Alexandra Sirgant - Le Délit https://www.delitfrancais.com/author/alexandrasirgant/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Fri, 12 Feb 2021 19:52:46 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 Montréal, métropole gentrifiée https://www.delitfrancais.com/2017/09/12/montreal-metropole-gentrifiee/ Tue, 12 Sep 2017 16:12:42 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=29050 La gentrification, une réalité au Mile-End, à Rosemont et à Hochelaga-Maisonneuve.

L’article Montréal, métropole gentrifiée est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
Qu’est-ce que la gentrification? La gentrification, c’est quand tu descends Saint-Laurent et qu’il ne reste plus que des cafés branchés (et proclamés hipster) à cinq dollars le café filtre (lait de soja et taxes non incluses dans le prix, évidemment). La gentrification, c’est quand tu te promènes sur Duluth et que tu entends beaucoup de dialogues en français, mais pas un seul accent québécois. La gentrification, c’est quand ton petit appart «cute» du Mile-End te coûte un bras par mois.

Considéré comme du développement pour certains, ou comme de l’exclusion pour d’autres, le phénomène de la gentrification transforme véritablement la nature des quartiers touchés.

Petit cours d’urbanisme

Rappelons d’abord ce que ce terme signifie. La gentrification est la tendance à l’embourgeoisement d’un quartier populaire. Pour ce faire, elle passe par la transformation de l’habitat, de l’espace public et des commerces. Selon l’encyclopédie électronique Hypergeo, la gentrification implique un changement de la division sociale de l’espace intraurbain. La réhabilitation d’un quartier engendre une augmentation de ses prix, ce qui pousse les classes sociales les moins aisées, ne pouvant plus maintenir le nouveau coût de vie imposé, à se délocaliser dans des quartiers moins chers.

Le terme lui-même a une étymologie à nuance critique. Inventé par le sociologue marxiste Ruth Glass en 1964, «gentrification» est un néologisme anglais. Il vient du mot «gentry» qui désigne de façon péjorative la petite noblesse. La notion sera par la suite théorisée par un grand nombre de géographes anglais et nord-américains dans les années 80. Si dans un premier temps la gentrification désigne un processus de réappropriation par les classes moyennes de centres-villes délaissés, elle inclut aujourd’hui la transformation d’espaces populaires, aussi bien résidentiels qu’industriels.

Bobos ou gentrificateurs ?

Il y a 30 ans, la bataille contre la hausse des prix d’un quartier populaire, c’était la bataille des résidents du Plateau-Mont-Royal.  Quartier très à la mode dans les années 80, il devint rapidement la cible d’une forte ébullition spéculative. Selon un reportage de Radio-Canada, le nombre de logements accaparés par des spéculateurs à l’époque s’élevait à 8000. Afin de dénoncer ces pratiques immobilières, de nombreuses conférences de presse et manifestations avaient été organisées dans le secteur. Ceci n’a cependant pas empêché les prix d’augmenter dans le quartier, avec le coût moyen d’un 4 1/2 qui s’élève à 79 pourcent de plus qu’en 2001.  Aujourd’hui, ce quartier est complètement gentrifié, processus auquel les étudiants de McGill ou d’ailleurs, contribuent inconsciemment.

En effet, selon Johanne Charbonneau, sociologue à l’IRNS, les gentrificateurs ne sont pas forcément des gens qui ont de l’argent, mais des étudiants et des artistes qui rendent le quartier «in». Sans s’en rendre compte, ces derniers sont responsables de l’augmentation des loyers et de l’effritement de la mixité sociale du quartier. L’arrivée de populations au style de vie «tendance» pousse les commerces à se développer en conséquence pour accueillir ce nouveau voisinage. On y voit alors apparaître des cafés pour étudiants, des épiceries bios, des magasins branchés. Les artistes donnent un certain cachet à ces espaces délabrés et rendent ces quartiers populaires «hype». Seulement, ces quartiers, tel que le Mile-End, deviennent rapidement presque victimes de leur succès. Ils perdent leur identité populaire d’autrefois à cause de l’arrivée en masse de ces individus à la recherche «d’authenticité».« Intimidation, chantage, harcèlement, éviction ou même expulsion, tous les moyens sont bons pour pousser les locataires à quitter leurs logements »

