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Le loup-garou du campus

MBA : plus compétitif, moins accessible

La maîtrise en administration des affaires (MBA) de McGill a fait parler d’elle dans les médias dernièrement. Afin que le programme devienne autofinancé, les frais de scolarité annuels du programme devraient passer à $29 500 pour tous à l’automne 2010.

Pour information, ils s’élèvent actuellement à $1 673 pour les résidents du Québec. Même si ce changement n’affectera pas les étudiants déjà inscrits dans le programme, cette augmentation ne passera sûrement pas inaperçue. La Ministre de l’Éducation du Québec, Michelle Courchesne, a déjà annoncé qu’elle s’opposait à cette hausse qu’elle n’avait pas autorisée.

Si vous êtes habitués aux discours de notre principale, Heather Munroe-Blum, vous aurez peut-être remarqué que son mot d’ordre est « compétitivité ». À l’entendre, la gouvernance de l’université se limite à une lutte acharnée pour affirmer son excellence de recherche et d’enseignement aux échelons nationaux et mondiaux. Tout le reste n’est vraiment qu’un moyen en vue de cet objectif. Cette vision semble partagée par Don Melville, le directeur du programme MBA, qui a voulu justifier la hausse des frais en déclarant : « On veut s’assurer qu’on est le meilleur programme au Canada et un des meilleurs au monde ».

Cependant, la réputation de ce programme a été quelque peu malmenée par le classement du Financial Times, la référence internationale. De 44e mondial en 2006, le MBA de McGill est passé 90e en 2007, 96e en 2008 et a disparu du top 100 cette année, alors que cinq autres universités canadiennes y figurent. Jusqu’à l’an dernier, l’administration adoptait la politique de l’autruche. « On est toujours dans le top 100 », se réjouissait Geoffrey King, le chargé de la communication de la faculté de gestion, à la vue du classement 2008. « Nous sommes toujours satisfaits », concluait-il.

Mais cette année, la sortie du tableau renommé a eu l’effet d’une douche froide. D’autant que dans un programme de gestion, la compétitivité n’est pas seulement un objectif d’administrateurs, c’est une valeur sacrée. Au moment de leurs inscriptions, de nombreux étudiants se fient essentiellement aux classements pour optimiser le ratio de prestige par heure de cours. « Nous n’avons aucun intérêt à être médiocre », conclut  Ron Duerksen, directeur du marketing et de la communication pour la faculté de gestion.
Pour que le MBA devienne à la hauteur de ses ambitions, la faculté de gestion a  donc décidé de « reconstruire » le programme. De nouvelles installations, trente nouveaux professeurs, des services aux étudiants restructurés… même les 30 millions de dollars donnés par Marcel Desautels pour l’occasion ne suffiront pas à financer tout cela. Rappelons au passage que seulement une soixantaine d’élèves par an est admise en MBA.

Le programme coûte à McGill environ $22 000 par an et par étudiant. Il est actuellement financé par les frais de scolarité et des subventions gouvernementales, ce qui ne représente que $12 000 par an et par étudiant. Au lieu de se plaindre que les programmes de gestion sont sous financés, l’administration a décidé de renoncer à l’argent public et de monter les frais à $30 000. Bien sûr, on s’est empressé de dire que les universités « concurrentes » facturent de telles sommes depuis longtemps. Et on nous dit qu’on a toujours le souci de l’accessibilité. Ron Duerksen annonce même que les aides étudiantes vont décupler ! Cependant, la moyenne s’élève actuellement à $400 par an et par étudiant.

Que les élèves de l’an prochain ne s’inquiètent donc pas, ils n’auront plus que $26 000 à trouver !


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