Le 13 octobre dernier, le gouvernement du Québec a annoncé une augmentation des frais de scolarité pour les étudiants non québécois dès la rentrée d’automne 2024. Le gouvernement compte prélever un montant forfaitaire pour chaque étudiant non québécois dans le but de réinvestir ces fonds dans le réseau des universités francophones. Les étudiants canadiens venant d’autres provinces verront ainsi leurs frais de scolarité presque doubler, passant de 8992 à 17 000 dollars canadiens par an. De plus, alors que les universités avaient jusqu’à présent la décision finale sur le montant des frais appliqués aux étudiants internationaux, le gouvernement impose désormais que ces derniers soient facturés un minimum de 20 000 dollars canadiens. Certaines exceptions ont toutefois été annoncées : les étudiants déjà inscrits dans un programme ne seront pas soumis aux nouvelles tarifications d’ici la fin de leurs études (soit un maximum de 5 ans). Les étudiants en recherche aux deuxième et troisième cycle, et les étudiants bénéficiant d’une entente internationale particulière – les Français et les Belges – seront aussi exemptés.
La hausse des frais de scolarité a provoqué de nombreuses réactions au sein des administrations et communautés étudiantes des universités anglophones. Bishop’s, Concordia et McGill ont unanimement dénoncé cette augmentation. Dans un courriel adressé à la communauté mcgilloise datant du 16 octobre dernier, le principal de McGill, Professeur Deep Saini, s’est exprimé sur ces hausses. Il a annoncé la mobilisation de plusieurs équipes afin de « démontrer les conséquences négatives concrètes que de telles mesures auraient sur notre établissement, sur le secteur de l’enseignement supérieur et sur la société québécoise dans son ensemble », et de « stopper ces conséquences ».
La réaction de la communauté étudiante
Dans une déclaration commune, l’Union des étudiants de Concordia (CSU) et l’Association des étudiants de l’Université McGill (AÉUM) « condamnent fermement cette hausse des frais comme étant antidémocratique et discriminatoire ». Les deux associations étudiantes critiquent cette nouvelle mesure prise sans consultation préalable avec les institutions et les communautés touchées, et dénoncent une hausse qui risque d’impacter particulièrement les étudiants en situation précaire, menaçant d’exacerber l’élitisme au sein de l’éducation post-secondaire. Le Délit s’est entretenu avec Michael*, un étudiant ontarien anglophone en troisième année en économie à McGill qui a préféré rester anonyme. Michael reconnaît la légitimité de l’inquiétude du gouvernement québécois face au déclin du français dans la métropole montréalaise, mais il ne pense pas que la solution se trouve dans l’augmentation des frais de scolarité. Selon lui, la protection du français devrait passer par « de plus grands investissements dans des programmes d’apprentissage obligatoires du français, pour les étudiants et le personnel administratif des universités anglophones. (tdlr) ». Interrogé sur l’impact de de la hausse des frais de scolarité, Michael nous a affirmé que s’il devait aujourd’hui décider de venir étudier à McGill, « l’augmentation de l’engagement financier m’aurait amené à reconsidérer mon choix ».
Le lundi 30 octobre prochain à 13 heures, une manifestation sera tenue afin d’affirmer une opposition de masse face à cette décision du gouvernement québécois. Le Délit a rencontré Alex O’Neill, actuellement étudiant à McGill, qui organise la manifestation avec son collaborateur Noah Sparrow. Il nous a expliqué que leur but, à travers cette manifestation, est de « répondre à cette loi du gouvernement Legault qui attaque l’identité culturelle de Montréal ». Il affirme par la suite que c’est justement sa variété linguistique, culturelle, et son ouverture au monde, qui font de Montréal une ville « unique ». Selon lui, changer cette singularité reviendrait à renoncer à la force de Montréal, qui est un atout indéniable pour le Québec.
Allant du Square Dorchester jusqu’au portail Roddick de McGill, cette manifestation réunira une grande partie de la communauté montréalaise. Après avoir reçu de nombreux messages de soutien et promesses d’affiliation à la manifestation, Alex annonce que cette manifestation sera d’une grande ampleur, et qu’« environ 50 000 personnes seront présentes pour protester ». Francophones comme anglophones, des étudiants de McGill, de Concordia, de l’UQAM et encore de l’UdeM ont annoncé leur mobilisation. À leurs côtés, d’autres groupes non-étudiants comme des syndicats (tel que MUNACA et MUNASA, regroupant les employés non académiques de l’Université McGill), et d’autres associations ont annoncé leur soutien et leur participation à la manifestation.
*Nom fictif