Archives des Montréal - Le Délit https://www.delitfrancais.com/category/actualites/montreal/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Thu, 28 Nov 2024 20:55:49 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.1 Solidarité sans logement https://www.delitfrancais.com/2024/11/27/solidarite-sans-logement/ Wed, 27 Nov 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=56685 Un point sur l’itinérance à Montréal avant l’arrivée de l’hiver.

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Le 18 novembre, un avis d’éviction a été envoyé à quelques individus logeant dans un campement de sans-abris de la rue Notre-Dame, dans le quartier d’Hochelaga. Le jeudi suivant, le ministère des Transports devait procéder au démantèlement d’une partie du campement, une décision déplorée par certains, compte tenu du manque de place dans les refuges de la ville, particulièrement en hiver.

À la suite de l’appel de la mairesse, Valérie Plante, la ville de Montréal a mis à jour son plan hivernal pour les personnes itinérantes. Ce plan inclut la création de comités d’aide et l’établissement de centres d’hébergement temporaires, ainsi que la distribution de 500 000$ aux organismes de la ville offrant du soutien et des services aux personnes en situation d’itinérance. Malgré ces mesures, les défis auxquels se heurtent les itinérants de la ville restent importants. Un recensement datant de 2022 révèle que Montréal compte plus de 4 500 sans-abris, mais malgré les infrastructures d’hébergement de la ville, près de 1 000 personnes dorment dans l’espace public chaque nuit. Avec des risques particulièrement élevés durant les mois d’hiver et des ressources insuffisantes, comprendre et réparer les failles du système de bien-être social est essentiel.

Ce sont des gens très seuls qui ont besoin d’accompagnement. Cette solidarité ne remplace pas le sentiment d’un vrai chez- soi.

Communauté et logement

Le Délit a discuté avec Matthieu*, qui est en situation d’itinérance à Montréal depuis près de quatre ans. Après s’être fait licencié et avoir quitté Chicoutimi pour trouver un emploi à Montréal, il s’est retrouvé à la rue. « J’ai pas trouvé [d’emploi, ndlr] à temps. Au début, je dormais chez des gens que je connaissais, mais ça n’a pas duré. Je ne parle plus à ma famille, donc je ne peux pas rentrer, mais je suis mieux dans une grande ville comme Montréal qu’ailleurs. » Plusieurs se rendent vers les centres urbains de la province en espérant trouver un emploi, ou encore pour avoir accès à des services sociaux plus développés.

En parallèle, un processus d’aliénation et d’isolement s’installe progressivement, affirme Emma Cyr, étudiante à la maîtrise en travail social et intervenante dans une clinique pour les personnes ayant des problèmes de dépendance – une population dont la majorité se trouve en situation d’itinérance. Selon elle, « certains se retrouvent dans la rue par concours de circonstances, ils commencent à consommer [de la drogue, ndlr], et sans téléphone, ils perdent la connexion avec leurs proches. Ils finissent par vouloir avoir assez d’argent pour continuer à consommer, ce qui fait souvent en sorte qu’ils se retournent contre leur propre famille, et deviennent très isolés ».

Emma constate la présence d’une communauté solidaire entre les personnes en situation d’itinérance, mais clarifie que « ce sont des gens très seuls qui ont besoin d’accompagnement. Cette solidarité ne remplace pas le sentiment d’un vrai chez-soi. Ils veulent une communauté qui n’est pas juste entre personnes itinérantes, cette communauté là n’est pas suffisante. Elle ne comble pas les besoins fondamentaux ».

Malheureusement, ces besoins restent inaccessibles pour beaucoup. Les temps d’attente pour l’obtention de logements à loyer modique à Montréal varient, mais en fonction des circonstances individuelles, ils peuvent aller jusqu’à plusieurs années. La crise du logement dans les grandes villes a exacerbé cette pénurie de logements accessibles, et Emma explique avoir dû annoncer à plusieurs personnes qu’ils auraient à attendre près de 10 ans pour y accéder : « Quand j’ajoute des gens à la liste pour accéder à ces logements [subventionnés, ndlr] je suis dans l’obligation de leur déclarer le temps d’attente. Ces gens survivent au jour le jour, ils sont découragés d’entendre qu’ils devront attendre aussi longtemps. »

L’hiver à l’approche

L’arrivée de l’hiver est redoutée par beaucoup, et la pression sur les services de logement et d’aides aux personnes sans-abri augmente. Matthieu explique certains des problèmes présentés par les refuges : « Il y a pas mal d’endroits qui ne te permettent pas de rentrer avec tes affaires, mais pour moi, au début, mes affaires c’est tout ce que j’avais. C’était mes vêtements, mes chaussures, les choses que j’avais amenées avec moi. J’avais rien d’autre, je pouvais pas m’en débarrasser, alors je dormais dans la rue. Mais quand l’hiver s’en est arrivé, je n’avais plus vraiment le choix, il faisait trop froid pour rester dehors. » En effet, certains refuges interdisent à ceux qui les fréquentent d’y rentrer avec des biens personnels, généralement pour des questions sanitaires. Cependant, ces critères d’admissibilité empêchent plusieurs personnes d’avoir accès aux logements d’urgence de la ville, d’autant plus que posséder des biens matériaux est un défi en soi. Matthieu raconte s’être fait voler certains de ses biens, et conclut que « le moins de choses t’as, le moins t’es ciblé ».

Le manque de ressources et de financement peut être tenu responsable de l’insuffisance des services, surtout l’hiver. Matthieu raconte lui-même avoir des difficultés d’accès à ces services : « des fois, il y a des refuges qui ont de la place et des fois ils n’en ont pas. Quand j’ai assez de sous, je fais la file pendant longtemps pour m’assurer d’avoir une place, mais j’arrive pas tout le temps. Il n’y a pas la place pour tout le monde, donc il y a des périodes où je dors dehors. »

Il n’y a pas d’argent pour la création de logements à loyer modique, et quand les personnes en situation d’itinérance finissent par avoir un logement, il faut qu’elles continuent d’être accompagnées.

« Quand il commence à faire froid, ça se sent dans les organismes », explique Emma. « Autour du mois de novembre, des centres de répit ouvrent dans des églises, des centres communautaires, et des arénas, mais ce n’est pas tout le temps des endroits pour dormir, » poursuit-elle. Beaucoup de ces refuges sont des logements à court-terme, et n’offrent finalement pas de solution permanente.

Un secteur sous-financé

Plus tôt cet automne, Québec a alloué 4,2 millions de dollars pour lutter contre l’itinérance à Montréal, une somme visant spécifiquement à gérer des profils plus complexes. Malgré cela, plusieurs acteurs dans le secteur communautaire déplorent les subventions insuffisantes de la part du gouvernement. Selon Emma, le financement manque à tous les niveaux : « Il n’y a pas d’argent pour la création de logements à loyer modique, et quand les personnes en situation d’itinérance finissent par avoir un logement, il faut qu’elles continuent d’être accompagnées. Ce n’est pas juste avoir un logement, c’est être capable de le garder. C’est facile d’oublier de payer son loyer, ou de laisser d’autres gens rentrer. »

Cet accompagnement social, explique-t-elle, est sous-financé. Les salaires bas et les conditions de travail difficiles des intervenants et des travailleurs sociaux y sont pour beaucoup. « Il y a tellement de retournement d’employés, c’est difficile de garder des gens dans ce milieu-là. C’est un secteur qui ne reçoit pas beaucoup d’attention dans le domaine politique, » conclut-elle.

*Nom fictif

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Entre hommages et célébrations https://www.delitfrancais.com/2024/10/30/entre-hommages-et-celebrations/ Wed, 30 Oct 2024 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=56308 Retour sur le mois de l’héritage latino-américain à McGill et à Montréal.

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Ce mois d’octobre a marqué la sixième édition du Mois de l’héritage latino-américain à Montréal, et des célébrations de tous genres ont été au rendez-vous. Au cours des dernières semaines, les apports culturels diversifiés de la communauté latino-américaine ont été mis à l’honneur au moyen de festivités et de commémorations à travers la ville. Depuis 2019, la mission de cet évènement est de « favoriser la convergence et le rayonnement des différentes expressions sociales et culturelles » qui découlent de l’immigration latino-américaine. Le comité d’organisation a ainsi proposé au public une multitude de rencontres vibrantes et culturelles, telles que des spectacles de danse, des foires et des expositions, mais aussi des conférences traitant de sujets sociétaux comme l’intégration dans le monde professionnel.

Faciliter l’intégration

Un des contributeurs majeurs du mois de l’héritage n’est autre que la fondation LatinArte qui, depuis la première édition, s’est installée à la Maison de la culture Claude-Léveillée et organise son festival chaque année. Si le mois de l’héritage organisé par la ville de Montréal est relativement nouveau, le festival de la fondation LatinArte, lui, est bien plus ancien. Depuis maintenant 16 ans, celui-ci vise à mettre en lumière les artistes latino-américains et leurs contributions à la culture montréalaise. Pour Angela Sierra, directrice du festival, chaque mois d’octobre représente un pas de plus pour l’intégration de la communauté latino-américaine à Montréal. Elle rappelle que différents organismes tels que la Maison des Amériques, ou le Centre d’aide aux familles latino-américaines (CAFLA) sont disponibles et ont pour but de faciliter l’insertion des nouveaux arrivants sur le sol québécois.

Depuis maintenant six ans, les locaux Claude-Léveillée sont devenus le foyer des artistes latino-américains de tous genres. Le 23 octobre s’est ainsi tenue la rencontre poétique et musicale de la poète Flavia Garcia et du pianiste José Maria Gianelli, Fouiller les décombres, qui retrace l’enfance de la poète sous la dictature de la junte militaire en Argentine. Dans un décor minimaliste et faiblement éclairé, les artistes alternent voix parlée, chantée, danse, piano, contrebasse et flûte. De temps à autres, Flavia Garcia, qui interprète ses propres textes, passe du français à l’espagnol, avec un accent argentin qui réconforte l’audience. Ayant quitté l’Argentine dans sa jeunesse, elle insiste sur l’importance de partager les expériences de son passé : « C’est un peu notre héritage vivant, notre apport à la société dans laquelle on vit. On apporte nos histoires et on les partage avec les gens. » Elle a conscience qu’il est parfois difficile de s’insérer mais souligne aussi les progrès de ces dernières années : « Ce n’est pas facile de s’intégrer ici, surtout quand on ne parle pas la langue. Mais une fois cette barrière franchie, il y a beaucoup de mesures mises en place pour que les gens puissent s’intégrer facilement », explique-t-elle.

Lara Cevasco | Le Délit

Des hommages multiples

À quelques pas de là, sur la rue Saint-Hubert, se tient l’exposition temporaire Titre de voyage, qui illustre la crise migratoire face à laquelle sont confrontés réfugiés et migrants lorsqu’ils arrivent au Canada. Cette œuvre, réalisée par Juan David Padilla Vega, est une installation multimédia itinérante qui se niche dans plusieurs coins de la ville et qui mêle musique, photographie, performance et écriture. Sur l’installation de Saint-Hubert, une série de quatre affiches dépeint le lourd fardeau de ces populations. « 3 038 jours », « 1 600 jours », « 2 045 jours », peut-on lire sur les images : ce sont le nombre de jours depuis lesquels les immigrés sont dans l’attente d’une régularisation. Selon l’artiste, l’œuvre illustre cette attente perpétuelle qui « se matérialise comme une empreinte sur la peau des migrants ».

Toutefois, les hommages ne sont pas seulement culturels. L’Équipe de la Défense du Canada, elle aussi, tient à commémorer la contribution des populations latino-américaines au pays durant ce mois d’octobre. Saviez-vous que des membres de la communauté latino-américaine, venus tout droit de leur pays d’origine, s’étaient portés volontaires pour s’enrôler dans les Forces armées canadiennes lors des Première et Seconde Guerres Mondiales? Ne parlant pour la plupart que l’espagnol, ces derniers avaient su s’intégrer de manière « remarquable » aux forces armées, a tenu à honorer le capitaine Rey Garcia-Salas, coprésident du réseau latino-américain de l’Équipe de la Défense et responsable du comité de planification du Mois du patrimoine latino-américain. Cette année, à l’occasion de la célébration de ce patrimoine et pour rendre hommage aux vétérans, différentes cérémonies de commémoration se sont tenues au Canada, dont une à Québec, ce vendredi 25 octobre.

« Ce n’est pas facile de s’intégrer ici, surtout quand on ne parle pas la langue. Mais une fois cette barrière franchie, il y a beaucoup de choses mises en place pour que les gens puissent s’intégrer facilement »

Flavia Garcia, Poète

Et à McGill?

Le campus de McGill a lui aussi su prendre part aux célébrations. Ces dernières semaines, différents clubs et associations ont proposé aux étudiants un agenda d’activités pour rendre hommage à leurs cultures. Ainsi, l’Association d’Étudiants Espagnols et Latino-Américains (SLASA) a organisé plusieurs évènements sur le thème de l’héritage latino-américain, permettant à la fois la rencontre entre élèves et la mise en réseau avec des professionnels. Le 25 octobre dernier s’est alors tenu un panel réunissant plusieurs consuls de Montréal, notamment du Brésil, du Mexique et de l’Argentine. Cet évènement s’est fait aux côtés de l’Association des professionnels latinos d’Amérique (ALPFA) de Montréal, qui vise à offrir des opportunités d’échanges et de réseautage aux Latinos du Québec. Pour Julia, co-présidente de SLASA, il est important que le monde universitaire prenne conscience de cet héritage : « C’est une célébration qui unifie, et je suis fière que SLASA contribue à construire ce pont au sein de la communauté mcgilloise (tdlr). » De son côté, l’Association d’études caribéennes et latino-américaines et d’études hispaniques (CLASHSA) a elle aussi proposé différentes activités aux étudiants de McGill ; l’une d’elles, un atelier de poésie sur le thème des poètes latino-américains célèbres.

Bien que le mois d’octobre s’achève, certains évènements seront encore ouverts au public au début du mois de novembre, notamment pour célébrer la légendaire fête du Día de Los Muertos, qui se tient généralement les 1er et 2 novembre. Originaire du Mexique, cette tradition se célèbre dans l’ensemble de l’Amérique latine, et met en avant l’amour et le respect des populations envers les membres de leur famille n’étant plus parmi eux. Faisant partie du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO, le Día de los Muertos rassemble des millions de personnes dans un esprit de fête, car à travers défilés, costumes et danses, ils célèbrent à la fois la vie et la mort.

Si vous souhaitez vous rendre aux évènements proposés par la ville de Montréal, toutes les informations sont disponibles sur les sites internet du Mois de l’héritage latino-américain et du festival LatinArte. Concernant le campus de McGill, les actualités culturelles et académiques peuvent être retrouvées sur les comptes Instagram des associations, @slasa.mcgill et @clashsa.mcgill.

Et si vous avez manqué l’occasion de participer au célébrations du Mois de l’héritage latino-américain, ne vous inquiétez pas, il revient l’année prochaine!

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Incendie de batteries au lithium au port de Montréal https://www.delitfrancais.com/2024/10/02/incendie-de-batteries-au-lithium-au-port-de-montreal/ Wed, 02 Oct 2024 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=56098 Gestion des batteries au lithium : quels défis ?

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Le lundi 24 septembre 2024, aux alentours de 14h30, un incendie s’est déclaré au port de Montréal, touchant un conteneur d’environ 15 000 kilos de piles au lithium. Les flammes ont été maîtrisées et éteintes au cours de la journée du mardi. Communiquée par un appel au 911, l’information a mené à la sécurisation du périmètre s’étendant entre la rue Vimont, la rue Hochelaga, l’avenue Haig et le fleuve Saint-Laurent. Les habitants ont reçu la consigne de ne pas quitter leur domicile, de couper les systèmes de ventilation, et de fermer portes et fenêtres pour éviter une exposition à des fumées toxiques. Florence, une résidente du quartier de Hochelaga et étudiante montréalaise de 22 ans, témoigne : « J’ai été notifiée des consignes directement par une alerte sur mon cellulaire. C’était surprenant de voir qu’on n’est jamais à l’abri des accidents, peu importe où on vit. »

Bien qu’un pompier ait été transporté aux urgences pour une blessure au genou, l’incendie n’a compromis la santé physique d’aucune autre personne. Le Service de sécurité incendie de la Ville de Montréal (SIM) a assuré qu’il n’y avait pas de danger immédiat concernant la qualité de l’air, bien que certains riverains aient ressenti des picotements à la gorge ou aux yeux. Cet incident met en lumière les défis multiples posés par le marché des batteries au lithium, qui connaît une demande croissante avec l’essor des technologies dites « propres ». Il soulève des questions sur la gestion de ces batteries, particulièrement dans des lieux de transit comme les ports, où cette demande accrue augmente le risque d’accidents. Une enquête est en cours au port de Montréal pour déterminer les causes précises de cet incendie.

