Le Délit https://www.delitfrancais.com/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Sat, 29 Mar 2025 21:09:32 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 Le brutalisme : appréciable ou détestable? https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/le-brutalisme-appreciable-ou-detestable-2/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57951 Critique du film The Brutalist de Brady Corbet.

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Le 2 mars dernier, le film The Brutalist (Le brutaliste) du réalisateur Brady Corbet a remporté trois Oscars : meilleur acteur pour Adrien Brody, meilleure musique de film ainsi que meilleure photographie. Avec ses 3 heures 45 minutes, entre le scandale d’intelligence artificielle et son choix audacieux d’un tournage en 70 mm, The Brutalist a su provoquer la discussion à Hollywood et marquer les esprits – ainsi que la saison des Oscars.

Renouveau à Hollywood

L’œuvre de Brady Corbet s’empare d’un sujet déjà largement traité à Hollywood, abordant le sort des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale et les migrations forcées qui ont suivi. Bien que The Brutalist n’innove pas en matière de récit, il apporte un angle inédit avec le thème du rêve américain. Le film raconte l’histoire de László Tóth, incarné par Adrien Brody, un architecte renommé d’origine juive hongroise, qui immigre à New York après la Seconde Guerre mondiale. Il travaille dans un premier temps dans un magasin de meubles, puis dans les mines de charbon, avant de refaire son prestige dans l’architecture en adoptant le style brutaliste des années 1950. L’œuvre est divisée en deux parties, chacune correspondant à une tranche d’années. La première (1947- 1952) offre un aperçu réel et brut de la réalité des immigrants des années 40 : de New York à Philadelphie, les tensions familiales, les banques alimentaires et la dépendance à l’héroïne sont tous des thèmes qui offrent un aperçu cru et sombre des réalités du « rêve américain ».

La deuxième partie (1953–1958) suit László Tóth dans son nouveau projet architectural : l’Institut Van Buren, financé par le riche homme d’affaires Harrison Lee Van Buren (Guy Pearce). Ce dernier souhaite construire un centre communautaire à l’architecture grandiose en Pennsylvanie, en l’honneur de sa mère. Au fil des années, les retrouvailles familiales, les tensions professionnelles entre László et Harrison Lee, ainsi que les traumatismes passés se croisent et s’entrelacent. Cette deuxième partie met en lumière l’exceptionnelle performance d’Adrien Brody, qui incarne un homme déchiré entre ses ambitions de grandeur et son identité d’immigrant, un conflit qui entrave son intégration dans la société américaine. Entre les retrouvailles familiales, les difficultés liées à l’identité et les luttes personnelles, tant physiques qu’émotionnelles, les traumatismes et le désir de renouveau se mêlent et se confrontent tout au long de l’histoire.

D’entrée de jeu, la qualité cinématographique de The Brutalist est évidente. L’oeuvre a été filmée avec une caméra 70 mm, un choix que le directeur Brady Corbet justifie : « La meilleure façon d’accéder [aux années 1950] était de filmer quelque chose qui avait été conçu dans la même décennie (tdlr) ». Cette décision artistique s’avère un franc succès. Dès le premier plan, l’immersion est parfaite : le protagoniste est dans un train, en route vers ce que l’on croit être un camp de concentration. Mais dès l’ouverture des portes, un plan sublime révèle la Statue de la Liberté, symbole d’espoir pour les immigrants. Grâce au format 70 mm, nous sommes instantanément projetés dans l’atmosphère des années 50. Tout au long de l’œuvre, les plans statiques (mines de charbon, chantiers de construction, carrières de Carrare en Italie, maisons grandiose de Pennsylvanie, ou encore plans d’architecture illuminés) se dotent d’une dimension sublime grâce au style de caméra et au travail du cinématographe Lol Crawley. Composée par le compositeur Daniel Blumberg, la bande originale de The Brutalist est aussi une partie clé de sa réussite. Les 10 premières minutes du film sont accompagnées d’une musique ininterrompue, qui établit l’atmosphère pour le reste de l’œuvre.

Un prix mérité ?

