Depuis sa fondation en 1983, le Parti Vert du Canada (PVC) a toujours eu pour vocation première de défendre des causes environnementales à la chambre des communes. D’ailleurs, dans l’esprit de la plupart des électeurs, un vote pour le Parti Vert équivaut à un vote en faveur de la protection de l’environnement. Pourtant, depuis que leur cheffe Élizabeth May a été élue à la Chambre de Communes, en 2011, les Verts ont dû se prononcer sur une multitude d’enjeux, certains sans lien avec l’environnement ; or ces prises de position restent majoritairement méconnues du public.
Une économie citoyenne
En matière d’économie, la proposition la plus ambitieuse du Parti Vert est certainement d’établir un revenu minimum garanti, c’est-à-dire un montant d’argent fixe distribué chaque mois à chaque canadien, qu’il soit chômeur ou non. Selon les économistes qui en font la promotion, cette allocation, qui viendrait remplacer tous les transferts gouvernementaux permettrait de garantir une sécurité financière à tous les citoyens tout en réduisant les coûts bureaucratiques. Le Parti Vert chercherait aussi à implanter une assurance médicamentaire qui rendrait gratuits tous les médicaments prescrits par un médecin.
Il cherche aussi à établir une agence gouvernementale d’achat de médicaments qui permettrait de négocier le prix des médicaments directement avec les compagnies pharmaceutiques.
Pour les étudiants universitaires, le Parti Vert compte abolir les frais de scolarité. Il faut noter ici que le Parti Vert ne s’engage qu’à travailler avec les provinces pour mettre en place la gratuité, car l’éducation est une compétence provinciale et non fédérale. La formation politique mettrait aussi en place un programme pour effacer les dettes étudiantes individuelles qui dépassent les 10 000$, ainsi qu’un programme de bourse pour aider les étudiants à la maîtrise et au doctorat.
Chose surprenante, afin de diminuer la consommation de pétrole étranger au Canada, le PVC soutiendrait la production et la distribution du pétrole des sables bitumineux albertains. La logique du parti est de consommer davantage de pétrole canadien pour cesser l’importation de pétrole étranger, jugée plus polluante à cause du transport.
Cette prise de position, qui peut s’expliquer par une volonté de ménager les électeurs des provinces dont l’économie dépend de la production pétrolière, a créé des désaccords au Québec, où l’exploitation des sables bitumineux est très mal perçue par l’opinion publique. Dans un message sur Twitter, le chef du Bloc Québécois a par exemple décrié les « mauvaises surprises » du parti. Le chef du Parti Vert du Québec, Alex Tyrell, a quant à lui exprimé sa dissension en rappelant que le pétrole des sables bitumineux était beaucoup plus polluant que le pétrole polluant que le pétrole importé, même en comptant les émissions de transport. Dans le contexte de la compétition féroce entre le PVC et le NPD pour obtenir les faveurs des électeurs progressistes au Québec, cette prise de position contrastant avec l’opinion publique pourrait faire mal. Par ailleurs, lundi, le NPD a annoncé avoir recruté l’environnementaliste Réjean Hébert, un ancien chef du Parti Vert du Québec.
Un progressisme social contesté
Pour ce qui est des enjeux sociaux, le Parti Vert est largement en accord avec le Parti Libéral et avec le Nouveaux Parti Démocratique, progressistes socialement. La position du parti sur l’avortement fait toutefois régulièrement la cible d’attaques de la part des autres partis de gauche, notamment du Bloc et du NPD. Mme May, une anglicane pratiquante, a en effet affirmé par le passé qu’elle ne croyait pas que les femmes avaient « le droit frivole de choisir » et qu’elle avait déjà dissuadé plusieurs femmes de se faire avorter. Toutefois, elle a toujours affirmé par la suite qu’elle soutenait le droit des femmes de choisir et qu’elle n’avait jamais oscillé sur cette position. Mme May a ravivé la controverse autour de sa position en déclarant qu’elle n’interdirait pas à ses députés de présenter d’éventuels projets de loi anti-avortement, mais la cheffe des Verts a par la suite fait volte-face en affirmant qu’elle expulserait du caucus les députés déposant de tels projet. ξ