Multiplication des risques

Avec 80% d’utilisation exclusive à la conception de batteries, le lithium-ion est essentiel pour assembler des appareils électroniques (téléphones cellulaires, ordinateurs portables…) mais aussi des véhicules électriques et des systèmes de stockage d’énergie. La production mondiale a de ce fait connu un essor important au cours des dernières années. Au Canada, l’exploitation de ce métal, qui avait été limitée de 2014 à 2020 en raison de difficultés financières, a repris de plus belle en 2021 avec la croissance exponentielle générée par le marché des véhicules électriques. Elon Musk désignait à ce titre les batteries au lithium comme le « nouveau pétrole ». Avec environ 3,2 millions de tonnes de réserve d’oxyde de lithium, le Canada, dont les mines principales se situent au Québec, près de Val‑d’Or, et au Manitoba, dispose d’atouts qui lui permettront de se positionner comme un acteur clé sur le marché florissant de celui qu’on appelle « l’or blanc de l’économie verte ». Ces dernières années, le lithium est en effet devenu un matériau indispensable au déploiement d’alternatives aux voitures thermiques.

L’exploitation du lithium n’est pas exempte de risques. C’est un métal très réactif qui présente des dangers, et ce de manière accrue lorsqu’il est mal entreposé ou transporté. Lors de son utilisation dans une batterie, les ions de lithium se déplacent entre les électrodes, générant un courant électrique. Le danger survient lorsqu’une cellule entre en « emballement thermique », une réaction en chaîne au cours de laquelle la chaleur se développe extrêmement rapidement : une surcharge ou un défaut de fabrication sont autant de raisons qui peuvent engendrer ce phénomène. La moindre surchauffe ou défaillance interne peut ainsi entraîner une fuite thermique et provoquer un incendie, comme celui survenu au port de Montréal. La demande croissante amplifie de facto le risque d’accidents générés par l’utilisation de ce métal.

Incertitudes sur la sécurité des batteries

L’incident au port de Montréal n’est malheureusement pas un événement isolé. A moins de 600 km de là, la ville de New York a recensé 21 décès liés à des incendies de batteries au lithium entre les années 2021 et 2023, et plus d’une centaine d’accidents similaires durant cette seule année. Malgré les risques connus, les entreprises exploitantes subissent une pression du marché qui les incite à ajouter de l’énergie aux batteries, au risque de repousser les limites de sécurité. Les batteries produites pour les vélos électriques contiennent par exemple bien plus d’énergie que celles des téléphones cellulaires, ce qui les rend de fait particulièrement destructrices en cas d’incendie. À cela s’ajoutent des mauvaises conditions de stockage, l’absence de protocoles adaptés ou le vieillissement des batteries qui sont autant de facteurs qui aggravent l’incidence des incendies initiés par des batteries au lithium.

Si la récente reprise de l’exploitation du lithium au canada a renforcé son rôle stratégique dans la transition environnementale du pays, elle s’accompagne aussi d’enjeux de taille pour assurer la sécurité tout au long du cycle de vie des batteries (de la production à l’élimination). Dans ce cadre, l’incendie au port de Montréal ne s’inscrit que dans la continuité de la croissance du marché du lithium, et rappelle aux autorités l’urgence de revoir les normes et protocoles encadrant la manipulation des batteries. En d’autres termes, il s’agit d’investir davantage dans l’adaptation des infrastructures et l’implémentation des réglementations afin de prévenir de futurs accidents.

Lithion Technologies : recyclage innovant au Québec

Face à cette problématique, la province du Québec finance à hauteur de 2 millions de dollars l’entreprise Lithion Technologies. Celle-ci s’est donnée pour mission de créer la circularité des matériaux stratégiques au Québec et dans le monde. À travers sa filiale Recyclage Lithion, l’entreprise québécoise use d’un procédé innovant permettant de recycler les batteries au lithium et d’en récupérer 95 % des composants en produits de haute pureté (lithium, nickel, cobalt, manganèse, graphite). Ils sont ensuite utilisés pour fabriquer de nouvelles batteries aux ions de lithium.

Ouverte à Saint-Bruno en 2023, la première usine commerciale de Recyclage Lithion permet la réalisation de ce plan d’économie circulaire : elle assure le traitement mécanique des batteries, tandis qu’une seconde usine (ouverture prévue pour 2026) effectue le processus chimique de purification des métaux. Elle a également vocation à devenir un centre de formation et d’observation pour les futurs entrepreneurs dans le domaine du recyclage des batteries. L’entreprise prévoit le développement de 25 usines d’ici 2035, et des partenariats avec la Corée du Sud, les États-Unis et l’Europe sont déjà en cours.

L’incendie qui a pris place au port de Montréal lundi dernier nous rappelle les défis présents sur la route vers la transition énergétique. Si les technologies se développent rapidement, la politique doit aussi encadrer ces avancées, afin de s’assurer qu’elles ne nuisent pas à la sécurité et à l’environnement.

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Marathon de Montréal 2024 https://www.delitfrancais.com/2024/09/25/marathon-de-montreal-2024/ Wed, 25 Sep 2024 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=55938 Retour sur un événement riche en succès.

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Ce dimanche 22 septembre, le départ du Marathon de Montréal a été lancé depuis l’espace 67 du Parc Jean-Drapeau, sur l’île Sainte-Hélène. Le plus grand événement de course à pied au Québec, créé en 1979 sous la supervision du journaliste sportif Serge Arsenault, a marqué sa 32e édition avec un parcours symbolique, traversant Montréal de rive en rive. L’occasion est d’autant plus significative puisque le parc Jean Drapeau célèbre ses 150 ans cette année.

Au programme, la traversée de cinq quartiers emblématiques de la ville, qui ne sont autres qu’Ahuntsic-Cartierville, Plateau-Mont-Royal, Rosemont-La Petite-Patrie, Ville-Marie et Villeray-Saint-Michel-Parc- Extension, tout en longeant les principaux parcs. Les coureurs ont notamment eu l’occasion d’apercevoir la basilique Notre-Dame de Montréal ainsi que d’autres monuments symboliques du patrimoine montréalais. Cette année, l’événement a réuni 27 000 coureuses et coureurs, un record d’inscriptions depuis son commencement. Pour établir une comparaison, l’année 2003 ne comptait que 2 400 coureurs. La popularité de l‘événement n’a cessé de croître, attirant des participants provenant de l’extérieur de la province et même du pays!

Malgré son nom, le Marathon de Montréal ne propose pas seulement un marathon annuel. Sur trois jours, du 20 au 22 septembre, les épreuves du 10, 5 et 1 kilomètres, ainsi que le mile et les courses jeunesse se sont déroulés sous l’égide du Marathon Beneva, en se clôturant par les 42,2 kilomètres phares ce 22 septembre. Les marathoniens étaient accompagnés des participants du demi-marathon pendant 14 kilomètres, avant de se séparer au niveau du Boulevard Saint-Joseph.

Une équipe d’encadrement mobilisée

Les membres de l’organisation du marathon étaient présents tout au long du parcours pour s’assurer de la fluidité de l’événement : « On doit préparer plusieurs mois à l’avance, c’est un événement qui demande beaucoup de préparation et de monde, pour encadrer et gérer des flux de spectateurs », explique l’un des organisateurs.

Les organisations travaillent en collaboration avec la ville de Montréal, qui apporte notamment son aide pour la fermeture des routes et la sécurité. La police, la sécurité et les pompiers étaient présents pour assurer le bon déroulement du marathon. La compagnie Beneva constitue également un partenariat majeur en ce qui concerne le financement de l’événement depuis 2020.

Le personnel encadrant était notamment composé de bénévoles, qui étaient responsables de nettoyer les trottoirs jonchés de verres en carton et d’emballages après le passage des coureurs aux zones de ravitaillement. Joaquim et Olivier participaient à cette activité bénévole dans le cadre scolaire : « On est censés réaliser deux activités de bénévolat dans l’année, et on était motivés par le marathon, parce qu’aider les coureurs et les encourager, c’est une expérience intéressante. »

« Pendant les entraînements, on ne court jamais le parcours en entier, donc il y a un mélange d’excitation et de stress de savoir si on sera capable d’aller jusqu’au bout »

Lancement du Marathon : entre excitation et changement

Au départ de la course, et malgré la température fraîche, l’ambiance était déjà électrique. Des milliers de marathoniens se préparaient pour la course à l’aide de musique ou de méditation, et toutes autres méthodes utile pour se mettre dans sa bulle.

Lou et Héloïse étaient toutes les deux présentes, l’une sur la ligne de départ et l’autre prête à encourager derrière les barrières. Les deux amies se sont beaucoup entraînées ensemble l’année précédente pour le marathon 2023, mais rien ne prépare entièrement à la course officielle : « Pendant les entraînements, on ne court jamais le parcours en entier, donc il y a un mélange d’excitation et de stress de savoir si on sera capable d’aller jusqu’au bout », explique Héloïse, qui avait déjà couru le demi-marathon en 2023.

Parmi les coureurs du Marathon, de nouveaux athlètes étaient présents, mais aussi d’anciens participants, qui n’avaient pas eu l’occasion de tester le nouveau circuit. Jusqu’en 2022, en effet, le parcours du Marathon de Montréal passait principalement par le centre-ville, avec un départ souvent situé près du Pont Jacques-Cartier ou dans des zones proches du centre historique. Il longeait des quartiers emblématiques comme le Vieux-Port, avant de traverser d’autres parties de l’île, incluant le parc Jean-Drapeau. Ce tracé valorisait des sites historiques, mais l’édition actuelle a changé pour inclure davantage d’espaces verts et un nouveau parcours entre l’île Sainte-Hélène et le parc Maisonneuve.

Ce changement de parcours relève des avis mitigés au sein de la communauté montréalaise : « Les années précédentes, le parcours était moins étalé dans la ville et c’était peut-être plus festif parce que les supporters étaient tous plus regroupés », maintient Anna, qui encourage ses amis depuis quelques années.

Emportés par la foule

Depuis le Pont Jacques-Cartier au parc La Fontaine, et jusqu’à la ligne d’arrivée, les nombreux spectateurs ont acclamé les coureurs avec vigueur, tout en profitant de l’ambiance festive du marathon. Déjà nombreux au départ, tous ont participé à la grandeur de l’événement en encourageant amis, famille, et inconnus : « C’est sûr qu’au bout d’un moment, [les encouragements, ndlr] aident à trouver la motivation », déclare un groupe de Montréalais, venu encourager des amis à l’aide de clochettes et de magnétophones. Chloé, supportrice de longue date, souligne l’importance du public : « On peut voir sur le visage des sportifs que cela leur fait plaisir quand on les encourage. »

D’autres sources de motivation étaient également populaires le long du chemin de course : musique, bulles, jets d’eau… Certains spectateurs ont personnalisé des bannières avec des messages encourageants et humoristiques. Le dossard nominatif est également un élément-clé de motivation : « Le fait que les spectateurs voient notre nom et nous encouragent personnellement, c’est plus touchant aussi », affirme Justine, qui a couru son premier demi-marathon cette année.

Le public semble constituer un facteur clé de motivation pour les coureurs, ce qui explique en partie l’annulation du marathon de 2021, en raison des conditions sanitaires qui auraient empêché le rassemblement de spectateurs au fil du parcours. Emmanuelle, qui a couru le marathon plusieurs fois depuis six ans, com- prend cette décision : « Je me suis blessée six semaines avant la course, le public était donc vraiment nécessaire pour rester motivée dans les moments compliqués. » Gabriel, participant au marathon, partage le même constat : « À chaque kilomètre, il y avait toujours des groupes avec de nouveaux slogans…Surtout dans les passages difficiles où je pensais que je m’arrêterais, le public m’a vraiment aidé. Je ne pense pas que j’aurais aussi bien performé sans eux. »

Une ligne d’arrivée bien méritée

À l’arrivée située au parc Maisonneuve, l’ambiance générale était festive : « On est fières d’avoir accompli le challenge et d’avoir fini », affirment Stéphanie et YLan. Gabriel partage les mêmes conclusions : « Je suis super fier de ce que j’ai accompli, puisque c’est mon premier marathon, et j’ai réussi à pousser à travers les crampes et le mal de jambes. »

Les objectifs étaient différents, certains ayant pour but de se dépasser tout en priorisant la santé et d’aller au-delà de leurs capacités, tandis que d’autres se sont lancés un défi entre amis. Pour Justine et Joëlle, novices du demi-marathon, l’objectif était de ne pas s’arrêter : « Partir lentement c’est mieux pour garder de l’énergie à la fin ; nous n’étions pas des coureuses avant, et notre seul objectif était de ne pas marcher, ce qu’on a réussi. »

Une chose est sûre, tous étaient déterminés d’atteindre la ligne d’arrivée, et certains sont déjà sûrs de retenter l’expérience en septembre 2025, cette fois avec des objectifs plus ambitieux en tête.

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Les professeurs de la Faculté de droit en grève https://www.delitfrancais.com/2024/09/11/les-professeurs-de-la-faculte-de-droit-en-greve/ Wed, 11 Sep 2024 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=55700 La position de McGill suscite l'indignation du corps enseignant.

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Le 26 août dernier, les professeurs de la faculté de droit de McGill, rassemblés sous la bannière de l’Association McGilloise des Professeurs de Droit (AMPD), ont déclenché une grève importante, et ce pour une durée indéterminée. Seulement une infime proportion des cours de droit proposés par McGill pour ce semestre d’automne a été assurée. Le Délit s’est entretenu avec Kirsten Anker, professeure associée de la faculté de droit et vice-présidente de l’AMPD, pour mieux comprendre les causes, enjeux et conséquences de cette grève.

L’AMPD, créée en 2021 et accréditée en novembre 2022 par le Tribunal administratif du travail québécois, est le premier syndicat de professeurs à McGill. L’AMPD lutte pour différentes causes syndicales, au coeur desquelles figurent les conditions de travail, l’autonomie dans la gouvernance de la faculté, ou encore la juste rémunération. L’AMPD demande plus de transparence dans les décisions administratives et moins de centralisation au sein de l’exécutif, par exemple lors de l’allocation de mérites aux différents membres de la faculté. Depuis sa certification, l’AMPD négocie la signature d’une convention collective avec McGill afin de protéger les professeurs de droit et d’avoir une voix dans la gouvernance de la faculté. En entrevue, professeure Anker confirme que ce sont bien les préoccupations de gouvernance, et non monétaires, qui forment le coeur du combat de l’AMPD.

Obstacles aux négociations

Cependant, selon Anker, l’administration de McGill s’est montrée très réticente à faire avancer les négociations de bonne foi pour la convention collective. La professeure estime que McGill a développé des techniques antisyndicales basées sur l’augmentation du délai des procédures administratives, le report ou l’annulation de réunions, et les négociations de surface, qui s’attardent souvent sur des détails de langage et rallongent le processus. Pour ces raisons, l’AMPD avait déjà déclenché plusieurs grèves. La première, en février 2024, était due à la colère des membres de l’AMPD après que McGill ait à nouveau essayé de repousser les négociations. La deuxième, qui était de durée indéterminée, et qui a finalement duré huit semaines entre avril et juin 2024, était également due au refus de McGill de négocier la convention collective. L’AMPD avait décidé de terminer la grève après que McGill ait accepté d’organiser quatre sessions de négociation fin août et début septembre. En effet, selon Anker, le syndicat a souhaité créer à nouveau un environnement favorable à la discussion et l’écoute entre les deux parties. Cependant, l’administration de McGill a décidé de violer l’accord qui avait été trouvé, en ne se présentant pas dans la salle de réunion face à la l’équipe de négociation de l’AMPD lors de la date fixée en juin. Cela est d’autant plus décevant pour l’AMPD car Anker explique que les deux parties étaient arrivées à un accord sur la majorité des points de la convention collective, mais que McGill avait insisté pour inclure une clause lui permettant de modifier le contenu du document à n’importe quel moment, et ce unilatéralement. Évidemment, l’AMPD était opposé à cette requête, qui allait à l’encontre d’un des principaux objectifs de la convention, soit l’autonomie dans la gouvernance de la faculté.