Les qualités esthétiques du film ne l’ont pourtant pas exemptées de scandale. En effet, en janvier dernier, l’éditeur de The Brutalist Dávid Jancsó a révélé que les voix d’Adrien Brody (László) et de Felicity Jones (Erzsébet) avaient été modifiées avec l’intelligence artificielle afin de peaufiner l’accent hongrois dans quelques scènes. Si certains ont critiqué cet usage, arguant qu’il diminue le talent du jeu d’acteur, d’autres y ont simplement vu une campagne de diffamation avant la saison des Oscars. Bien que cela n’altère en rien le travail des acteurs ni la beauté du film, nombreux sont ceux qui sont restés perplexes lorsque Adrien Brody a remporté l’Oscar du meilleur acteur, considérant que d’autres nominés, dont la performance n’avait pas été enrichie par l’intelligence artificielle, l’auraient davantage mérité.

Ce film comporte des scènes de violence sexuelle.

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Aux portes de la Franche-Comté https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/aux-portes-de-la-franche-comte/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57946 Critique de Vingt Dieux.

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Comté, comté et comté. Oui, Vingt Dieux, le premier long métrage de la réalisatrice Louise Courvoisier, est un film qui trace les escapades d’un jeune adulte délinquant, Totone, incarné par Clément Faveau (son premier rôle à l’écran). Laissé à lui-même, contraint de s’occuper de sa petite sœur sans travail fixe, il picole et commet des tas de bêtises. Finalement, ne serait-ce pas un film qu’on a déjà vu mille fois, démontrant ce passage à l’âge adulte rugueux rempli d’incertitude et de quête de soi? Pas si vite. Il y a aussi du fromage et l’accent jurassien.

Pour son premier long métrage, Louise Courvoisier a choisi la région où elle a grandi, la Franche-Comté, située à l’Est de la France. Le paysage y est pittoresque, vallonné, brumeux et c’est là qu’on trouve l’essentiel de la production du fromage comté. Dans cette campagne auprès des vaches, elle réussit à évoquer cet air frais jusqu’aux salles de cinéma calfeutrées.

Pour les comédien·ne·s, le lieu est aussi familier. Le film repose sur un « casting sauvage », c’est-à-dire que la réalisatrice elle-même a parcouru la région à la recherche de ses acteur·rice·s. Nous sommes donc très loin des divas et des studios hollywoodiens. Les jeunes ne trichent pas sur leur âge et les vaches sont bel et bien laitières. Dans cette distribution, on ne trouve pas d’acteur·rice·s de formation, mais plutôt des agriculteur·rice·s de métier : notre personnage principal, Clément Faveau, est issu de l’industrie volaillère.

« Dans cette campagne auprès des vaches, elle [Louise Courvoisier] réussit à évoquer cet air frais jusqu’aux salles de cinéma calfeutrées »

À l’arrivée, une authenticité notable transpire de ce film. Prenons Maïwène Barthélémy, dans le rôle de l’agricultrice Marie-Lise, qui fait son entrée dans la vie de Totone, lui fournissant le lait nécessaire à la production du fromage. Parmi ses vaches, elle est très à l’aise. Devant la caméra, idem. À la fois bourrue et sensible, elle est d’un naturel convaincant dans son premier rôle au cinéma. D’ailleurs, elle poursuivait un brevet de technicien supérieur (BTS) en production animale dans un lycée agricole au moment du casting. Bien qu’inexpérimentée, une distinction de taille lui est attribuée : le 28 février, elle est récompensée avec le César de la meilleure révélation féminine. D’un tapis en foin jusqu’au tapis rouge.

Parfois, le réalisme est tel qu’on se demande si on ne serait pas face à un documentaire. Les fêtes de village, les ateliers fromagers, et les caves d’affinages ne ressemblent pas à des décors de tournage, mais à des lieux de vie et de travail. De plus, on en apprend énormément sur la manufacture du comté : l’ingrédient clé pour la coagulation du lait cru (la présure), le temps de maturation d’un Comté d’appellation d’origine protégée (AOP) (il faut de la patience), et surtout comment arriver à transporter une roue entière de comté sur une petite mobylette (le jugement bien naïf de Totone !).

