Archives des Non classé - Le Délit https://www.delitfrancais.com/category/non-classe/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Tue, 05 Nov 2024 23:06:37 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.6.2 Les échecs du REM https://www.delitfrancais.com/2024/11/06/les-echecs-du-rem/ Wed, 06 Nov 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=56511 Des trajets de près de trois heures par jour pour les étudiants de la Rive-Sud.

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Le Réseau express métropolitain (REM) est-il un cadeau empoisonné pour les habitants de la Rive-Sud? C’est bien le sentiment que partagent de nombreux utilisateurs, en particulier les étudiants, relayés au second plan dans la planification des horaires et du service de ce nouveau réseau de transport en commun, fonctionnel depuis le mois d’août 2023.

Le problème concerne tout particulièrement les individus qui n’habitent pas à distance de marche d’une station de métro. Ils se plaignent alors du manque décourageant de places de stationnement d’auto gratuites devant le REM, qui se fait ressentir de manière grandissante depuis la rentrée scolaire en septembre. « Récemment, si j’arrive à 7h30 du matin à ma station du REM, il n’y a déjà plus de places. Il faut que j’arrive avant 7h si je veux avoir une chance de trouver une place! » raconte Sabrina*, étudiante en droit à McGill. Cette situation est d’autant plus frustrante puisque Sabrina, comme de nombreux autres étudiants, ne commence parfois ses cours qu’en début d’après-midi. Elle se retrouve donc malheureusement contrainte de partir tôt le matin afin de s’assurer d’avoir une place de stationnement.

L’incapacité du réseau à répondre aux besoins des étudiants se reflète notamment dans le service d’autobus transportant les résidents des zones plus éloignées de la Rive-Sud vers les stations du REM. Ces bus ne circulent que tôt le matin et en fin d’après-midi, suivant les horaires des travailleurs traditionnels, de 9h00 à 17h00. Dans le cas de Sabrina, le dernier bus passant devant chez elle le matin part à 8h09 et le dernier bus pouvant la ramener en soirée passe aux alentours de 18h00. Un véritable casse-tête pour un étudiant qui, par exemple, n’aurait cours qu’entre 17h00 et 19h00. « J’en ai souvent pour près de trois heures de transports par jour dans ces conditions », se désole Sabrina. « Ce système est peut-être pratique pour les parents travaillant de 9h00 à 17h00, mais certainement pas pour les étudiants! » Face à cette situation, Sabrina est parfois tentée de reprendre sa voiture, espérant miraculeusement trouver une place de stationnement près de sa station REM. « Il y a quelques jours, je n’ai rien trouvé. J’étais tellement désespérée que j’ai garé ma voiture à une place interdite et j’ai eu une amende.»

Cette situation est d’autant plus problématique que le REM est désormais la seule option de transport en commun pour les citoyens de la Rive-Sud. Depuis la mise en service du REM le 31 juillet 2023, une clause de non-concurrence hautement controversée empêche les autobus de traverser le pont Champlain, ce qui contraint ainsi les utilisateurs à emprunter le REM, puisqu’il s’agit de la seule option leur étant offerte. Un choix politique lourd de conséquences, qui se traduit par un achalandage démesuré des stations et par des stationnements bondés de voitures.

En d’autres termes, les étudiants sont pris au piège, avec peu d’options pour des trajets sereins et efficaces. Que ce soit par une augmentation des services de bus circulant entre les stations du REM et les différentes zones de la Rive-Sud, un accroissement des places de stationnement ou un abandon de la clause de non-concurrence, des solutions doivent être envisagées!

*Nom fictif

Eileen Davidson | Le Délit

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Chasse aux graffitis https://www.delitfrancais.com/2024/11/06/chasse-aux-graffitis/ Wed, 06 Nov 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=56527 Si tu penses que Montréal ne peut faire aucun tort,Tu n’es jamais parti·e à la chasse aux graffitis,Dans les ruelles de Saint-Laurent,Tout l’après-midi d’un jour gris,Car tu en avais enfin eu le temps,Pensant qu’être à l’extérieur,Ne pouvait être que ce qu’il y aurait de meilleur. Les personnages sur la brique devant toi,Jamais tu ne leur… Lire la suite »Chasse aux graffitis

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Si tu penses que Montréal ne peut faire aucun tort,
Tu n’es jamais parti·e à la chasse aux graffitis,
Dans les ruelles de Saint-Laurent,
Tout l’après-midi d’un jour gris,
Car tu en avais enfin eu le temps,
Pensant qu’être à l’extérieur,
Ne pouvait être que ce qu’il y aurait de meilleur.

Les personnages sur la brique devant toi,
Jamais tu ne leur ressembleras,
Promesse à toi-même qui te terrifia.
Une œuvre ne se cache pas,
Et ce n’est pas entre les portes arrière de cantine,
Aux odeurs de gras,
Qu’on se déploie.
Et tu reconnais au moins que ça,
Tu te le dois.


La chasse aux graffiti fut fructueuse,
Les nouveautés murales nombreuses,
Mais la rumination qui creuse,
Elle te laisse anxieux·se.
Tu renommes la ruelle « l’existentielle »,
Hommage à ta crise silencieuse,
Que tu rends,
En quittant,
Saint-Laurent.

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La lutte des Wet’suwet’en pour leurs terres ancestrales https://www.delitfrancais.com/2024/10/09/la-lutte-des-wetsuweten-pour-leurs-terres-ancestrales/ Wed, 09 Oct 2024 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=56259 Yintah : un documentaire percutant et nécessaire.

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Le documentaire Yintah, réalisé par Jennifer Wickham et Michael Toledano, est bien plus qu’un reportage : c’est une œuvre puissante qui plonge au cœur de la résistance autochtone des Wet’suwet’en en Colombie-Britannique. Filmé sur une période de 10 ans, le documentaire retrace la lutte menée pour protéger leurs terres ancestrales contre l’intrusion brutale des oléoducs et des machines, face à l’indifférence d’un État motivé par le profit. Chez les Wet suwet’en, le territoire n’est pas une carte à ratisser ni une surface à conquérir. La terre est vivante, vibrante. Elle est l’âme des ancêtres, la mémoire des générations passées, et la promesse des générations à venir. Yintah brille par sa capacité à capturer la beauté sauvage du territoire canadien. Les plans aériens offrent une vue à couper le souffle des paysages que la communauté lutte pour préserver. Ces images mettent en exergue l’absurdité du projet d’oléoduc de Trans Mountain, une intrusion brutale dans un espace d’une pureté rare. Les réalisateurs montrent sans artifice ce que les Wet’suwet’en tentent de protéger : une terre dont ils ne sont pas les propriétaires, mais les gardiens.

Les images poignantes de cette lutte révèlent une vérité dérangeante : nous sommes les occupants permanents de terres qui ne nous appartiennent pas. Yintah est un assemblage minutieux de moments clés, captés dans une démarche de cinéma direct. Chaque image est soigneusement choisie pour refléter la réalité brute de la réoccupation du territoire par les Wet’suwet’en, illustrant à la fois la résistance de la communauté et la violence de l’État. On ressent la colère, la tristesse, mais aussi la résilience qui brûle dans chaque regard, chaque geste.

La musique s’entrelace avec les images, jouant un rôle crucial dans la construction émotionnelle du film. Des chants traditionnels rappellent l’histoire millénaire qui se déroule sous nos yeux. On voit les femmes Wet’suweten, gardiennes du territoire, debout face aux agents armés de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), tenant tête avec un calme et une dignité qui font honte à ceux qui se tiennent de l’autre côté. Elles chantent d’une voix brisée, dans un acte de résistance pacifique, et refusent de se taire, même lorsqu’on leur passe les menottes aux poignets. Mais le véritable cœur du film réside dans son message : une dénonciation de l’injustice coloniale persistante au Canada. Ce qui rend Yintah particulièrement puissant, c’est son refus de sombrer dans le pathétique. La douleur est présente, mais elle est portée avec dignité. Le rire semble parfois être la seule réponse possible à l’ironie de la situation, qui culmine lorsqu’un policier scie un panneau de bois portant l’inscription « Réconciliation ». Un geste aussi absurde que symbolique, qui résume toute la duplicité des politiques gouvernementales. Le gouvernement Trudeau parle de réconciliation, de respect des droits autochtones, mais ses actions révèlent un autre visage, celui de la force brute et de l’exploitation.

Et puis, il y a la fin. Un appel vibrant depuis l’écran, qui incite à agir, à se rallier à la cause. À ne pas oublier cette résistance des Wet’suwet’en, cette solidarité qui, bien que freinée par le confinement, continue de réclamer notre attention. Parce que Yintah n’est pas un film que l’on regarde passivement. Il vous interpelle, vous secoue, vous transforme en témoin, en acteur potentiel d’une lutte qui est loin d’être terminée.

Yintah sera disponible sur la plateforme de visionnement Netflix dès le 18 octobre.

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Calendrier culturel – septembre 2024 https://www.delitfrancais.com/2024/09/11/calendrier-culturel-septembre-2024/ Wed, 11 Sep 2024 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=55690 Danse – Festival Quartiers Danses 22e édition du Festival de danse contemporaine, qui réunit des choréographes originaires de sept pays. Jusqu’au 14 septembrePlace des arts Théâtre - Trop humains par Étienne Lepage10 interprètes explorent la condition humaine dans une série de scénettes improbablesDu 11 septembre au 5 octobreThéâtre de Quat’Sous Littérature – Festival international de… Lire la suite »Calendrier culturel – septembre 2024

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Danse – Festival Quartiers Danses

22e édition du Festival de danse contemporaine, qui réunit des choréographes originaires de sept pays.
Jusqu’au 14 septembre
Place des arts

Théâtre - Trop humains

par Étienne Lepage
10 interprètes explorent la condition humaine dans une série de scénettes improbables
Du 11 septembre au 5 octobre
Théâtre de Quat’Sous

Littérature – Festival international de la littérature (FIL)

Le FIL célèbre ses 30 ans d’existence.
Du 18 au 28 septembre

Théâtre – Cordes

par Inés Adán Mozo
Comédie dramatique teintée d’humour qui explore la masculinité et les rivalités fraternelles.
Du 9 septembre au 2 octobre
Théâtre La Licorne

Théâtre – Les gens, les lieux, les choses

Anne-Élisabeth Bossé incarne Emma, comédienne toxicomane contrainte d’entamer une démarche de désintoxication.
Du 12 septembre au 12 octobre
Théâtre Duceppe

Exposition – P pour Palestine

Exposition collective qui rassemble des œuvres multidisciplinaires d’artistes palestiniennes sous le sigle de la résilience.
21 septembre au 14 décembre
Centre d’exposition Plein Sud

Théâtre – La femme qui fuit

Adaptation théâtrale du roman éponyme d’Anaïs Barbeau-Lavalette par Sarah Berthiaume & Alexia Bürger.
Du 10 septembre au 5 octobre
Théâtre du Nouveau Monde

Cinéma – Tous toqués!

Julie Le Breton partage l’écran avec l’acteur français Édouard Baer dans cette comédie rassembleuse qui plaira aux amateur·ice·s de cuisine.
Dès le 13 septembre
Cinéma Quartier Latin

Cinéma – Festival international du film black de Montréal (FIFBM)

L’inauguration de cette 20e édition du FIFBM sera présidée par nul autre que le réalisateur américain Spike Lee.
Du 25 au 29 septembre
L’Olympia de Montréal

Exposition – Deux par deux rassemblés

Collection qui rassemble des œuvres récemment acquises par le MBAM.
Du 11 septembre au 5 octobre
Musée des Beaux-Arts de Montréal

Théâtre – La démagogie des dragons

Deux artistes québécois se lancent à la quête de leurs racines vietnamiennes.
Du 16 septembre au 11 octobre
Centre du Théâtre d’Aujourd’hui

Théâtre – Peau d’âne

Le duo Félix-Antoine Boutin et Sophie Cadieux revient à la charge avec une réinterprétation complètement déjantée de ce classique des Frères Grimm.
Du 27 septembre au 15 octobre
Salle Denise-Pelletier

Tu peux aussi visiter la 17e édition de l’exposition World Press Photo, située au Marché Bonsecours jusqu’au 14 octobre! C’est 12$ pour les étudiant·e·s!

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Dernière édition https://www.delitfrancais.com/2024/02/22/derniere-edition/ Fri, 23 Feb 2024 00:05:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=55020 L’article Dernière édition est apparu en premier sur Le Délit.

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Rose Chedid | Le Délit

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Un indépendantisme solidaire https://www.delitfrancais.com/2024/02/21/un-independantisme-solidaire/ Wed, 21 Feb 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54932 Une nouvelle campagne de Québec Solidaire promeut la souveraineté auprès des jeunes.

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Le 9 février dernier, Québec Solidaire, parti politique de gauche dirigé par les co-porte-paroles Gabriel Nadeau-Dubois et Émilise Lessard-Therrien, a annoncé une campagne destinée à rallier les jeunes au projet indépendantiste québécois.

De nouveaux arguments

Le projet proposé consiste en quatre étapes. Il demande l’élection d’un gouvernement solidaire, la création d’une assemblée représentative de la société québécoise, le développement d’une constitution à l’image de l’opinion et des inquiétudes du peuple québécois, et finalement, la déclaration de l’indépendance de ce nouveau pays.

