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Le politique désartmé

En organisant un événement où Stephen Harper joue au piano et chante Imagine de John Lennon avec Maria Aragon, une jeune fille d’origine philippine qui doit sa notoriété à son interprétation de Born This Way de Lady Gaga sur YouTube, les stratèges conservateurs ont sans doute voulu projeter l’image d’un Canada cultivé, harmonieux et connecté. 

Une image à laquelle nous pouvons tous nous identifier… sous réserve qu’elle soit vraie. S’il y une chose qui est vraie dans cette image, c’est que la culture, pour les conservateurs, n’est l’affaire que d’un seul homme : Harper.

L’État, c’est moi
Dans l’éditorial du 1er mars, je disais que Harper se comportait comme un roi. Selon lui, il n’existe aucune différence entre lui et le gouvernement du Canada. Et il le façonne à son image.

Au début de l’année, le gouvernement Harper, comme il aime être désormais nommé, a coupé jusqu’à 45 millions de dollars dans le financement des arts et de la culture ; le Québec représentant à lui seul 15 millions de ces 45 millions de dollars de la coupure.

Le Fonds canadien du film et de la vidéo indépendants, le Canadian Memory Fund (qui numérise les archives d’agences fédérales pour un accès en ligne OU électronique), et le Northern Distribution Program (distributeur du Aboriginal Peoples Television Network), entre autres, ont perdu leur financement, mais ces coupures ont surtout empêché le financement pour les voyages et les expositions à l’étranger. Certes, les conservateurs ont investi 100 millions de dollars dans des événements culturels en 2009, mais dans des grands festivals déjà financés par des corporations, comme le Festival International du Film de Toronto. De plus, l’argent a été distribué par Industrie Canada plutôt que le Conseil des Arts du Canada.

L’art n’est pas qu’une commodité et ne devrait pas être livré aux lois du marché et ce n’est pas à Harper de choisir quels groupes représenteraient le mieux le Canada à l’international.

L’art est au fondement de l’être humain. Des dessins sur les murs des cavernes aux dessins de la maternelle, l’art permet de circonscrire notre monde, de l’exprimer comme on le conçoit et de le partager aux autres.

L’art est création et dialogue. Dialogue à travers le temps, avec nos contemporains, avec nos ancêtres en puisant dans leur art, et avec le futur. L’art permet aussi d’étendre notre conception du monde, d’aller à sa rencontre.

L’art permet d’évoquer nos sentiments, d’évacuer nos douleurs et nos colères, de rejoindre les autres dans une expérience partagée. L’art tisse des liens, crée des communautés.

Comme en témoigne L’envol, la protestation pacifique et créative des étudiants de l’UQAM (page 7).

La politique des armées
L’image d’un pays, c’est bien plus que des paroles. « Imagine no possessions, no need for greed or hunger », la paix n’est certainement pas l’intérêt premier du gouvernement conservateur ; personne n’est dupe.

Le Canada a manqué sa chance en octobre dernier de gagner une place d’une durée de deux ans au Conseil de Sécurité des Nations Unies, un des corps les plus importants en relations internationales. Le Canada, très actif sur le plan international –nos contributions en Afghanistan, notre leadership en Haïti avant et après le tremblement de terre, notre financement dans l’aide internationale, les sommets du G8 et du G20 et les Jeux Olympiques d’hiver de Vancouver– a perdu face au Portugal.

Nous devons nous rendre à l’évidence que notre pays n’est plus aussi bien perçu qu’auparavant sur la scène internationale. Stephen Harper n’était pas suffisamment engagé dans les affaires internationales et au sein de l’ONU, a préféré l’ouverture d’une nouvelle succursale de Tim Horton’s à Oakville qu’une assemblée générale des Nations Unies. Notre ancienne bonne réputation est désuète, l’ancien ambassadeur canadien aux Nations Unies, Robert Fowler a affirmé : « The world doesn’t need more of the Canada it has been getting ».

Dans le cadre de ce dernier numéro joint à un cahier dédié à la création, je tenais donc à vous rappeler que l’art a une liberté à protéger et qu’elle ne devrait en aucun cas être brimée. Sur ce, ne manquez pas d’aller voter le 2 mai.


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