Si le thème des jeunes qui grandissent à la campagne a déjà été exploité souvent au cinéma, Louise Courvoisier réussit néanmoins à y apporter sa propre empreinte. Vingt Dieux dévoile les difficultés – parfois clichées – de la vie rurale, en ne s’appuyant toutefois pas trop sur une vision sombre. Cela reste un film d’aventure doux, amusant et sensuel. Si vous cherchez un film pour accueillir les beaux jours de printemps, Vingt Dieux est un film rafraîchissant qui vaut le détour. Retrouvez-le en salle au Cinéma Beaubien et à la Cinémathèque québécoise.

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Manie ou TOC? https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/manie-ou-toc/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57941 Comprendre les troubles obsessionnels compulsifs pour moins les subir.

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La vie d’un étudiant est loin d’être de tout repos. Les sources d’anxiété sont aussi nombreuses que les tâches à accomplir et chacun adopte ses propres stratégies pour y faire face. Si certains préfèrent la méditation et le yoga, d’autres se rassurent grâce à leur routine et à certaines manies. Néanmoins, il arrive que nos habitudes deviennent envahissantes, au point d’être chronophages et d’alourdir notre charge mentale plutôt que la soulager. Vérifier une dizaine de fois que son réveil est bien programmé, s’assurer une fois, puis trois fois, que le four est bien éteint… À partir de quel moment peut-on parler de troubles obsessionnels compulsifs (TOC)?

Catherine Courtois-Ouellet, psychologue spécialisée en TOC à l’Institut Allan Memorial du Centre Universitaire de Santé de McGill (CUSM) démystifie ce problème de santé mentale et explique en quoi il se différencie d’une simple manie.

Obsessions et compulsions

Selon la psychologue, les TOCs se manifestent par la présence d’obsessions ou de compulsions, même si en général les deux vont de pair. Les obsessions sont « des pensées intrusives qui surviennent à notre esprit alors qu’on ne souhaite pas les avoir » et se traduisent souvent en doutes. Elle donne un exemple : « Est-ce que j’ai touché quelque chose qui était contaminé? ». Ces obsessions peuvent aussi se présenter sous la forme « d’images récurrentes et intrusives » qui s’imposent à l’esprit.

Les compulsions sont « des comportements répétitifs qui visent à évincer les obsessions et réduire la détresse qu’elles provoquent ». Elles agissent ainsi comme mécanisme de protection : « Par exemple, on peut se laver les mains à répétition pour s’assurer de ne pas être contaminé ou de ne pas contaminer les autres. » Ces compulsions ne sont pas toujours visibles. Elles peuvent également se faire mentalement, comme lorsqu’une personne « répète une série de chiffres pour empêcher qu’un malheur ne survienne aux gens qu’elle aime » ou lorsque l’« on se remémore le déroulement des évènements de la journée pour s’assurer que tout est sans risque ». Contrairement aux manies, à savoir des habitudes anodines, les TOCs peuvent avoir des répercussions graves sur ceux qui en souffrent. Si beaucoup trouvent du réconfort dans des rituels sans grande incidence sur leur quotidien, sommes-nous tous susceptibles de développer des TOCs aux conséquences plus néfastes?

Un problème de croyance

La psychologue explique que les symptômes du TOC se présentent sur un spectre et présentent différents degrés de sévérité. La pensée superstitieuse peut ainsi être une tendance moins sévère de TOC. Plus le TOC prend de la place dans notre vie, plus il est sérieux. « Pour être capable de poser un diagnostic de troubles obsessionnels compulsifs, il faut que les obsessions, les compulsions, prennent au moins une heure dans la journée de la personne, créent une interférence importante dans son fonctionnement ou entraînent une détresse significative », précise la psychologue.

D’après elle, un mélange de facteurs mène à l’apparition d’un TOC, même si les causes ne sont pas encore bien connues. D’un côté, il y a un aspect génétique et neurobiologique inhérent à la personne, de l’autre, des facteurs extrinsèques peuvent exacerber une fragilité préexistante à la suite d’événements de vie angoissants : la perte d’un être cher, la transition de l’adolescence à l’âge adulte… Cela explique pourquoi l’âge typique d’apparition d’un TOC est 19 ans, au début de l’âge adulte. Étant fortement influencé par le contexte, le TOC ne relève pas d’un trouble de la personnalité, mais est plutôt associé à un problème de croyance : « la personne avec le TOC fait trop confiance à son imaginaire, à défaut de faire confiance à son bon sens et à la réalité. »