La campagne établit un nouveau visage à l’argument souverainiste. En effet, l’idéologie est souvent associée à une vision anti-immigration tenue par une tranche de la population âgée qui avait l’âge de voter lors des deux premiers référendums sur l’indépendance du Québec en 1980 et en 1995. Lors d’une entrevue avec Radio-Canada, Ruba Ghazal, députée solidaire à la tête de cette nouvelle campagne, explique vouloir avancer une vision plus progressiste de la souveraineté. En effet, celle-ci met en lumière des enjeux précédemment exclus du discours indépendantiste, tels que l’importance des relations de nation-à-nation avec les populations autochtones en territoire québécois.

Attrait auprès d’un jeune public

La campagne lancée cible un public jeune, auprès duquel le projet indépendantiste semble présentement avoir moins d’attrait. La nouvelle génération n’a pas vécu la période des référendums, et est moins préoccupée par l’idée d’un Québec indépendant. Éric Bélanger, professeur en sciences politiques à l’université McGill écrit au Délit : « Il est certain que ce projet a le potentiel de devenir attrayant s’il est arrimé de manière convaincante aux
préoccupations (notamment environnementales) de la jeune génération actuelle. » C’est ce que Québec Solidaire tente, en notant dans leur plan qu’un Québec indépendant serait libre de passer des lois plus progressistes sur l’environnement, qui seraient autrement contraintes par la séparation constitutionnelle des juridictions. Bien que la vision avancée soit importante au succès d’un mouvement pro-souverainiste, l’attention doit être aussi portée au contexte socio-politique. Le professeur Bélanger explique que « le meilleur catalyseur d’appui pour le projet souverainiste au Québec a toujours été un sentiment de colère ou d’indignation vis-à-vis des autres partenaires canadiens ». Il poursuit qu’une telle crise n’est pas en vue. En effet, les autorités fédérales gèrent avec prudence leurs relations avec le Québec depuis la période des référendums en 1980 et en 1995. Le gouvernement fédéral
n’a rien à gagner de l’indignation des Québécois, et ceci se reflète dans sa politique qui a donné naissance à un fédéralisme asymétrique, c’est-à-dire un fédéralisme adapté aux spécificités du Québec.

Éric Bélanger note cependant la possibilité de points de friction importants entre le gouvernement québécois et le gouvernement fédéral. Il identifie notamment la potentielle décision de la Cour Suprême du Canada sur la constitutionnalité de la Loi 21. Cette loi sur la laïcité, pour laquelle le gouvernement caquiste de François Legault
a invoqué la clause nonobstant, fait polémique depuis son adoption en 2019. Le prononcement d’un jugement défavorable à la Loi 21 par la Cour « pourrait offrir un potentiel de choquer plusieurs Québécois ». En effet, cette loi, parfois perçue comme renfort du caractère distinctement laïque de la province, pourrait être source de tension entre le Québec et le Canada si la Cour Suprême émettait un jugement défavorable à l’opinion québécoise.

Pourquoi maintenant?

Québec Solidaire, affirme le professeur Bélanger, « cherche à réagir à la montée en popularité du Parti Québécois, et donc à ne pas laisser ce parti occuper seul toute la place concernant le projet de souveraineté ». En effet, le Parti Québécois gagne rapidement en popularité, surtout auprès du jeune électorat : en décembre 2023, 40% des jeunes disaient voter pour Québec Solidaire, et 23% pour le Parti Québécois, contre 36% et 27% en février 2024, respectivement, selon un sondage publié par la firme Léger.

La décision de lancer cette campagne n’est pas exclusivement stratégique. Elle est également fondée dans une réelle conviction idéologique au sein de Québec Solidaire que l’indépendance du Québec est un projet fondamental pour la province. Comme Bélanger le fait remarquer, Émilise Lessard-Therrien, nouvelle co-porte-parole du parti depuis juin 2023, adhère ouvertement au souverainisme depuis longtemps. Bélanger explique que cette croyance tenue par plusieurs membres influents du parti se traduit en « une croyance que les jeunes Québécois peuvent se laisser convaincre du bien fondé et de la nécessité du projet ». Toutefois, il note qu’il est trop tôt pour déterminer si l’idée gagnera de la traction au sein de cette tranche de la population.

Et l’opinion étudiante?

Bien qu’il soit trop tôt pour déterminer la popularité du projet indépendantiste Solidaire, Le Délit a discuté avec trois jeunes québécois·e·s (18–34 ans), Marianna, Alex* et Jess, pour mieux comprendre ce qui les attire dans la souveraineté québécoise, mais aussi leur réticence à s’embarquer dans un tel projet.

« Le meilleur catalyseur d’appui pour le projet souverainiste au Québec a toujours été un sentiment de colère ou d’indignation vis-à-vis des autres partenaires canadiens »

Professeur Éric Bélanger

Marianna explique que pour elle-même et son entourage, l’enjeu d’indépendance n’est pas la priorité, surtout pour les jeunes issus de familles immigrantes. « Nos inquiétudes ne sont pas basées autour de l’indépendance
du Québec. » Elle poursuit : « le Québec pourrait peut-être faire mieux sur le plan international s’il était indépendant, donc je pense que le projet a de la légitimité, et c’est certainement plus facile d’accrocher les jeunes avec leur vision [celle de Québec Solidaire, ndlr] altermondialiste [une pratique qui favorise une économie sociale et mieux répartie, ndlr] ».

Toutefois, des enjeux identitaires trompent l’attrait de cette vision pour Marianna. Elle clarifie que « les communautés immigrantes n’ont pas vraiment de sentiment d’appartenance au Québec, et s’associent plus au Canada qu’au Québec. Il faudrait promouvoir une identité québécoise qui est plus inclusive ». Elle illustre la nécessité d’un projet d’indépendance qui rallie les québécois·e·s de toutes les origines, et conclut : « Je ne me sentirais pas représentée dans un Québec qui ne fait plus partie du Canada. »

Alex trouve la proposition solidaire plus attirante. Iel adhère particulièrement à l’idée d’un Québec plus progressiste, qui n’est pas restreint par le reste du Canada, notamment sur des enjeux environnementaux.
Iel ajoute : « J’ai plus d’attachement au Québec, à sa culture et son histoire qu’au Canada. Je parle de la
culture québécoise au sens large, qui inclut les communautés immigrantes. Je pense que c’est important aussi qu’il y ait une valorisation de cette culture québécoise, et l’indépendance aiderait cela. »

L’indépendance, néanmoins, ne peut pas être obtenue coûte que coûte, selon Alex. « Il y a certaines choses que nous ne pouvons pas sacrifier ou compromettre, comme la place égale des nations autochtones ou des immigrant·e·s dans un Québec indépendant », conclut-iel.

Alex note également une dimension géographique à considérer avec l’approche de Québec Solidaire. « Ayant grandi en campagne avec des Québécois qui étaient tous blancs et francophones, je n’avais pas vraiment de sensibilité aux enjeux des communautés autochtones. Je ne sais pas si les arguments de Québec Solidaire sur l’importance d’inclure les nations autochtones dans le processus vont nécessairement rejoindre les jeunes qui ne sont pas sensibilisés à ces situations. »

Jess, pour sa part, exprime de l’ambiguïté. « Je n’ai pas d’opinion fondée. Au niveau identitaire, je m’associe plus au Québec qu’au Canada, mais le Canada fait quand même partie de mon identité. » Jess explique douter de l’approche de Québec Solidaire vis-à-vis ses relations avec les peuples autochtones, et de l’argument environnemental. En référence au plan mis en ligne par le parti, iel explique qu’au vu de la manière dont il est
présenté, « Québec Solidaire met le blâme sur le reste du Canada pour les problèmes environnementaux, alors que c’est un enjeu collectif ». Iel continue : « Ils disent trouver important de centrer les expériences des personnes autochtones, mais ils n’en parlent qu’à la fin. Est-ce l’indépendance d’abord et les peuples autochtones ensuite, ou les peuples autochtones d’abord et ensuite l’indépendance? »


*Nom fictif

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Le Mois de l’histoire des Noir·e·s https://www.delitfrancais.com/2024/02/11/le-mois-de-lhistoire-des-noir%c2%b7e%c2%b7s/ Sun, 11 Feb 2024 21:06:55 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54624 Le 1er février 2024 a marqué le lancement du Mois de l’histoire des Noir·e·s, et bien que celui-ci existe depuis 1978, il n’est célébré à McGill que depuis 2017. Cette année, Le Délit a décidé de lui dédier son édition spéciale, ainsi qu’à tous·tes les étudiant·e·s noir·e·s du campus. Le journalisme s’intègre indéniablement dans la… Lire la suite »Le Mois de l’histoire des Noir·e·s

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Le 1er février 2024 a marqué le lancement du Mois de l’histoire des Noir·e·s, et bien que celui-ci existe depuis 1978, il n’est célébré à McGill que depuis 2017. Cette année, Le Délit a décidé de lui dédier son édition spéciale, ainsi qu’à tous·tes les étudiant·e·s noir·e·s du campus. Le journalisme s’intègre indéniablement dans la structure raciale de la société québécoise, ayant une part d’influence sur la hiérarchisation raciale et les inégalités. Nous rapportons les histoires des autres, nous sommes engagé·e·s pour l’équité et déterminé·e·s à lutter contre les oppressions, mais nos identités ne peuvent pas, pour autant, disparaître de nos mots. Le manque de diversité dans le milieu du journalisme doit donc être questionné, car il participe à la perpétuation des inégalités sociales et structurelles de la société canadienne.
Selon une enquête menée par l’Association canadienne des journalistes (ACJ) en 2022 et rapportée par Radio-Canada, 78% des journalistes canadien·ne·s sont blanc·he·s. De surcroît, parmi dix salles de rédactions interrogées, huit ne comptaient aucun·e journaliste noir·e ou autochtone. De telles proportions dans le milieu du journalisme impacte nécessairement le type de nouvelles et de discours mis de l’avant, en plus de limiter la compréhension et l’interprétation de certaines dynamiques raciales dans la société canadienne.

« Tout est une question de race », car les institutions canadiennes ont été bâties sur les ruines du génocide culturel et des massacres des peuples autochtones, puis l’esclavage et l’exploitation des personnes noir·e·s. Si nous voulons comprendre les fonctionnements politique, culturel, institutionnel et économique de la société canadienne dans le but de partager avec exactitude toutes les nouvelles que nous traitons, nous ne pouvons pas nous abstenir de prendre en compte ces éléments dans les dynamiques de pouvoir. Si les structures ne changent pas, alors il est de notre devoir de promouvoir l’inclusion des journalistes noir·e·s, de questionner notre fonctionnement, notre structure, et de mettre en place des démarches actives pour faire de nos journaux des espaces qui ne reproduisent pas des schémas d’oppression, et qui osent aller à contre-courant pour apporter un peu de changement à l’ordre de notre société. Lutter pour la diversité et l’inclusion des journalistes noir·e·s est absolument nécessaire, car tous les discours se nourrissent en partie des mots diffusés par les médias. Enfin, nous croyons en la création et la valorisation de nouvelles plateformes qui favorisent la diffusion des expériences et pensées des étudiant·e·s noir·e·s, afin de proposer des alternatives qui soient des sources de pouvoir et d’émancipation.

Pour cette édition spéciale, nous avons ainsi eu la chance de collaborer avec le Réseau des
étudiant·e·s Noir·e·s de McGill (Black Students Network), une association étudiante dont l’existence est vitale au sein d’une université comptant seulement 4,6% d’étudiant·e·s noir·e·s dans sa population. Cette collaboration permet notamment au Délit d’accueillir la participation d’étudiant·e·s noir·e·s qui ont partagé avec nous leur talent et leur perspective unique. Nos pages arborent notamment des contributions artistiques tout aussi magnifiques que pertinentes. Notre couverture est l’œuvre de la talentueuse Océane Nzeyimana, étudiante en
première année, qui réalise des collages que vous pouvez retrouver sur son compte Instagram @ohciseaux. La dernière page accueille quant à elle les photographies et le texte de Harantxa Jean, qui propose des interprétations de peintures ou de photographies connues afin de questionner les représentations de la beauté féminine et de s’en réapproprier les codes.Avec ces collaborations, notre journal bénéficie de regards qui méritent d’être mis de l’avant bien au-delà des limites du mois de février. Nous dédions alors cette édition à tous·tes les étudiant·es noir·e·s de l’Université McGill. Le Mois de l’histoire des Noir·e·s est une occasion de célébrer les accomplissements, mais aussi de se rappeler des inégalités profondes et structurelles auxquelles les personnes noires font face dans leur quotidien. Néanmoins, ce mois est aussi loin d’être une fin en soi. La lutte contre le racisme systémique est un combat constant, qui dépasse largement les pages de notre journal.

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«Parfums étrangers» https://www.delitfrancais.com/2024/01/24/parfums-etrangers/ Wed, 24 Jan 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54431 Un poème de Jonas Sultan.

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Ouvre ce carnet, ses pages vierges et douces,
Qui sentent tout ce qui sent bon :
De la rosée de roses en émulsion de mousse,
Aux copeaux de cèdre aux pieds du bûcheron.

Du crayon grossier de l’enfant qui joue,
À la plume tendre du poète de saison,
Que ta prose mérite de se lire debout,
Et se vaille tant de forme que de fond.

Puis, lorsque le génie passe, que la fougue s’enfuit
Quand le soleil remplace la lumière des bougies,
Scelle d’un regard ces vers inachevés
Dans ce grimoire aux parfums étrangers.