« Intimidation, chantage, harcèlement, éviction ou même expulsion, tous les moyens sont bons pour pousser les locataires à quitter leurs logements »

Un phénomène violent dont on parle (trop) peu

Le documentaire «Quartier sous tensions», diffusé le vendredi 11 août sur Radio-Canada, souligne la véritable violence de ce phénomène qui touche le quotidien des habitants de Rosemont-La-Petite-Patrie et d’Hochelaga Maisonneuve.

Patricia Viannay, organisatrice communautaire au Projet Organisation Populaire Information et Regroupement (POPIR), évoque la détresse dont lui font part les citadins au quotidien. «J’ose plus marcher sur Notre-Dame, je suis tanné de voir des gens sur les terrasses qui se payent des choses que moi je ne pourrai jamais me payer», rapportent des victimes.

Intimidation, chantage, harcèlement, éviction ou même expulsion, tous les moyens sont bons pour pousser les locataires à quitter leurs logements afin de pouvoir les louer à trois fois le prix initial. L’organisatrice communautaire parle aussi de l’attitude parfois «colonisatrice» qu’adoptent certains promoteurs immobiliers. Nombreux sont ceux qui considèrent que le développement de leur condo permettra de «corriger» le quartier, des mots rabaissants et durs à entendre pour des gens qui y ont construit leurs vies.

«On ne parle de gentrification que lorsqu’ il y a du vandalisme» déplore la réalisatrice du documentaire, Carole Laganière. Selon elle, il s’agit au contraire d’un drame quotidien qui se produit dans le silence.

Besoin de mesures municipales

Il serait naïf de croire que ce phénomène puisse être réversible. Là n’est d’ailleurs pas la question. L’arrivée de nouveaux arrivants dans un quartier peut être bénéfique et peut permettre le développement à la fois économique et social de ce quartier. Cet article ne cherche en aucun cas à mettre tous les «méchants» investisseurs et propriétaires dans le même bateau. Il existe des nuances et le droit aux logements reste un droit pour tous.

Seulement, afin d’atténuer les répercussions de la gentrification sur la vie des citoyens les plus démunis, le gouvernement devrait leur donner des outils afin de leur permettre de «vivre» (et non «survivre») dans le quartier. Le documentaire «Quartier sous tensions» propose un bon nombre de recommandations pour lutter contre ces répercussions. Tout d’abord, la municipalité pourrait réserver des terrains pour des logements sociaux et pour des coopératives, tout en apportant une plus grande aide financière sous forme de chèques sociaux pour remédier à la hausse du coût de la vie.  De plus, la Régie du logement doit mettre en place des mesures de vérification plus strictes afin de ne plus laisser passer des évictions sous le prétexte d’aménagement de propriété qui ne se font pas. Le documentaire conclut en soulignant que si des mesures pour la mixité ne sont pas mises en place, c’est vers une gentrification totale que la métropole se dirige.

Il est essentiel de développer nos quartiers tout en nous assurant qu’il reste de la place pour tous. L’apport d’une plus grande mixité sociale dans les quartiers de Montréal est important, mais il doit s’accompagner de mesures inclusives pour en protéger les résidents. Celles-ci sont cruciales afin d’éviter que Rosemont-La-Petite-Patrie et Hochelaga-Maisonneuve deviennent des Plateau Mont Royal 2.0.

L’article Montréal, métropole gentrifiée est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
Saint-Apollinaire, emblème d’une société québécoise partagée https://www.delitfrancais.com/2017/08/24/saint-apollinaire-embleme-dune-societe-quebecoise-partagee/ Thu, 24 Aug 2017 11:19:13 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=28928 Le débat identitaire qui divise la petite municipalité témoigne d’une scission idéologique québécoise bien plus profonde.

L’article Saint-Apollinaire, emblème d’une société québécoise partagée est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
Le projet d’implantation d’un cimetière musulman à Saint-Apollinaire, à une trentaine de kilomètres de Québec, aura fait couler beaucoup d’encre cet été.

