Philippe Chassé - Le Délit https://www.delitfrancais.com/author/philippechasse/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Fri, 12 Feb 2021 19:52:52 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 L’analyse d’un vieux couple https://www.delitfrancais.com/2017/03/21/lanalyse-dun-vieux-couple/ Tue, 21 Mar 2017 12:53:33 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=28226 Il faut réconcilier Montréal avec ses citoyens.

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Les Montréalais entretiennent une relation particulière — imprégnée d’un mélange singulier de passion et de nostalgie — avec leur ville, avec toi. Ils se souviennent, amers, de cette époque où tu étais la capitale culturelle et économique du Canada et rêvent encore de l’Exposition universelle et des Jeux olympiques; lorsque tous les regards du monde étaient rivés sur eux, sur toi. Aujourd’hui, tu leur sembles éteinte et continuellement dans l’ombre des grandes métropoles qui t’entourent. Comme pour ces vieux couples que l’on aperçoit, assis silencieusement au fond des restaurants de quartier, il y a toujours de l’amour entre vous, mais le romantisme et la fébrilité naïve des premiers instants ont disparu. Les défauts se sont, au fil du temps, accaparés de l’esprit des Montréalais et ont altéré ta beauté, ton éclat. Ils peinent à voir au-delà des travaux interminables et des cônes orange qui pullulent en ton centre-ville. Tu leur deviens purement fonctionnelle: qu’un banal décor pour la routine. Métro, boulot, dodo, et ça recommence. C’est triste, car tu as tant à offrir. Tu es si spéciale, si belle.

Il ne faut pas sombrer dans le pessimisme: il n’est pas trop tard pour se débarrasser de cette morosité, de cet aveuglement néfaste qui s’est imposé entre vous au fil du temps. S’ils ouvrent les yeux et prennent, finalement, le temps de t’apprécier, de te vivre, les Montréalais ne pourront que succomber à ton charme; ils redeviendront follement amoureux de toi.

Tu es l’une des rares villes UNESCO du design de ce monde, mais cela, ils l’ignorent. En t’observant un peu, les Montréalais s’apercevront peut-être enfin de l’omniprésence de l’art public que tu leur offres jusqu’aux profondeurs de tes quais du métro; celle qui a le pouvoir de rendre leurs matins moins gris, moins ternes. Ils contempleront peut-être pour la première fois ta verrière de Marcelle Ferron à la station Champ-de-Mars, ou ton œuvre «Pic et Pelle» de Germain Bergeron à la station Monk. Ils lèveront peut-être les yeux vers le ciel pour remarquer la complexité architecturale de ton complexe olympique, ou l’esthétique du Westmount Square, conçu par l’architecte de renommée internationale Mies Van der Rohe. Curieux, ils redécouvriront peut-être ton square Saint-Louis si cher à Michel Tremblay ou tes rues qui n’en finissent pas que chantait Robert Charlebois. Il semble que les Hommes aient ce besoin inévitable de payer pour comprendre que ce qu’ils ont devant leurs yeux vaut la peine d’être vu, d’être admiré: la beauté accessible et gratuite s’oublie facilement et finit par passer inaperçue, c’est absurde, ne trouves-tu pas?

L’habitude a probablement collaboré à corrompre la perception que les Montréalais ont de toi. L’ubiquité de la créativité, de l’originalité et de la vitalité mène nécessairement à une prise pour acquis, à une certaine banalité de la chose. Alors que tu es célébrée et récompensée partout dans le monde pour tes artistes, tes festivals, ta qualité de vie et tes universités, les Montréalais, eux, ont les cônes orange pour sujet de prédilection lorsqu’ils ne parlent pas de la météo. C’est affligeant.

Cinquante ans se sont passés. Vous en avez vécu des hauts et des bas, mais tu n’as pas changé, tu es toujours cette ville qui faisait battre la chamade au cœur des Montréalais. Tu es toujours resplendissante. Et si ce vieux couple, votre vieux couple, cessait enfin d’être silencieux et renouait avec la passion de son jeune temps? 

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Le règne de l’uniformité https://www.delitfrancais.com/2017/03/14/le-regne-de-luniformite/ Tue, 14 Mar 2017 15:02:29 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=28089 Comment les réseaux sociaux mènent à l’homogénéisation de l’esthétisme.