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Dix chandelles (en cire de soja) pour le FVM! https://www.delitfrancais.com/2023/10/04/dix-chandelles-en-cire-de-soja-pour-le-fvm/ Wed, 04 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52719 Le Festival végane de Montréal fête ses dix ans d’existence.

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Le Palais des congrès était bondé, les 30 septembre et 1er octobre derniers, à l’occasion de la dixième édition du Festival végane de Montréal (FVM). Plus de 120 exposants, allant d’incontournables comme Aux vivres et BKIND à des entreprises véganes bourgeonnantes telles que Ethically Warm et WOOP4, en passant par des sanctuaires pour animaux de ferme et des organisations militantes, accueillaient les centaines de véganes et végécurieux·ses qui déambulaient entre les kiosques.

L’alimentation végétale à l’honneur

La facette la plus connue du véganisme est sans aucun doute l’alimentation à base de plantes (plant-based) ; il est donc peu étonnant que plus de la moitié des kiosques étaient dédiés à des produits alimentaires. Les bouchées gratuites permettaient au public d’échantillonner des saveurs des plus variées, notamment du tofu façon shish taouk, du tempeh style barbecue, des biscuits au matcha et chocolat blanc, des champignons shiitake en mode porc effiloché, et plus encore. Signe de l’innovation de la scène alimentaire végane, il était même possible d’essayer du poisson végétal : le saumon fumé de BY2048 – à base de carottes – avait la texture et le goût parfaits pour un bagel lox, tandis que le tartare mahi-mahi de WOOP4 était si réaliste qu’il a presque donné la frousse à notre journaliste végane!

« Signe de l’innovation de la scène alimentaire végane, il était même possible d’essayer du poisson végétal »

Les boissons à base de plantes étaient également mises de l’avant durant le FVM, du kombucha au lait de soja. Particulièrement populaire, le kiosque de la Crémerie des Trois- Rivières permettait au public majeur de goûter ses crèmes alcoolisées à base de lait d’avoine, à saveur de chocolat-noisette ou d’espresso. L’alcool végane était aussi au cœur de la conférence de Priya Rao, au sujet des accords entre mets et vins véganes, car – contrairement à la croyance populaire – tous les vins ne sont pas véganes : plusieurs vigneron·ne·s utilisent encore des substances animales (notamment des blancs d’œuf ) dans le collage et la filtration du vin, sans compter l’utilisation de fertilisant animal dans les vignobles ou de cire d’abeille dans les amphores. Certaines bases de données en ligne, telles que The Social Herbivore pour les vins canadiens ou Barnivore à l’échelle internationale, offrent toutefois un répertoire de vins véganes.

Végane de la tête aux pieds

Le véganisme est toutefois loin de n’être qu’un régime alimentaire : ce mode de vie s’applique à tous les aspects du quotidien, de nos vêtements à nos soins corporels. Plusieurs entreprises mettaient ainsi de l’avant des alternatives végétales et sans cruauté aux éléments de notre quotidien, comme Les Pétards avec leurs chandelles à base de cire de soja ou encore Bego et leurs élégantes sandales en cuir d’ananas. Ethically Warm, qui participait à son premier FVM, a particulièrement interpellé notre journaliste avec ses parkas, doudounes et vestes écologiques, biodégradables, éthiquement et localement produits et – bien sûr – véganes. « Notre but, souligne la fondatrice Alexandra Gavrila, était d’offrir une alternative aux Kanuk et Canada Goose, ces manteaux canadiens hauts de gamme auprès desquels, au niveau de l’éthique et du véganisme, on ne trouvait toutefois pas notre compte », ajoutant que les alternatives véganes existantes – à base de plastique – n’étaient pas pour elle la solution.

BKIND, présentateur officiel du FVM, a également attiré l’attention de notre journaliste : l’entreprise accueillait les festivalier·ère·s à l’entrée du festival avec un immense kiosque accompagné de figures gonflables (représentant notamment Luna, le chien de la fondatrice) ainsi que d’une station de manucures express! Les produits de beauté et les soins pour la peau de BKIND sont depuis plusieurs années une valeur sûre de la scène végane montréalaise, et l’entreprise est particulièrement reconnue pour la qualité de ses vernis à ongle non toxiques. Pour la fondatrice de BKIND Marilyne Bouchard, cette dixième édition du FVM rend évidente l’évolution du véganisme depuis une décennie : « ce n’était pas cool » de vendre des produits végétaliens et sans cruauté au milieu des années 2010, mais être végane en 2023 est « un outil marketing » inestimable pour les entreprises, et le FVM, tout comme BKIND, ont évolué conséquemment à cette popularité croissante du mouvement végane au Québec.

Pour les animaux

Fondamentalement, le véganisme est une position sociale et politique qui s’oppose à l’exploitation animale. Il aurait donc été difficile de célébrer une dixième édition du FVM sans mettre en valeur le travail des activistes qui luttent, chacun·e à leur manière, pour la cause animale. Du côté des exposants, l’on trouvait notamment Montreal Pig Save, un regroupement qui organise des vigiles devant des abattoirs montréalais afin de commémorer les derniers moments des cochons qui y seront tués, et Plant Based Treaty, une organisation mondiale qui vise à convaincre des acteurs municipaux, nationaux et internationaux à effectuer un virage végane dans le but de mettre les systèmes alimentaires au cœur du combat contre la crise climatique, étant donné les impacts dévastateurs de l’agriculture animale sur nos écosystèmes et la biodiversité.

Les refuges pour animaux – tant locaux qu’internationaux – étaient eux aussi à l’honneur. Le Sanctuaire pour animaux de ferme de l’Estrie (SAFE) bénéficiait d’un kiosque entouré de porte-parole et de festivalier·ère·s enthousiastes ainsi que d’une conférence touchante donnée par la fondatrice du SAFE, Catherine Gagnieux. Cette dernière a raconté en toute humilité les grandes difficultés auxquelles elle fait face dans le cadre de sa mission, du manque de financement et de bénévoles au fardeau émotionnel qui accompagne l’obligation de refuser de nouveaux résidents, faute de place. Elle endure ces défis grâce à la beauté indicible du lien qui peut unir les animaux humains aux animaux non humains, puisque même si ces derniers n’ont pas de voix, « ils parlent, et il faut juste apprendre à les écouter ».

Gabrielle Genest | Le Délit

Dans sa propre conférence, Sarah Heiligtag abondait dans le même sens, soulignant la force du pouvoir de connexion entre les animaux humains et non humains : « Lorsque des enfants viennent au sanctuaire et regardent un cochon dans l’œil, cela change tout (tdlr). » La philosophe suisse a fondé une école d’éthique au sein même de son sanctuaire pour animaux, et elle accompagne des propriétaires de fermes dans la transformation de leurs fermes animales en fermes véganes, une méthode d’agriculture éthiquement et écologiquement durable connue sous le terme de TransFARMation.

« [D]ans la mesure où elle implique des violences et des dommages non nécessaires, […] l’exploitation animale est injuste et moralement indéfendable »

Déclaration de Montréal

Sarah Heiligtag n’était pas la seule philosophe à donner une conférence : Martin Gibert, Valéry Giroux et François Jaquet ont également participé au FVM afin d’aborder la Déclaration de Montréal. Ce texte, qui célèbre son premier anniversaire le 4 octobre 2023 (soit la Journée mondiale des animaux), déclare principalement que « [d] ans la mesure où elle implique des violences et des dommages non nécessaires, […] l’exploitation animale est injuste et moralement indéfendable ». Signée à ce jour par plus de 550 chercheur·se·s en philosophie morale et politique, ce document « signifie au grand public qu’un groupe conséquent d’expertes et d’experts s’accorde sur cette conclusion », selon François Jaquet, et constitue un outil de taille pour les activistes de la cause animale.

→ Voir aussi : L’éthique animale sous la loupe avec François Jaquet

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Quand l’amour consume https://www.delitfrancais.com/2023/09/27/quand-lamour-consume/ Wed, 27 Sep 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52529 ton coeur brûle, le mien aussi… T’ouvres le paquetTu frottes la fleur entre tes doigtsTu plies délicatement le cartonTu le déposes sur ta feuilleEt tu roulesDoucementSûrementTa langue glissant sur le rebord du papier Mouvements répétitifs,Routine.Tu es habitué.Plus qu’ à l’allumer etRépéter. Je me suis ditPour moi tu vas arrêter Mais tu as continuéJe me suis… Lire la suite »Quand l’amour consume

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ton coeur brûle, le mien aussi…

T’ouvres le paquet
Tu frottes la fleur entre tes doigts
Tu plies délicatement le carton
Tu le déposes sur ta feuille
Et tu roules
Doucement
Sûrement
Ta langue glissant sur le rebord du papier
Mouvements répétitifs,
Routine.
Tu es habitué.
Plus qu’ à l’allumer et
Répéter.

Je me suis dit
Pour moi tu vas arrêter
Mais tu as continué
Je me suis dit
Au moins diminuer ?
Mais rien n’a changé

Tes yeux éclairés par la seule lumière de la flamme
Celle qui brûle et consume
Qui te vole à moi

Tu te noies dans la fumée
T’échappes à tes pensées
Mais je peine à respirer
Même si je suis prête à tout donner pour t’aider
Rien n’y peut.

Je suis spectatrice de ta propre destruction
Impuissante

Jade Lê

humbert, humbert

Tu te dessines sous la lueur du high noon
Tes jambes brunes partent delà la rambarde
Oh, mais qu’est-ce que tu t’en fous my little loon,
pages au bout des doigts, tu es loin d’être peinarde.

Des mots, tu t’inventes des princes et des gardes
Tu es magicienne, tirée droit d’un cartoon
Les pages défilent et tes tresses renardes,
au vent frémissent comme de vie, ah! je swoon

J’envie fort la paille entre tes roses lèvres
Oh, tu fronderais si tu connaissais ma fièvre
Comment t’aborder sans que tu ne m’haïsses?

Puis, une voix, depuis la coulissante, émerge
Désolant que tu rentres, ma petite vierge
À table ta maman pose son pain de maïs…

Symona Lam

Contributrice

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L’activisme après le deuil https://www.delitfrancais.com/2023/09/13/lactivisme-apres-le-deuil/ Wed, 13 Sep 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52049 Deux fois colonisée, de Lin Alluna et Aaju Peter, un témoignage de résilience.

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Les Inuits sont dépendants de la chasse aux phoques pour se nourrir et pour obtenir un revenu en vendant des produits dérivés du phoque à l’Europe. Les manifestations européennes contre cette pratique ont donc été dévastatrices pour la culture et l’économie inuites. En 2007, alors que les campagnes et manifestations nuisent plus que jamais à cette communauté, l’avocate, militante et designer Aaju Peter fait le voyage du Nunavut aux Pays-Bas avec son fils Aggu pour défendre le mode de vie traditionnel de son peuple. Aaju Peter a par la suite figuré dans le documentaire Angry Inuk (2016) d’Alethea Arnaquq-Baril, avant de produire son propre documentaire, intitulé Deux fois colonisée, en collaboration avec la réalisatrice danoise Lin Alluna.

Deux fois se décoloniser

Pour conserver le mode de vie inuit et ses traditions, Aaju propose d’appliquer un processus de décolonisation. Ainsi, la conservation de la culture peut contribuer à protéger la santé mentale des membres de la communauté, qui récupèrent un sentiment d’identité. Pour ce faire, il faut selon elle commencer par modifier notre langage, plus précisément notre manière d’aborder les conséquences de la discrimination vécue par la nation inuite, en essayant plutôt de trouver des solutions pour en contrer les effets. À cette fin, le documentaire d’Aaju et de Lin se réapproprie l’histoire des Inuits. Pendant ces 90 minutes qui condensent sept années mouvementées, on suit Aaju dans ses réflexions, ses batailles juridiques avec les pays colonisateurs (le Danemark et le Canada) et ses voyages entre Iqaluit, le siège de l’ONU aux États-Unis, Copenhague, et Nanortalik (un village au Groenland où elle a passé une partie de son enfance). Les spectateurs sont surtout témoins de son deuil et de la résilience dont elle fait preuve après le suicide de son fils. L’engagement d’Aaju et ses défis personnels agissent comme une porte d’entrée pour comprendre les enjeux politiques, culturels et les traumatismes intergénérationnels qui affectent la communauté inuite entière, ainsi que les communautés autochtones du monde.

Commencer par la fin

« Je suis anéantie », dit Aaju à l’équipe de production alors qu’elle s’ouvre à propos du suicide de son fils. Cet événement traumatique l’a figée. Puis, après une longue période de deuil, elle s’est réveillée. Sa mission est devenue claire. « En acceptant ce qui s’est passé, je peux transformer le négatif en quelque chose d’extraordinaire», explique-t-elle. En six mois, Aaju a réparé son cœur et son âme afin de reprendre son travail avec plus d’ambition que jamais. Tout au long du documentaire, elle envoie un message qui peut donner de la force à tous : afin de rester « parmi les vivants », il faut se servir des épreuves que l’on traverse pour mieux se propulser dans sa mission, peu importe ce qu’elle est.