Dimanche 16 juillet, les habitants de cette municipalité étaient appelés à voter en faveur ou non de l’ouverture d’un cimetière destiné aux personnes de confession musulmane. Après six mois de débats acharnés de la part des partisans de chaque camp, c’est finalement le camp du «non» qui l’a emporté avec un total de 19 votes, soit 3 votes de plus que les défenseurs du projet. Cet événement, qui aurait pu s’apparenter à un simple fait divers, a pris des proportions nationales au cours des dernières semaines.

L’idée du projet

Le feu vert avait été donné par le maire de Saint-Apollinaire, Bernard Ouellet, quelques semaines après l’attentat de janvier qui avait couté la vie à six personnes à la grande mosquée de Québec. D’après des propos recueillis par Radio-Canada, Bernard Ouellet voyait cette initiative comme l’opportunité de se montrer accueillants, et de témoigner de l’ouverture d’esprit québécoise.

Le projet avait pour but l’ouverture d’un cimetière exclusivement réservé aux musulmans sur un terrain de 60 000 pieds carrés dans le parc industriel de Saint-Apollinaire. Il cherchait à répondre au souhait de la communauté musulmane d’enterrer ses morts dans un endroit qui lui serait entièrement consacré. Afin de voir le jour, le complexe funéraire d’Harmonia nécessitait un changement de zonage.

Une opposition mobilisée

Peu après l’annonce de ce projet, une opposition s’est organisée autour de ce changement de réglementation afin de contrer la possibilité de la construction de ce cimetière. Le motif de cette opposition émanait à la fois d’une crainte de perte de valeur de terrain (il faut avouer qu’avoir un cimetière à côté de chez soi n’enchante personne), mais aussi d’une crainte de perte identitaire. Le maire de Saint-Apollinaire a souligné la peur de certains citoyens en raison des préjugés tenaces qui persistent à l’égard des musulmans au Québec. Des préjugés que ce dernier condamne et qu’il estime être le fruit d’une tendance actuelle à considérer «plus ce qui est mauvais que ce qui est bon des musulmans».

La résidente porte-parole de cette opposition, Sunny Létourneau, militait pour un cimetière multiconfessionnel qui appartiendrait non seulement à une religion mais à plusieurs, tel que celui qui fut récemment inauguré à Saint-Augustin-de-Desmaures. D’après le journal Le Devoir, le groupe identitaire La Meute aurait aussi été fortement impliqué dans le débat. Créée en 2015 par des vétérans des Forces armées canadiennes, la Meute se dit vouloir combattre l’implantation de l’islam radical au Québec. Six des militants du Comité d’alternative citoyen, créé pour contrer l’arrivée du cimetière, étaient aussi membres du «clan» local de la Meute.

Selon Le Journal de Québec, le «camp du non» aurait été «insistant» auprès des citoyens de Saint-Apollinaire. Le maire de la municipalité a confirmé que certains habitants lui avaient fait part de longs porte-à-portes entretenus par les membres du comité afin d’inciter les citoyens à voter contre.

Suite à cette forte mobilisation, il fut convenu d’un référendum, auquel seuls les électeurs domiciliés dans la zone concernée par le projet de règlement auraient le droit de voter.

Un référendum local d’importance provinciale

La forte attention médiatique accordée à ce référendum est révélatrice d’un débat de société bien plus profond. Selon l’analyste en communication politique Jean-Charles Del Duchetto, il s’agit là de la confrontation de deux versions du vivre ensemble, avec les partisans d’une société multiculturelle d’une part et les défenseurs d’une société plus républicaine de l’autre.

Dans le cas de Saint-Apollinaire, le modèle multiculturaliste serait soutenu par le Centre culturel islamique de Québec (CCIQ), le maire de Québec et le maire de Saint-Apollinaire, tandis que la proposition faite par l’opposition d’installer un cimetière multiconfessionnel serait plus en phase avec l’effort de maintenir une sphère publique dénuée d’affiliation religieuse. L’analyste souligne également l’absurdité d’imposer à trente-cinq personnes, n’ayant pas forcément d’avis sur l’affaire, un débat de société de cette importance.