« En entrevue, Kirsten Anker confirme que ce sont bien les préoccupations de gouvernance, et non monétaires, qui forment le coeur du combat de l’AMPD »

De lourds enjeux

Anker explique que les enjeux aujourd’hui sont énormes pour l’AMPD. En effet, McGill a lancé une procédure légale afin d’annuler la certification syndicale de l’AMPD, et le combat est ainsi devenu une question existentielle pour l’association. Les sessions judiciaires sont prévues pour le mois de décembre. La grève qui a lieu en ce moment, confie Anker, trouve son origine dans le refus de McGill de se consacrer à négocier de bonne foi la convention collective, mais est surtout une réaction à cette procédure légale engagée par McGill.

Anker confie qu’elle a l’impression que McGill s’obstine à dépenser son énergie, son temps et son argent à lutter contre l’AMPD. Selon elle, l’administration pourrait utiliser ses ressources pour faire en sorte que la négociation de la convention collective se passe en respectant les intérêts des deux parties à travers des négociations menées avec honnêteté. La professeure raconte par ailleurs que les actions de McGill ont des conséquences sur la réputation de l’institution, expliquant qu’elle a l’impression que cette bataille légale entre l’AMPD et l’Université fait de cette dernière le « paria » de l’éducation supérieure au Québec et au Canada.

Par ailleurs, si McGill remportait son effort de retrait de la certification de l’AMPD, d’autres facultés seraient directement impactées. En effet, après la création de l’AMPD comme premier syndicat de professeurs à l’université, la Faculté des arts et la Faculté d’éducation ont elles aussi lancé leur projet de syndicalisation, et sont actuellement au coeur du processus de certification. Anker avertit que si McGill parvient à obtenir une victoire en décembre contre l’AMPD, cela impacterait très négativement les efforts menés par les deux facultés pour certifier leurs associations – mettant fin pour une période indéterminée à la vie syndicale professorale sur le campus.

Des pratiques malhonnêtes

Selon Anker, McGill présente des arguments fallacieux pour justifier ses actions. McGill aurait donné comme justification à son combat contre l’AMPD que la multiplication des syndicats à l’Université deviendrait rapidement laborieuse au niveau administratif. Pourtant, rappelle Anker, l’AMPD est l’unique syndicat de professeurs certifié à McGill. Par ailleurs, beaucoup d’autres syndicats non professoraux existent, comme celui des auxiliaires d’enseignement (AEEDEM), et selon Anker, McGill parvient déjà à les gérer sans problème.

Début septembre, le Tribunal administratif du travail a ordonné à McGill d’arrêter d’interférer avec les actions de l’AMPD, après que des courriels aient été envoyés à ses représentants, remettant en question la crédibilité du syndicat, juste avant la réunion cruciale pendant laquelle les membres de l’AMPD devaient voter le début de la grève. Ces courriels de McGill ont été interprétés comme de l’intimidation par l’AMPD. Cité dans un article de CBC/Radio-Canada publié le 2 septembre, Richard Janda, secrétaire et négociateur en chef de l’AMPD, qualifie la déclaration du tribunal comme un « retournement de situation remarquable (tdlr) », et comme la première décision officielle qui montre que « l’Université agit de manière antisyndicale et contre la loi ».

Quelles conséquences pour les élèves ?

Il est important de comprendre que la grève de l’AMPD est totale et d’une durée indéterminée. Les professeurs, ainsi qu’une majorité d’auxiliaires d’enseignement, n’assureront pas leurs cours jusqu’à nouvel ordre. Anker confirme qu’il n’y a aucun moyen pour les élèves de suivre les cours de droit, et explique que l’AMPD estime que c’est la seule façon d’exercer une véritable pression sur McGill. Les professeurs s’engagent également dans des lignes de piquetage autour de la faculté de droit, rendant l’accès au bâtiment ardu. Les élèves sont obligés de suivre des cours dans d’autres matières, qui vérifient ou non les prérequis de leur diplôme. Certains élèves, relate Anker, se sont organisés pour différer le paiement de leurs frais de scolarité jusqu’à ce que les cours reprennent, refusant de payer pour des cours non offerts. La situation trouvera sa fin si McGill accepte les conditions de l’AMPD, souligne Anker, ou si la procédure d’arbitrage engagée par McGill se déroule bel et bien, faisant perdre à l’AMPD son droit de grève.

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Ce que vous avez manqué cet été https://www.delitfrancais.com/2024/08/28/ce-que-vous-avez-manque-cet-ete-2/ Wed, 28 Aug 2024 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=55481 Trois événements qui ont marqué l’été montréalais.

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MISE À JOUR : MÈRES MOHAWKS

Au cours de l’été, des avancées ont été faites dans la dispute légale entre les Mères Mohawks et l’Université McGill concernant les fouilles tenues sur le terrain de l’hôpital Royal Victoria. Tandis que l’Université tente d’entreprendre des travaux de développement sur l’espace anciennement occupé par l’hôpital Royal Victoria, les Mères Mohawks s’opposent aux fouilles, qu’elles considèrent être hâtives, considérant la possible présence de tombes non marquées sur le terrain. 

En novembre 2023, un rendement de la Cour supérieure du Québec avait contraint l’Université à poursuivre ses excavations sous la supervision d’un panel indépendant d’archéologues. Ce 16 août 2024, cette décision a été infirmée par la cour d’appel du Québec. L’aboutissement de cette dispute permettra donc à McGill de poursuivre ses fouilles sans la présence du panel indépendant d’experts en archéologie qui avait été mandaté par la cour.

PLACE AUX INONDATIONS

Ysandre Beaulieu | Le Délit

Alors que l’été 2023 a été marqué par des feux de forêt sans précédent, ce sont les ouragans et la pluie qui auront rythmé le quotidien des montréalais cet été. En effet, les vestiges de l’ouragan Béryl ont frappé Montréal le 10 juillet dernier. En 24 heures, 80 mm de pluie ont recouvert la ville par endroits, un chiffre variant d’arrondissement en arrondissement, mais avec des effets tout de même impressionnants : des sous-sols remplis d’eau, des autoroutes fermées, et des mesures d’urgence déclarées.

La ville se remettait tranquillement du déluge, lorsqu’un mois plus tard, le 9 août, la tempête tropicale Debby a déferlé sur Montréal. En plus des inondations causées par les 140 mm de pluie tombés, plus de 550 000 foyers ont été victimes de pannes de courant, certains d’entre eux pendant plusieurs jours.

MONTRÉAL EN FESTIVAL

Trois événements qui ont marqué l’été montréalais.
Ysandre Beaulieu | Le Délit

L’été à Montréal introduit la saison des festivals, qui s’enchaînent les uns à la suite des autres, imprégnant la ville d’une énergie indescriptible. Comme chaque année, les événements culturels gratuits rendent encore plus attrayant l’été à Montréal, avec les Francofolies, les Nuits d’Afrique, ou encore le Festival international de Jazz de Montréal, qui offrent à tous les curieux des expériences inoubliables. Cet été, la grandeur et la beauté des concerts gratuits, notamment celui interprété au pied du Mont-Royal par l’Orchestre Métropolitain et la pianiste Alexandra Stréliski, manifestent une belle volonté de faire découvrir et briller le talent d’ici.

Pour plusieurs Montréalais, ce sont les festivals et leur ambiance électrique qui auront marqué leur été. Les foules était au rendez-vous pour assister aux performances des artistes à Osheaga, observer les couchers de soleil au Parc Jean-Drapeau lors du Piknic Électronik, ou découvrir les représentations électriques des Nuits d’Afrique. C’était à en oublier la canicule, devenue synonyme de vacances!

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74 jours d’occupation https://www.delitfrancais.com/2024/08/28/74-jours-doccupation/ Wed, 28 Aug 2024 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=55489 Une chronologie du campement pro-palestinien à McGill.

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Le Délit revient sur les faits concernant le campement pro-palestinien, en vous offrant une chronologie non-exhaustive des événements qui se sont déroulés au cours de ces 74 jours d’occupation. 

27 avril - Début du campement sur la partie inférieure du campus de l’Université, notamment mené par les organismes Solidarity for Palestinian and Human Rights (SPHR), et SPHR Concordia. Les groupes, qui s’identifient comme mouvements d’étudiants issus des universités McGill et Concordia, déclarent le campe ment « zone libérée », en y installant des tentes et des grillages en guise de délimitation. Leurs revendications sont claires : le désinvestissement des fonds des deux universités envers les compagnies « financant le génocide et l’apartheid en Israël (tdlr) » et la fin de toute relation académique entre les universités et Israël. 

27 avril - Le campement fait appel au soutien de la communauté, demandant à ceux et celles qui peuvent se le permettre d’apporter de l’eau, de la nourriture, et du matériel. Les membres du campement incitent également les étudiants à se joindre à eux pour accroître leur présence sur le campus. Ces appels font augmenter le campement d’une vingtaine de tentes, à plus d’une cinquantaine d’entre elles. Dès les premiers jours du campement, la présence policière augmente sur le campus. 

29 avril - Dans un courriel adressé à la communauté mcgilloise, Deep Saini, président et vice-chancelier de l’Université McGill, déplore le comportement des manifestants, citant des commentaires antisémites et affirmant que leur présence sur les terrains privés de l’Université enfreint non seulement a ses politiques, mais également la loi. Saini affirme également avoir essayé d’établir une entente en dialoguant avec les représentants étudiants du mouvement, sans succès. 

1er mai - L’administration de McGill propose aux manifestants de les convier à un forum pour discuter de leurs demandes, à la condition qu’ils abandonnent le campement de manière permanente. 

2 mai - Une manifestation pro-Israël s’organise devant le portail Roddick, pour contester le campement. Les manifestants remplissent la rue Sherbrooke, tandis que des contre-manifestants pro-palestiniens s’organisent de l’autre côté du grillage. Une présence policière importante sur le campus et dans les rues environnantes se fait remarquer dès le début des rassemblements, et les tensions augmentent au cours de la journée. Les manifestants sont séparés non seulement par le grillage et par les policiers, mais aussi par des bénévoles du campement, identifiés par des dossards jaunes. Les manifestations restent pacifiques, et les foules se dispersent en soirée. 

Ysandre Beaulieu | Le Délit

10 mai - McGill annonce son intention de déposer une injonction demandant le droit de démanteler le campement, et d’obtenir, si nécessaire, l’assistance du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) pour ce faire. L’Université cite plusieurs raisons, dont des inquiétudes vis-à-vis la santé et la sécurité publique, des tensions grandissantes, et le dérangement causé par la présence des manifestants. 

15 mai - La demande d’injonction provisoire se rend jusqu’à la Cour supérieure du Québec, qui décide de rejeter la demande de McGill, citant l’absence d’incident violent depuis le début de sa mise en place. Le juge, Marc St-Pierre, justifie cette décision en expliquant qu’une injonction ne peut être préventive et que les risques à la santé et à la sécurité publique cités par l’Université ne se sont pas matérialisés. 

26 mai - Au cours d’un événement pro-palestinien sur le campus lors duquel s’est mobilisé le SPVM, un portrait d’un politicien israélien « vêtu d’un vêtement à rayures évoquant un uniforme de prisonnier » est suspendu, comme l’explique un courriel du recteur à la communauté mcgilloise. L’incident est rapporté au SPVM, qui n’intervient pas

29 mai - Dans un courriel, Deep Saini dénonce des méthodes qu’il qualifie de « coercitives et discriminatoires ». À l’appui, il mentionne l’incident du 26 mai et associe le vêtement à rayures à l’uniforme revêtu par des millions de juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. D’autres incidents sont décrits. Parmi eux, le harcèlement de certains membres du personnel de l’administration et des graffitis « blasphématoires » sur des murs des bureaux de l’Université. 

6 juin - Occupation du bâtiment James McGill. Vers 16h00, un groupe pénètre dans le bâtiment, s’y barricade, et dessine des graffitis sur les murs. Près d’une heure plus tard, c’est l’arrivée d’une présence policière, qui, vers 19h30, disperse la foule qui bloque l’accès à l’entrée du bâtiment. 

10 juin - L’Université McGill émet une nouvelle proposition, qui est refusée par les manifestants. Celle-ci inclut quatre éléments : un examen de la possibilité de désinvestir dans des entreprises de fabrication d’armes ; une divulgation de tous les placements de l’Université (incluant ceux inférieurs à 500 000 dollars) ; une prise en compte accrue des institutions et des intellectuels palestiniens et une offre de soutien, notamment financier, aux universitaires déplacés sous les auspices du réseau Scholars at Risk, ainsi qu’une amnistie pour les personnes qui occupent le campement. 

14 juin - Selon une porte parole du campement, l’Université refuse de répondre à l’appel des manifestants et de poursuivre les négociations. 

17 juin - Dans un courriel destiné aux étudiants de McGill, Deep Saini dénonce le programme d’été révolutionnaire de la SPHR, citant l’imagerie violente utilisée sur ses tracts (un individu portant un fusil automatique). Il demande également à l’Association étudiante de l’Université McGill (AÉUM) de dénoncer le programme, et de rompre tout lien avec la SPHR qui est inclus dans sa liste de clubs affiliés, le cas échéant étant interprété par l’Université comme support de la SPHR.

2 juillet - Sur leurs réseaux sociaux, le mouvement SPHR dénonce le manque de volonté de l’Université de répondre à leurs demandes, et déplore sa décision de cesser toute négociation.  

5 juillet - Des manifestants commettent des actes de vandalisme, « fracassant des vitres et les tapissant de graffitis où l’on pouvait lire slogans et obscénités », menant à l’arrestation d’un individu. 

9 juillet - SPHR émet un communiqué de presse dénonçant la réaction de McGill face à la mobilisation étudiante, notamment leurs négociations menées « de mauvaise foi » avec les représentants du campement et leurs tentatives de diviser l’intifada.  

Ysandre Beaulieu

10 juillet - Le campement pro-palestinien reste en place jusqu’au 10 juillet, lorsqu’une firme de sécurité privée, engagée par l’Université, initie son démantèlement. Dans un courriel diffusé à l’ensemble de la communauté mcgilloise, le recteur de l’Université, Deep Saini, annonce le démantèlement du campement situé sur la partie inférieure du campus, citant « de nombreux graffitis haineux et menaçants » et « des risques importants en matière d’hygiène, de sécurité et d’incendie ».

À la suite au démantèlement du campement, le campus est partiellement fermé avec une réouverture graduelle au cours de laquelle les points d’entrée sont limités aux individus détenant une permission. À partir du 5 août, le campus est accessible à tout le monde entre 6h et 22h, ainsi qu’aux membres du personnelet aux étudiants détenant une carte d’identité de l’Université en dehors de ces heures.

Malgré le démantèlement du campement, les tensions persistent sur le campus. Il est difficile de prédire les formes qu’elles prendront une fois les cours commencés. Cependant il est clair que des efforts importants de la part de la communauté mcgilloise seront nécessaires pour rétablir la stabilité.

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« Arrêtez l’esclavage ouïghour! » https://www.delitfrancais.com/2024/02/14/arretez-lesclavage-ouighour/ Wed, 14 Feb 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54662 Manifestation contre le génocide des Ouïghours devant le consulat chinois.

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Le dimanche 4 février, environ 50 personnes se sont retrouvées à 13 heures devant le Consulat général de la république populaire de Chine pour commémorer les victimes du massacre de Ghulja (ville aujourd’hui nommée Yining Xian par les autorités chinoises), survenu le 5 février 1997 et ayant fait 167 morts et plusieurs centaines de blessés. Plus généralement, la manifestation avait pour but de protester contre le génocide du peuple ouïghour, qui prend place depuis 2015 dans la province du Turkestan oriental [officiellement appelé Xinjiang, ndlr], fief historique de la culture ouïghoure en Chine.

Afin d’approfondir notre analyse de la situation, Le Délit s’est entretenu avec Michel Tessier, sinologue retraité ayant enseigné à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) et dans le secteur public.