Une réalisation engageante

Le documentaire offre une perspective intime de la vie d’Aaju. Les scènes de joie, de danse, de chant ou de rires sont souvent suivies directement de scènes plus sombres et douloureuses. Ce contraste met en lumière les hauts et les bas qu’Aaju ressent lors de sa lutte engagée pour les droits des communautés autochtones et pendant le deuil de son fils Aggu. Grâce à des plans chargés d’émotions et des montages vidéos représentant la jeunesse d’Aaju, qui permettent une proximité sans intrusivité, le spectateur est amené à s’attacher à la narratrice et à mieux comprendre sa cause. La musique traditionnelle inuit, avec ses tambours et ses chants de gorge, accompagne les images, et permet au spectateur de concevoir l’importance et l’ampleur du défi d’Aaju, soit conserver et faire valoir la culture inuite.

« Afin de rester “parmi les vivants”, il faut se servir des épreuves que l’on traverse pour mieux se propulser dans sa mission, peu importe ce qu’elle est »

Vers la fin du documentaire, on voit Aaju qui met la touche finale au premier brouillon de sa rédaction. En sous-titre à Deux fois colonisée, elle ajoute : Est-il possible de changer le monde et de panser ses blessures en même temps? C’est la question centrale du documentaire, à laquelle je pense que dans le cas d’Aaju, on peut répondre «oui », même si décoloniser les manières de penser et guérir sont deux procédés qui s’étendent dans le temps, sans aboutissement définitif.

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Veuillez déranger s’il vous plaît https://www.delitfrancais.com/2021/11/09/veuillez-deranger-sil-vous-plait/ Tue, 09 Nov 2021 17:21:39 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=45401 Ligne de fuite.

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Yigu Zhou | Le Délit
Yigu Zhou | Le Délit
Yigu Zhou | Le Délit
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In Memoriam Raphaël Michaud https://www.delitfrancais.com/2021/10/19/in-memoriam-raphael-michaud/ Tue, 19 Oct 2021 16:03:57 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=44925 Ton cœur continue de battre à travers le mien et celui de tous ceux que tu as aimés Bertrand Guay À Montréal le 5 septembre dernier est décédé à l’âge de 27 ans Raphaël Michaud. Raphaël était un contributeur régulier et un membre de l’équipe éditoriale au Délit et espérait s’inscrire bientôt en maîtrise à… Lire la suite »In Memoriam Raphaël Michaud

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Ton cœur continue de battre à travers le mien et celui de tous ceux que tu as aimés

Bertrand Guay

À Montréal le 5 septembre dernier est décédé à l’âge de 27 ans Raphaël Michaud. Raphaël était un contributeur régulier et un membre de l’équipe éditoriale au Délit et espérait s’inscrire bientôt en maîtrise à l’École de journalisme de Sciences Po à Paris. Le 8 octobre dernier, ses parents, sa famille et ses amis se sont réunis pour livrer un dernier hommage à celui que les témoignages lus ce soir-là décrivent non seulement comme un jeune homme d’une rare érudition et d’une rigueur égale à sa droiture intellectuelle, mais également comme un humaniste.

Raphaël a vécu plusieurs vies et il a longtemps eu, disent ses amis, l’énergie folle pour le faire. Avant d’en venir aux sciences politiques et aux lettres, il a connu une carrière remarquée de pianiste classique. Son jeu musical parvenait àrendre exactement l’histoire de chaque pièce jouée. On ne rencontre pas tous les jours un étudiant capable d’interpréter avec le même brio le Sposalizio de Liszt et les Essais de Montaigne. Il était de ces étudiants qui font de vous un meilleur professeur. Les enseignants et les camarades de classe qui ont eu le privilège de le croiser en classe se rappelleront longtemps de cette vivacité d’esprit qui vous oblige à penser vite et qui vous donne envie de trouver des répliques à la hauteur d’une pensée déjà si mature. Il valorisait le savoir sous toutes ses formes et la musique autant que la littérature, le théâtre, le cinéma, les arts visuels et la gastronomie étaient pour lui autant d’occasions d’aller vers l’autre. Il ne voyait ni l’âge, ni la couleur de la peau, ni le milieu : il ne voyait que l’humain, qu’il accueillait avec un enthousiasme égal à sa gentillesse.

Au moment de te laisser partir, cher Raphaël, il nous vient l’envie de t’imaginer pour une dernière fois au piano ou souriant d’admiration devant une toile ou une sculpture, tentant d’en percer les mystères ; l’envie d’imaginer une dernière discussion enflammée sur des sujets brûlants d’actualité, devant lesquels tu ne reculerais pas et que tu nous donnerais envie d’aborder avec le même sérieux et le même esprit critique que toi. Ta quête de sens n’a eu cesse de te pousser à essayer de comprendre notre monde, à le rêver parfois autrement mais à rêver toujours grand, à l’échelle de la planète que tu aurais dû avoir le temps de parcourir.

Parents, amis, professeurs : nous sommes plusieurs à avoir reconnu en toi cet ardent et exigeant désir d’apprendre et cette vive soif de liberté et de justice qui font que l’on dit un jour des êtres comme toi : « C’est, c’était un grand homme ». Mais il en va parfois de la vie comme des printemps. Certains passent trop vite. Et ce sont souvent les plus beaux, les plus lumineux et les plus intenses. Bon repos, cher Raphaël.

Le présent hommage s’inspire des témoignages de gens que tu as marqués :

Tongchun Qin (Israël), Yvon Pomerleau (Montréal), Jennifer Liu (Ottawa), Bertrand Guay (Québec), Simon Gamache-Fortin (Rimouski), F. Roger Bélisle (Montréal), Isabelle Arseneau (Montréal)

Texte fourni par la famille de Raphaël Michaud. L’équipe du Délit offre ses condoléances à sa famille.

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Élections américaines : Des réponses à vos dernières questions https://www.delitfrancais.com/2020/10/27/elections-americaines-des-reponses-a-vos-dernieres-questions/ Tue, 27 Oct 2020 13:12:45 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=38631 Dans cette série d’articles sur les élections américaines, Philippe Granger et Emmanuel Prince-Thauvette apportent des réponses à vos questions.

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Après avoir répondu à vos questions sur les rouages du processus électoral et sur les enjeux amenés dans le tourbillon électoral par la pandémie, nous terminons cette série spéciale sur les élections américaines de 2020 en abordant le cas du candidat démocrate Joe Biden. À ce moment de la campagne, Donald Trump tire assez solidement de l’arrière dans les sondages. En dehors de leurs différends sur les politiques publiques à mettre en place, qu’est-ce qui pourrait désavantager Joe Biden le 3 novembre prochain?


Qu’est-ce qui joue en la défaveur de Joe Biden?

La réponse très (très) courte

Beaucoup de choses que l’on reproche aussi à Donald Trump.

La réponse courte

Pour ses rivaux, Biden est considéré comme trop vieux et trop désarçonné pour devenir président. De surcroît, des scandales de racisme, d’agression sexuelle et de népotisme ont refait surface durant la campagne.

La réponse longue

Les élections américaines, et plus particulièrement celles de cette année, reposent énormément sur les apparences. Ainsi, cette réponse ne cherchera pas à approfondir les failles des promesses du politicien Biden, mais se concentrera plutôt sur les défauts les plus partagés et ostentatoires du candidat Biden. Il faut aussi noter que l’issue d’une élection aux États-Unis est le résultat de nombreuses stratégies géographiques, comme le découpage électoral partisan (gerrymandering), qui permet aux législatures des États américains de redécouper les circonscriptions électorales.

Il est vieux, bègue et maladroit. 

Surnommé «Sleepy Joe» par son rival, Joe Biden deviendrait le plus vieux président de l’histoire des États-Unis s’il était élu le 3 novembre, atteignant les 78 ans lors de son investiture.

Tweet du Président Trump datant du 13 octobre.
On peut y lire «BIDEN COMME PRÉSIDENT».

De plus, Joe Biden a souffert toute sa vie de bégaiement, ayant même été surnommé «tête de bègue» («Stutterhead») durant son enfance. Le président Trump, par son attitude intimidatrice lors des débats présidentiels et sur les réseaux sociaux, semble montrer peu d’indulgence face à cette situation. En 2019, l’ancienne porte-parole de la Maison-Blanche Sarah Huckabee Sanders s’était moquée du bégaiement de Biden sur Twitter, mais s’est ensuite excusée et a retiré la publication. Aujourd’hui, le bégaiement commence graduellement à être souligné comme une force et une preuve de la persévérance du candidat. 

Tweet de Joe Biden datant du 11 octobre.
On peut y lire « Brayden – tu as du coeur, du courage et de la maturité qui dépasse ton âge. Tu as un potentiel illimité – et j’attend avec impatience de voir ce que ton futur te réserve. »

De surcroît, l’aspect maladroit de Joe Biden, remarqué depuis de nombreuses années, n’aide pas la situation. Entre autres gaffes, Joe Biden a déjà invité en 2008 un sénateur à se lever afin que la foule puisse le voir. Seul problème: le sénateur est paraplégique. En 2010, en racontant une anecdote en présence du premier ministre irlandais, Biden a confondu lequel des parents du premier ministre est mort, adressant un «Dieu bénisse son âme» par rapport à sa mère, alors que le défunt était le père. 

Joe Biden se considère lui-même comme une «machine à gaffes», mais affirme que c’est une «une chose incroyable comparativement à un gars qui ne peut pas dire la vérité». Or, il va sans dire que l’addition de l’âge, de la situation de bègue et de la maladresse de Joe Biden multiplie les attaques qu’effectuent les rivaux du candidat à son égard.

Tweet du Prédisent Trump datant du 12 octobre.
On peut y lire : «Le maladroit Joe Biden a eu une journée particulièrement mauvais aujourd’hui. Il ne pouvait plus se rappeler du nom de Mitt Romney, a annoncé qu’il se présentait de nouveau au Sénat américain et a oublié dans quel État il était. Si j’avais fait cela, ce serait disqualifiant. Avec lui, c’est juste Joe le maladroit!»

Biden, un «idiot raciste»?

Le long passé politique de Joe Biden, et plus particulièrement sa vice-présidence de 2008 à 2016 sous Obama, peut à certains égards être considéré comme un grand avantage pour sa candidature. Or, ce long passé se voit miné par des déclarations et prises de position pouvant affecter sa candidature aujourd’hui, notamment en ce qui a trait à l’avortement et à la guerre d’Irak. De toutes ses déclarations controversées, ce sont celles sur la question du racisme anti-noir qui hantent le plus Joe Biden.

Il y a une cinquantaine d’années, Biden s’est exprimé en faveur, puis en défaveur du «busing», une méthode de «déségrégation raciale» qui consiste à intégrer des élèves noirs dans les écoles publiques urbaines afin de trouver une «balance raciale» dans les classes. Cette mesure s’est avérée inefficace et sa logique largement critiquée, les parents blancs décidant d’envoyer leurs enfants dans des écoles privées ou déménageant dans les banlieues, qui à cette époque étaient en grand développement.

En s’opposant finalement au busing, Biden s’est joint à deux sénateurs connus pour leurs positions ségrégationnistes. Lors des débats à la chefferie démocrate, ce revirement a été critiqué par la candidate démocrate Kamala Harris, qui a vécu le processus de busing lors de son enfance. Il faut croire que cette attaque a porté fruit pour Harris, qui est désormais candidate à la vice-présidence. 

La déclaration à laquelle se colle le camp Trump est plutôt celle en lien avec la soumission d’une loi anti-criminalité en 1994. Trump prétend que Biden aurait qualifié les Américains noirs de «superprédateurs».

Tweet du Président Trump datant du 16 octobre.
On peut y lire : «Biden a commis une autre grosse erreur. Il a totalement mélangé deux projets de loi sur la criminalité. Il n’avait aucune idée (comme d’habitude!). En outre, il a librement utilisé le terme SUPER PRÉDATEUR!!!»

Selon de nombreux médias, le terme «superprédateurs» est attribuable à Hillary Clinton, candidate aux présidentielles de 2016, et ne désignait pas explicitement les Américains noirs. Biden aurait plutôt utilisé le terme «prédateurs», encore une fois sans viser spécifiquement un groupe sociodémographique.

Cette loi est une fierté pour Biden, qui souligne qu’elle a permis de remettre de l’ordre dans les zones urbaines. Or, elle se voit largement critiquée aujourd’hui, puisqu’elle aurait permis l’incarcération de masse aux États-Unis, et plus particulièrement à l’égard des Américains noirs.

Biden s’est longtemps vu assez confiant d’obtenir les faveurs de l’électorat noir, ayant même déjà déclaré cette année que les Noirs votant pour Trump «ne sont pas noirs», une déclaration pour laquelle il s’est plus tard excusé. Ironiquement, cette situation a joué en sa défaveur et a mené à une dépréciation de sa candidature.

La revue The Economist se questionne ainsi en 2007: «Joe Biden: idiot raciste, ou médiocrement retranscrit?»

Des relations entre l’Ukraine et son fils?

Dans l’horizon politique depuis de nombreuses décennies, Joe Biden est fustigé par de nombreux rivaux pour de supposées actions népotiques, et plus particulièrement envers son fils Hunter Biden. Une histoire révélée il y a quelques semaines est au cœur des attaques des Républicains.

À la mi-octobre, le tabloïd The New York Post dévoile avoir mis la main sur des courriels et documents appartenant à Hunter Biden. Dans son article sur le sujet, le New York Post avance notamment qu’un cadre de Burisma, une compagnie pétrolière et gazière basée en Ukraine, aurait remercié Hunter Biden de l’avoir invité à une rencontre à Washington en présence de son père. Le Post aurait mis la main sur ces documents par le truchement de l’avocat de Trump, Rudolph W. Giuliani, qui aurait reçu une copie du disque dur de Hunter Biden par un réparateur d’ordinateur s’étant occupé de l’ordinateur de Hunter. 

