Ton cœur continue de battre à travers le mien et celui de tous ceux que tu as aimés
Bertrand Guay
À Montréal le 5 septembre dernier est décédé à l’âge de 27 ans Raphaël Michaud. Raphaël était un contributeur régulier et un membre de l’équipe éditoriale au Délit et espérait s’inscrire bientôt en maîtrise à l’École de journalisme de Sciences Po à Paris. Le 8 octobre dernier, ses parents, sa famille et ses amis se sont réunis pour livrer un dernier hommage à celui que les témoignages lus ce soir-là décrivent non seulement comme un jeune homme d’une rare érudition et d’une rigueur égale à sa droiture intellectuelle, mais également comme un humaniste.
Raphaël a vécu plusieurs vies et il a longtemps eu, disent ses amis, l’énergie folle pour le faire. Avant d’en venir aux sciences politiques et aux lettres, il a connu une carrière remarquée de pianiste classique. Son jeu musical parvenait àrendre exactement l’histoire de chaque pièce jouée. On ne rencontre pas tous les jours un étudiant capable d’interpréter avec le même brio le Sposalizio de Liszt et les Essais de Montaigne. Il était de ces étudiants qui font de vous un meilleur professeur. Les enseignants et les camarades de classe qui ont eu le privilège de le croiser en classe se rappelleront longtemps de cette vivacité d’esprit qui vous oblige à penser vite et qui vous donne envie de trouver des répliques à la hauteur d’une pensée déjà si mature. Il valorisait le savoir sous toutes ses formes et la musique autant que la littérature, le théâtre, le cinéma, les arts visuels et la gastronomie étaient pour lui autant d’occasions d’aller vers l’autre. Il ne voyait ni l’âge, ni la couleur de la peau, ni le milieu : il ne voyait que l’humain, qu’il accueillait avec un enthousiasme égal à sa gentillesse.
Au moment de te laisser partir, cher Raphaël, il nous vient l’envie de t’imaginer pour une dernière fois au piano ou souriant d’admiration devant une toile ou une sculpture, tentant d’en percer les mystères ; l’envie d’imaginer une dernière discussion enflammée sur des sujets brûlants d’actualité, devant lesquels tu ne reculerais pas et que tu nous donnerais envie d’aborder avec le même sérieux et le même esprit critique que toi. Ta quête de sens n’a eu cesse de te pousser à essayer de comprendre notre monde, à le rêver parfois autrement mais à rêver toujours grand, à l’échelle de la planète que tu aurais dû avoir le temps de parcourir.
Parents, amis, professeurs : nous sommes plusieurs à avoir reconnu en toi cet ardent et exigeant désir d’apprendre et cette vive soif de liberté et de justice qui font que l’on dit un jour des êtres comme toi : « C’est, c’était un grand homme ». Mais il en va parfois de la vie comme des printemps. Certains passent trop vite. Et ce sont souvent les plus beaux, les plus lumineux et les plus intenses. Bon repos, cher Raphaël.
Le présent hommage s’inspire des témoignages de gens que tu as marqués :
Tongchun Qin (Israël), Yvon Pomerleau (Montréal), Jennifer Liu (Ottawa), Bertrand Guay (Québec), Simon Gamache-Fortin (Rimouski), F. Roger Bélisle (Montréal), Isabelle Arseneau (Montréal)
Texte fourni par la famille de Raphaël Michaud. L’équipe du Délit offre ses condoléances à sa famille.