Le génocide

Dans un pays d’un milliard et quatre cent millions d’habitants, la population ouïghoure est une minorité musulmane de près de 25 millions d’individus, dont 12 millions vivant dans le Turkestan oriental. Comme le montre le massacre de Ghulja, durant lequel plusieurs Ouïghours ont été tués par les forces chinoises après avoir manifesté pour l’indépendance du Turkestan oriental, la répression du peuple ouïghour date de plusieurs décennies. Néanmoins, cette dernière s’est accélérée et aggravée depuis 2015. Au début des années 2010, le gouvernement chinois a annoncé se lancer dans une campagne de « lutte contre le terrorisme (tdlr) » dans cette région. Selon plusieurs organismes défenseurs des droits humains dont Human Rights Watch, cette « lutte contre le terrorisme » s’est surtout exprimée à travers une oppression croissante du peuple ouïghour, qui représente 45% de la population de la région. De nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) comme Human Rights Watch ou Amnistie internationale accusent la Chine de crimes contre l’humanité à l’encontre du peuple ouïghour. Elles dénoncent notamment les arrestations et détentions arbitraires, ainsi que les tortures et la surveillance de masse perpétrées par la Chine contre cette minorité depuis 2010. Aujourd’hui, plus d’un million de Ouïghours sont emprisonnés dans plusieurs camps dans la région du Turkestan oriental.

La manifestation

Devant le consulat, les manifestants – majoritairement des membres de la communauté ouïghoure – ont affronté le froid. Accompagnés de leurs bannières, pancartes et dépliants, ils ont scandé des slogans et dénoncé les actions du régime chinois pendant plus d’une heure. Plusieurs personnes ont pu prendre la parole pour exprimer l’importance de se mobiliser afin de sensibiliser les gens aux actions perpétrées par le gouvernement chinois. Pendant cette période de discussion, Le Délit s’est entretenu avec Kayum Masimov, chef de projet au sein du Projet de défense des droits des Ouïghours. Au cours de notre discussion, Kayum nous a interpellé et nous a posé une question simple mais pertinente relative au message général de la manifestation : « Chaque fois que vous entrez au centre d’achat Costco ou Walmart ; Vous achetez du café ou des chandails qui proviennent de Chine. Ce n’est pas cher n’est ce pas? Il est temps de se poser la question : Pourquoi ça ne coûte pas cher? »

« Chaque fois que vous entrez au centre d’achat Costco ou Walmart ; vous achetez du café ou des chandails qui proviennent de Chine, ce n’est pas cher, n’est ce pas? Il est temps de se poser la question : Pourquoi ça ne coûte pas cher? »

Le groupe de manifestants a par la suite entrepris une marche sur la rue St-Catherine, vers l’arrêt de métro Guy-Concordia, en scandant divers slogans tels que : « Liberté pour le Turkestan oriental! » ; « Fermez les camps de concentration! » ; « Arrêtez l’esclavage ouïghour! » ; « Boycottez la Chine » ; ou encore, « Canada, agis maintenant! Défends les Ouïghours! ». Pour conclure l’événement, le groupe est revenu devant le consulat général. À nouveau, certains ont pu prendre la parole pour s’exprimer.

Une action limitée

Aujourd’hui, l’action internationale pour mettre un terme au génocide des Ouïghours est souvent perçue comme trop limitée. Michel Tessier suppose que ce manque de prise de position radicale s’explique par la place prépondérante de la Chine dans l’économie mondiale. En 2023 par exemple, la Chine comptait pour 30% de la production manufacturière mondiale. Malgré la volonté de boycotter la Chine et les biens qui y sont fabriqués – comme les slogans l’ont d’ailleurs mentionné pendant la manifestation –, agir concrètement contre la Chine et l’exploitation des Ouïghours n’est pas une mince affaire. « La Chine est une des premières économies mondiales, très importante, et aujourd’hui indispensable. Ne plus acheter de produits chinois semble donc difficilement réalisable. »

Le sinologue ajoute néanmoins que si la Chine est aujourd’hui devenue intouchable, c’est en partie parce que les puissances mondiales comme les États-Unis, le Royaume-Uni et d’autres puissances européennes ont délocalisé leurs chaines de production dans les années 1990–2000. Selon lui, en délocalisant leurs chaînes de production, « les pays ont limité leurs possibilités d’action [à l’égard de la Chine, ndlr] ».

À l’échelle canadienne, la mobilisation contre le génocide est aussi limitée selon Kayum Masimov. Ce dernier note néanmoins de réelles mesures prises par le Canada depuis 2015 : « En 2022, le Parlement canadien a fait du Canada le premier pays au monde à reconnaître officiellement le génocide des Ouïghours en Chine, et l’année dernière, on [le Canada, ndlr] a adopté la résolution de rapatrier les réfugiés ouïghours, ce qui est vraiment très positif. » En effet, en janvier 2023, la Chambre des communes du Canada a pris la décision de recevoir 10 000 réfugiés ouïghours par année à compter de 2024. Michel Tessier souligne aussi que « quand on rencontre une motion comme celle votée au Parlement, c’est qu’une bureaucratie se met en place pour les accueillir [les réfugiés, ndlr], pour leur donner un logement, une éducation pour les enfants, un accès à la santé, etc. C’est une vraie avancée ».

Le sinologue nuance néanmoins son propos : « En dehors de ça, qu’est ce que vous voulez que le Canada fasse? Le Canada est un pays de seconde catégorie. Ce n’est pas un pays important sur la scène internationale. Il ne faut pas se faire d’illusions. Une fois qu’on a dénoncé la situation au Turkestan oriental et le génocide qui s’y passe, il n’y a plus rien. Et ce, parce qu’on ne peut pas faire grand chose. »

Une solution : le boycott ciblé

Pour Michel Tessier, « il faut que nous revoyons nos tactiques parce que c’est bien beau de vouloir boycotter les produits chinois, mais il faut être réaliste. Dressons la liste des produits faits par les esclaves ouïghours ; ce sont ceux-là qu’il faut boycotter ». En effet, s’il est difficile de boycotter l’ensemble des produits qui proviennent de Chine, Michel Teissier et Kayum Masimov appuient tous deux la possibilité de boycotter les produits directement liés au génocide, qui sont le fruit de l’exploitation de la minorité ouïghoure.

Cibler l’ensemble de ces produits et ne plus les acheter reviendrait à faire halte au processus génocidaire de production. Une telle mesure a d’ailleurs déjà été mise en place par l’Union Européenne et les États-Unis. Kayum Masimov souligne que « depuis l’introduction de la Force Labor Prevention Act il y 25 mois, elles [les autorités américaines, ndlr] ont interdit [la vente de produits issus de l’esclavage ouïghour, ndlr] et saisi des marchandises totalisant une valeur d’environ cinq milliards de dollars ».

Et à McGill?

Le 19 janvier 2023, L’AÉUM a adopté une motion qui demande à l’Université McGill de désinvestir des entreprises ayant des activités ou des liens directs et indirects avec l’exploitation du peuple ouïghour en Chine. Depuis, l’Université n’a pas entrepris d’action concrète pour répondre à la requête des étudiants.

Afin de sensibiliser à la répression que subit le peuple ouïghour, Sabiha Tursun, étudiante ouïghoure de deuxième année à McGill, a fondé le tout nouveau club étudiant Mcgill Students for Uyghur Solidarity (Étudiants de McGill pour la solidarité avec les Ouïghours, tdlr). Dans une entrevue pour Le Délit, Sabiha explique plus précisément son initiative : « L’un de nos objectifs est de faire pression sur McGill pour que l’Université prenne des mesures de désinvestissement, car certaines des entreprises auxquelles notre fond de dotation est destiné sont complices de l’utilisation de produits issus du travail forcé, de la fourniture et du soutien d’infrastructures de camps d’internement et de camps de travail forcé (tdlr). »

Si l’Université est pour le moment restée muette, la création de cette nouvelle association montre que les étudiants ne sont pas insensibles au sort de la population ouïghoure. Sabiha conclut : « Il est de la responsabilité de McGill d’offrir un environnement éthique à ses étudiants et c’est le moindre qu’elle puisse faire pour le bien de l’humanité. »

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Immersion au sein des grèves étudiantes https://www.delitfrancais.com/2024/02/07/immersion-au-sein-des-greves-etudiantes/ Wed, 07 Feb 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54476 Les étudiants de Concordia et de McGill se mobilisent contre la hausse des frais de scolarité.

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Le 13 octobre dernier, le gouvernement du Québec a annoncé une augmentation de 33% des frais de scolarité pour les étudiants non québécois dès la rentrée d’automne 2024. Dans le but de protéger la langue française à Montréal, le gouvernement compte prélever par le biais de cette mesure, un montant forfaitaire pour chaque étudiant non québécois, et réinvestir ces fonds dans le réseau des universités francophones, telles que l’UQAM ou l’Université de Montréal. Rapidement après cette annonce, des manifestations étudiantes se sont organisées, et les recteurs des trois universités anglophones du Québec, c’est-à-dire l’Université Bishop’s, Concordia et McGill, ont exprimé conjointement leur mécontentement.

En décembre, le gouvernement du Québec est revenu sur sa décision initiale, et a proposé une augmentation plus modérée des frais d’études pour les étudiants canadiens non québécois. Alors qu’ils devaient initialement augmenter de 9 000$ à 17 000$, l’augmentation requise est désormais de 3 000$, soit 12 000$ par an. En revanche, les universités anglophones du Québec devront franciser 80% de leurs étudiants de premier cycle. Ces derniers devront suivre des cours de langue française et atteindre un niveau « intermédiaire » avant la fin de leur diplôme : une mesure excessive et irréalisable selon les recteurs des trois universités concernées. Alors que les étudiants avaient déjà mené une manifestation contre l’augmentation des frais de scolarité fin octobre 2023, ces derniers se sont une nouvelle fois mobilisés pour faire pression sur le gouvernement Legault. Du 31 janvier au 2 février, les étudiants de Concordia et de McGill ont fait la grève, empêchant ainsi la tenue de nombreux cours.

À Concordia : 3 jours de grève

Afin d’éclaircir la situation à Concordia, Le Délit s’est entretenu avec Oli Sinclare, étudiant·e en études interdisciplinaires de la sexualité à Concordia. Oli nous explique que ces grèves étaient bien organisées, et légalement encadrées. Avant le début de ces dernières, les étudiants des nombreux départements des facultés de Concordia ont voté démocratiquement pour tenir ces grèves. « Vous avez certains droits en tant que membre de votre association étudiante. Techniquement, parce que vous êtes reconnu comme un syndicat, si vous faites la grève, c’est comme une grève officielle du syndicat. Vous ne pouvez pas être pénalisé. (tdlr) » Au total, ce sont 11 000 étudiants de Concordia qui ont fait la grève au cours de la semaine.

Bloquer les classes

Au 7ème étage de l’édifice Henry F. Hall de Concordia – l’espace dédié aux actions et associations étudiantes de la faculté des arts et des sciences de Concordia – des blocages de salles de classes ont été organisés pendant ces trois jours. Dans les couloirs, à voix haute, à peine pouvait-on entendre : « Qui veut bloquer une classe de science politique? », ou « Qui veut bloquer l’entrée d’une classe qui commence dans 20 minutes? », que de nombreuses mains se levaient, motivées et assoiffées d’engagement. Par groupes de trois, les étudiants grévistes, appartenant à une grande variété d’associations et de syndicats, se dirigaient alors vers leurs classes attribuées.

Nous avons suivit le groupe d’Oli, afin de mieux comprendre le fonctionnement des blocages. Arrivé devant la salle de classe, le petit groupe s’organise pour réaliser ce qu’ils appellent du « picketing », du « piquetage » en français. Le groupe, équipé de dépliants et de bannières, se positionne devant l’entrée de l’auditorium pour bloquer le passage, et dissuader les étudiants et le ou la professeur d’y entrer. Le but : empêcher la tenue du cours. Oli nous explique : « Nous n’empêcherons pas physiquement les gens d’aller en classe. Si un étudiant est vraiment déterminé à entrer, nous ne le retiendrons pas. Mais nous lui expliquerons qu’il s’agit d’une mesure qui a été votée démocratiquement, et qu’aller en classe revient à ne pas respecter cette décision. »

Un support impressionnant…

La mobilisation étudiante à Concordia a eu un effet très important : pour beaucoup, les cours furent annulés du mercredi au vendredi. Oli nous explique qu’il y a eu un engouement important en faveur de la grève, que ce soit du côté des étudiants, autant que celui des professeurs.

« Les gens veulent vraiment en parler. Beaucoup de gens s’accordent pour dire que c’est [la hausse des frais de scolarité, ndlr] une décision terrible qui va affecter tout le monde. Je pense que les gens sont ravis de voir qu’il y a une mobilisation, que les gens font quelque chose. » Oli ajoute que lorsque les étudiants sont bloqués en dehors de leur salle de classe, « neuf fois sur dix, les gens se disent : “cool, je vais rentrer chez moi” , mais parfois ils restent et discutent avec nous ». Iel nous a aussi fait part des réactions des professeurs, et précise que, même si ceux-ci ont la responsabilité d’au moins de tenter de tenir classe, ils jouent le jeu la majorité du temps, et acceptent d’annuler leur cours lorsque les étudiants grévistes bloquent le passage.

… et contesté

Cela n’a pas été facile de bloquer toutes les classes, certains étudiants et professeurs ont fait part de leur mécontentement à plusieurs reprises. Certains professeurs ont tenu à donner leur cours coûte que coûte, en les remplaçant par davantage d’heures de bureau, ou encore en réalisant leurs cours à distance, via la plateforme Zoom. Si les étudiants grévistes n’ont pas pu bloquer les heures de bureau, ils ont tout de même trouvé le moyen d’empêcher les cours à distance par le biais de « Zoom-bombing », qui consiste à s’introduire dans une conférence Zoom et de gêner la tenue du cours en faisant beaucoup de bruit, en écrivant des messages, ou encore en incitant les étudiants à quitter la conférence.

Si les grèves étudiantes ont eu une ampleur moins importante à McGill, plusieurs cours ont tout de même été bloqués par des étudiants grévistes. Maxime*, étudiant en géographie à McGill, qui a souhaité garder l’anonymat, nous a fait part de ses observations au cours de la semaine : « Ils [les étudiants grévistes, ndlr] ont bloqué l’entrée et ont essayé de nous limiter l’accès à la salle. Ils ne m’ont pas empêché d’y entrer, mais j’ai dû forcer le passage, et me faufiler entre eux. […] Je soutiens la cause, mais je ne peux pas manquer mes cours pour autant. Je pense que c’est un des seuls moyens qu’ils [les grévistes, ndlr] ont pour avoir un impact significatif et je pense que ça a fonctionné, parce que vendredi, il y avait nettement moins de personnes en classe. Alors que d’habitude nous sommes 200, nous n’étions que 50. »

À Concordia, certains étudiants et professeurs se sont également opposés au blocage des cours. Face à cela, Oli répond qu’« en tant qu’étudiants, l’une de nos principales sources de pouvoir est de cesser d’aller en classe. Arrêter de travailler dans le domaine de l’éducation, c’est comme arrêter de travailler pour les travailleurs qui sont en grève. C’est comme si nous pouvions arrêter de contribuer à l’école. »

« En tant qu’étudiants, l’une de nos principales sources de pouvoir est de cesser d’aller en classe. Arrêter de travailler dans le domaine de l’éducation, c’est comme arrêter de travailler pour les travailleurs qui sont en grève. C’est comme si nous pouvions arrêter de contribuer à l’école. »

Oli Sinclare – Étudiant·e de Concordia

Après ces trois jours de grève, les étudiants grévistes sont désormais dans l’attente d’une réponse du gouvernement caquiste. « Après la première mobilisation en décembre, il y a eu des modifications, ils ont donc réduit le montant de l’augmentation des frais de scolarité, et j’espère que cela se reproduira. » Finalement, Oli Sinclare conclut que tant qu’il n’y aura pas davantage de modifications de cette mesure gouvernementale, les étudiants continueront de se mobiliser pour faire entendre leurs voix.

*Nom fictif

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Syndicats et gouvernement Legault : Grèves et nouvelles ententes https://www.delitfrancais.com/2024/01/10/syndicats-et-gouvernement-legault-greves-et-nouvelles-ententes/ Wed, 10 Jan 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54009 Entretien avec le Professeur Barry Eidlin.

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Du 23 novembre au 29 décembre dernier, plus de 566 000 travailleurs du secteur public sont entrés en grève, perturbant ainsi de façon conséquente le système de santé et le milieu de l’éducation à travers la province. Plusieurs syndicats et fédérations de syndicats dans les domaines de l’éducation, de la santé et des services sociaux ont participé aux grèves. Le plus grand regroupement est celui du Front Commun, composé de quatre centrales syndicates : la Confédération des syndicats nationaux (CSN), la centrale des Syndicats du Québec (CSQ), la Fédération des Travailleurs et Travailleuses du Québec (FTQ) et l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS). On retrouve également la Fédération autonome de l’Enseignement (FAE), qui compte à elle seule 66 500 enseignants, ainsi que la Fédération Interprofessionnelle de la Santé du Québec (FIQ), rassemblant près de 80 000 travailleurs, deux fédérations qui se sont alliées au mouvement du Front commun durant les derniers mois.