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La modernité est un paradoxe. Alors que l’Homme se libère peu à peu du joug des stéréotypes associés aux genres et embrasse la diversité, il s’asservit sans hésitation à l’homogénéisation culturelle et à l’esthétisme uniforme et aseptisé que promeuvent les grands réseaux sociaux. La ville dans laquelle il se trouve n’a plus d’importance. Qu’il soit à Montréal, New York ou Amsterdam, l’Homme trouvera, sans le moindre doute, ce petit café aux murs de brique, où les lampes industrielles et les grandes ardoises noires côtoient des matériaux bruts et du blanc, beaucoup de blanc. On lui servira un latte torréfié maison et une viennoiserie végétalienne pour la modique somme de douze dollars. Le goût ne sera qu’un facteur secondaire, insignifiant. Après tout, si cela lui aura permis de faire un joli cliché pour son profil Instagram, il sera satisfait.

Longtemps, on a critiqué la prolifération de la restauration rapide et des magasins à grande surface à l’échelle internationale. On criait à l’impérialisme culturel, à l’imposition du style de vie américain. Aujourd’hui, on reste muet. Pourtant, le problème n’est pas de moindre importance, bien au contraire. Ces commerces que l’on considère «authentiques» et qui définissent si une ville est «branchée» ne sont, au fond, que de pâles copies des uns et des autres. Ils sont tous indépendants, mais si semblables qu’ils pourraient former une chaîne. Nos villes, aliénées de leurs personnalités, se ressemblent de plus en plus et l’inconnu, lui, devient rare. Partout où l’on va, on peut retrouver ce même confort, et ce, dans un décor inchangé. Voyager devient progressivement inutile et le monde, lui, perd les couleurs qui le rendent si beau, si unique.

Ils veulent se distancier de ce qu’ils considèrent comme la norme, mais n’en créent qu’une nouvelle

Ce n’est pas que l’environnement de l’Homme qui se conforme aux normes d’esthétisme imposées par les réseaux sociaux; sa perception de ce qui l’entoure est également altérée. Il analyse les lieux, les objets et les aliments en fonction de leur capacité à plaire dans une petite photo de forme carrée et perd, ainsi, toute interaction autre avec ceux-ci. Son appréciation du monde n’est plus indépendante et libre; elle est influencée par le dictat de la majorité. Tous les profils Instagram finissent par se ressembler: yaourt accompagné de fruits et de graines de chia, égoportraits, petites plantes sur des tables de marbre blanc et paysages urbains. C’est à croire que tous aiment les mêmes choses, que tous ont la même vie. C’est fade, c’est triste.

Toutefois, le plus accablant, c’est que l’Homme lui-même n’est pas épargné par le règne de l’uniformité. Certains acceptent sans broncher, mais même ceux qui recherchent désespérément à se démarquer, à être différents, deviennent identiques entre eux. Ils veulent se distancier de ce qu’ils considèrent comme la norme, mais n’en créent qu’une nouvelle. C’est étrange comment tous ceux qui recherchent un style non conformiste finissent par ressembler à un profil Tumblr. Bien qu’il n’aime pas l’admettre, l’Homme peine à s’émanciper de la domination de l’esthétisme promue par les réseaux sociaux, et ce, peu importe le style qu’il souhaite adopter. Tant qu’il le niera, il lui sera impossible de s’affranchir et de préserver la diversité culturelle qu’il chérit tant. Tant qu’il le niera, il ne fera qu’alimenter le paradoxe de la modernité. 

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La menace imaginaire https://www.delitfrancais.com/2017/02/21/la-menace-imaginaire/ Tue, 21 Feb 2017 14:41:40 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=27836 Unis, nous serons toujours plus forts.

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Le débat sur la laïcité de l’État, qui ponctue sporadiquement l’actualité politique québécoise depuis 2007, semble de nouveau en vogue. Délicat, il soulève les passions, voire la discorde. Contrairement à ce que plusieurs ont affirmé au cours des dernières semaines, je ne le considère pas intrinsèquement malsain, intolérant ou raciste. J’estime qu’il est constructif, pour toute société, de se questionner sur les valeurs qu’elle souhaite promouvoir et partager. Il est possible de débattre ouvertement sans alimenter la haine et la stigmatisation. Cela est, par ailleurs, probablement moins dangereux que de laisser certains discours nocifs se propager dans l’ombre, sans «contre-argumentation».