La vision sociétale multiculturaliste vise à mettre l’accent sur les droits des individus et à favoriser une société commune au sein de laquelle une multitude de communautés vivent côte à côte et chacune à leur façon. Cette vision plutôt anglo-saxonne diffère du modèle républicain, bien plus français. Celui-ci consacre une grande importance à la distinction entre ce qui fait partie de la sphère publique et ce qui appartient à la sphère privée. Elle impose une forte laïcité dans la sphère publique afin de créer un espace neutre qui puisse fédérer une réelle cohésion nationale.

Selon l’article 27 de la Charte canadienne des droits et libertés, la Constitution doit être interprétée avec l’objectif de promouvoir le multiculturalisme. De plus, la Chartre se consacre à faire respecter, entre autres libertés fondamentales, la liberté de religion, liberté de croyance et liberté d’expression. Le Québec devrait donc se positionner plus dans une lignée anglophone.

Cependant, selon un sondage d’opinion réalisé par CROP/Radio-Canada en 2017, la religion dérange essentiellement au Québec lorsqu’elle est visible sur la place publique. L’opinion sur le port de vêtements liés à la région est très tranchée, avec une majorité de 76% des répondants québécois souhaitant que ce symbole soit interdit pour les personnes en position d’autorité.

Ainsi, on retrouve une population québécoise qui se positionne plutôt sur un axe républicain. L’opposition à la construction du cimetière musulman à Saint Apollinaire prend exemple sur la France, où depuis 1981 les cimetières ne sont plus confessionnels et sont gérés par les villes. Toutes les religions sont donc enterrées dans le même cimetière, mais certaines sections de cimetière peuvent être réservées à une religion particulière.

Un débat récurrent et propre au Québec

La remise en question du modèle multiculturaliste est d’autant plus forte au Québec que dans le reste du Canada. Toujours d’après le sondage CROP/Radio-Canada, on remarque une importante différence de perception du voile, avec 62% des Québécois qui perçoivent le voile comme un signe de soumission, à la différence de 48% dans le reste du Canada. Cette disparité peut être attribuée à la difficulté rencontrée par le Québec de préserver une culture francophone dans un pays majoritairement anglophone, tout en intégrant des nouveaux arrivants à cette culture. Selon le président du CROP, cette différence est aussi liée au rôle «très autoritaire» qu’a joué l’Église catholique au Québec et au mouvement de laïcisation survenu lors de la Révolution tranquille dans les années 1960.

Depuis, il est difficile de trouver un juste milieu entre la promesse de tolérance du multiculturalisme et les limites de la notion de laïcité. Les demandes de dérogation aux lois présentées par des membres des minorités ethniques ou religieuses, au nom de leurs croyances et pratiques, prennent appui sur la politique multiculturelle et la liberté de religion promise par la Charte. L’ambiguïté autour de ces concepts engendre de fortes tensions sociétales et fragilise le projet de cohésion social québécois.

Victoire pour la communauté musulmane

Finalement, les musulmans de Québec auront leur cimetière dans la région. Le maire de Québec, Régis Labeaume, a annoncé le vendredi 4 août que la Ville vendra un terrain au CCIQ. Le nouveau cimetière sera construit au sud de la rue Franck-Carrel, non loin d’un autre cimetière du nom de Belmont. Regis Labeaume s’est empressé d’ajouter qu’ «aucune modification ne sera requise en termes de zonage», afin d’éviter d’attiser les tensions comme celles engendrées par le référendum de Saint-Apollinaire. Cette annonce a été reçue comme un véritable «soulagement» par le Centre culturel, nous apprend Radio-Canada.

 

Malgré cette victoire, une chose reste sûre: tant qu’il demeure une ambivalence autour de la place de la laïcité dans une société multiculturelle, des conflits de cette envergure ne risquent pas de disparaître.