Depuis décembre 2022, les différents syndicats tentent de négocier leurs conventions collectives respectives, c’est-à- dire un contrat avec le patronat établissant les conditions de travail des travailleurs dans le cadre de leur emploi. Les revendications générales des grévistes comprennent une amélioration des conditions salariales et de travail, une plus grande flexibilité des horaires de travail et une amélioration des services publics dans le domaine de l’éducation, de la santé et des services sociaux.

Néanmoins, les négociations n’ont pas avancé à un rythme jugé satisfaisant par les différents acteurs, malgré l’utilisation de nombreux moyens de pression, dont une manifestation qui comptait plus de 100 000 travailleuses et travailleurs du secteur public en septembre dernier. Pour remédier à la lenteur des négociations, les différents syndicats ont choisi l’option de la grève générale, dont cinq jours pour le Front Commun et la grève général illimitée pour d’autres avec un seul objectif : contraindre le Conseil du Trésor de Sonia LeBel (présidente du Conseil du Trésor) à négocier leurs demandes avec urgence.

À la suite de plusieurs semaines de grève, les négociations se sont intensifiées mi-décembre et ont conduit à des hypothèses d’ententes concluantes pour tous les syndicats impliqués. Du côté du Front commun, une augmentation de salaire de 17,4 % sur cinq ans a été conclue, accompagnée d’autres avantages, notamment des améliorations aux régimes de retraite et aux régimes parentaux. De plus, la FAE a mis fin à sa grève générale illimitée à la suite d’un accord de principe, dont les détails n’ont pas encore été révélés.

Interrogé sur les accords conclus entre les syndicats du secteur public et le gouvernement du Québec, Barry Eidlin, professeur au programme de Sociologie de l’Université McGill, a partagé ses réflexions avec Le Délit sur divers aspects de cette grève.

La réaction du gouvernement Legault

Durant les cinq semaines de grève au sein du secteur public québécois, impactant grandement l’éducation des enfants et le domaine de la santé, l’opinion publique, notamment de La part des parents d’élèves, était plutôt favorable à la grève. Syndicats et citoyens se sont alliés pour critiquer la gestion de la grève par le gouvernement Legault, ainsi que la lenteur du processus de négociation avec les différents syndicats. Pour le professeur Eidlin, la forte remise en question de cette gestion de la crise est principalement dû au fait que : « Le gouvernement de la CAQ n’a simplement pas l’habitude de négocier. Ils ont de grandes majorités parlementaires, donc ils vont discuter, prendre vos avis en compte, mais en fin de compte, auront les votes pour passer ce qu’ils veulent. »

Le Professeur Eidlin nous a fait part de l’importance du soutien des citoyens envers le mouvement qui a pris place au cours des dernières semaines. Plus de sept Québécois sur dix soutiennent les travailleurs et travailleuses en grève, selon la maison de sondage SOM. Pour le professeur, une grande partie de la réussite de la grève s’explique par ce support massif : « L’appui du public ne cessait de s’accroître et est plus fort parmi les plus impactés, dont les parents d’enfants d’âge scolaire, et le gouvernement a été obligé de négocier. » Ce soutien massif du public, couplé à la mauvaise gestion de la crise par le gouvernement a donc joué en faveur des grévistes.

« Le gouvernement Legault n’a simplement pas l’habitude de négocier »

Professeur Barry Eidlin

Les hypothèses d’ententes

La crise s’est conclue par plusieurs hypothèses d’ententes. Depuis le début des négociations entre les syndicats et le gouvernement québécois en décembre 2022, un accord sur les salaires a permis de nettes et concrètes augmentations. Pendant une grande partie de l’année, le Conseil du Trésor a offert une augmentation salariale de 9% dans le secteur public, ce qui, selon le professeur Eidlin, équivaut à une baisse de salaire pour les travailleurs et travailleuses du secteur public, si l’on considère l’inflation qui est de 9% seulement en 2023.

Peu à peu, les négociations ont fait augmenter les salaires de 9% à 12,7%, pour finalement aboutir à une entente sur une augmentation de 17,4 % sur cinq ans en décembre 2023 pour le Front Commun. À ce sujet, le Professeur Eidlin mentionne que même si l’offre salariale présentée a augmenté considérablement, « les demandes initiales des syndicats portaient sur une augmentation salariale de 24% sur 3 ans, donc l’accord conclu représente une réduction significative de leurs exigences ».

S’ajoutant aux augmentations salariales, des améliorations de conditions de travail et des avantages sociaux ont été négociés au sein de l’hypothèse d’entente du Front Commun. On y retrouve une amélioration du régime de retraite, une majoration salariale de 10% pour les psychologues dans le secteur public et des améliorations des régimes parentaux en place. Le Professeur Eidlin renchérit sur ces avancées : « Les détails dans ce cas-ci sont très importants et vont changer beaucoup de choses, car le plus important n’est pas nécessairement l’augmentation salariale, mais les conditions de travail, donc les heures supplémentaires, le personnel supplémentaire, etc., qui font une grande différence pour la qualité de vie des travailleurs. »

« C’est le vote des membres qui décidera si c’est un succès. On ne s’attend pas à gagner tout ce qu’on demande : c’est ça le but d’une négociation »


Professeur Barry Eidlin

Une victoire potentielle pour les syndicats

En date du 7 janvier, le Front commun a annoncé les précisions des accords de son hypothèse d’entente avec le gouvernement québécois. Ces détails ont été révélés afin d’informer les membres des plus de 300 syndicats respectifs, qui auront à leur tour, la chance de faire part de leurs opinions sur leurs ententes, lors d’assemblées générales organisées.

Lorsque nous lui avons demandé si ces accords peuvent être considérés comme une victoire pour les syndicats, le Professeur Eidlin nous répond que « c’est le vote des membres qui décidera si c’est un succès. On ne s’attend pas à gagner tout ce qu’on demande : c’est ça le but d’une négociation ».

Les membres des syndicats du Front commun seront appelés à voter d’ici le 15 janvier sur les hypothèses d’ententes conclues fin décembre avec le Conseil du Trésor.

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Désacraliser la guerre https://www.delitfrancais.com/2023/11/29/desacraliser-la-guerre/ Wed, 29 Nov 2023 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53792 Comprendre l’évolution de la « paix » dans le contexte du conflit Israël-Hamas.

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Le 14 novembre dernier, des dizaines de milliers d’américains se sont réunis à Washington DC pour soutenir Israël dans sa guerre contre le Hamas, et pour s’opposer aux appels au cessez-le-feu. Ce rassemblement a réuni des figures politiques américaines des deux côtés, du chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, au porte-parole des républicains au Congrès, Mike Johnson. Au cours du rassemblement, ce dernier a pris la parole : « Ces appels pour un cessez-le-feu sont outrageux (tdlr). » La foule avait répondu à son discours en criant : « Pas de cessez-le-feu! »

Alors que la réponse militaire israélienne aux attaques meurtrières du Hamas du 7 octobre dernier a tué plus de 12 000 Palestiniens, selon le ministère de la santé palestinien, et détruit ou endommagé près de la moitié de la ville de Gaza, les discours sur une potentielle évolution vers la paix peinent à s’imposer dans les débats politiques aux États-Unis et en Europe.

Le Délit s’est interrogé sur l’évolution des conceptions de la paix dans le cadre du conflit qui oppose Israël au Hamas. Pour ce faire, nous nous sommes entretenus avec un ancien professeur d’études religieuses de McGill, Norman Cornett.

Le Délit (LD) : Comment comprendre ce rejet du cessez-le-feu par une partie de la population en Israël et aux États-Unis? La paix n’est-elle plus un idéal?

Norman Cornett (NC) : Quand Mike Johnson a dit qu’un cessez-le-feu était un outrage, ça revenait à dire : « On appuie la guerre. » C’est s’afficher comme des belliqueux et dire que cette guerre est juste. Peut-on parler d’une guerre juste? N’y a‑t-il pas là une contradiction?

Cette approche est dangereusement binaire. C’est soit Israël, soit Palestine. Vous êtes soit pour nous, soit contre nous. Quand on regarde ce qui se passe depuis le début de ce conflit, ceux et celles qui prônent un cessez-le-feu, ou plus, la paix, sont décriés et réduits au silence. C’est comme si la paix revenait à céder au terrorisme, céder au Hamas. La paix, pour ces personnes, c’est la trahison des pauvres innocents et innocentes morts lors des attaques du 7 octobre 2023. Donc, il n’y a pas de marge de manœuvre. Il n’existe aucune zone grise. Comment peut-on arriver à une solution quand tout est noir ou blanc, vrai ou faux, bon ou mauvais? Pour arriver au bout de ce conflit Israël-Hamas, il faut des compromis.

Pour moi, cette approche binaire revient à jumeler la guerre et la sainteté ou la guerre et le sacré. Pour les colons juifs en Israël, il ne s’agit pas d’un simple conflit géopolitique, de même, les combattants du Hamas sont engagés jusqu’à la mort dans une guerre sainte. Pour ces derniers, il s’agit de combattre jusqu’à sa destruction, il s’agit d’éradiquer Israël. Des deux côtés, les extrêmes ont sacralisé les enjeux. Ce phénomène est loin d’être unique à une religion. Dans les religions monothéistes, il y a cette idée centrale qu’on peut marier une cause sacrée avec le militarisme. Évidemment, on pense aux croisades du Moyen Age. C’était la guerre sainte. Il fallait se réapproprier la Terre sainte, Jérusalem, peu importe les pertes en vies humaines, peu importe les coûts. Sitôt qu’une religion vient sacraliser un conflit militaire, on se trouve dans une impasse. Donc, pour arriver à une solution et à la paix, il faut désacraliser.

« C’est comme si la paix revenait à céder au terrorisme, céder au Hamas. La paix, pour ces personnes, c’est la trahison des pauvres innocents et innocentes morts lors des attaques du 7 octobre 2023 »

LD : Vous parlez d’une guerre sacralisée, est-ce que vous pouvez nous en dire plus?

NC : Un cessez-le-feu de quatre jours a été déclaré, mais le cabinet israélien et le premier ministre Netanyahou ont dit : « Nous, on va continuer la guerre. » Au sein du cabinet israélien, plusieurs ministres affiliés à des mouvements d’extrême droite ont dit vouloir une nouvelle Nakba [exode de 800 000 Palestiniens après la défaite des pays arabes face à Israël en 1948, ndlr]. Ça veut dire : « On va se battre, on va les chasser du territoire. » Au début, on croyait que c’était pour répliquer à l’attaque meurtrière du Hamas le 7 octobre. Maintenant, on nous dit qu’après, il nous faut gérer Gaza. Rappelons que jusqu’en 2007, Israël occupait Gaza et avait des kibboutz, avant qu’Ariel Sharon les obligent à quitter Gaza, tout en maintenant un contrôle complet. Netanyahou dit maintenant : « On va assurer la sécurité d’Israël, peu importe l’issue du conflit. »

Aussi longtemps qu’on a recours aux solutions uniquement militaires, on est pris dans ce cercle vicieux. À quand des pourparlers sur une solution à deux États, avec un État palestinien viable et des frontières contiguës? Sans solution politique, on est pris dans un engrenage de guerre éternelle, où le but n’est pas de chercher une solution autre que de les massacrer.

Quand on parle du conflit Israël-Hamas, c’est un euphémisme ; les deux belligérants sont engagés dans une guerre totale, une guerre où tous les moyens sont mobilisés et justifiés, et où il n’y pas de distinction entre civils et combattants. Il faut garder en tête que quand Netanyahou et les généraux israéliens nous parlent d’attaques précises, de bombardements ciblés, la réalité est toute autre. On est dans la guerre totale. Qui plus est, ce qui est pratiqué actuellement, c’est ce qu’on appelle la politique de la terre brûlée. On ne laisse rien. C’est exactement ce qu’Israël a fait en 2007 quand les colons ont quitté Gaza. Toutes les infrastructures qui étaient en place ont été rasées, pour ne plus rien laisser à la population sur place. Qu’est-ce qui se passe actuellement? La même politique de la terre brûlée. Qu’est-ce qui reste des infrastructures? Que ce soient les aqueducs, les hôpitaux, les centres d’accueil, presque tout a été détruit.

« Il n’existe aucune zone grise. Comment peut-on arriver à une solution quand tout est noir ou blanc, vrai ou faux, bon ou mauvais? »

LD : Alors comment parler de paix?

NC : Il faut démystifier, car la sacralisation du militarisme écarte la paix comme valeur fondamentale. Tant et aussi longtemps que la guerre reste plus grande que nature, qu’aucun compromis n’est permis, il n’y a pas de paix. Et je tiens encore comme spécialiste en sciences des religions, à souligner l’importance de la paix dans les religions monothéistes, en politique et en géopolitique. Chez les juifs, pour se saluer, on dit « Shalom », ce qui veut dire « la paix ». Et quand on salue quelqu’un, en tant que musulman, on dit « As-salaamu alaikum » : « que la paix soit sur vous. » Donc en philosophie et en théologie, on parle de hiérarchie des valeurs. Or, au sommet de cette hiérarchie, dans chacune des religions monothéistes, c’est la paix. Au point qu’elle a infusé la langue et même les liturgies. C’est là-dessus qu’il faut insister.

Il y a des idéaux vers lesquels on peut tendre, des rêves que l’on peut chercher à réaliser. La paix est l’un d’entre eux. Un excellent exemple ici, c’est Nelson Mandela, qui a reçu le prix Nobel de la paix. Retournons dans l’Histoire. Nelson Mandela est jeune, en Afrique du Sud, dans une société avec l’apartheid, et il se joint au Parti Africain en tant que marxiste où il prend les armes. Ça, on l’oublie bien souvent. Il a embrassé le militarisme pour atteindre son but : la fin de l’apartheid. Mais qu’est-ce qui est arrivé alors qu’il était emprisonné pendant plus de 20 ans sur l’île Robben? Il a réfléchi, et il y a eu un changement de cap chez lui. Son message, ce n’était plus la lutte armée pour en finir avec l’apartheid, mais c’était la résistance non violente. Or, vous le savez, l’Afrique du Sud en ce moment a appuyé haut et fort les Palestiniens dans le conflit présent, étant donné qu’ils se sont vus dans cette tentative de se libérer et ils sont conscients de l’héritage de Nelson Mandela et du modèle de son évolution politique.

Depuis le début de ce conflit, le récit qu’il faut suivre de près, c’est celui d’une perspective fataliste, portée par une partie de la classe politique et de la population, que la guerre est inévitable et qu’elle fait partie intégrante de la condition humaine, plus spécifiquement de l’histoire humaine. La question existentielle se pose, est-ce qu’on peut céder à un tel fatalisme? Non, mais où doit-on chercher la paix?

Aujourd’hui, Biden est hautement critiqué sur la scène internationale, mais aussi domestique. Parce qu’au lieu d’être un médiateur, il affiche un soutien inconditionnel à Israël dans son offensive. Dans quelle mesure peut-il contribuer à des négociations sur la paix? On assiste peut-être à la fin de la « Pax Americana » des États-Unis comme gendarme du monde. Mais qui a créé l’onde de choc sur la scène diplomatique internationale en mars dernier, en actant le rapprochement de l’Iran Chi’ite, et de l’Arabie Saoudite Sunnite? Il s’agit de la Chine. Nous sommes peut-être au seuil d’un nouvel ordre mondial établi par la Chine, qui vient inaugurer au 21e siècle un autre modus vivendi sur les conflits : la « Pax Sinae ». Finalement, c’est peut-être la Chine qui pèsera sur le processus de paix au Moyen-Orient.

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« Liberté aux prisonniers de guerre! » https://www.delitfrancais.com/2023/11/08/liberte-aux-prisonniers-de-guerre/ Wed, 08 Nov 2023 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53314 Un groupe de manifestants ukrainiens dénonce les crimes de guerres de la Russie.