Une charte électoraliste

Toutefois, le débat entourant la Charte des valeurs du Québec, proposée par le gouvernement de Pauline Marois en 2013 n’a, en aucun cas, atteint ses objectifs. Purement stratégique, le projet de loi, qui, entres autres, souhaitait interdire le port de signes religieux ostensibles par les employés de l’État, ne cherchait pas à construire un avenir meilleur, juste ou plus près des valeurs des Québécois.Il ne tentait que de plaire à une partie de l’électorat – une frange se sentant menacée et qui craint pour la pérennité de la culture québécoise – afin d’assurer la réélection du Parti Québécois lors du prochain scrutin. C’est cet objectif crasse, voué à diviser, qui  selon moi, mène à la stigmatisation de certaines minorités culturelles, principalement la communauté musulmane. Les arguments fallacieux, les calomnies et les raccourcis intellectuels ont été permis et ont, sans le moindre doute, eu un effet non négligeable sur les relations entre les divers groupes culturels du Québec. Si nous décidons, aujourd’hui, de rouvrir ce débat, faisons-le bien et apprenons des erreurs commises par le passé.

Je crois, néanmoins, qu’il faille pousser notre raisonnement plus loin avant de poursuivre cette discussion de société. Cette «menace» que certains perçoivent et qui a mené le Parti Québécois à adopter cette stratégie est-elle réelle? Est-ce que les minorités culturelles, voire les musulmans, car, soyons honnêtes, c’est la communauté soulevant le plus de préjugés, mettent réellement la culture et les valeurs québécoises en péril? À toutes ces questions, je réponds catégoriquement: non. Cette «menace» me semble tout simplement imaginaire.

Alliés pour préserver notre unicité

Je ne fais pas l’autruche: je suis conscient que l’accueil de nouveaux citoyens est toujours perfectible et nécessite, pour toute société, des discussions et des choix difficiles. Cependant, alors que les Québécois perdent, petit à petit, leur poids démographique, l’immigration me semble un allié indispensable pour préserver l’unicité du Québec en Amérique du Nord et dans le monde. Ces immigrants, nous les choisissons et, il faut l’avouer, nous sommes plutôt exigeants, voire sévères. Une part importante des néo-Québécois est originaire de l’Afrique du Nord, où la population est majoritairement musulmane. Mais est-ce la seule caractéristique qui définisse ces gens? Certainement pas, et, à vrai dire, c’est un détail auquel je trouve que nous accordons beaucoup trop d’importance. Tant que nous en oublions nos ressemblances et tout ce qui nous unit.

Ils sont des alliés pour préserver notre unicité ainsi que pour assurer l’épanouissement de la francophonie en Amérique du Nord

Nous avons tous, bien entendu, ce désir d’être épanouis et libres, mais nous partageons également une langue commune, qu’elle nous soit maternelle ou seconde. Il existe de nombreuses caractéristiques pouvant unifier les hommes, et la langue n’est certes pas l’unique qui puisse aider à tisser des liens forts. Toutefois, il est impossible de négliger la multitude de repères culturels et la proximité qu’offre la langue française. Les néo-Québécois ont, en effet, cette capacité de consommer et d’apprécier la culture unique du Québec. De plus, ils peuvent, et cela me semble beaucoup plus important, participer activement à la création et au rayonnement de celle-ci. Ils sont des alliés pour préserver notre unicité ainsi que pour assurer l’épanouissement de la francophonie en Amérique du Nord: nous n’avons qu’à leur tendre la main et à nous attaquer réellement aux problèmes qui empêchent leur confort. Si nous ne le faisons pas, nous ne parviendrons pas à créer ces liens si vitaux, et les sentiments de «menaces» et de peur qu’éprouvent certains persisteront éternellement.

Deux façons diamétralement opposées de préserver la culture et les valeurs québécoises s’offrent aujourd’hui à nos politiques. Ils devront les garder en tête s’ils poursuivent le débat sur la laïcité de l’État. Ils peuvent céder, dans un but électoraliste, à la menace imaginaire, en excluant et en divisant, ou peuvent assurer un avenir pérenne à la culture québécoise en débattant de manière constructive, mais surtout, en incluant. Unis, nous serons toujours plus forts. 