L’article Saint-Apollinaire, emblème d’une société québécoise partagée est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
Portrait d’une jeunesse désenchantée https://www.delitfrancais.com/2016/11/01/portrait-dune-jeunesse-desenchantee/ Tue, 01 Nov 2016 14:12:53 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=26496 Jonas est une histoire d’amour qui retranscrit le déterminisme social du Brésil.

L’article Portrait d’une jeunesse désenchantée est apparu en premier sur Le Délit.

]]>
La 10e  édition du festival du film brésilien de Montréal s’est tenue cette semaine (du 21 au 27 octobre) au Cinéma du Parc. Le Brésil étant souvent dépeint comme un pays muni d’une forte diversité culturelle, le festival avait pour ambition de répondre aux attentes des «amoureux du drame quotidien, de la comédie et de la romance inattendue». Avec le film Jonas   de Lo Politi, cette édition du festival a tenu sa parole!

Jonas   est un drame romantique rythmé par des séquences de suspense propres au thriller. Premier long métrage de la réalisatrice brésilienne, le film est une histoire d’amour impossible entre Jonas, jeune des  favelas  (bidonville, ndlr) et dealer de drogue, et Branca, fille d’une famille riche de Sao Paulo. Amis depuis l’enfance, l’abîme social qui les sépare une fois adultes devient irrécusable. Le film débute au retour de Branca qui vient troubler le quotidien de Jonas, secrètement amoureux d’elle depuis toujours. Alors que les festivités du carnaval de Sao Paulo battent leur plein, Jonas se retrouve malgré lui auteur d’un crime qui le pousse à kidnapper Branca. Cachés à l’intérieur d’un char en forme de baleine, l’élément star du festival, une histoire d’amour invraisemblable débute entre eux. Les personnages sont attachants et nous charment par leur sensibilité.

Nous assistons à un véritable tourbillon d’émotions;  la camera oscille entre gros plans et cadrages plus saccadés, permettant aux spectateurs de partager à la fois les moments d’intimité et d’appréhension des personnages.

Une conception de l’amour revisitée

 Certes, des histoires d’amour impossibles entre personnes de classes sociales différentes, on en connaît un bon nombre. Pouvant s’apparenter à un «Romeo et Juliette» contemporain,  Jonas  se distingue cependant par sa critique de l’illusion du grand amour. Jonas est un personnage solitaire qui se sent étranger de tous. Blasé par le carnaval, il représente une jeunesse découragée par le manque de marge de manœuvre que lui offre son quotidien. Il idéalise alors l’amour comme unique échappatoire, et c’est précisément cette conception erronée qu’il s’en fait qui le poussera à séquestrer sa dulcinée. Très rapidement, nous nous rendons compte que le bourreau devient victime, victime de cet amour qui l’isole davantage.

L’utilisation d’images floues et l’absence de musique lors des scènes de carnaval font écho au sentiment de décalage du jeune homme. Les somptueux décors et couleurs éclatantes du festival sont juxtaposés avec le garage sinistre des chars allégoriques du carnaval, se trouvant au bord d’une autoroute déchue. A l’image de l’illusion amoureuse, l’envers du décor du carnaval nous le montre sous un autre jour, sans magie ni artifice.

Une critique sociale malgré tout

Le film se passe dans le quartier natal de la réalisatrice, Villa Madalena. Ce quartier se différencie des autres quartiers de Sao Paulo par sa forte mixité sociale, ce que Politi retranscrit à merveille dans son film. La réalisatrice insiste cependant sur le fait que le film n’est pas une histoire sociale mais une histoire d’amour, et c’est peut être la critique que nous pouvons lui faire. On aimerait que le film aille plus loin dans la représentation des inégalités des métropoles brésiliennes, ainsi que dans la dénonciation du déterminisme social. La fin ouverte du film freine brutalement l’action et nous laisse sur notre faim.

Le film reste représentatif des inégalités sociales du Brésil actuel ainsi que des problèmes de sécurité du pays. La grandeur des scènes de carnaval et la richesse de la bande son nous plongent au cœur d’un Brésil aussi vibrant que troublant.

L’article Portrait d’une jeunesse désenchantée est apparu en premier sur Le Délit.

]]>