Acclamé par les critiques au festival international du film de Venise un mois avant son entrée en salles, le film Joker — sorti le 4 octobre dernier — se distingue des autres films de la compagnie DC Comics et est encore source de controverses médiatiques quelques semaines après sa sortie. Accusé de propager des idées de violence et de contestations, le long-métrage de 122 minutes, ayant accumulé déjà près de 750 millions de dollars américains au box-office mondial, raconte l’histoire des origines du Joker, un vilain très apprécié par le public et provenant de la bande dessinée Batman.
Une nouvelle approche
À une époque où la recette des films de superhéros est connue de tous, le film Joker vient se démarquer des autres métrages de l’univers des héros en se centrant sur un « vilain ». De plus, le film se déroule dans un monde dépourvu de magie ou de technologie miraculeuse et ne comporte aucune grande bataille finale (un troisième acte utilisé au point d’être devenu cliché). Plutôt que de nous en mettre plein la vue à l’aide d’effets spéciaux comme il est devenu habituel de le faire à Hollywood, le réalisateur Todd Phillips opte pour une photographie travaillée et pour un univers cinématographique faisant référence aux films des années 1970–80 (notamment à Taxi Driver de Martin Scorsese).
Un récit psychologique
Le film nous entraîne dans la vie d’Arthur Fleck (Joaquin Phoenix), un aspirant humoriste souffrant d’une maladie particulière provoquant des rires incontrôlables. Après la perte de son emploi comme clown, Arthur descend lentement au plus profond de sa folie en provoquant au passage un mouvement social antiélitiste ayant pour symbole le clown. L’histoire nous montre la dégradation de l’esprit de celui qui deviendra éventuellement le Joker. Cet être, bien que malade, vient émouvoir les spectateur·rice·s par la vraisemblance de son cheminement. Bien que l’on soit différent d’Arthur, l’on peut comprendre ses réactions face aux horreurs qu’il subit, dont le réalisme mêlé à la gravité de l’univers du personnage perturbent à merveille l’auditoire.
Une expérience à vivre
Joker n’est pas un film à regarder pour se détendre, mais bel et bien pour habiter pendant deux heures un esprit chaotique. Cette expérience présente une perspective unique sur la maladie mentale et sur les fléaux qui habitent les parts d’ombres de notre société. Il ne faut pas s’attendre, en visionnant ce film, à une leçon intéressante, à une révélation incroyable ou à des scènes d’action divertissantes. Là n’était pas l’intention du réalisateur. Pour apprécier Joker à sa juste valeur, il faut accepter d’entrer en salle pour vivre une expérience psychologique qui sera chaotique, touchante, souffrante et parfois malaisante, mais qui s’avérera de grande qualité pour les esprits préparés.