autres misanthropes du trio. Heureusement, ces imperfections ne suffisent pas à atténuer la force du long-métrage qui exprime l’amour et la liberté avec une acuité saisissante. Louise Archambault illustre avec brio l’amour des laissés-pour-compte et de ceux qui ont choisi de tout abandonner ; son œuvre rend vraiment hommage au texte de Jocelyne Saucier en plus de conférer à ses personnages une beauté tangible.
Brûler en silence
Autrement, on ne peut passer sous silence la beauté du territoire qui nous est présenté ; filmé dans plusieurs régions différentes, dont l’Abitibi et le lac Supérieur, le long-métrage nous présente la forêt sous son jour le plus majestueux tout en restant humble dans son traitement de la nature. Sobres et subtils, mais prenants ; les paysages sont magnifiques sans pourtant être à couper le souffle, leur caractère transcendant, mais effacé, laisse la trame narrative se déployer dans toute sa sensible lenteur.
Il pleuvait des oiseaux est un film à voir, non seulement parce qu’il est excellent, mais surtout parce qu’il met en lumière des acteurs québécois talentueux, une réalisatrice maintenant sûre de ses moyens et une autrice bien affirmée sur la scène littéraire.