Cet article se voit critiqué pour de nombreuses raisons. Il n’est pas du tout clair selon le reportage du Post si la rencontre a bel et bien eu lieu et, si oui, quand. De surcroît, des employés du Post remettent eux-mêmes en question l’authenticité des documents, selon le New York Times. Le camp Biden rejette le fait qu’une rencontre ait eu lieu tel que mentionné par le journal et rappelle par ailleurs que deux comités sénatoriaux (dirigés majoritairement par des Républicains) ont évalué qu’il n’y avait pas eu de manipulations de Joe Biden à l’égard de l’Ukraine. Finalement, Giuliani est peu reconnu pour son honnêteté et sa rigueur intellectuelle et a été accusé à de nombreuses reprises par le passé d’avoir menti aux médias.

Allégation d’agression sexuelle et attouchements inappropriés 

Plus d’une fois, Joe Biden a effectué de manière publique des attouchements inappropriés envers des femmes de tous âges de manière publique, parfois accompagnés de «blagues de mononc’» souvent reçues avec un rire jaune.

Or, il est allégué qu’il soit allé encore plus loin en 1993: une ancienne employée du bureau sénatorial de Biden accuse le candidat de l’avoir agressée sexuellement.

Biden, qui a pourtant longtemps témoigné de son soutien aux dénonciations d’inconduite sexuelle, nie ces allégations. Souvent perçu comme possible colistière de Biden, la représentante Stacey Abrams a, à l’instar de plusieurs démocrates, défendu Joe Biden. Une étude plus approfondie de la situation a été effectuée par le New York Times. Puisque le sujet est épineux, nous vous suggérons la lecture de cet article, afin que vous puissiez vous faire votre propre idée.

Accusé lui aussi de nombreuses agressions sexuelles, Donald Trump s’est avéré assez silencieux sur le sujet. Or, l’histoire a largement fait écho sur les réseaux sociaux et à l’international.

Pour en savoir encore plus sur les élections américaines du 3 novembre, nous vous invitons vivement à consulter ce document récapitulatif effectué par l’équipe de l’Observatoire sur les États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques. Nous vous invitons également à, si ce n’est pas déjà fait, aller consulter nos deux premiers articles sur les élections américaines parus les 29 septembre et 6 octobre derniers. Vous y trouverez, on l’espère, de plus amples réponses à vos questions!

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Constitution unilingue : l’AÉUM conteste la décision du conseil judiciaire https://www.delitfrancais.com/2020/08/24/constitution-unilingue-laeum-refuse-la-decision-du-conseil-judiciaire/ Mon, 24 Aug 2020 19:32:57 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=36574 Lors d’une rencontre tenue le 20 août dernier en soirée, le conseil d’administration de l’Association étudiante de l’Université McGill (AÉUM) a décidé de ne pas ratifier la récente décision du conseil judiciaire invalidant sa nouvelle constitution. Cette dernière avait été déclarée nulle puisque que sa version française, qui a, en théorie, primauté sur sa version… Lire la suite »Constitution unilingue : l’AÉUM conteste la décision du conseil judiciaire

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Lors d’une rencontre tenue le 20 août dernier en soirée, le conseil d’administration de l’Association étudiante de l’Université McGill (AÉUM) a décidé de ne pas ratifier la récente décision du conseil judiciaire invalidant sa nouvelle constitution. Cette dernière avait été déclarée nulle puisque que sa version française, qui a, en théorie, primauté sur sa version anglaise, n’avait pas été soumise au vote des électeur‧rice‧s.

L’AÉUM s’est prévalue de son droit de renvoyer un jugement au conseil judiciaire, en vertu de l’article 03.5.3.b des Règlements internes de gouvernance. Une fois que le conseil d’administration (CA) de l’Association aura envoyé au conseil judiciaire un avis détaillant les raisons de sa décision, celui-ci aura 21 jours pour décider s’il reconsidère ou non son jugement.

Un conseil d’administration divisé

La décision du CA n’a pas été unanime : seuls deux membres ont donné leur accord au renvoi, tandis que l’un d’entre eux s’y est opposé et que les 7 autres se sont abstenu‧e‧s. Le président de l’AÉUM Jemark Earle, qui s’est lui-même abstenu, explique cette décision mitigée par le manque d’information. « Il y a beaucoup d’incertitude par rapport au raisonnement derrière la décision du conseil judiciaire. Je pense que, pour la plus grande partie, le conseil d’administration est d’accord avec le constat : oui, la constitution de 2020 n’aurait pas dû être approuvée, personne ne conteste ça. » Il note cependant que, lors des délibérations, il avait proposé une solution différente : l’AÉUM aurait continué à fonctionner selon sa nouvelle constitution unilingue anglophone jusqu’à ce que la version francophone soit adoptée par un référendum le plus rapidement possible.

Dans son jugement, le conseil judiciaire avait expliqué pourquoi il ne retenait pas cette solution : elle aurait forcé les francophones à voter sous pression, car un refus de leur part aurait nécessairement entraîné de graves problèmes de fonctionnement à l’AÉUM. Face à cet ultimatum, les francophones n’auraient pas une opportunité égale à celle des anglophones d’évaluer le contenu de la nouvelle constitution. Cet argument est relativisé par le président de l’AÉUM, car il serait très improbable selon lui que les francophones rejettent la nouvelle constitution.

La décision du CA  a été motivée par le fait que l’invalidation de la constitution de 2020 entraînerait la disparition temporaire de trois nouveaux sièges  au conseil législatif, soit ceux des représentants de la commission des Affaires francophones, de la commission des Affaires autochtones et de la commission à l’Équité. Ces nouvelles positions non-votantes avaient été créées par la nouvelle constitution afin de garantir une meilleure représentation des minorités au sein de l’AÉUM. Pour Earle, revenir en arrière « n’aurait tout simplement pas de sens ».

Un jugement remis à plus tard

Le jugement du conseil judiciaire étant le fruit d’une décision unanime de ses membres, Jemark Earle est conscient qu’il est possible que celui-ci ne revienne pas sur sa décision lorsque les 21 jours seront écoulés. Dans cette éventualité, Earle souhaiterait que le conseil fournisse des raisonnements plus concrets pour justifier sa décision.

Selon Earle, le conseil judiciaire a  sous-estimé les conséquences d’une révocation de la constitution. Les recommandations proposées à la fin du jugement ne sont pas du tout réalistes et ne sauraient être mises en œuvre, selon lui. « Ils n’ont pas, comme les conseiller‧ère‧s exécutif‧ve‧s, l’expérience d’avoir dirigé l’AÉUM. »

Si le conseil judiciaire ne revient pas sur sa décision, il resterait encore un recours à l’AÉUM. Conformément aux Régulations internes de gouvernance de l’AÉUM, le conseil d’administration a le droit de rejeter toute décision du conseil judiciaire s’il estime qu’elle « était manifestement déraisonnable ou motivée par des facteurs comprenant, sans s’y limiter, le racisme, le sexisme, la collusion, la corruption, l’homophobie ou le conflit d’intérêts ». Une telle décision doit toutefois recueillir l’appui de quatre cinquièmes de ses membres.

Cette possibilité n’est pas envisagée par Jemark Earle, qui entend se plier à la deuxième décision du conseil judiciaire. « S’il le faut, nous retournerons à la version de 2017 et nous effectuerons les changements nécessaires.»

Pour l’avenir du français à l’AÉUM

Peu importe l’issue du jugement, le nouveau président entend prendre beaucoup plus au sérieux les enjeux francophones cette année. Il dit avoir été ébahi d’apprendre que la constitution avait mis plus de deux mois à être traduite en français, alors qu’un très grand nombre de personnes étaient au courant du dossier. À ce moment, la nouvelle équipe d’exécutif‧ve‧s n’était pas encore en poste. Earle a assuré qu’un tel laissez-faire ne se produirait pas sous sa gouverne. « En ce moment, nous les exécutif‧ve‧s sommes en quelque sorte en train d’essayer de réparer les erreurs de l’an passé. »

Pour s’assurer que les prochaines lois soient toujours traduites et votées en français, Earle propose de faire passer un règlement au conseil législatif qui invaliderait d’office toute proposition de loi émanant de l’AÉUM qui ne serait pas déjà traduite. Il serait même prêt à ajouter cette clause à la constitution, si jamais le conseil judiciaire maintenait sa décision et le forçait à refaire un référendum.

« J’en ai parlé au conseil d’administration hier soir et on m’a dit que nous [l’AÉUM] n’étions pas obligés de faire ça ; la seule raison pourquoi la constitution française a primauté sur la version anglaise, c’est que nous l’avons nous-même ajouté à la constitution. Toutefois, je crois que nous avons plus qu’une obligation légale envers les étudiant·e·s francophones. »

Afin de traduire tous ces documents, le président de l’AÉUM voudrait faire appel à des firmes externes, afin qu’il n’y ait plus de fautes d’orthographe. Pour vérifier les traductions avant de les proposer aux étudiant·e·s, il entend faire appel au commissaire des Affaires francophones. À long terme, Earle a l’intention de doter l’AÉUM de traducteur·rice·s rémunérées d’ici cinq ans, dans le cadre du plan quinquennal qu’il entend mettre de l’avant. Rappelons que, l’an passé, le conseil législatif avait fait adopter un plan de francisation pour doter l’AÉUM de meilleures ressources de traduction, mais que celui-ci avait été rejeté par une majorité des étudiant·e·s lors du référendum pour l’adopter. 

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La poésie à travers l’écran https://www.delitfrancais.com/2020/08/12/la-poesie-a-travers-lecran/ Wed, 12 Aug 2020 15:55:52 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=36379 Regard sur le Festival de la poésie de Montréal en contexte pandémique.

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Dans le froid printanier qu’a vécu notre métropole, c’est toute la ville qui s’est mise sur pause, musées, théâtres et festivals inclus. Ce grand gel collectif, malgré l’arrivée de l’été, est loin d’être achevé pour bien des espaces culturels, qui ressentent encore intrinsèquement les effets pervers de la pandémie, que ce soit par le ralentissement de leurs activités, la perte importante de revenu, ou encore l’impossibilité d’envisager un retour « à la normale ». 

S’il est clair que les différents domaines artistiques ont été touchés à plusieurs niveaux, il va de soi que tous n’en ont pas ressenti les mêmes effets. Tandis que de nombreux espaces culturels ont été contraints de cesser leurs activités, d’autres ont tenté la transition vers le web. C’est notamment le cas du Festival de poésie de Montréal, pour lequel la pandémie aura été à la fois un énorme défi, mais aussi un épisode porteur de changements positifs pour l’avenir. 

 

Repenser l’espace poétique

Unique activité du genre en Amérique du Nord, le Festival de la poésie de Montréal œuvre à la promotion, au développement et au rayonnement de la poésie québécoise au Canada et à l’international. Porté par un double mandat – celui de présenter le livre et celui de créer une rencontre entre les poètes et le lectorat – le Festival est un lieu privilégié qui accueille l’ensemble du monde de l’édition de la poésie au Québec. 

Imaginer une transition en ligne pour un événement de cette ampleur n’a donc pas été une mince tâche, nous confie Isabelle Courteau, directrice artistique et générale du Festival. « C’est sûr qu’en personne, la parole résonne différemment. L’une ne remplace pas l’autre. On s’entend que la rencontre, la découverte, faire dédicacer son livre par les poètes, pouvoir échanger avec eux, ça reste fondamental, en mon sens. » 

Dans la période stressante qu’a été le confinement, madame Courteau nous confie toutefois que la transition numérique a été à la fois très bénéfique et énergisante pour son équipe. Présentée entièrement en ligne du 1er au 7 juin dernier, la 21e édition du Festival mettait à l’honneur les poétesses d’Amérique latine. Y a été présenté du contenu varié, composé de vidéos, de conférences, de balados et d’événements en direct à regarder dans le confort de son salon. 

Pour la directrice artistique, le contexte favorable dans lequel s’inscrivait alors le Festival a permis de rendre la transition possible : « Depuis 2014, on s’est beaucoup intéressé à la vidéo. C’est un médium qui a vécu une démocratisation, avec l’arrivée des téléphones et des nouvelles caméras. La poésie a bénéficié de ça, notamment avec la création des rendez-vous vidéo-poésie. » 

Ces rendez-vous constituent une compétition mise sur pied dans le cadre du Festival, où un appel à projet est lancé aux poètes et réalisateur·rice·s qui peuvent soumettre un poème prenant la forme d’un film. Ces courts-métrages sont bien souvent à la frontière de la poésie, du cinéma, et de la vidéo expérimentale, ce qui permet un renouveau créatif aux déclinaisons aussi nombreuses qu’uniques. « La vidéo expérimentale a un rapport plus étroit aux textes et aux arts visuels. Il y a un dialogue entre la poésie, le texte, la vidéo. Puis de notre côté, les rendez-vous vidéo-poésie nous avaient déjà un peu préparés à envisager une transformation d’une partie des projets », confie la directrice. 

