Samedi soir, je regardais un film d’action à la télévision, mon laptop ouvert sur mes genoux, mes mains inertes déposées sur le clavier, le regard anxieux. Je cherchais sans succès un sujet culturel d’actualité qui intéresserait vraiment les lecteurs. Quelle ne fut pas ma honte, le lendemain matin, de réaliser qu’un sujet d’une haute importance planait juste sous mes yeux –d’autant plus que je participais à un événement culturel en son honneur.
Alors que l’on prend pour acquis, aujourd’hui, la liberté et le droit de vote féminins, il semble facile pour plusieurs personnes d’oublier l’importance –ou parfois même l’existence– de la Journée internationale de la femme. Pourtant, il reste encore bien du chemin à faire en ce qui a trait à l’égalité des sexes, et les acquis sont toujours fragiles. C’est pour cette raison que la date du 8 mars revêt une importance particulière et devrait être mise en évidence dans tous les agendas et calendriers
La fin de semaine dernière, plusieurs colloques et manifestations avaient lieu pour souligner les combats passés, présents et futurs des femmes d’ici et d’ailleurs. Pour ma part, j’ai chanté le 8 mars dernier. La chorale dont je fais partie depuis peu, l’ensemble vocal Les Nanas de Montréal, avait été invitée à faire un bref concert dans le cadre de colloque De l’oppression à la reconnaissance, le 5e colloque de Gai Écoute, qui abordait la situation des femmes lesbiennes venues d’ailleurs et des femmes bispirituelles autochtones. Nous y avons chanté des chansons jazz et des classiques français, mais la pièce à l’honneur lors de ce spectacle spécial était décidément « Du pain et des roses », une chanson de circonstance. La pièce avait été écrite en 1995 pour la Marche du Pain et des Roses, une manifestation pacifique organisée par Françoise David et rassemblant 850 femmes revendiquant l’éradication de la pauvreté qui affligeait les Québécoises. Les 200 kilomètres parcourus en dix jours ont mené le groupe à l’Assemblée nationale, où 15 000 personnes les attendaient. Grâce à cette marche, le salaire minimum a été augmenté et la loi sur l’équité salariale créée. La Marche mondiale des femmes, un mouvement international réunissant 163 pays et militant pour l’égalité et contre la violence, est un autre produit de cette courageuse initiative québécoise. En 2005, une marche commémorative réunissait quelques centaines de participantes « pour jeter des perspectives des luttes féministes qu’il [restait] à mener », lit-on sur le site de la Fédération des femmes du Québec.
Encore aujourd’hui, bien des gens sont mal à l’aise devant le mot « féministe ». On y associe un mouvement extrémiste qui rabaisse les hommes et qui prône la supériorité féminine. Bien qu’il existe certainement des femmes qui en veulent aux hommes, la très grande majorité des féministes cherchent plutôt à améliorer les conditions de vie des femmes et à promouvoir l’égalité entre les sexes. En d’autres mots, le féminisme est un mouvement qui ne cherche pas à brimer les droits des hommes, mais bien à défendre les droits qui reviennent aux femmes. De Thérèse Casgrain à Françoise David, en passant par Janette Bertrand et Pauline Marois, le dernier siècle a vu agir des centaines de militantes dévouées. En retraçant non seulement l’histoire de la chanson « Du pain et des roses », mais aussi l’histoire générale des femmes au Québec, j’ai ajouté ma voix au mouvement féministe avec davantage de fierté.