Reprendre le contrôle

Vivre avec des TOCs sévères peut devenir très contraignant au quotidien. « Peut-être que le TOC va pousser la personne à ne plus vouloir quitter son domicile, ou à s’isoler pour différentes raisons », illustre la psychologue. La personne atteinte de TOC peut même éviter la présence de certaines personnes ou situations qui sont liées à ses obsessions, de peur de causer du tort. Cela peut limiter les choix en matière d’emploi ou dans la sphère privée, ainsi que rendre plus difficile l’entrée dans une relation amoureuse. Mais alors, est-il possible d’atténuer les conséquences négatives des TOCs?

« La personne avec le TOC fait trop confiance à son imaginaire, à défaut de faire confiance à son bon sens et à la réalité »

Catherine Courtois-Ouellet, psychologue

« Les compulsions sont une illusion de contrôle parce qu’elles reflètent des comportements qui n’ont pas d’incidence réelle », observe la psychologue. Finalement, elles représentent une perte de temps et amènent le TOC à avoir le contrôle sur nous. Toutefois, il est possible de retrouver notre liberté d’action via différentes thérapies. L’une d’entre elles, nommée la thérapie d’exposition et de prévention de la réponse (EPR), consiste à s’exposer à nos peurs sans faire les compulsions. Il s’agit donc d’apprendre à tolérer les situations qui donnent naissance à nos obsessions ainsi que l’anxiété qui en découle. L’ajout de notions issues de la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT) à l’EPR peut enrichir cette approche en aidant la personne à développer une nouvelle relation avec ses pensées intrusives et ses émotions difficiles. Plutôt que de lutter contre les obsessions ou de chercher à réduire l’anxiété à tout prix, l’ACT encourage à reconnaître ces expériences comme passagères et à rediriger l’énergie vers des actions alignées avec ses valeurs. Une autre approche complémentaire, la thérapie cognitive comportementale basée sur les inférences (TCC‑I), se concentre sur la manière dont les obsessions émergent, en mettant l’accent sur les processus de raisonnement plutôt que sur l’anxiété. Selon cette approche, les obsessions ne proviennent pas d’une hyperactivation de l’anxiété, mais plutôt d’une confusion entre imagination et réalité. La TCC‑I aide ainsi le patient à remettre en question les inférences erronées à l’origine de ses obsessions et à reconstruire une perception des situations redoutées qui est plus juste et ancrée dans l’ici et maintenant.

Bien qu’il soit possible que le TOC ne disparaisse pas entièrement pour certains, il peut perdre de son emprise et devenir plus gérable au quotidien, jusqu’à s’apparenter davantage à une habitude intrusive ou à une fragilité plutôt qu’à une source majeure de détresse.

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L’ONU, miroir du monde : quand la culture façonne la diplomatie  https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/lonu-miroir-du-monde-quand-la-culture-faconne-la-diplomatie/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57928 Les Nations Unies à travers les yeux de la McGill Youth Advisory Delegation.

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Loin des salles de classe et au cœur du siège des Nations Unies, chaque année, la Délégation Consultative des Jeunes de l’Université McGill (McGill Youth Advisory Delegation ou MYAD) s’engage dans un travail minutieux de recherche et de plaidoyer pour que les voix des jeunes soient entendues sur la scène internationale. En tant qu’organisation bénéficiant d’un statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) depuis 2006, la mission de l’ONG mcgilloise est claire : façonner des politiques qui reflètent les préoccupations et aspirations de notre génération.

L’année scolaire des délégués est rythmée par la rédaction de recommandations politiques centrées sur la jeunesse, destinées aux trois grandes commissions de l’ONU à New York : la Commission du développement social (CSocD) en février, la Commission de la condition de la femme (CSW) en mars et la Commission de la population et du développement (CPD) en avril. Leur engagement culmine avec la publication du Youth Policy Report, un document entièrement rédigé par les délégués de MYAD, et présenté aux missions permanentes ainsi qu’aux délégués jeunesse de l’ONU lors de leurs commissions respectives.

