Où en sommes-nous ?
Disons que les progrès ont été modestes depuis l’année dernière. Les donateurs internationaux ont promis de donner 5,3 milliards de dollars pour venir en aide au Haïtiens, mais jusqu’à présent, seuls 1,2 milliards des fonds leur ont été alloués… Et Médecins Sans Frontières (MSF) déplore un manque d’outils médicaux sur le terrain.
Le choléra, qui a fait 3 759 morts depuis que la maladie a éclaté en octobre, continue à faire des ravages. La porte-parole de L’Organisation Mondiale de la Santé, Fadela Chaib, a affirmé jeudi dernier que l’épidémie n’avait pas encore atteint son point culminant, le taux de mortalité n’ayant toujours pas baissé. MSF est plus optimiste et annonce aujourd’hui que le nombre d’admissions dans les centres de traitement diminue progressivement.
Bilan : un séisme dévastateur ; dix à onze millions de mètres cubes de décombres à évacuer ; quelques 300 000 morts ; une épidémie de choléra ; des organisations humanitaires concurrentes plutôt que coopératives ; et finalement, le retour d’un dictateur sanguinaire exilé depuis vingt-cinq ans, Jean Claude « Baby Doc » Duvalier.
Comment Haïti en est-il arrivé à ce point ? Est-ce simplement de la malchance ?
Un bref examen de l’histoire haïtienne s’impose. Au XVIIIe siècle, la Perle des Antilles était un comptoir de sucre et de café extrêmement lucratif pour les colons français. Inspirés par la révolution française de 1789, les esclaves se révoltèrent et déclarèrent leur indépendance en 1804. Les Haïtiens payèrent chèrement leur liberté –150 millions de francs-or, pour être exact. En 1825, la France exigea une indemnité pour ses pertes économiques (équivalente à 20 milliards de dollars aujourd’hui). Acculée par quatorze vaisseaux et 500 canons français, forcément, la nouvelle république acquiesça. Cet endettement est un boulet qu’Haïti traîne toujours aujourd’hui.
La dette haïtienne fut pleinement acquittée en 1947. Pourtant, l’endettement de la Perle a continué au cours du XIXe siècle. De 1957 à 1986, la famille Duvalier fit régner un régime autoritaire dispendieux qui laissa le pays plus pauvre que jamais. On estime que 45% de la dette actuelle d’Haïti est attribuable à un détournement de fonds de la part des Duvalier.
Cet endettement, responsable de l’extrême précarité économique haïtienne, s’élève aujourd’hui à plus d’un milliard de dollars. C’est cet endettement qui a empêché le progrès du pays depuis près de 200 ans. C’est également cette dette qui explique l’ampleur du désastre qui a envahi Haïti il y a un an. Les infrastructures de santé et de transports, qui devraient servir lors d’un désastre naturel, étaient déjà compromises ou désuètes, voire non existantes. Le tremblement de terre et l’épidémie n’ont fait que souligner ce triste constat.