 

Une portée différente

Les festivités, pour la plupart adaptées dans leur intégralité, ont d’ailleurs eu une portée bien distincte auprès des festivaliers et festivalières dans leur version « en ligne ». Alors qu’à chaque année, le Festival organise un marché de la poésie, une multitude de lectures publiques ainsi que plusieurs conférences, tables rondes et spectacles, le tout s’est adapté afin d’offrir une expérience poétique modifiée, mais unique. À titre indicatif, les rendez-vous vidéo-poésie ont normalement lieu au cinéma Beaubien, où la capacité maximale d’une salle est de 75 personnes. Accessibles en ligne, ces rendez-vous auront été visionnés par plus de 1000 personnes cette année. 

Prudente, Isabelle Courteau affirme toutefois que cette portée est certes plus importante, mais avant tout bien différente. S’il est difficile de faire déplacer les gens pour un événement en présentiel, la mise en ligne permet de rejoindre un public plus large, parfois issu de milieux plus éloignés. Mais il y a quelque chose d’unique, dit-elle, dans la portée qu’a un texte sur un auditoire, lorsque déclamé en direct, devant des gens. Il est difficile de savoir si l’expérience en ligne peut réellement être équivalente, voire même suffisante. 

 

S’il est difficile de faire déplacer les gens pour un événement en présentiel, la mise en ligne permet de rejoindre un public plus large, parfois issu de milieux plus éloignés.

 

Un équilibre précaire

Bien que la transition en ligne de certaines activités se soit réalisée sans trop de remous, l’un des aspects les plus affectés du Festival de la poésie concerne la vente de livres. Pour le mois de mars et d’avril, alors que le confinement était à son apogée, les ventes de livres ont chuté à  moins de 35% de leur volume habituel. Pour compenser cette baisse drastique, les libraires ont dû se démener et explorer l’étendue des possibles afin d’éviter le pire. 

Des expériences de cueillette ont été mises en place dans certaines librairies, tandis que d’autres misaient davantage sur le web. Mais la vente en ligne réussit bien mal à la poésie : alors qu’un recueil se vend normalement entre 10 et 12$, les frais de livraison s’élèvent parfois au double de ce montant. Pour les acheteuses et acheteurs, cela représente un frein significatif à l’achat, d’autant plus que le marché du livre, notamment pour le livre de poésie, est déjà précaire, et repose en grande partie sur l’art presque perdu de « bouquiner », soit de cueillir un recueil à même les rayons de la librairie, sans avoir au préalable un titre en tête.

Un autre des enjeux fondamentaux pour de nombreux espaces culturels concerne la vente de billets. Alors que plusieurs organismes culturels ne réussissent à survivre que grâce au revenu engendré par les billets, les mesures de confinement prises dès le mois de mars dernier ont occasionné de nombreux remboursements pour les acheteuses et acheteurs, entraînant par le fait même des pertes significatives pour les musées, les festivals et autres organismes du milieu. 

L’initiative citoyenne #billetsolidaire, amorcée par plusieurs membres du secteur culturel québécois, a tenté d’encourager les consommatrices et consommateurs à conserver leurs billets de spectacle en évitant de demander un remboursement afin de soutenir l’industrie culturelle. Mais si les producteurs vivent une période de crise, il en va de même pour les consommatrices et consommateurs. Il est ainsi difficile de faire primer le bien commun de l’industrie, quand la classe moyenne est elle-même plongée dans une situation financière précarisée. 

 

« La poésie, cette forme littéraire jusqu’au-boutiste, est à privilégier pour réenvisager le monde avec courage et créativité »

 

Exister dans l’ombre 

Si la vente de billets n’est pas un enjeu majeur pour le Festival de la poésie, qui travaille en gratuité pour le public, Isabelle Courteau affirme toutefois qu’en tant que milieu souvent perçu comme un épiphénomène, la poésie tend à se dissoudre de l’imaginaire collectif, souffrant de son manque de représentativité. « La pandémie a vraiment été un choc dans le sens qu’il n’y a rien d’acquis pour la poésie. Nous ne sommes pas dans une société où la poésie est très prisée. »  

Pour madame Courteau, il est d’autant plus important de lui faire de la place dans l’espace public, pour éviter qu’elle ne disparaisse. « Le milieu de la culture est vraiment fragile. Ce genre d’événement met en lumière la précarité du milieu. Ç’a quelque chose de terrifiant. » On pense par exemple au milieu théâtral, qui, durant la pandémie, a dû complètement fermer ses salles. En l’absence de pièces, c’est comme si le théâtre avait disparu de l’espace public. Les gens ne peuvent pas voir les pièces, les médias ne peuvent pas les critiquer, bref, c’est tout un pan de la culture qui se perd avec la fermeture de ces lieux de diffusion. 

Évidemment, des alternatives en ligne ont été mises de l’avant, mais ce que nous rappelle madame Courteau, c’est que plus petit est l’espace offert aux représentations culturelles, moins les gens s’en préoccupent. C’est un phénomène d’ailleurs très présent dans les médias actuels. « Les festivals ne sont plus couverts autant qu’avant, en tant qu’événement significatif, dans les grands médias. Le Devoir fait normalement un encadré ou quelque chose pour couvrir certains grands événements, mais l’orientation éditoriale a changé : ce n’est pas seulement l’espace qui est plus petit, c’est aussi la manière dont c’est présenté. » 

Le problème du manque de représentation, madame Courteau ne l’octroie pas qu’aux grands journaux, qui, admet-elle, souffrent eux aussi d’une véritable « crise des médias ». Toutefois, c’est un dur coup que celui d’être relayé au second plan, aux oubliettes des grands médias. « En tant que petit festival, parfois, on se sent invisible. Ça nous confirme qu’il faut continuer : c’est encore plus important d’être présents », affirme la directrice.

 

L’expérience humaine

Si la poésie est un art qui se pratique dans la solitude, nombreux·ses ont été ceux et celles qui ont perdu l’espace nécessaire – à la fois mental et physique – pour écrire. Pour beaucoup de  foyers, la possibilité d’une chambre à soi telle qu’imaginée par Virginia Woolf était inaccessible durant le confinement. Pour d’autres, la pandémie a plutôt forcé une solitude – désirée, ou pas – qui aura impérativement influencé ce rapport étroit avec l’art d’écrire. Ce que l’on retient surtout, c’est le manque ressenti par plusieurs, celui d’être en contact les un·e·s avec les autres. Car si la poésie est un art qui se pratique dans la solitude, c’en est aussi un qui fleurit à la rencontre d’autrui. 

Pour Isabelle Courteau, il est clair que le manque de contact avec l’oeuvre, l’objet et l’artiste a indéniablement manqué à l’expérience artistique. Pour elle, la tenue en ligne des événements peut être bénéfique, notamment pour la plus grande accessibilité que permet ce format, mais ne saurait combler le besoin d’une rencontre artistique. Somme toute, comme le dit si justement madame Courteau, « la poésie, cette forme littéraire jusqu’au-boutiste, est à privilégier pour réenvisager le monde avec courage et créativité ». La poésie n’arrêtera pas la pandémie, mais peut-être saura-t-elle apaiser, le temps d’un poème ou d’un recueil entier, les remous de ce grand ouragan planétaire.

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L’impérative mobilisation pour la justice climatique https://www.delitfrancais.com/2020/02/25/limperative-mobilisation-pour-la-justice-climatique/ Tue, 25 Feb 2020 13:52:10 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=35793 Un activisme jeune est un activisme de nécessité : dans un contexte de crise climatique, les voix s’unissent dans l’urgence d’un monde qui s’effondre. Celles et ceux qui feront nos sociétés de demain n’ayant pas accès au pouvoir de décision, c’est à travers l’organisation, la manifestation, parfois la désobéissance civile, que grandissent les luttes pour la… Lire la suite »L’impérative mobilisation pour la justice climatique

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Un activisme jeune est un activisme de nécessité : dans un contexte de crise climatique, les voix s’unissent dans l’urgence d’un monde qui s’effondre. Celles et ceux qui feront nos sociétés de demain n’ayant pas accès au pouvoir de décision, c’est à travers l’organisation, la manifestation, parfois la désobéissance civile, que grandissent les luttes pour la justice climatique. L’urgence est motrice de rassemblement, mais aussi d’une écoanxiété dont les jeunes sont particulièrement sujets, les poussant à l’action afin de traduire leurs maux en des dispositifs de luttes concrets (« Exprimer la détresse climatique », p.9). À McGill, et au Québec, ce phénomène est prévalent et c’est pour essayer de dessiner un nouvel horizon — sans pénuries massives, mouvements migratoires contraints, conflits politiques — que l’on se mobilise.

Mettre l’accent sur les conséquences humaines de la crise climatique permet alors de repenser une vision classique de l’environnementalisme qui, en séparant l’humain de la nature, ne porte aucune attention aux impacts différenciés des dégradations environnementales sur les populations. Effectivement, la crise climatique cause des déplacements forcés, des sécheresses, des inondations, des hausses de températures, qui affectent disproportionnellement les populations qui y ont contribué le moins. L’on peut notamment penser à la caravane de migrant·e·s en Amérique centrale ou à la fonte du pergélisol en territoires autochtones. Cette crise est causée et perpétuée par une logique coloniale d’invasion et d’exploitation des territoires (« Quand le vert est décidé par le blanc », p.10). Il nous semble donc obligatoire d’adopter la  justice climatique comme angle d’approche de cette édition.

L’engagement pour le climat s’infuse dans toutes les sphères — politiques, commerciales et même culturelles (« La culture, pilier de la transition », pp.13–14). La plupart du temps se déploient toutefois des efforts mineurs : recyclage, produits éco-conscients, fonds donnés pour l’environnement. Tout cela reste très flou et lorsque l’on s’attarde sur les exactions, réalisées sous couvert de développement durable, des institutions qui sculptent nos sociétés — les gouvernements, les entreprises, les universités — les constats sont graves.

Cet écoblanchiment atteint un tel niveau qu’il devient difficile de distinguer le réel engagement de celui qui n’est que façade. Pensons notamment à McGill, qui en juillet 2019 a été reconnue comme International Sustainability Institution of the Year par les Green Gown Awards — récompenses subventionnées par le programme des Nations Unies pour l’environnement — malgré ses investissements de plus de 50 millions de dollars dans des compagnies d’énergies fossiles (« Blocage et désinvestissement », p.3). Pensons aussi à des entreprises comme Teck Resources qui, dans la présentation de leur projet Frontier, mettent tout de suite l’emphase sur « leur pratiques pour la protection de l’environnement », des phrases qui masquent le plus souvent une inaction en proportion à la crise climatique.

La suppression du projet de mine Frontier a très certainement été accélérée par la mobilisation des groupes activistes, et notamment par l’usage de moyens de pression non-traditionnels comme l’occupation des bureaux du ministre Stephen Guibault. De façon similaire, l’invasion par la GRC du territoire Wet’suwet’en en Colombie-Britannique continue à faire les manchettes grâce aux blocages ferroviaires entretenus notamment à Tyendinaga, en Ontario. Ces exemples mettent en évidence l’efficacité incontestable des moyens de pression transgressifs.

L’activisme pour la justice climatique doit se faire à toutes les échelles, par le plus de moyens possible, et cela commence par une critique de chacune des institutions que l’on fréquente de près. En tant qu’étudiant·e·s à McGill — et notamment parce que Justin Trudeau en est diplômé — nous nous devons de réagir à l’éco-blanchiment de l’administration face à l’ampleur de la crise. Tout d’abord, en participant aux assemblées générales de nos facultés respectives, afin de faire voter la grève pour la Semaine de la Transition organisée par la Coalition étudiante pour un virage environnemental et social, du 30 mars au 3 avril prochains. Ensuite, en rejoignant les étudiant·e·s de la quarantaine d’établissements québécois qui prévoient de participer à la Semaine de la Transition, afin d’envoyer un message clair au gouvernement et à nos dirigeant·e·s respectif·ve·s. Enfin, en étant prêt·e·s à envisager la grève illimitée comme dernier recours si ceux·celles qui possèdent le pouvoir décisionnel le plus fort persistent à ne pas céder.

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Dieu est plus grand https://www.delitfrancais.com/2020/02/04/dieu-est-plus-grand/ Tue, 04 Feb 2020 14:42:17 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=35528 Conséquences de l’obsession occidentale pour l’islam sur des vécus intersectionnels.

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Le 15 janvier dernier, j’assistais à une conférence donnée à l’UQAM intitulée « À l’intersection de l’islamophobie et de l’hétérocissexisme : récits de résilience de huit personnes LGBTQ+ musulmanes vivant à Montréal ».

Je suis moi-même une personne queer, immigrante d’Afrique du Nord, vivant à Montréal. Je ne suis pas croyant, mais je me définis comme musulman de culture, car c’est un aspect intégrant de mon éducation et de mon identité et qui représente beaucoup plus pour moi qu’une simple croyance religieuse.

Cette conférence représentait donc pour moi une occasion précieuse et assez rare de voir mon expérience représentée et abordée dans l’espace public, à travers des récits de personnes qui ont potentiellement un vécu similaire au mien. Tout le monde a une identité, mais certaines sont plus politiques que d’autres, car elles sont liées à des structures de pouvoir qui les dépassent, qui souvent les marquent au fer…et ça fait mal. Ce genre de moments est l’occasion pour moi de soulager cette douleur existentielle, identitaire et politique que je ressens, car ceux-ci me permettent de sortir de ma solitude, de rencontrer des gens qui comprennent cette peine et cette douleur, avec l’espoir, peut-être, de construire une communauté de soutien et d’amour.