« Plus qu’une commission, la CSW69 a été une célébration du multiculturalisme, alors que la diversité se manifestait à travers le partage »

C’est dans ce cadre que sept étudiantes mcgilloises et moi-même avons pris la route pour New York la semaine du 10 mars 2025, pour participer à la 69e session de la Commission de la condition de la femme (CSW69), le plus grand rassemblement mondial dédié à la promotion de l’égalité des genres. Au-delà des discours et des panels, notre présence à l’ONU fut remplie de rencontres diplomatiques stratégiques, où nous avons eu des échanges avec la mission permanente de la Roumanie, les représentants de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et de UN Women, ainsi qu’avec les délégués jeunesse de la Suède et de l’Allemagne, parmi tant d’autres. Ces discussions nous ont permis de comparer nos approches respectives en matière de plaidoyer, tout en mettant en lumière une perspective essentielle : la diversité culturelle au cœur de la commission.

CSW69 : microcosme de la culture internationale

Dès notre arrivée au siège des Nations Unies, une mosaïque culturelle s’est dévoilée sous nos yeux. Les couloirs résonnaient de conversations en dizaines de langues, les habits traditionnels côtoyaient les tailleurs de bureaux, et les événements reflétaient la richesse des perspectives. Plus qu’une commission, la CSW69 a été une célébration du multiculturalisme, alors que la diversité se manifestait à travers le partage. En effet, parmi les nombreuses initiatives culturelles, le Royaume d’Arabie saoudite offrait aux participants la possibilité d’écrire leur nom en calligraphie arabe et a organisé un grand souper général d’iftar en l’honneur du ramadan, tandis que plusieurs événements interconfessionnels mettaient en lumière l’importance du dialogue entre croyance et tradition.

L’un des moments les plus marquants de notre séjour fut la cérémonie d’ouverture de la CSW69, lors de laquelle le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a pris la parole pour souligner l’urgence de l’émancipation et de la liberté des femmes à travers le monde. Son discours, empreint de gravité et de détermination, fut ponctué d’un moment de légèreté lorsqu’un membre du public lui posa la question fatidique : « Quand aurons-nous enfin une femme secrétaire générale? (tdlr) » Ce à quoi il répondit, avec humour : « Je ne vais pas m’excuser de ne pas être une femme quand même. » Un éclat de rire a traversé la salle, rappelant que, même dans des discussions aussi sérieuses, l’humour peut aussi être un vecteur de connexion.

En tant que déléguées, nous nous sentions honorées de participer à la plus grande commission de l’ONU à New York. Le fait d’être témoins des stratégies déployées pour faire avancer l’égalité des genres nous a rappelé que notre rôle en tant que jeunes étudiantes est essentiel dans la construction d’un avenir plus juste. Entre traditions partagées et dialogues engagés, la CSW69 nous laisse avec la conviction que les identités culturelles ne sont pas des barrières, mais des ponts vers une compréhension commune – un aspect clé de l’idéologie onusienne.

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On écrit parce qu’on aime https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/on-ecrit-parce-quon-aime/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57925 Un poème par Ivan Gaspart.

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On écrit parce qu’on aime … écrire! Aujourd’hui, c’est ma bile qui implose, on n’écrit ni pour soi ni pour autrui, on écrit parce qu’on aime tellement toutes les choses que l’on lit que c’est uniquement le mélange de toutes ces lectures qui nous pousse à faire le choix d’écrire. Au commencement, on créa le mot et son sens. C’est là que de toutes les entrailles enivrées, on s’exclama « Que l’harmonie soit ! », et l’harmonie fut. C’est l’humain que l’on déchaîne, les mots virevoltent et toutes les âmes se révoltent, car écrire c’est tellement beau qu’on écrit pour écrire, pour l’harmonie de tous les mots. Comme cent bols de soupe font une marmite, cent mots font un passage et dans ce passage, on perd sa boussole, noyée dans la soupe ; les mots forment un corps et à ce corps il y a deux yeux, et moi, c’est dans ces deux yeux que je me perds ; c’est comme un trou béant qui avale les mots, tranche la langue, rend muet ; et pourtant dans un regard des milliers de mots sont dits, et des regards, y’en a des douzaines qu’on échange, et on aimerait tellement que le corps comprenne mais il manque le mot, et sans mot pas d’harmonie, et sans harmonie on se perd dans les choses futiles jusqu’à ce qu’un jour, on lève le regard et on regarde la Lune parce que elle, elle ne disparaît jamais, elle est toujours là pour qu’on s’y perde les soirs où on devient bleu.