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Dimanche 5 novembre dernier, Mariia Zaborovska et Vira Seletska, deux Ukrainiennes habitant à Montréal, ont lancé un appel à la manifestation à partir du groupe Instagram @silentprotest_mtl_ua. Une trentaine de personnes ont répondu à l’appel. Réunis aux alentours de midi devant le consulat général de la fédération de Russie, les manifestants ont brandi devant le consulat des pancartes sur lesquelles il était inscrit « La Russie est un État terroriste, tdlr », « Liberté aux prisonniers de guerre » ou encore « Arrêtez les tortures ».

Dans une entrevue avec Le Délit Mariia Zaborovska explique que cette manifestation était une contestation de l’invasion russe, mais que son but était plus particulièrement de dénoncer les crimes de guerre commis par la Russie à l’encontre des prisonniers ukrainiens. En effet, depuis le début de la guerre en Ukraine le 24 février 2022, la communauté internationale, dont le Rapporteur spécial sur la torture aux Nations Unies, ont fait part de leurs inquiétudes quant au traitement des prisonniers de guerre ukrainiens détenus en Russie. Le groupe de manifestants a en particulier dénoncé les crimes de torture et de sous-alimentation, en affirmant notamment que « neuf prisonniers ukrainiens libérés sur dix ont subi de la torture ». Toutefois, on note que l’utilisation de la torture à l’encontre des prisonniers ukrainiens n’a pas pu être vérifiée par les Nations Unies, sachant que la Russie leur a refusé l’autorisation d’inspecter ses prisons. La connaissance de telles pratiques repose donc sur les témoignages de prisonniers libérés.

Par la suite, le groupe de manifestants a commencé à marcher à travers le centre-ville, pour finalement arriver au Square Phillips, aux abords de la rue Sainte-Catherine. Une fois à destination, 15 membres du groupe ont ôté leurs manteaux, pour laisser place à des chandails blancs, chacun arborant au dos une lettre. Une fois les manifestants alignés, le public pouvait lire sur leurs dos : « Ils sont torturés. »

Sortir du silence

Depuis le début de la guerre, le groupe a organisé des protestations silencieuses pour soutenir l’Ukraine et dénoncer l’agression russe dont elle est victime. Depuis maintenant 20 mois, le groupe a organisé et a appelé à participer aux courses de solidarité comme « Run for Ukraine », qui a tenu des stands de récolte de dons, et a réalisé des sit-in dans les espaces publics de Montréal. Mariia Zaborovska explique : « Depuis avril, nous organisons des manifestations silencieuses pour sensibiliser les gens; on essaye d’utiliser des moyens adaptés aux besoins. » Force est de constater que « la couverture médiatique du conflit en Ukraine diminue » face aux nouveaux événements d’actualité, comme la récente escalade du conflit entre Israël et le Hamas, qui depuis un mois occupe une place majeure dans l’actualité. Mariia affirme que c’est pour tenter de pallier cette diminution de couverture médiatique que cette fois-ci, ils ont décidé de faire une manifestation d’envergure et « définitivement pas silencieuse ».

« C’est [la couverture médiatique qui diminue, ndlr] un des plus gros défis auxquels nous devons faire face. Le monde est en feu et je comprends cela […] En tant qu’Ukrainiens, c’est notre devoir premier de parler, d’organiser des manifestations, et de sensibiliser les gens […] Notre but est simplement d’inciter les gens à s’informer, à faire des recherches pour rester au courant de ce qui se passe en Ukraine actuellement. On veut pousser les gens à aller voir ce qui se passe et ce qui est écrit dans les journaux comme CNN ou le New York Times. Si après nous avoir vus dans la rue les gens font cela, ça nous suffit amplement. On veut juste rappeler aux gens que ce conflit existe encore. »

Une baisse du support international?

Le 10 octobre dernier, 3 jours après le début de l’escalade entre Israël et le Hamas, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a fait part, au cours d’un entretien télévisé pour la chaîne française France 2, de sa crainte vis-à-vis d’une potentielle baisse du soutien international envers l’Ukraine. En effet, alors que la guerre se poursuit, d’autres conflits ont éclaté depuis février 2022, et les pays soutenant l’Ukraine ont d’autres préoccupations stratégiques et financières. Les États-Unis et l’Union européenne, qui constituent les principaux soutiens à l’Ukraine depuis le début de la guerre, se retrouvent désormais fortement impliqués dans deux conflits à durée relativement indéterminée.Alors que Biden affirmait encore le 1er octobre que le soutien à l’Ukraine ne s’affaiblissait pas, la question se pose désormais, étant donné des divisions récentes au sein du Congrès américain. Mariia rappelle néanmoins que « donner du soutien à l’Ukraine ce n’est pas faire de la charité, ni une cause émotionnelle. Si l’Ukraine est vaincue aujourd’hui, qu’adviendra-t-il des pays baltiques? Que va t‑il arriver à la Pologne? Ces pays sont aussi en danger. Aider l’Ukraine c’est donc plutôt un moyen de prévenir de futures attaques de la Russie. […] Soutenir l’Ukraine n’est pas uniquement lui fournir de l’aide, mais c’est faire barrière et aider l’ensemble des pays qui sont et seront potentiellement à risque ».

En abordant le sujet d’un affaiblissement de l’aide internationale pour l’Ukraine, Mariia a surtout souhaité notifier l’enjeu de futures élections dans le monde entier : la récente élection du parti pro-russe Smer-SD en Slovaquie montre que l’opinion publique occidentale sur la guerre en Ukraine n’est ni unanime, ni intemporelle. Mariia affirme donc que « notre destin est entre les mains de ces pouvoirs qui changent en Europe et aux États-Unis ».

Touchés, malgré la distance

Selon Mariia, 95% des gens présents à la manifestation étaient Ukrainiens. Elle affirme que malgré la distance, les gens sont touchés par la guerre, que ce soit indirectement ou directement. Mariia nous a expliqué que « la première année, c’est comme si l’une de mes moitiés était en Ukraine et l’autre était ici, à Montréal. C’était très dur et troublant de voir la vie normale ici, tout en sachant qu’il y a la guerre à la maison [en Ukraine, ndlr] […] Maintenant les choses sont plus stables, on doit vivre et éduquer nos enfants. Mais il faut qu’on aide le pays comme on peut, justement en faisant des manifestations et des collectes de dons. Ici [dans le groupe, ndlr] par exemple, chacun donne dès qu’il peut ». Depuis le début de la guerre, le groupe récolte des dons à travers ses activités et manifestations. Pour cette manifestation, le groupe a décidé de soutenir une fondation qui soutient les femmes de combattants morts, ou faits prisonniers au cours de la guerre. « Ces personnes n’ont pas simplement perdu quelqu’un de cher, elles ont aussi (souvent) perdu la personne qui pourvoit à leurs besoins ».

Retrouvez plus d’informations sur le compte Instagram @silentprotest_mtl_ua, ainsi que plus de photos à propos de l’action sur le compte instagram de Lana : @lanasvitphoto_mtl.

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Reportage photo https://www.delitfrancais.com/2023/11/01/reportage-photo-2/ Wed, 01 Nov 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53136 Retour sur l’activisme montréalais : Enraciné au sein de la communauté étudiante.

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25 octobre 2023
Manifestation sur le campus de McGill en soutien à la Palestine et aux communautés autochtones.

Margaux Thomas | Le Délit

23 septembre 2022
Marche pour le climat organisée en partie par des étudiants de McGill.

Dominika Grand’Maison | Le Délit

30 octobre 2023
Manifestation contre la hausse des frais de scolarité pour les étudiants hors province, dont ceux à McGill.

Véronique Martel | Le Délit

25 octobre 2023
Manifestation sur le campus de McGill en soutien à la Palestine.

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« On vous ment! » https://www.delitfrancais.com/2023/11/01/mohawk-mothers/ Wed, 01 Nov 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53139 Les Mères mohawks donnent une conférence à McGill et le procès avance.

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Invité par l’Association des étudiants en anthropologie le 26 octobre dernier, le collectif des Mères mohawks (Kanien’keha:ka Kahnistensera) a tenu une conférence dans un amphithéâtre de McGill. La conférence nommée « On vous ment! » avait pour but d’informer les mcgillois sur le projet du Nouveau Vic, qui prend place sur un espace suspecté de contenir des tombes non marquées d’enfants autochtones. Ces derniers auraient subi les expériences scientifiques du programme MK-Ultra au cours des années 1950. Lors de la conférence, les Mères mohawks ont dit vouloir « rétablir la vérité (tdlr) » sur la responsabilité de McGill et de la Société Québécoise des Infrastructures (SQI) – organisations avec lesquelles le collectif est encore actuellement en procès – dans des travaux archéologiques qu’elles qualifient d’« inacceptables ».

Une conférence pour rétablir la vérité?

Lors de la conférence, les femmes autochtones, accompagné de l’anthropologue Philippe Blouin et d’une des personnes représentant les moniteurs culturels (qui sont présents sur le site du Nouveau Vic lors des travaux) sont revenus sur l’histoire des travaux au Nouveau Vic ainsi que sur la bataille juridique qu’ils mènent depuis plus d’un an contre McGill et la SQI. En s’adressant aux étudiants de McGill, Kwetiio, une des Mères mohawks, a déclaré : « Vous ne voyez que ce qu’ils veulent que vous voyiez, pas ce qui se passe vraiment. » Ces dernières ont dit vouloir répondre aux informations publiées dans les courriels officiels du vice-principal exécutif de McGill, Christopher Manfredi. Dans un courriel adressé à l’ensemble de la communauté mcgilloise, l’Université a affirmé qu’ « aucune trace de la présence de sépultures anonymes n’a été décelée », une affirmation démentie par le comité des Mères mohawks. Dans une publication Instagram sur le compte de l’Association des étudiants en anthropologie, ces derniers affichent leur soutien pour les Mères mohawks et s’adressent aux étudiants de McGill en affirmant : « Nous vous exhortons à faire de même. » La conférence a donc eu lieu dans un bâtiment de McGill réservé pour l’occasion par l’Association des étudiants en anthropologie, indépendante de l’administration de McGill. Contactée par Le Délit pour leur avis sur cette conférence, l’Université n’a pas répondu à nos sollicitations.

« McGill et la SQI ont interprété ce document et les données archéologiques dans leur propre intérêt »

Philippe Blouin, anthropologue et orateur à la conférence

Un soutien palestinien

Sachant que la conférence a eu lieu le même jour que le rassemblement pro-palestinien sur le campus de McGill, les deux mouvements se sont rejoints. Juste après la conférence, les organisateurs et orateurs de ce rassemblement ont invité les Mères mohawks à s’exprimer devant les participants du rassemblement. Kwetiio et sa mère, toutes les deux membres du comité des Mères mohawks, ont fait entendre la cause menée par les populations autochtones, faisant un lien avec la cause palestinienne : « Nos terres sont violées et c’est inacceptable. C’est pour cela que nous sommes là, pour nos terres. »

Des avancées dans le procès

Au mois de septembre, les Mères mohawks avaient déjà eu une audience mais avaient perdu le procès par manque de preuve. Deux jours après la conférence, le vendredi 27 octobre, les Mères mohawks ont assisté à une deuxième audience devant le palais de justice de Montréal. Grâce à cette dernière, le procès contre les promoteurs du projet Nouveau Vic – soit McGill et le gouvernement du Québec – a pu se poursuivre. Le but des Mères mohawks est de retarder les futurs travaux de l’ancien Hôpital Royal Victoria jusqu’à ce qu’une enquête archéologique plus approfondie soit menée. Ceci permettrait de sauvegarder toute preuve potentielle – encore cachée dans la terre – de tombes anonymes. Une des priorités du groupe autochtone est de garantir que les protocoles de Kaianere’kó:was (la Grande Loi de la Paix) soient respectés et compris lors du procès.

« Vous ne voyez que ce qu’ils veulent que vous voyiez, pas ce qui se passe vraiment »

Kwetiio, une des Mères mohawks

Les Mères mohawks affirment avec conviction que McGill et la SQI ne respectent pas les termes de l’accord conclu en avril. Malgré le fait que McGill et la SQI soient engagés à mener une enquête qui serait co-dirigée par les autochtones, les Mères mohawks estiment que cet engagement a été bafoué. Lors de l’audience, la SQI a de son côté soutenu fermement qu’elle s’est conformée à l’accord et accuse les Mères mohawks de tenter de modifier ce dernier. Le point de discorde majeur réside dans la clause 17 de l’accord, qui concerne les « découvertes inattendues » et stipule que dans de tels cas, un comité doit être convoqué. Philippe Blouin, anthropologue et l’un des orateurs de la conférence, considère qu’il y a beaucoup de zones grises dans cet accord : « McGill et la SQI ont interprété ce document et les données archéologiques dans leur propre intérêt. » Une des personnes faisant partie des moniteurs culturels a mentionné le passé des terres sur lesquelles reposent le projet du Nouveau Vic, y compris les horreurs du projet MK-Ultra, et affirme que McGill et le gouvernement québécois « s’entêtent toujours et ne collaborent pas ».

De son côté, la SQI argumente que la seule interprétation plausible d’une découverte inattendue serait la découverte de corps, bien que cette spécification ne figure pas dans l’accord. En revanche, les Mères mohawks soutiennent que la détection par des chiens renifleurs constitue une « découverte inattendue ». Une étude de 2021, présentée lors de l’audience par les Mères mohawks, a révélé que lorsqu’au moins deux chiens renifleurs détectent les mêmes odeurs au même endroit, la probabilité d’un faux positif est inférieure à 0,06%. Cependant, McGill et la SQI rejettent catégoriquement ces résultats, présentant des chiffres divergents, provenant d’une étude datant de 2011. Cette pluralité de sources qui se présente comme expertes complexifie la situation.

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L’insécurité alimentaire à McGill https://www.delitfrancais.com/2023/10/25/linsecurite-alimentaire-a-mcgill/ Wed, 25 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52957 Quelles sont les solutions durables? Une discussion avec des experts.

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Remédier à l’insécurité alimentaire au sein du campus est devenu un enjeu majeur pour la communauté étudiante mcgilloise. Récemment, les coûts exorbitants des repas fournis par les établissements réfectoires de l’Université ont suscité des critiques. Payer 18 dollars pour une salade dans une cafétéria de bibliothèque, ou débourser plus de cinq mille dollars pour un plan de repas en résidence sont des prix immoraux pour Nilly, membre du Groupe de recherche d’intérêt public de McGill (QPIRG). Dans une entrevue avec Le Délit, elle a exprimé que l’administration de McGill privilégie le profit au détriment du bien-être de leurs étudiants. Nilly souligne que les repas proposés sur le campus de McGill étaient autrefois gérés par des coalitions étudiantes, qui ont depuis été remplacées par des grandes entreprises indépendantes comme le café Redpath.

Pour répondre à ces problèmes, des organisations dirigées par des étudiants ont été mises en place au sein de l’Association des étudiants de l’Université McGill (AÉUM), avec pour objectif principal de remédier à l’insécurité alimentaire vécue au sein de McGill. En mars dernier, l’organisation étudiante Let’s Eat McGill a réuni plus de 200 étudiants dans le but de sensibiliser sur les différentes initiatives alimentaires afin de réduire le coût et d’augmenter la qualité des repas sur le campus. L’Association étudiante de nutrition et d’accessibilité (SNAC) (tdlr) de McGill a participé à l’assemblée et continue à apporter des solutions durables et accessibles à la communauté étudiante. Lors d’une entrevue avec Alexa, étudiante en économie et sciences cognitives à McGill et co-présidente de SNAC, elle a souligné les avancées significatives, telles que Good Food Box, réalisées depuis leurs premières rencontres. Cependant, elle a également relevé que cela ne constitue qu’un point de départ, et que SNAC doit aujourd’hui faire face à de nombreux défis, notamment en termes de logistique et de priorisation des personnes les plus vulnérables.

« La solution se trouve dans l’expansion de fermes urbaines dans le centre-ville de Montréal et sur les campus universitaires »


La discussion du Panel


Lundi dernier, le QPIRG a accueilli trois panélistes pour animer une discussion portant sur l’insécurité alimentaire, explorant ses causes, ses conséquences et les solutions possibles. Ayub Alleyne est le directeur des affaires à la Fondation Soeur Sabria, une organisation non gouvernementale montréalaise qui apporte un soutien aux membres les plus vulnérables de la communauté en matière de nourriture et d’hébergement, en particulier auprès des femmes et des enfants, et au sein de la communauté musulmane. Sona Sadio est co-coordinatrice du collectif Sankofa qui vise à aborder l’insécurité alimentaire, touchant selon eux de manière disproportionnée la communauté noire et autochtone. Enfin, le professeur Erik Chevrier de l’Université Concordia est un activiste impliqué dans de nombreux groupes travaillant à construire des modèles économiques favorisant la durabilité de la biosphère.