Se trouver de tels espaces peut s’avérer vital dans certaines situations où des structures comme la famille, censée apporter ce soutien et cet amour, ne sont pas en mesure de remplir leur rôle. L’expérience du rejet familial ou de la non-acceptation est très répandue dans les expériences LGBTQI+, plaçant ainsi de nombreuses personnes queers dans une situation de précarité relationnelle et émotionnelle, et de solitude; car notre différence est trop grande, trop inacceptable. Dans ma culture, la famille est une structure centrale et fondamentale, soudée, solidaire, aimante, joyeuse, festive. Son rejet peut donc être vécu de manière bien plus aiguë et déchirante que dans des cultures occidentales plus individualistes et atomisées, où la famille occupe une place différente. Ainsi, une communauté de vécus et d’affinités a le beau potentiel de combler ce vide et de devenir une nouvelle famille, choisie, qui vient, non pas nécessairement remplacer, mais compléter la famille biologique.

Tout cela pour dire que ce moment d’échange salutaire et de retrouvailles « alterfamiliales » n’a jamais eu lieu. Il nous a été confisqué par un groupe de personnes dans l’assemblée se disant antithéistes qui ont monopolisé la parole pour tenter de nous enseigner, peut-être de bonne foi, à quel point l’islam et le Coran sont hostiles à l’homosexualité et nous apporter la libération qu’ils pensaient nous offrir. Il s’agissait d’une demi-douzaine d’hommes et de femmes québécois·e·s de souche  qui exprimaient leur refus de concevoir la possibilité d’une existence musulmane et queer, en prenant pour appui tantôt d’obscurs versets coraniques, tantôt des lois homophobes dans certains pays du Moyen-Orient. Ou comment amalgamer complètement islam, musulman·e·s, textes sacrés, pays musulmans et expériences LGBTQI+, tant leur imaginaire est conditionné par des récits occidentaux très enracinés, fait d’amalgames et de clichés, opposant dans ce cas-ci un Québec libéré de la religion grâce à la Révolution tranquille à un Orient encore plongé dans les abîmes. L’une de ces personnes, assise à côté de moi, s’empressait de sortir de son sac un dossier papier intitulé « L’homosexualité selon l’islam » avec un corpus de versets et d’interprétations, et de citer le verset 5 de la Sourate 4 de la section 10 du chapitre 25 de l’Évangile selon Mohammed, dans une conférence ayant pour sujet les récits de résilience de huit personnes queers qui s’avèrent être musulmanes. Ce n’étaient clairement pas ces expériences de vie difficiles, éprouvantes et réduites au silence qui intéressaient ces personnes, mais plutôt l’occasion de prouver leur point— en prenant toute la place qu’il leur fallait—, et de montrer que l’islam est une religion rétrograde, dans une salle où étaient présentes des dizaines de personnes LGBTQI+ pour qui l’islam et/ou la culture musulmane ont une valeur affective importante.

Réduire pour juger

Autant je pense que le débat d’idées, et notamment le débat sur la religion, sont importants — je suis moi-même assez critique des religions — autant je refuse que nos existences et nos vies soient réduites à un débat théologique et que nos espaces soient parasités par des individus qui ne comprennent pas la nature douloureuse de nos expériences et refusent de nous écouter. On peut débattre d’idées, et la religion est un corpus d’idées, mais nos existences et nos vies ne sont pas de cette nature, elles sont bien réelles et ont des conséquences très matérielles. En parler exige une éthique du dialogue rigoureuse et empathique basée avant toute chose sur l’écoute des concerné·e·s, le but n’étant pas d’avoir raison ou de faire son point, mais d’apprendre à propos d’une expérience de vie que tout le monde ne traverse pas, de combler une méconnaissance qui n’est pas une honte.

Cette polémique a été assurément frustrante, car elle n’a permis ni aux concerné·e·s de se retrouver, ni aux non-concerné·e·s d’apprendre. Elle m’a néanmoins beaucoup fait réfléchir à mon histoire et mon rapport houleux et conflictuel avec Dieu, au dilemme que j’ai vécu entre être musulman·e et être LGBTQI+. Et petit spoiler qu’il faut visiblement encore rappeler : les deux sont parfaitement compatibles! Car qui a dit qu’être musulman·e signifiait être lié·e à la virgule près à un texte révélé il y a une dizaine de siècles? Être musulman·e renvoie certes à un rapport à une religion, mais cette signification s’est considérablement enrichie avec le temps dans un sens plus agentif, plus créatif et plus libre, comme cela est en réalité le cas pour beaucoup d’autres allégeances religieuses ou non religieuses. Après tout, y a‑t-il un sens unique au fait d’être chrétien·ne, juif·ve, bouddhiste ou même athée, pour ne citer que ces croyances?

Mais dans les pays occidentaux, l’islam n’est pas une religion comme une autre. Parler de religion amène même généralement à parler d’islam, et très souvent en des termes peu flatteurs (les fameux « signes religieux »). Et cela revient habituellement à confondre islam, musulman·e·s et pays à majorité musulmane, et à débattre d’humain·e·s avec aussi peu d’égards et d’empathie que l’on débat d’abstractions.

Un imaginaire essentialiste très bien rodé est à l’origine de cela. Il s’est cristallisé depuis au moins une vingtaine d’années autour de l’idée d’un Orient accablé et fantasmé en même temps, qui amalgame des régions, des cultures et des croyances très différentes et complexes dans la catégorie vulgaire du sujet oriental islamique, perçu tantôt comme une menace terroriste, tantôt comme un sujet opprimé à libérer.

Alors peut-on encore parler d’islam comme de n’importe quelle autre religion dans ce contexte politique, social et symbolique? Peut-on en discuter comme de n’importe quel autre système d’idées, de dogmes et de croyances, avec ses apports et ses travers? Vraisemblablement non, l’islam est un objet d’exception qu’il faut traiter avec la plus grande sévérité et intransigeance pour la menace qu’il représenterait spécifiquement pour la démocratie, et ses adeptes venus d’ailleurs doivent le comprendre et s’intégrer.

Mon propos ici n’est pas de nier la réalité des décalages culturels et moraux liés à l’immigration; il s’agit d’une réalité sociologique indéniable et inévitable. Vouloir adresser cela au nom de la cohésion d’une société est une chose, mais en est une autre que d’y opposer une attitude hostile, défensive et finalement assez primitive qui relève plus de la psychologie que de la raison tant célébrée. C’est précisément cela qui mène au racisme, à l’essentialisme, à l’ignorance et à la haine dont font l’objet les populations immigrantes musulmanes (ou ayant l’air musulmanes) et dont le seul projet politique que je peux leur voir est de s’assurer des conditions de vie dignes.

Partant très souvent de cette base de méfiance et de supériorité, l’attitude occidentale face à la diversité culturelle et religieuse ne peut que condamner la communication saine nécessaire au vivre-ensemble et à l’empathie ; elle devient alors un dialogue de sourds, un dialogue impossible qui polarise, frustre et braque les un·e·s contre les autres. C’est précisément dans cette situation que l’on se trouve en ce moment dans la majorité des pays occidentaux face à l’islam et aux musulman·e·s. C’est précisément cela qui s’est passé à la conférence à laquelle j’ai assisté. Et les seul·e·s à qui bénéficie cette dynamique sont des entrepreneur·euse·s politiques calculateur·ice·s et dangereux·ses associé·e·s à des médias, marchands de haine, toujours plus nombreux.

Combattre l’isolement

Face à ce climat toxique, injuste et blessant pour une partie de la société qui n’a rien demandé d’autre que de vivre en paix, en phase avec elle-même et intégrée à la société où elle se trouve, je me pose une question tous les jours : comment aborder sereinement dans ce contexte les conversations nécessaires sur les dynamiques d’oppression et sur les haines qui existent dans nos communautés religieuses? Comment avoir ces conversations et ces débats difficiles, sans donner des munitions aux marchands de haine pour nous nuire, et sans pour autant se maintenir dans l’invisibilité et l’interstice?

La conséquence la plus problématique de ce climat du point de vue de mon expérience intersectionnelle est qu’elle me place dans un dilemme cornélien, un déchirement intenable, en tant que personne queer, immigrante et de culture musulmane, où je ne sais pas quoi dire, où le dire, sans me nuire à moi-même ou à ma communauté, car il n’y a pas d’espaces de dialogue sécuritaire et constructif qui ne soient pas épargnés par le regard essentialisant, intrusif et accusateur des marchands de haine. Les termes de la conversation nous ont été confisqués. Et non seulement la communication est brisée entre la société majoritaire et la minorité musulmane à cause d’une attitude d’ignorance, d’antipathie et de déshumanisation, cette même attitude empêche la communication au sein de nos communautés. Et évidemment, dans cette situation, les premièr·e·s à en souffrir sont ceux·celles se situant à l’interstice de ces différentes expériences sociales, dans cet espace microscopique que personne ne voit, qui n’intéresse personne d’autre que ceux qui y vivent à l’étroit, souvent dans la solitude, et qui ressentent un besoin brûlant et vital d’engager les conversations nécessaires.

Finalement, même si j’ai rompu avec Dieu il y a de cela quelques années, je pense de plus en plus qu’il n’est finalement pas nécessaire de s’en débarrasser pour trouver libération, je pense même que la religion peut être un vecteur de progrès et de changement des mentalités, car elle a un potentiel rassembleur. Mais cela, seulement si l’on accepte d’attaquer les dynamiques de pouvoir et d’oppression qui traversent nos communautés, sans excommunier quiconque et rien d’autre que la haine. Et cela, seulement si on accepte de développer un rapport plus libre, plus réfléchi et plus courageux à l’égard de la religion, empreint de spiritualité, d’amour et d’empathie.

Dans le roman éponyme d’Amin Maâlouf, Baldassarre le voyageur incarne très bien cet esprit. Comme il le dit très joliment : « J’aime à croire que le Créateur préfère, de toutes ses créatures, justement celles qui ont su devenir libres […]. Le Dieu qui mérite que je me prosterne à Ses pieds ne peut avoir aucune petitesse ni aucune susceptibilité. Il doit être au-dessus de tout cela. Il doit être plus grand. Il est plus grand, plus grand, comme aiment à répéter les musulmans. »

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« Personne n’est illégal·e sur des terres volées » https://www.delitfrancais.com/2019/10/29/personne-nest-illegal%c2%b7e-sur-des-terres-volees/ Tue, 29 Oct 2019 19:16:19 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=34856 Qui s’oppose au projet de construction du centre de détention de migrant·e·s?

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Fatima Gabriela Salazar Gomez a quitté le Pérou avec sa mère et son frère, alors un bambin, lorsqu’elle avait 6 ans. Ils arrivent à Miami en 1999, mais, face aux conditions de travail médiocres et au refus du gouvernement des États-Unis à leur donner la citoyenneté, décident d’aller s’établir au Canada avec un visa de touristes. Ils se font expulser du pays et doivent repartir aux États-Unis, où ils vivent sans papiers pendant 1 an et se partagent à trois un matelas dans un sous-sol. Résiliente, la mère de Fatima décide de retenter sa chance au Canada. Nous sommes alors pendant la dictature d’Alberto Fujimori, ce qui facilite le processus de demande d’asile. Fatima, sa mère et son frère traversent donc à pied la frontière États-Unis-Canada et se font interpeller par les douaniers américains. Toute la famille est en pleurs, et le frère de Fatima supplie la douanière de ne pas tuer sa mère. Finalement, les douaniers les laissent passer, mais non sans conséquence : Fatima a été barrée des États-Unis pendant 10 ans, et se fait maintenant questionner sur ces événements à chaque fois qu’elle passe les douanes. « À jamais, je resterai pour eux une personne ayant vécu de manière ‘‘undocumented’’».

Militante, féministe, étudiante engagée et citoyenne canadienne, Fatima fait maintenant un projet de maîtrise en communication à l’UdeM sur la représentation sociale de la Latina dans la culture québécoise, et travaille comme consultante pour le projet MTLElles qui vise la participation égalitaire des femmes à la vie démocratique municipale et communautaire. Lorsque je lui parle du projet de prison à Laval, celle qui autrefois était réfugiée politique au Canada s’insurge. « C’est un projet déshumanisant et empli d’une immense violence coloniale et raciste », me dit-elle. « Personne n’est illégal sur des terres volées ». Elle espère que le travail de sensibilisation et de mobilisation effectué par les différents groupes d’activistes s’opposant à la prison, notamment Solidarité sans Frontières (SSF), mais aussi par les 80 autres organismes signataires de la déclaration contre la construction de la prison, en feront réfléchir plusieurs quant aux enjeux liés à la migration. « Plus de personnes que vous ne le pensez sont affectées par ces politiques », me dit-elle.