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Une année de plus, mais toujours pas plus certaine https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/une-annee-de-plus-mais-toujours-pas-plus-certaine/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57921 Choisir entre études, travail, voyage ou tout ce dont on rêve.

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Hier, je célébrais mon anniversaire. Aujourd’hui, je suis une année plus vieille, et une année plus proche de la fin. Malgré tout, je vois cette nouvelle année comme un nouveau début. Cette année marque aussi la fin d’un chapitre important, avec ma remise de diplôme qui arrive à grands pas. Bien que je tente de me rassurer et de rester optimiste face au futur, ça reste une période d’instabilité, d’incertitude, et je ne sais à quoi m’attendre des mois qui viendront.

On parle souvent de la vingtaine comme des plus belles années d’une vie, d’une ère de liberté teintée par la frivolité et la légèreté d’esprit. On en parle comme d’une période d’exploration de soi. On souligne ces soirées qui ne finissent jamais, ces départs en voyage sur un coup de tête, cette liberté intarissable. Et quelque part, il y a du vrai dans ce portrait de la vingtaine. Mais, on parle beaucoup moins souvent du vertige que cette période peut impliquer, surtout vers la fin des études. Ce moment étrange où les repères tombent un à un, où les échéances changent de nature. Ce ne sont plus des devoirs à remettre ou de la matière à apprendre par cœur, mais plutôt des candidatures à envoyer, des décisions à prendre, et des portes qui se ferment parfois avant même qu’on ait pu les pousser.

Depuis que je suis toute jeune, les différentes étapes de la vie étaient relativement balisées : l’école primaire, le secondaire, le cégep, puis l’université. On avançait tous ensemble à travers ces étapes préétablies, ce calendrier commun. Notre vie était dictée par un rythme que l’on partageait tous plus ou moins, qu’on suivait tous. Et maintenant? Il n’y a plus de sentier battu. Certains d’entre nous cesseront leurs études, certains poursuivront des études universitaires de deuxième cycle. Certains travailleront dans le champ professionnel auquel ils ont dédié leurs études. D’autres changeront complètement de milieu. Il n’y a plus de guide : nous sommes, plus que jamais, libres. Cette liberté, bien qu’elle ait une part de beauté, est profondément angoissante — du moins, pour moi.

J’ai 23 ans. Je suis jeune. C’est ce qu’on me répète souvent. Mais pourquoi, alors, ai-je l’impression d’être en retard? Pourquoi est-ce que chaque jour passé à ne pas « avancer » me semble perdu? Ce sentiment, je sais que je ne suis pas seule à le ressentir. Autour de moi, plusieurs amis vivent la même chose : une sensation d’être suspendus dans les airs, entre deux mondes, celui de la vie académique et l’autre de la vie professionnelle, à la fois pressés d’agir et paralysés par la peur de se tromper. Détenteurs de baccalauréats, nous espérons pouvoir faire ce que nous désirons, mais rien n’est si simple. Un dilemme se présente à moi et à tous ceux qui graduent : poursuivre ses études, entrer sur le marché du travail ou voyager, lâcher tout pour voir le monde? Faire une maîtrise, accepter n’importe quel emploi en attendant, prendre une année de pause, déménager loin d’ici, rester? Chaque option semble valide. Et chaque option semble risquée. Chaque option a une part de bien, mais peu importe ce qu’on choisit, des sacrifices devront être faits.

Ajoutons à mes angoisses un marché du travail extrêmement compétitif qui n’aide en rien.

Trouver un emploi à Montréal en ce moment, ce n’est pas une mince affaire. Même avec un baccalauréat en main, même en étant bilingue, même en ayant fait tout ce qu’il fallait. Les stages, le bénévolat, les jobs étudiants. On m’avait dit que ça paierait. Pourtant, tous les emplois qui semblent intéressants exigent souvent plusieurs années d’expérience ou des qualifications qu’aucun jeune diplômé ne peut espérer avoir. Comment peut-on commencer au bas de l’échelle si ce bas est lui-même inatteignable? Comment puis-je prouver que j’en vaux la peine?