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Le grand procès des «élites» https://www.delitfrancais.com/2017/01/24/le-grand-proces-des-elites/ Tue, 24 Jan 2017 15:15:56 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=27303 Des innocents sur le banc des accusés.

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Ce grand procès a débuté le 23 juin avec le référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union européenne. Ensuite, il s’est poursuivi le 8 novembre avec l’élection de Donald Trump à la tête des États-Unis d’Amérique et il tente, aujourd’hui, de s’immiscer au Québec, avec l’ancien distributeur de drogue Bernard Gauthier, aussi connu sous le nom de Rambo, reconnu coupable d’intimidation et ouvertement misogyne. Les plaignants sont des démagogues, s’autoproclamant être la voix du peuple, du «vrai monde»  et des petites gens. Étrangement, ces hommes et ces femmes apparaissent tous à ce moment précis, à l’apogée de la popularité politique du populisme. De l’opportunisme, manifeste et criant? Je vous laisse en juger.

Sur le banc des accusés, les «élites» politiques, jugées totalement déconnectées des citoyens ordinaires. Elles sont imaginées se prélassant sans la moindre considération pour les misères d’autrui du haut de leurs tours d’ivoire. On ne sait pas trop d’où elles viennent, quelles sont les causes qui les motivent ou ce qu’elles font réellement. Tout ce que l’on sait, c’est qu’elles trahissent, vraisemblablement sans arrêt, la société qu’elles servent.

Verdict de non-culpabilité

L’observateur que je suis, n’ayant que sa plume pour changer l’issu de ce procès, ne peut que contester cette image que l’on a des accusés. Il fait deux constats. En premier lieu, que le terme «élite» est utilisé à outrance pour décrire des groupes complètement hétérogènes, voire différents. On l’emploie, au fond, sans distinction et de manière péjorative pour à peu près tout et n’importe quoi. En deuxième lieu, que cette utilisation abusive est, au fil du temps, devenue totalement faussée. Aujourd’hui, du moins selon les dires des tribuns se proclamant les avocats du peuple, l’entièreté de la classe politique forme l’élite et est coupable: les analystes, stratèges, sondeurs, auteurs, candidats, députés, ministres et partis sont, de par leur déconnexion du citoyen moyen, la source de tous les maux qui affligent la société. Au fond, tous ceux qui ont passé, qui passent et  passeront des heures interminables à s’investir corps et âme pour le bien public seront mis dans le même bateau. Ce fut le cas lors des dernières élections américaines  et ce sera le cas avec tous les autres «traitres à la nation.»

Les juges de ce grand procès, c’est nous tous, les électeurs.

L’observateur ne peut que s’insurger. Je ne peux le tolérer. Je ne fais pas l’autruche, certains politiciens ne servent pas la communauté pour de nobles raisons, certains sont corrompus et d’autres opportunistes, déconnectés ou véreux. Toutefois, je refuse catégoriquement de croire que tous ces gens qui m’entourent, ceux qui étudient sans cesse afin de trouver des solutions aux problèmes mondiaux les plus criants, ceux qui passent des heures interminables à faire du bénévolat qui ne leur offrira jamais aucune visibilité ni gloire, ceux qui sont passionnés et qui acceptent de laisser leurs emplois et le précieux temps qu’ils ont avec leurs familles pour se lancer dans ce monde ingrat et dur qu’est la politique, n’ont pas le bien de la société à cœur. Car oui, ce sont tous ces gens qui s’entassent aujourd’hui sur le banc des accusés, pas seulement les vrais coupables.

Les juges de ce grand procès, c’est nous tous, les électeurs. Nous avons le pouvoir de rendre le verdict qui est juste. Tout en restant critiques de ce monde politique, ne cédons pas aux mensonges grotesques des démagogues. La déconnexion perçue provient peut-être de ce devoir qu’ont les politiciens élus de gouverner pour tous, dans un monde plus complexe que celui décrit par les Johnson, Trump et Gauthier. Il n’est pas facile de plaire à une population si diversifiée et parfois, les solutions simples, irréfléchies et irréalisables peuvent être attrayantes. Condamnons les vrais coupables et que justice soit faite! 