« C’est un projet déshumanisant et empli d’une immense violence coloniale et raciste » – Fatima Gabriela

Des cibles différentes

M. Smith*, président d’une des compagnies qui avaient été approchées par le gouvernement pour soumissionner pendant l’appel de projets pour la construction de la prison à Laval, m’a accordé une demi-heure pour discuter des enjeux liés à la prison. Son message principal : lui, ses employé·e·s et les autres compagnies ayant été approchées ne sont pas tous « des monstres racistes et pro Trump ». Au moment où nous nous sommes parlé, fin mars 2019, la compagnie de M. Smith n’avait pas encore répondu à l’appel de projets, mais ne rejetait pas la possibilité de le faire, malgré la forte pression publique l’appelant à ne pas s’impliquer dans ce processus. M. Smith m’a confié que près d’une centaine de personnes l’avaient appelé en l’espace de quelques semaines pour lui demander de se retirer de ce projet « moralement répréhensible », pour reprendre leurs mots. Pour M. Smith, cependant, il s’agit bien « d’un contrat comme un autre », en ce sens que ce n’est pas l’aspect moral, mais plutôt les critères financiers qui le guident dans les prises de décision pour son entreprise. « Des contrats de 50 millions, on n’en voit pas tous les jours », me confie-t-il. Ce montant représente de quoi sécuriser une année financière complète pour une entreprise petite comme la sienne. « Mes employé·e·s doivent nourrir leurs enfants, je dois penser à eux aussi ». Lorsque je le questionne sur la moralité de nourrir ses enfants en enfermant ceux des autres, il m’avoue ne pas approuver totalement le projet. Cependant, il a l’impression que les activistes ne se tournent pas vers les « bons coupables » en s’adressant aux compagnies. « C’est l’État qu’on doit blâmer » me dit-il. « Après tout, c’est lui qui finance le projet ».

Au final, ce n’est pas la compagnie de M.Smith, mais les entreprises Lemay et Groupe A, deux firmes d’architecture basées respectivement à Montréal et à Québec, qui ont signé des contrats pour la conception des plans de construction de la prison. L’entrepreneur général Construction Tisseur Inc., dont le siège social est basé à Val-David, a quant à lui obtenu, en juillet, le contrat pour superviser la construction de la nouvelle prison. Ses travaux sur le site ont commencé le 5 août. Après que plus de 70 personnes se soient rassemblées devant les bureaux de l’entrepreneur pour la première d’une série d’actions déterminées à dénoncer la violence du système de détention du Canada, Tisseur a obtenu de la Cour Supérieure du Québec une injonction juridique contre le réseau de justice migrante Solidarité sans frontières empêchant les membres de SSF de manifester devant leur siège social. L’injonction, qui devait durer jusqu’au 1er septembre, a ensuite été renouvelée jusqu’au 31 octobre. « Les propriétaires de Tisseur aiment présenter leur compagnie comme une entreprise socialement responsable, mais ils profitent de la misère et de la violence auxquelles le gouvernement canadien contraint les migrant·e·s » a déclaré Amy Darwish de Solidarité sans frontières, lors de l’occupation devant les bureaux de Tisseur.

« Les propriétaires de Tisseur […] profitent de la misère et de la violence auxquelles le gouvernement canadien contraint les migrant·e·s »

L’image du·de la migrant·e

Fatima me parle beaucoup du pouvoir des mots et des images qui y sont associées. « Le pouvoir des mots est tellement important dans une société qui valorise la connaissance. Ce serait faux de penser que [le langage utilisé pour parler des personnes migrantes] est anodin. » Associer le mot « illégal » au mot « immigrant·e », comme le font certains médias pour parler de personnes se présentant de façon irrégulière à une frontière, de migrant·e·s et de demandeur·euse·s d’asile, ça frappe fort l’imaginaire et c’est aussi extrêmement péjoratif : « Quand tu te présentes à la frontière, oui, tu es migrante, mais tu es aussi une mère, une fille, une citoyenne d’un autre pays. Lorsque les journalistes parlent de toi d’une telle façon, c’est déshumanisant. La population se fait une image de toi sans savoir tout ce que tu as vécu, juge de ton sort avant même que le gouvernement n’ait à le faire ».

La détention est-elle nécessaire?

Dans son essai La prison est-elle obsolète ?, paru pour la première fois en avril 2003 (Are prisons obsolete?, en anglais, ndlr) et analysant les soubassements racistes et sexistes du système carcéral américain, Angela Davis écrit : « Dans l’ensemble, les gens considèrent la prison comme un fait acquis. Ils ont du mal à imaginer une société sans elle. En même temps, nul n’a envie de regarder la réalité carcérale en face, de découvrir ce qui se passe vraiment à l’intérieur de ces lieux. » (p.17)

Le parallèle avec la situation carcérale des migrant·e·s au Canada est facile à faire. Peu s’intéressent aux conditions des migrant·e·s à l’intérieur de ces « Centres de surveillance de l’immigration », qu’ils peinent à nommer par ce qu’ils sont réellement : des prisons. Beaucoup tentent de se convaincre qu’ils doivent être plus ou moins agréables, considérant la présence d’un terrain de jeu pour enfants, l’absence de barreaux visibles de l’extérieur. Très rares sont ceux qui parviennent à imaginer un paysage canadien sans centres de détention pour migrant·e·s. « Qu’est-ce qu’on fait si on sait que quelqu’un ne se présentera pas à son procès pour être déporté ? », a demandé l’une des membres de l’assistance lors de la conférence du 16 octobre. « Quelles sont les alternatives ? ».

Bien que l’emprisonnement de migrant·e·s ne soit pas un phénomène nouveau au Canada et fasse partie d’une longue histoire de violations des droits humains et de déportation, il est bon de se rappeler qu’il

n’en a pas toujours été ainsi — et que d’autres alternatives existent. En effet, le gouvernement fédéral loue parfois des chambres d’hôtels ou des résidences universitaires pour y héberger des familles et personnes demandeuses d’asile. Pour M. Smith*, la décision du gouvernement de se tourner vers la construction d’une prison pour migrants plutôt que de favoriser l’hébergement temporaire dans des lieux plus humains pourrait s’expliquer par un facteur strictement économique : « Alors qu’il en coûte cher à l’État de louer des chambres d’hôtels et chambres de résidence, ce qui empêche aux propriétaires de ces établissements de les rendre disponibles à d’autres clients, la construction d’une prison représente davantage un investissement qu’une dépense, car le centre de détention pourra être revendu dans plusieurs années, ce qui permettra de rembourser la plupart des dépenses que sa construction aura engendrées. C’est un peu comme l’achat d’une maison », résume-t-il. La question se pose alors à savoir si l’État canadien préfère protéger ses finances ou protéger les

droits humains.

« La possibilité de bloquer la prison dépendra de la prise de conscience de la population », a dit Mary, représentante de SSF, lors de la conférence organisée par RadLaw le 16 octobre. « Il faut que les gens en parlent autour d’eux, se partagent des articles, réalisent ce qui se passe à côté de chez nous ».  La construction devrait être terminée pour 2021, à moins qu’elle ne soit bloquée par des citoyen·ne·s.

*Nom fictif, le nom de cette personne a été modifié à sa demande

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Éveiller ses sens https://www.delitfrancais.com/2019/10/02/eveiller-ses-sens/ Wed, 02 Oct 2019 13:39:24 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=34523 Retour sur Danse mutante et Antichambre à l’Agora de la danse.

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L’Agora de la danse a débuté sa saison d’automne à l’édifice Wilder ce 17 septembre dernier avec Danse mutante de Mélanie Demers et poursuivait cette semaine avec Antichambre d’Aurélie Pedron. Avec ces deux performances, l’Agora reste fidèle à sa mission : inviter le public à vivre des expériences de danse contemporaine diverses et lui permettre de percevoir le monde autrement. Danse mutante présente quatre chorégraphes pour un seul duo de danseurs et le tout se déroule comme un relais. Durant celui ci, le public découvre quatre performances riches en sons, lumières et provocations. Dans Antichambre au contraire, le·a spectateur·rice fait partie intégrante de l’œuvre. Il·elle est plongé·e dans la pénombre et le silence, et accède à une expérience sensorielle incomparable. Ces deux spectacles, qui engagent le public de manière bien différente, se rejoignent sur certains points, notamment par la sensualité qui se dégage à travers les deux performances et leurs interprétations innovantes de la danse. 

Destruction, reconstruction et malaise

Danse mutante invoque l’art de la destruction puis de la reconstruction. La chorégraphie originale de Mélanie Demers est réinterprétée trois fois durant les deux heures et demie que durent la performance. Le duo de danseurs démarre dans un décor épuré, presque nu et avec pour seuls attributs une serviette et une canette. Ils se peignent le visage puis commencent lentement à danser sans se toucher, puis se rapprochent et finissent par s’enlacer. Cette première partie est pleine de sensualité et d’élégance, mais est interrompue par une séquence durant laquelle les deux danseurs parlent puis crient, en fixant l’audience comme s’ils s’adressaient à elle. Ce passage, qui tente d’impliquer les spectateurs, n’a pas l’effet escompté et brise le bel équilibre du début. Dans la version suivante, d’Ann Liv Young, les danseurs endossent de nouveaux rôles et enfilent perruques et robes. Ce changement radical provoque de nombreux rires au début, mais, alors que la performance se prolonge, les allusions au harcèlement sexuel se multiplient pour finalement se terminer par une simulation de viol. Cette scène provocante et dérangeante plonge l’audience dans un malaise palpable au moment précédent l’entracte. Ce sentiment s’estompe au début de la troisième variation, dans laquelle Kettly Noël crée une ambiance chaleureuse avec des étoffes colorées au sol, un éclairage à la bougie et une bande sonore qui rappelle le bruissement du désert. L’audience est transportée et les danseurs exécutent à nouveau des mouvements de danse précis, sensuels et élégants comme dans la première variation. Puis, ils changent à nouveau de rôles. L’un imite un homme blanc à la recherche d’exotisme sexuel pendant que l’autre se transforme en prostituée. Cette scène fait émerger à nouveau le malaise, mais cette fois-ci il disparaît lorsque la prostituée se rebelle et soumet l’homme blanc. Ces changements d’émotions brusques se produisent tout au long du spectacle et dans la variation finale, créée par Ann Van den Broek. Dans celle-ci, le sentiment de révolte présent à la fin de la performance précédente s’estompe, les danseurs et le décor changent ; l’on retrouve la sobriété du début. Aucun mouvement de danse n’est esquissé et, pendant les dernières minutes du spectacle, le duo se contente de chanter, en répétant les mêmes gestes et sans exprimer la moindre émotion. La performance devient longue et pesante et les spectateur·rice·s semblent ressortir de la salle perdu·e·s et sans trop savoir quoi en penser.

Au-delà de l’ouïe et de la vue

Du côté d’Antichambre, les spectateur·rice·s sont aussi perdu·e·s, mais cette confusion ne dure pas. Dans cette performance interactive, les spectateur·rice·s sont au coeur du dispositif et ne sont pas de simples témoins. Ils·elles entrent dans l’œuvre et la performance artistique dépend de leur propre performance. À l’entrée de l’antichambre, chacun·e doit couvrir ses oreilles d’un casque et ses yeux de lunettes qui permettent seulement de distinguer des silhouettes et des points de lumières. Ils·elles sont ensuite guidé·e·s vers un couloir étroit qui débouche sur un espace que chacun·e peut explorer à sa guise durant les prochaines 50 minutes. Cette exploration hors du commun passe essentiellement par le toucher puisque les sons sont atténués et la vision floue. Le·a spectateur·rice, ou plutôt le·a visiteur·euse, découvre ainsi des murs doux, une piscine remplie de billes gluantes à l’odeur d’huiles essentielles et surtout des danseur·euse·s guides. Ces dernier·ère·s guident ou se laissent guider, font danser les visiteur·euse·s ou bien les effleurent simplement. Au début, chaque personne semble un peu déboussolée, timide et n’ose pas trop toucher les autres ou s’aventurer trop loin dans la pénombre. Mais plus le·a visiteur·euse découvre de nouveaux espaces, plus cette envie de découverte grandit et plus il·elle désire explorer chaque recoin de l’espace. Quant à la peur des autres, elle s’estompe petit à petit et les visiteur·euse·s apprennent à apprécier et rechercher le contact d’une main ou l’effleurement d’une épaule. Contrairement à Danse mutante, où sons et lumières sont très présents, Antichambre trouve son originalité en l’absence de ceux-ci. L’expérience repose essentiellement sur le sens du toucher, rare pour le·a spectateur·rice dans une performance habituelle de danse, et celui-ci donne toute sa sensualité à la performance artistique. Chacun·e est libre d’aller à la recherche de l’autre ou de continuer son exploration en solitaire. Cette expérience est un merveilleux moment de liberté et de relaxation, voire de méditation, où chacun·e est coupé·e de la vie bruyante et pleine de lumières caractéristique de notre monde moderne. Les visiteur·euse·s plongé·e·s dans cet espace minimaliste peuvent apprendre ou réapprendre à écouter leur corps et à le laisser s’exprimer, communiquer et interagir avec les autres. Comme Danse mutante, cette performance est tout aussi originale et expérientielle. En revanche, au lieu de susciter un sentiment de mal-être qui va et vient, elle suscite rapidement une sensation de bien-être. 

Un changement de perception 

Les chorégraphes ont pris des risques avec ces deux performances artistiques qui poussent le public hors de sa zone de confort et aspirent à le faire devenir acteur plutôt que spectateur. Si ce parti pris est bien réussi dans Antichambre et crée un changement de perception chez l’auditoire, cela est plus mitigé pour Danse mutante. Certains passages sont trop dérangeants et atténuent le potentiel qu’ont d’autres moments chorégraphiques absolument magnifiques. Pour éveiller ses sens et être surpris·e, l’Antichambre est l’endroit où se rendre, se laisser entraîner, s’abandonner et vivre l’instant présent le temps d’une soirée. 

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