« Autour de moi, plusieurs amis vivent la même chose : une sensation d’être suspendus dans les airs, entre deux mondes, celui de la vie académique et l’autre de la vie professionnelle, à la fois pressés d’agir et paralysés par la peur de se tromper »

Tout ce qu’il reste à faire, c’est se comparer. Comment peut-on l’éviter? On se compare à ceux et celles qui ont obtenu la maîtrise de leurs rêves, qui partent en Europe vivre leurs ambitions, qui démarrent un projet, qui semblent avoir trouvé leur voie. Une part de moi est heureuse pour eux, mais il est quasi impossible d’éviter de ressentir un peu de jalousie. Je tente de me convaincre que chaque parcours est unique, que ce n’est pas une course. Et surtout, que même ceux qui semblent les plus confiants ont aussi des doutes, des échecs et des questionnements.

Le plus important, à mon avis, c’est d’apprendre à normaliser l’incertitude. À se dire que c’est pas si
mal de ne pas savoir tout de suite. Qu’il est acceptable de prendre une pause, de réfléchir, de se tromper de chemin pour mieux avancer par après. Que de faire un choix maintenant ne signifie pas se condamner à jamais à cette décision. C’est mon cas actuellement, et on ne m’a pas assez souvent dit que c’était normal de se tromper, de se questionner, d’angoisser face au futur.

On a grandi dans un monde qui valorise la productivité, la performance, la rapidité. Ce que j’ai envie de dire aujourd’hui, c’est que ce qui demande le plus de courage, c’est de ralentir, de se poser les questions, de prendre le temps de se demander ce qu’on veut vraiment. J’ai eu envie moi aussi de sauter immédiatement vers la maîtrise, parce que c’était un choix qui impliquait peu de remise en question, peu de changement dans mes habitudes. Il aurait été bien plus facile pour mon esprit de continuer dans la lignée où j’évolue déjà, mais il est bien plus courageux que je me pose pour réfléchir à ce que je désire vraiment. Bien que cela puisse donner l’impression de stagner, c’est un travail qui représente largement plus pour mon futur.

Je ne sais pas exactement où je serai dans six mois. Peut-être ici, peut-être ailleurs. Peut-être à la maîtrise. Peut-être en plein changement de domaine — pas parce que je n’aime pas ce que je fais, mais parce que ça fait longtemps que je me suis demandé si j’aimais vraiment ce que je faisais. Peut-être que je serai encore à la recherche de ce qui me passionne réellement. Et honnêtement, ce n’est pas aussi dramatique qu’on nous le fait croire.

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Pop : Éclater l’enseignement sélectif https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/pop-eclater-lenseignement-selectif/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57915 Des cours gratuits proposés par l'UPop Montréal.

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Pourquoi notre éducation supérieure devrait-elle se cloisonner à l’apprentissage d’une seule discipline, de nos 18 à nos 25 ans? Comment se fait-il qu’il faille payer et s’investir à temps plein ou partiel pour se renseigner, discuter, débattre en société? À l’heure où le président américain tente d’étouffer la science pour en balancer les cendres sous le tapis, des chercheur·se·s bénévoles et passionné·e·s continuent de solidifier les bâtisses de notre démocratie avec le ciment de leurs questions, hypothèses, découvertes et critiques. Ils·elles s’appliquent à partager des cours compréhensibles et accessibles pour nous tous, acteur·rice·s de notre démocratie.

Créer une société vivante

UPop Montréal, créée en 2010, est un organisme à but non lucratif qui s’inspire du mouvement alternatif des universités populaires européennes. Sa mission est de rendre le savoir accessible, en créant des lieux de rencontre, de réflexion et de partage des connaissances, le tout dans des espaces conviviaux, tels que des cafés et librairies. L’UPop soulève le couvercle de questions socialement vives : des objets de débats et d’incertitudes qui invitent les gens à enquêter sur leur quotidien de façon interdisciplinaire. « La gestion des déchets est une question socialement vive », soutient Blandine, le micro en main, éclairée par un projecteur d’appoint dans le Café les Oubliettes près du métro Beaubien. Postdoctorante en éducation à l’écocivisme, la chercheuse présente à une quarantaine de participant·e·s le deuxième panel de son cours : « Décoloniser la gestion des déchets. »