Les panélistes ont d’abord discuté des causes historiques et sociales de l’insécurité alimentaire. Le professeur Chevrier a souligné que l’insécurité alimentaire est un problème mondial : aujourd’hui, un huitième de la population de la planète souffre de famine. Il est donc indispensable de réfléchir à des solutions qui nourrissent les personnes en besoin à Montréal, mais qui bénéficient aussi à la durabilité mondiale. Dans la région de Montréal, près de 900 000 personnes ont eu besoin d’aides alimentaires en 2022. L’impact disproportionné de l’insécurité alimentaire des communautés immigrées, noires et autochtones de Montréal a été souligné par Mme Sadio. Elle a particulièrement souligné la responsabilité du néocolonialisme et de la surconsommation, dans la perte de compétences agricoles traditionnelles respectueuses de l’environnement.

Les panélistes ont ensuite abordé le choc culturel lié à l’alimentation pour les communautés immigrées au Canada. Mme Sadio a partagé que son premier choc culturel en arrivant à Montréal du Tchad n’était pas le froid ou la neige, mais la nourriture. Le manque d’accessibilité à une variété d’ingrédients culturellement diversifiés constitue une barrière culturelle importante pour les immigrants. Ayub a aussi souligné que le problème de l’insécurité alimentaire ne réside pas uniquement dans la distribution de nourriture, mais aussi dans la qualité des aliments proposés. Comment peut-on nourrir les populations les plus vulnérables à un coût responsable en priorisant la nature et la valeur nutritionnelle des aliments? Le professeur Chevrier a donc relevé le paradoxe capitaliste de l’insécurité alimentaire : afin d’aider ceux qui souffrent d’insécurité alimentaire, il est essentiel de réduire le coût de la nourriture. Toutefois, il est tout aussi crucial de garantir des revenus justes pour les agriculteurs, en particulier ceux qui sont noirs ou autochtones. Les panélistes se sont alors interrogés : « Les prix alimentaires bas sont-ils toujours synonymes d’exploitation des agriculteurs? »


Le panel a donc exploré les solutions que les étudiants et l’administration de McGill peuvent mettre en place pour donner accès à une nutrition durable et responsable. En exerçant une pression sur les gouvernements et les grandes institutions, la communauté étudiante peut influencer les politiques et les pratiques agricoles à l’échelle provinciale et nationale. De plus, se familiariser avec le quotidien des fermiers et aussi les longues étapes nécessaires pour cultiver les aliments est essentiel pour mieux saisir la réalité du travail agricole. Le professeur Chevrier estime qu’observer le processus laborieux de la culture d’une pomme de terre pourrait inciter à en éviter le gaspillage à l’avenir. En outre, l’apprentissage sur l’agriculture permettra de développer des compétences pratiques dans ce domaine, préparant ainsi le terrain pour la mise en place de fermes urbaines. Pour le professeur Chevrier, la solution se trouve dans l’expansion de fermes urbaines dans le centre-ville de Montréal et sur les campus universitaires. Il a affirmé qu’en promettant l’instauration de fermes urbaines sur le campus de McGill, l’Université renforcera non seulement la disponibilité d’aliments saisonniers, mais garantira également une qualité optimale grâce à une supervision directe des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement. De ce fait, les étudiants et l’administration pourront bénéficier d’un accès facilité à une alimentation saine et locale, tout en contribuant activement à la réduction de l’empreinte écologique de l’institution. Enfin, les panélistes ont rappelé que les solutions doivent être de nature communautaire. Ils ont expliqué que en formant des organisations étudiantes et en créant une coalition avec d’autres universités, en partageant nos connaissances et nos expériences et en élaborant des solutions créatives et durables, nous sommes capables d’apporter un réel changement quant à l’insécurité alimentaire à McGill et à Montréal.

« Afin d’aider ceux qui souffrent d’insécurité alimentaire, il est essentiel de réduire le coût de la nourriture. »

Quelles initiatives ont déjà été mises en place pour soutenir les étudiants?

Alexa a souligné que le travail accompli par les organisations étudiantes a eu un impact important : Midnight Kitchen participe à un système alimentaire alternatif qui privilégie l’entraide, les mouvements populaires, les droits des travailleurs, les soins communautaires et la durabilité. Les services offert incluent des déjeuners gratuits le mercredi et jeudi à 13h dans la Salle de bal de l’AÉUM, des services de traiteur gratuits pour les événements en accord avec leur mandat politique, des jardins sur le campus Macdonald, ou encore des cartes d’épicerie d’urgence (actuellement suspendues). SNAC McGill privilégie la durabilité, la nutrition et l’accessibilité au sein du campus, proposant des ateliers de cuisine et des programmes de distribution alimentaire. D’après Alexa, SNAC a déjà aidé plus de 1 100 étudiants, commandant près de 1 000 dollars d’aliments par semaine. Enfin, l’organisme Partage et Solidarité a comme objectif de récupérer la nourriture non vendue des magasins pour la distribuer gratuitement à la communauté de Montréal, au-delà de celle de McGill. Alexa, Mme Sadio, M. Alleyne et le professeur Chevrier encouragent les étudiants de McGill à se renseigner sur les enjeux liés à l’agriculture durable, à la nutrition et aux ressources qui sont à leur disposition pour combattre l’insécurité alimentaire.

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Et si le public proposait les sujets? https://www.delitfrancais.com/2023/10/25/et-si-le-public-proposait-les-sujets/ Wed, 25 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52968 Pivot inaugure sa nouvelle plateforme web : la Salle de nouvelles.

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Créé en 2021, le média indépendant et progressiste Pivot a lancé le 19 octobre dernier la Salle de nouvelles, une plateforme en ligne qui permet à ses abonné·e·s de soumettre des idées d’articles et de commenter les propositions des autres membres de la communauté. Cette initiative a pour but de créer un espace d’échange entre l’équipe éditoriale et les préoccupations du lectorat, qui peut se prononcer sur les sujets qu’il souhaite voir couverts.

Lors de la soirée de lancement agrémentée de numéros d’humoristes, collaborateur·rice·s et grand public étaient convié·e·s pour se familiariser avec le fonctionnement de la Salle de nouvelles. Il suffit de se connecter à la plateforme en ligne –accessible aux abonné·e·s – pour voir apparaître les suggestions d’article, qui seront révisées par l’équipe éditoriale de Pivot et qui, en fonction de leur popularité, pourraient se voir choisies. La personne qui est à l’origine de l’idée d’article serait alors mentionnée dans l’article lors de sa publication, afin de mettre en valeur ce tout nouveau processus collaboratif de production des nouvelles.

Comment se définit Pivot?

La soirée du 19 octobre a aussi été l’occasion de présenter la ligne éditoriale de Pivot, afin de faire connaître ses angles de prédilection dans la couverture de l’actualité. Créé il y a plus de deux ans, Pivot résulte de la fusion du volet francophone de journal multiplateforme Ricochet et du média Majeur, qui proposait jusqu’en 2021 du « contenu d’actualité à contre-courant des intérêts des élites économiques et politiques », comme indiqué sur son site web. Dans la continuité de cette mission, Pivot se présente comme un média ouvertement progressiste qui entend élargir les perspectives journalistiques au Québec, optant pour le traitement de certaines questions d’actualité qui ne sont pas assez contextualisées dans les médias traditionnels.

« Pivot estime que la prétention à l’objectivité ou à la neutralité masque surtout la persistance, consciente ou non, du point de vue, des conceptions et des valeurs dans l’information »

Un article sur la bande dessinée Résister et fleurir qui décrit la lutte contre le déboisement à Hochelaga ou encore un dossier d’enquête sur les conditions des travailleur·se·s au Club Med de Charlevoix ; voici quelques exemples des histoires pour lesquelles certain·e·s membres de l’équipe se sont dits particulièrement interpellés. Éclairant des enjeux locaux, Pivot se consacre également aux enjeux internationaux à résonance locale comme les impacts du conflit israélo-palestinien à Montréal. La couverture de la manifestation pro-palestinienne du 13 octobre dernier au centre-ville aura été l’occasion de recueillir des témoignages à chaud sur la condamnation par les gouvernements provincial et fédéral de toute manifestation pro-Palestine.

Pivot propose un journalisme « factuel » et « critique », selon sa page web dédiée à sa politique éditoriale. On peut également
y lire que « Pivot estime que la prétention à l’objectivité ou à la neutralité masque surtout la persistance, consciente ou non, du point de vue, des conceptions et des valeurs dans l’information », qui interviennent « inévitablement à diverses étapes » de l’élaboration des articles.

La Salle de nouvelles a pour objectif de permettre au public de participer activement au processus de création des nouvelles en évitant pour Pivot de se cantonner à une perspective journalistique unique. Selon Alex Ross, ayant cofondé Pivot et maintenant à sa rédaction en chef, la salle de nouvelles devient une manière de « travailler en collégialité » et de développer « une méthode plus démocratique » par la réinvention des pratiques du milieu. Iel explique que si les biais dans les choix des sujets sont inévitables, la participation des abonné·e·s permettrait un rééquilibrage des perspectives autour de la notion de progressisme de laquelle se réclame Pivot.

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MK-Ultra : les victimes réclament justice https://www.delitfrancais.com/2023/10/18/mk-ultra-les-victimes-reclament-justice/ Wed, 18 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52797 Des expériences illégales menées sur des sujets humains à McGill.

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Le 2 octobre dernier, la Cour d’appel du Québec a accordé l’immunité juridique au gouvernement américain, qui aurait laissé libre cours à des expériences de lavage de cerveau 70 ans plus tôt dans un hôpital psychiatrique de McGill. Le programme de recherche MK-Ultra, créé secrètement en 1953 par la CIA, développait des techniques de contrôle de l’esprit sur des cobayes humains non consentants. Il a pris place dans plus de 80 institutions, dont l’Institut Allan Memorial à McGill. Depuis, plusieurs familles de victimes réclament justice et estiment que des dommages irréparables leur ont été causés.

Cette affaire fait suite à une action collective entreprise en 2019 au nom de toute personne ayant subi des préjudices à la suite des expériences MK-Ultra. Cette action collective poursuit l’Université McGill, l’Hôpital Royal Victoria et les gouvernements canadien et américain.

En vertu de la Loi sur l’immunité des États de 1982, la Cour d’appel du Québec a décrété que le gouvernement américain ne peut être poursuivi en sol canadien, bénéficiant d’une immunité au moment où les expériences MK-Ultra ont été orchestrées. Les avocats du procureur général des États-Unis ont obtenu gain de cause en plaidant que tout procès intenté à l’encontre du gouvernement américain doit avoir lieu dans leur pays. Selon les plaignants, cette décision est invalide parce qu’elle ne tient pas compte d’une application rétrospective de la clause 6A de la Loi, qui établit une dérogation à l’immunité de juridiction dans le cas de « décès ou dommages corporels survenus au Canada ».

Dans quel contexte MK-Ultra a‑t-il eu lieu?

Au début de la guerre froide, la CIA suspectait l’URSS d’avoir découvert une drogue puissante permettant le lavage de cerveau, alors que certains combattants américains auraient été reconditionnés au sortir de leur emprisonnement dans le camp communiste. Durant la « Peur Rouge », un fort sentiment anticommuniste se propage aux États-Unis ; c’est dans ce contexte que la CIA crée le projet hautement confidentiel MK-Ultra, afin de mettre au point des techniques de manipulation mentale. Il est reconnu assez unanimement que le financement des expériences à l’hôpital psychiatrique de McGill provenait en partie de la CIA, sous couvert de fausses associations.

Électrochocs 30 à 40 fois plus forts que la moyenne, administration de LSD-25, coma artificiel et mélange de médicaments : tels étaient les traitements infligés aux patients qui entraient à l’Institut Allan Memorial, dirigé par son tout premier directeur, Donald Ewen Cameron. Co-fondateur de l’association mondiale de psychiatrie (WPA), il est à l’époque psychiatrique de renom et a participé à l’examen du cas dirigeant nazi Rudoplh Hess lors du procès de Nuremberg en 1945.

De 1948 à 1964, Cameron est à la tête de l’hôpital psychiatrique en plein cœur de Montréal. Il y instaure une politique d’« hôpital de jour », considérée novatrice à l’époque, parce qu’elle laisse le choix aux patients de retourner chez eux après avoir reçu leurs traitements dans la journée. Elle permet ainsi d’humaniser les soins et de limiter l’impression d’enfermement.

Une partie des recherches de Cameron mises en œuvre à l’Institut Allan Memorial de McGill portaient sur le traitement de la schizophrénie. Son article co-rédigé en 1958 présente une approche psychiatrique visant la « déstructuration » du cerveau du patient : « L’objectif de la thérapie par électrochocs est de produire, en combinaison avec le sommeil, un état de confusion que nous appelons déstructuration complète. (tdlr) » Cet « état de confusion » mènerait alors le patient à perdre toute notion spatio-temporelle, puis de son identité, afin d’entamer par la suite une période de « reprogrammation » du cerveau en le bombardant de messages à répétition. Ces expériences auraient notamment créé des troubles de la parole, d’incontinence et l’amnésie chez les patients.

Témoignage d’une survivante

Lana Ponting, une Winnipégoise de 82 ans contactée par Le Délit, a subi les expériences de Cameron et a accepté de témoigner de son passage au Allan Memorial Institute. Elle réclame une reconnaissance de ses traumatismes ainsi qu’une compensation financière de la part du gouvernement canadien. Ponting a fait une déclaration sous serment devant la Cour supérieure du Québec, appuyant le procès intenté par les mères Mohawks, puisqu’elle croit que des victimes des expériences MK-Ultra ont bel et bien été enterrées en sol mcgillois.

Pour rappel, le collectif des mères Mohawks a déposé une plainte en mars 2022 contre la construction du Nouveau Vic, alléguant que des tombes non marquées d’enfants autochtones, victimes des expériences du docteur Cameron et de mauvais traitements, seraient présentes sur le site.

De tempérament fugueuse, Ponting a été envoyée à l’hôpital psychiatrique en 1958 alors qu’elle était âgée de 15 ans. « J’avais des problèmes avec ma famille. Mon père et ma belle-mère n’avaient aucune idée de ce qu’était réellement l’Allan Memorial Institute. Et puis j’y suis entrée. On m’a donné beaucoup de drogues, y compris du LSD », explique-t-elle.

Ponting avoue ne pas se souvenir beaucoup de cette époque, en raison de la forte dose de médicaments et de drogues qu’elle ingérait. Elle conserve tout de même le souvenir de Cameron comme d’« un homme très méchant » et définit ses traitements comme de la « torture » qui ont laissé chez elle des traces physiques et mentales.

Elle est l’une des rares personnes qui a pu accéder à son dossier médical, qui consignait des notes sur le contexte des expérimentations illégales. Ce dossier s’avère bien souvent crucial pour récolter des preuves médico-légales de ce qui s’est véritablement passé à l’Institut Allan Memorial. En effet, plusieurs familles de survivants n’ont pas pu mettre la main sur ce dossier pour des raisons de confidentialité, ou encore parce qu’il aurait été détruit dans la foulée de la décision de la CIA d’éliminer en 1973 tout document relié au projet MK-Ultra.

Elle conserve tout de même le souvenir de Cameron comme d’« un homme très méchant » et définit ses traitements comme de la « torture » qui ont laissé chez elle des traces physiques et mentales.

Lana Ponting dit ne pas faire ses démarches légales uniquement pour elle-même, mais bien parce qu’elle désire que « tout le monde sache que cela s’est vraiment passé ». Il est toujours possible que l’action collective se poursuive devant la Cour suprême pour infirmer la décision d’accorder l’immunité aux États-Unis dans l’affaire MK-Ultra.

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Chaque enfant compte https://www.delitfrancais.com/2023/10/04/chaque-enfant-compte/ Wed, 04 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52608 Une journée d’action pour la vérité et la réconciliation.

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Chaque année, le 30 septembre marque la Journée nationale de la vérité et la réconciliation, un jour férié fédéral au Canada depuis trois ans. Cette journée honore les survivants des pensionnats autochtones, les enfants qui ne sont jamais rentrés chez eux, ainsi que leurs familles et communautés, afin de commémorer le préjudice intergénérationnel que ces écoles ont causé. Cette année, le Foyer pour femmes autochtones de Montréal ainsi que l’organisation Résilience Montréal ont organisé une marche partant du monument Cartier jusqu’à la place du Canada.