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Le moment de tirer sa révérence https://www.delitfrancais.com/2017/01/17/le-moment-de-tirer-sa-reverence/ Tue, 17 Jan 2017 14:50:26 +0000 http://www.delitfrancais.com/?p=27160 Il est temps de délaisser l’institution dépassée qu’est la monarchie.

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Selon diverses sources, inéluctablement influencées de diverses manières, les estimations des coûts reliés à la monarchie canadienne varient considérablement. Alors que quelques inconditionnels de la maison Windsor estiment que les dépenses qu’elle sollicite sont annulées par les revenus qu’elle entraîne, ses critiques les plus intransigeantes lui attribuent un coût avoisinant 1,85$ par citoyen canadien. En toute humilité, il me semble superficiel, voire faible, d’articuler un débat aussi important que celui du statut constitutionnel du Canada autour d’une vulgaire question monétaire.

Nous devrions, avant tout, nous questionner sur la nature et la pertinence du patrimoine culturel en lequel nous investissons avant de contester le nombre de millions de dollars que nous lui attribuons chaque année. La monarchie est-elle, aujourd’hui, à l’aube du 150e anniversaire de la fédération canadienne, une source de fierté pour notre peuple? Est-elle rassembleuse, pertinente ou positive?

N’est-il pas paradoxal, pour un pays se targuant d’être ouvert, moderne et libre, d’avoir, à titre de chef d’État, un monarque nommé uniquement en raison de son hérédité?

En s’attardant sur ces questions, on s’aperçoit que, sans équivoque, le moment de tirer sa révérence est venu pour la monarchie. Cette dernière n’a, en effet, plus sa place au sein de notre société actuelle. Sans négliger l’appui indéniable que la famille royale reçoit, principalement au Canada anglais, on ne peut que douter de sa réelle capacité à générer de la fierté d’un océan à l’autre. Elle ne dérange pas, mais ne mobilise pas non plus. N’est-il pas paradoxal, pour un pays se targuant d’être ouvert, moderne et libre, d’avoir, à titre de chef d’État, un monarque nommé uniquement en raison de son hérédité? Pouvons-nous être fiers que les nouveaux Canadiens, lors du serment de citoyenneté, prêtent allégeance à Élisabeth II, reine du Canada, à ses héritiers et à ses successeurs?

Donner un sens à la symbolique

Ce n’est que symbolique, certes. La reine, le gouverneur général et les multiples lieutenants-gouverneurs n’ont que des pouvoirs de jure ne s’appliquant pas en pratique, et bien qu’un souverain puisse refuser de reconnaître un gouvernement élu, il n’y a pratiquement aucune chance que cela arrive. Néanmoins, la symbolique ne doit, en aucun cas, être prise à la légère, comme cela est trop souvent le cas. La symbolique, c’est un message, une marque de commerce, qui se doit d’avoir un sens, assurément, mais un sens adapté à qui nous sommes et à ce dont nous aspirons. Nous sommes loin, ici, du pays d’«avant-garde» que nous tentons de vendre à l’international depuis 1980.

De toute évidence, la monarchie n’arrive pas à rassembler et à représenter les divers peuples fondateurs du Canada.

De toute évidence, la monarchie n’arrive pas à rassembler et à représenter les divers peuples fondateurs du Canada. Bien que la souveraine actuelle s’exprime mieux en français que plus de la moitié des ministres du gouvernement canadien actuel, la monarchie n’incarne, en aucun cas, l’héritage des Québécois et des Canadiens francophones. L’affront aux cultures autochtones est encore plus odieux.

Est-ce moi qui idéalise en étant persuadé que la succession au trône sera le moment idéal pour créer un poste de chef d’État qui saura représenter à la fois les valeurs, la culture, le passé et le présent de tous les Canadiens et les Canadiennes? Peut-être. Comme à l’habitude, nous voulons éviter de nous questionner sur qui nous sommes et sur ce à quoi nous aspirons comme peuple. Cela ne fait élire aucun gouvernement et ne risque que de vous faire passer pour un rabat-joie insatiable. Le confort et l’indifférence, comme le disait Denys Arcand…

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