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De la démocratie à McGill

L’Association des étudiants de la Faculté des Arts (AÉFA) tenait mardi soir une assemblée générale.

Parmi les questions débattues se trouvait une motion de grève. Les étudiants de la faculté étaient appelés à se prononcer en faveur ou contre une grève d’un jour pour protester contre la hausse des frais de scolarité de 1625 dollars sur cinq ans.

Il faut saluer le climat démocratique dans lequel a été voté ce débrayage. L’assemblée était clairement noyautée par la frange radicale de la communauté étudiante de McGill qui rêve de mettre un portrait de Karl Marx dans la cafétéria du Shatner Building. Cette frange, réputée pour être friande de démocratie et de pouvoir au peuple, semblait pressée de faire avancer son agenda. Après avoir écourté prématurément la période de question sur la motion de grève, l’assemblée a voté pour qu’il n’y ait aucun débat sur la motion et a appelé au vote. Il va de soi que l’enjeu fait l’unanimité. À quoi bon écouter les moutons noirs qui sont en faveur de la hausse ?

C’est ainsi que les étudiants de la Faculté des Arts de McGill se sont retrouvés en grève : en muselant le débat et en s’assurant que personne ne puisse s’informer en posant des questions. Selon un courriel de l’AÉFA, l’assemblée comptait près de 246 membres lors du plus haut niveau de présence. En 2010, il y avait 7 936 étudiants inscrits à la faculté. L’association peut donc se féliciter d’avoir précipité en grève près de 8000 élèves avec un taux de participation au vote de près de… 3%.

Pour ajouter l’insulte à l’injure, l’AÉFA a écrit dans le même courriel que 203 000 étudiants du Québec participeraient à la grève. Comme si 203 000 étudiants avaient donné leur accord à cette action ! Par 203 000, ils voulaient sûrement dire 12 000, soit le nombre de protestataires qui se sont présentés à la grande manifestation, selon la police. Cela équivaut à une participation deux fois plus grande que ce que l’association a eu, à 6%. Il est intéressant de se pencher sur comment certains ont « participé » à la manifestation. Il est connu que le mouvement étudiant est pacifiste et désire un dialogue respectueux, mais lorsqu’il présume qu’un groupe de personnes est en désaccord avec lui, ces dernières ne méritent pas ce respect. Félicitons les manifestants qui ont envahi le bâtiment James à McGill, siège de l’administration, et lancé des objets aux policiers, forçant la mobilisation de l’escouade anti-émeute. Un peu comme pour leurs études, ce seront les autres qui paieront pour leurs actes.

Dans la foulée du mouvement Occupy Wall Street, il est intéressant de se pencher sur les proportions. Dans le cas des étudiants universitaires, ce n’est pas le 1% contre les 99%, mais les 5% contre les 95%. En 2008, il y avait 262 142 étudiants dans le réseau universitaire et près de six millions de contribuables au Québec. Les travailleurs détenant un diplôme universitaire gagnaient entre 10 000 et 20 000 dollars de plus par année que la moyenne québécoise en 2010. Les étudiants en droit qui deviendront avocats dans une grande firme bénéficieront quant à eux d’un salaire de 82 000 à 89 000 dollars lors de leur première année, soit de 23 000 à 38 000 de plus que la moyenne ! Autrement dit, maintenir les frais de scolarité artificiellement bas ou vouloir la gratuité scolaire, c’est demander à l’écrasante majorité de la population de subventionner les riches de demain.

Chapeau bas la démocratie étudiante ! Non seulement se fiche-t-elle de respecter ceux qu’elle prétend représenter, mais elle demande aux autres de payer pour s’enrichir dans le futur.

Solidarité !


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