« Nous marcherons ensemble »

Au début de la marche, au pied du Mont Royal, les orateurs se sont succédé au micro pour tenir des discours, entonner des chants traditionnels et partager des témoignages émouvants de plusieurs survivants des pensionnats et de leurs descendants. Beaucoup portaient des chandails oranges, symbolisant les souffrances des peuples autochtones causées par les pensionnats autochtones, et brandissaient des pancartes indiquant « Chaque enfant compte », « Ramenez nos enfants à la maison (tdlr) » ou « Soutien à la Kahnistensera » – le groupe de mères Mohawk qui tente d’arrêter les travaux de forage et d’excavation sur le site que l’Université McGill souhaite réaménager. En passant par la rue Milton où se rassemblent de nombreuses personnes sans-abris, en majorité autochtone, les organisateurs de la marche ont encouragé les participants à donner de la nourriture et des vêtements à ceux qui en avaient besoin.

Victor Bonspille, élu chef du conseil de Kanehsatà:ke, territoire Mohawk, a exprimé lors d’un discours très émouvant, le besoin de se souvenir et d’honorer ces enfants, femmes et hommes perdus à cause du système des pensionnats. Bonspille a abordé la question de la reconnaissance des langues, des croyances et des cultures autochtones. Il a aussi demandé que ne soient pas oublié les traditions, les histoires et le passé, car « dès que nous oublions, nous perdons ». En évoquant directement le gouvernement québécois et canadien, il a déclaré : « Ils ont essayé de nous effacer, par le biais du système des pensionnats, par le biais du système judiciaire, et nous ne partons pas. Nous sommes là depuis des générations et nous n’irons nulle part. » C’est en finissant son discours sur une note d’harmonie et d’unité qu’il a remercié « tout le monde ici, toutes les Premières Nations, tous les non-Autochtones, j’apprécie que vous soyez tous venus et que vous manifestiez votre soutien ».

Margaux Thomas | Le Délit

Résilience autochtone

Lors de la marche, alors que les slogans « Nous sommes résilients pour nos enfants, pour la huitième génération » fusaient, Le Délit s’est entretenu avec David Chapman, directeur exécutif et cofondateur de Résilience Montréal, l’un des groupes ayant organisé la marche. Il s’agit d’un centre de jour pour le bien-être des plus vulnérables et constitue un lieu accueillant et sûr. Les personnes traumatisées des difficultés de la rue y sont honorées, défendues et peuvent accéder à des services qui répondent à leurs besoins. Créé en 2019, ce projet communautaire soutient la population autochtone sans- abri à l’angle des rues Atwater et Sainte Catherine. David Chapman parle des Autochtones comme « la population sans-abri la plus marginalisée ». L’objectif global est de restaurer le bien-être physique, émotionnel, spirituel et psychologique [des individus, ndlr].

« Ils ont essayé de nous effacer, par le biais du système des pensionnats, par le biais du système judiciaire, et nous ne partons pas »



Victor Bonspille,
Chef du conseil du territoire Mohawk Kanehsatà:ke

David Chapman explique qu’il s’agit d’une organisation qui « comble les manques ». Son but premier est d’offrir de l’accessibilité : « Vous pouvez être ivre, vous pouvez avoir un partenaire avec vous, un chien ou un rat de compagnie, personne ne vous posera de questions. » Les travailleurs d’intervention – qui sont pour la plupart des travailleurs autochtones – accueillent les personnes qui franchissent leurs portes et répondent à leurs besoins. Parfois, ils doivent refaire « une pièce d’identité, une carte d’assurance maladie, [ils doivent trouver, ndlr] un moyen de retourner chez eux dans le Nord [territoires autochtones du Nunavik, ndlr], de trouver des billets d’avion, un logement, une place en cure de désintoxication et même de les conduire à l’aéroport à cinq heures du matin », et Résilience Montréal s’en occupe. Ils fournissent également des vêtements, un endroit pour se reposer, l’accès à une douche, à Internet ou au téléphone.

Le problème, c’est que l’organisation manque de moyens financiers : « Certains coûts deviennent astronomiques, lorsque nous dépensons plus de 13 000 dollars canadiens par semaine en nourriture (avec 1 000 repas par jour) et que le loyer [de Résilience Montréal, ndlr] est de 20 000 dollars par mois. » Il est toutefois possible de faire des dons pour aider l’organisation.

La communauté mcgilloise mobilisée

Le 29 septembre dernier, la Faculté d’éducation de McGill s’est également mobilisée, comme chaque année depuis cinq ans, lors d’un petit rassemblement sur le campus pour la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation et la Journée du chandail orange. La cérémonie a été ouverte avec le discours de l’aîné invité, Ka’nahsohon Kevin Deer, suivi d’un événement interactif intitulé « Visite critique du campus », développé au sein de la Faculté et guidé par des étudiants autochtones en plein air sur le campus. Parmi les initiatives autochtones que l’Université met en place, il y a trois nouveautés cette année dans les ressources humaines, la reconnaissance de l’excellence autochtone et le renforcement des partenariats. Quinze nouveaux professeurs et employés autochtones ont été accueillis à McGill à l’hiver dernier. Trois membres des Premières nations, Inuits et Métis (PNIM) ont été décernés des doctorats honorifiques en mai et juin 2023. Enfin, McGill a créé un premier Comité consultatif autochtone dont la composition comprendra des leaders communautaires et des parties prenantes internes et externes à McGill.

Margaux Thomas | Le Délit

Les Mères Mohawks « trahies »

Deux jours après la marche de commémoration des survivants des pensionnats et de leur descendants, l’Université McGill ainsi que la SQI (Société des Infrastructures du Québec) ont entamé les travaux de construction du Nouveau Vic « dans une zone où les chiens renifleurs ont détecté des restes humains », d’après la représentante des Mères Mohawks lors d’une conférence de presse le lundi 2 octobre 2023. Il semblerait que McGill et la SQI refusent de coopérer en fournissant des informations de base permettant à l’enquête de conserver un minimum de crédibilité, « alors que les artefacts sont malmenés et que les preuves sont niées sans aucune explication », d’après un avis aux médias que les Mères Mohawks ont fourni pendant la conférence de presse. Les Mères Mohawks se sentent trahies, et affirment que malgré tout le soutien reçu il y a seulement deux jours, lors de la marche, « tout le monde s’en fiche, ils portent leurs chandails oranges, mais c’est tout ».

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La loi 96 : Entre unification et division https://www.delitfrancais.com/2023/10/04/la-loi-96-entre-unification-et-division/ Wed, 04 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52635 Retour sur la manifestation du 28 septembre.

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Le jeudi 28 septembre, devant le portail Roddick de l’Université McGill, a eu lieu une manifestation contre la Loi 96, portant sur la langue officielle et commune au Québec. La manifestation a été organisée par le comité spécial contre la Loi 96, une organisation ayant pour but d’informer le public québécois sur la Loi 96 et sa juridiction. Le comité est actuellement en pleine bataille juridique devant les tribunaux afin de renverser la Loi 96. La manifestation s’est déroulée de 11h à 13h et était constituée d’une trentaine de manifestants pourvus de pancartes ainsi que de bénévoles distribuant des pamphlets décrivant la Loi et ses obstacles pour les Québécois.

La Loi 96 en bref

La Loi 96, adoptée le premier juin 2022 à l’Assemblée nationale, est une loi modificatrice qui réforme la Loi 101, aussi connue sous le nom de la Charte de la langue française. Cette dernière, adoptée en 1977 par le gouvernement de René Lévesque, a fait du français l’unique langue officielle au Québec et a imposé l’enseignement en français à tous les immigrants, sauf aux enfants dont l’un des parents a étudié dans une école anglophone dans le système scolaire québécois. En 2022, le gouvernement du premier ministre François Legault a souhaité renforcer le statut du français au Québec et dans toutes les sphères de services publics, en adoptant la Loi 96 qui réforme la Charte de la langue française.

Grâce à la Loi 96, le français devient le dénominateur commun entre tous les habitants du Québec. L’État a maintenant l’obligation d’offrir tous ses services publics aux citoyens uniquement en français, sauf exception les laissant être servis en anglais. Le système scolaire est lui aussi assujetti à cette Loi, puisque les cégeps anglophones sont maintenant dans l’obligation d’offrir trois cours supplémentaires en français, et sont, depuis septembre, limités à 30 854 étudiants cumulés. Cette Loi est, selon le gouvernement Legault, une façon concrète de protéger la langue française et de permettre davantage de cohésion entre les habitants du Québec par l’usage d’une seule et même langue.

Le dilemme de la Loi 96 pour les Québécois

La Loi 96 renforce le statut du français au Québec en rendant obligatoire l’usage du français au sein des services offerts par le gouvernement à tous les citoyens à quelques exceptions près : les immigrants arrivés il y a moins de six mois, les communautés autochtones, les personnes éligibles à l’enseignement en anglais, et quelques autres. Il est donc ici question des interactions dans les hôpitaux, dans les centres de services automobiles, dans les boîtes vocales téléphoniques, et tant d’autres.

Thea Borck et Olivia Bernath, deux bénévoles du comité spécial contre la Loi 96 présentes à la manifestation du 28 septembre, ont partagé les motivations de leur implication dans le comité. Thea Borck explique que, selon elle, la problématique des services uniquement en français limitent certaines minorités linguistiques : « Ce projet de loi vise en réalité
à vous empêcher d’accéder aux services essentiels dont vous avez besoin
. (tdlr) » Elle donne pour exemple les étudiants étrangers à McGill et les personnes âgées qui ne maîtrisent pas tout à fait le français, qui sont contraints de recevoir des services de santé en français malgré les obstacles que cela leur apporte.

« Le problème avec le projet de Loi 96, c’est qu’il tente de passer outre la Charte fédérale. »

Thea Borck
Layla Lamrani | Le Délit

Le débat constitutionnel

Les moyens d’adoption de cette Loi ont aussi été source de polémique puisqu’elle a nécessité l’utilisation de l’article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés par le gouvernement Legault lors de son adoption en 2022. Aussi connue sous le nom de la clause dérogatoire, elle permet aux institutions politiques fédérales, provinciales et municipales d’adopter des projets de lois contournant certains droits protégés par la Charte pour une durée de cinq ans, et de ce fait, d’éviter des recours judiciaires. La Loi 96 a ainsi été adoptée à l’aide de la clause dérogatoire par mesure préventive afin d’éviter des mesures judiciaires qui pourraient empêcher son adoption. Le ministre de la justice Simon Jolin-Barrette s’est exprimé sur l’usage de cette clause, la qualifiant de nécessaire lorsque le français est en danger, car selon lui « ce n’est pas aux tribunaux à définir le contrat moral, le contrat de vivre-ensemble, c’est aux élus de l’Assemblée nationale à le faire ».

« Cette Loi est, selon le gouvernement Legault, une façon concrète de protéger la langue française et de permettre davantage de cohésion entre les habitants du Québec par l’usage d’une seule et même langue »

Thea Borck explique que selon elle : « Le problème avec le projet de Loi 96, c’est qu’il tente de passer outre la Charte fédérale. » Les deux jeunes femmes ont donc entretenu que l’usage de la clause dérogatoire par le gouvernement Legault afin d’adopter cette Loi est pour eux considérée comme inconstitutionnelle, et consiste en une grande problématique, qui est une raison de plus pourquoi le Comité Special Task Force est actuellement devant les tribunaux afin de renverser cette Loi.

Où en sommes-nous maintenant?

Le gouvernement québécois est dans une situation difficile en tentant de protéger la langue française par l’ajout de mesures linguistiques contraignantes qui exercent une pression sur les Québécois. De la Loi 101 à la Loi 96, les exigences augmentent monumentalement envers les citoyens, les entreprises privées et les organismes gouvernementaux afin de permettre davantage de cohésion entre les citoyens par l’usage d’une seule et même langue.

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Montréal en marche pour le climat https://www.delitfrancais.com/2023/10/04/lmontreal-en-marche-pour-le-climat/ Wed, 04 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52680 La manifestation de la rage climatique à la croisée des combats.

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Le vendredi 29 septembre dernier, à 14h au parc Jeanne-Mance, plus d’un millier de personnes, en grande majorité des étudiants, ont entonné des chants aux thèmes désormais familiers : « Et 1, et 2, et 3 degrés, c’est un crime contre l’humanité! » La Semaine de la Rage Climatique, organisée par le collectif du même nom dans les villes de Québec, Sherbrooke et Montréal, s’est achevée avec succès avec la manifestation de la Rage Climatique, qui a su rassembler la jeunesse pendant plus de trois heures à travers les rues de Montréal. Le Délit s’est rendu sur place pour vous rendre compte du déroulé de la manifestation.

Un écologisme radical?

L’événement était marqué par des revendications écologiques radicales. Rage Climatique affirme, sur son site Internet, que la semaine avait pour but de « mettre en avant une écologie radicale, anti-oppressive, anticoloniale et anticapitaliste ». Fini l”« éco-anxiété », les organisateurs de la marche ont appelé à transformer la peur du bouleversement climatique en « écofureur ». Cette colère idéologique se retrouvait dans les cortèges, notamment par la présence de plusieurs groupes anarchistes et communistes, comme Fightback. Le Délit s’est entretenu avec plusieurs manifestants, dont Justin, jeune militant indépendant, qui nous a expliqué ses motivations : « Le système économique dans lequel on vit nous mène droit dans le mur. La logique d’accumulation continue est en train de détruire la planète et de tous nous tuer. C’est aux riches de payer pour la crise qu’ils ont créée. » Les sensibilités politiques variaient, mais elles étaient réunies vendredi autour du combat climatique. Pour Joanie, manifestante du Front commun pour la transition énergétique, il s’agit de la meilleure stratégie : « L’important, c’est de multiplier les tactiques et d’être ensemble, au-delà des idéologies de chacun. »

La jeunesse (mais pas que) au rendez-vous

Hormis les groupes activistes, beaucoup de petits groupes d’étudiants du secondaire ou d’université étaient présents, participant à l’atmosphère gaie et bon enfant du cortège. Avant 15h, la foule réunie autour de la statue George-Étienne Cartier s’adonnait à la danse, aux chants et à la discussion. Côté pancartes, les militants allaient du plus direct « Capitalisme = Cancer de la planète (tdlr) » au plus décalé « La Terre devient plus chaude que Timothée Chalamet ».

Les motivations étaient également variées, entre lutte idéologique et revendications locales. Ludovic, étudiant originaire de Rouyn- Noranda, l’une des villes les plus polluées dans l’air du Canada, nous a raconté son combat : « J’allais à l’école à côté de la fonderie Horne. Chaque mercredi, une alarme sonnait et on devait se confiner et fermer les fenêtres en prévention d’une fuite de produits toxiques. […] J’ai envie, un jour, de pouvoir revenir fonder ma propre famille sans avoir peur de mettre en danger la vie de mes enfants. » Rappelons que la fonderie Horne rejette des tonnes de contaminants chimiques, dont l’arsenic, sur Rouyn-Noranda, si bien que la population de la ville court un risque accru de cancer du poumon.

Il reste néanmoins à préciser que les étudiants n’étaient pas seuls. Nous avons pu échanger avec Catherine et Isabelle, du groupe Mères au front : « On marche, on travaille avec les jeunes pour l’environnement. Les jeunes sont possiblement plus intéressés par le combat ; c’est leur avenir, ils ont peur et je les comprends. Mais leurs parents sont là aussi! » Mères au front est un groupe activiste spécialement dédié aux adultes révoltés face à la crise climatique. Le combat rassemble, à travers les générations.

Que faire de la convergence des luttes anticapitalistes et écologistes? Est-elle inévitable, ou contingente à l’inaction des gouvernements? La question reste ouverte. Pour les manifestants que nous avons interrogés, l’insuffisance des politiques environnementales canadiennes était claire. L’urgence climatique inquiète, à mesure que ses effets se font ressentir par les Québecois : des records absolus de température ont encore été battus en ce mois de septembre ( jusqu’à 35,8 °C à Waskaganish, au Nord-du-Québec). Au-delà des considérations idéologiques, cette manifestation a ainsi permis aux Montréalais engagés d’exprimer leur désir de réaction politique ferme et imminente, à l’échelle de la province, et du Canada.

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