Le 21 octobre passé, près de 18 millions de Canadiens et Canadiennes se sont rendus aux urnes afin d’élire leurs députées et députés à la Chambre des communes. Parmi eux, 111 000 électeurs ont utilisé le nouveau système de vote par anticipation sur les campus universitaires, lequel semble donc avoir été un succès.
Gouvernement minoritaire
À l’issue de ces élections, c’est donc le Parti libéral qui a récolté le plus de sièges (157), bien que ce soit le Parti conservateur qui ait récolté le plus de voix (34,4% contre 33,1%). Justin Trudeau reprend donc les rênes du pays, mais il devra cette fois-ci composer avec une minorité à la Chambre des communes (338 députés et députées au total).
S’il avait pu choisir de former une coalition en incluant des membres d’un ou de plusieurs autres partis dans son cabinet, Trudeau a écarté cette option deux jours après les élections. Il devra donc négocier avec les autres formations politiques présentes au Parlement, soit le Parti conservateur (122 sièges), le NPD (24 sièges), le Bloc Québécois (32 sièges), et dans une moindre mesure, le Parti vert (3 sièges). Cette configuration politique est intéressante pour Trudeau puisqu’elle lui permettrait de gagner un vote en chambre avec le support soit du NPD ou du Bloc Québécois, même si elle demeure pour lui loin d’être optimale.
Le Bloc Québécois sort incontestablement gagnant de cet exercice démocratique, après avoir triplé son nombre de députés à Ottawa. La partie n’était pourtant pas gagnée d’avance pour le Bloc ; il y a un peu plus d’une année, le parti était encore secoué par une très grave crise de leadership. Yves-François Blanchet, le chef du Bloc, aura su mener une campagne efficace, mais il se sera surtout démarqué par sa performance aux débats télévisés. Le Bloc est donc à présent bien placé pour soutirer aux libéraux des concessions.
Quant aux verts, ils ont réussi à faire élire un député de plus, à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, mais cela devrait être insuffisant pour leur donner un réel pouvoir à la Chambre des communes. Le NPD s’est, quant à lui, carrément effondré, surtout au Québec, poursuivant une trajectoire déjà amorcée en 2015.
Pourtant, les néo-démocrates pourraient ironiquement avoir une plus grande influence maintenant sur la législation canadienne qu’auparavant puisque les deux précédents gouvernements étaient majoritaires.Maxime Bernier n’a pas réussi à être élu dans sa propre circonscription, ce qui a sonné le glas de son Parti populaire. Par ailleurs, l’ancienne ministre de la justice libérale Jody Wilson-Raybould a été la seule candidate indépendante à être réélue dans son comté de Vancouver.
Un équilibre à construire
Les premières étapes dans l’établissement du nouveau gouvernement canadien sont l’assermentation des députés, le choix du cabinet de ministres, le discours du trône et la composition des comités. Trudeau et son équipe doivent aussi envisager le dépôt du prochain budget, qui se fera au printemps, moment critique pour tout gouvernement minoritaire.
Dans les premiers temps de son nouveau mandat, le premier ministre pourra manoeuvrer sans trop craindre de perdre son poste : les partis d’opposition, très endettés et affaiblis par la campagne électorale qui vient de se terminer, n’ont pas intérêt à en déclencher une nouvelle tout de suite. Qui plus est, le NPD et le Bloc Québécois, des formations qui n’ont pas grande chance de former un gouvernement et donc pour qui la balance du pouvoir représente un avantage exceptionnel, tenteront probablement de la conserver le plus longtemps possible.