« C’est l’esprit critique du citoyen qu’elle veut stimuler plutôt qu’enseigner une technique ou une théorie »

L’intervention de Blandine est suivie d’une heure de discussion ouverte où le micro chemine entre les mains des différent·e·s participant·e·s, une « petite communauté éphémère », peut-on lire sur le site, composée de personnes de tous âges et origines. Ici, les gens viennent et reviennent à chacune des quatre séances du cours organisé par Blandine. Les cours proposés ne présentent pas un savoir tout clé en main : le propre d’une question vive est qu’elle n’a pas de solution évidente, ne suit ni une théorie prescrite ni un activisme particulier. Un angle de recherche est une prise de position, surtout quand il s’agit d’en faire une histoire ludique pour enseigner à des novices. Il s’agit avant tout d’une proposition, qui est ensuite enrichie par les débats de groupe. On se rend alors compte qu’il y a dans ce même café des professionnel·le·s du milieu, des enseignant·e·s, des gens qui travaillent pour la ville ou qui partagent leur expérience personnelle. On peut lire sur le manifeste de l’UPop : « Les personnes présentes seront des peintres, des plombiers, des sculptrices, des charpentiers, des informaticiennes. Peut-être bien des astronomes, des architectes, des musiciennes, des poètes. Des libraires, des typographes, des flâneurs. Nous aurons besoin de beaucoup de flâneurs. Beaucoup. »

Des chercheur·se·s engagé·e·s

À l’hiver 2025, la programmation annonce six thèmes présentés chacun par un·e chercheur·se qui décline sa recherche sous ses différentes facettes lors de deux à quatre rencontres. Les présentateur·rice·s bénévoles, sont conscient·e·s que la recherche ne doit pas être choyée et noyée dans une pile d’articles scientifiques, et que le savoir n’a de portée que si reçu par un·e citoyen·ne. Blandine explique qu’elle a contacté l’UPop pour proposer son cours quand elle est arrivée au Canada l’année dernière. Elle mène une recherche transculturelle en Corse, au Cameroun, et au Québec. Même si elle venait à enseigner dans un contexte universitaire traditionnel, c’est l’esprit critique du citoyen qu’elle veut stimuler plutôt qu’enseigner une technique ou une théorie : « J’aimerais enseigner aux professionnels, aux ingénieurs de l’environnement. Je pense qu’on devrait les aider à travailler leur propre rapport à l’environnement pour voir des répercussions positives sur leur travail. » Lors de son cours sur la gestion des déchets, elle a apporté une valise entière de livres qui ont nourri sa recherche. Elle les dispose sur une table du café pour que les participant·e·s puissent les regarder, voire les emprunter.

« Au-delà des droits et des devoirs du ou de la citoyen·ne, l’éducation est un muscle d’empathie et d’émerveillement pour tout ce qui nous entoure au quotidien »

Ouvrir notre troisième oeil

Une question socialement vive donne l’occasion d’enquêter sur son quotidien et d’aiguiser un regard sur la réalité de nos rues, de nos voisin·e·s, du contenu sur notre flux en ligne, des aliments que l’on mange. C’est ce qui peut manquer à l’université, qui nous apprend des cas pratiques et des théories du 20e siècle alors que le 21e siècle continue de se dérouler, qu’on y participe activement ou non. Blandine soulève que « 60 à 80% des apprentissages se font en dehors des institutions ». Rien qu’en assistant à l’intervention engagée de Blandine, le jet d’ordures dans la rue, l’emballage de tofu jeté après la préparation d’un repas et le passage du camion poubelle le lundi matin peuvent être perçus différemment. L’œil est aiguisé sur le présent parce qu’il a compris le passé : la recherche est contextualisée dans l’Histoire et les définitions de ses termes clés. Par exemple, Blandine brosse le portrait du déchet dans son contexte sociohistorique, en comparant des sociétés, la représentation du déchet pour les pauvres et les riches, sa symbolique, et se concentre ensuite sur le présent et la façon dont il est abordé aujourd’hui. Elle compare sa place dans nos rues et dans les rues du Cameroun et de Corse, où elle a aussi mené sa recherche. Blandine mentionne la façon dont les objets ont remplacé les mots dans les déclarations d’amour, d’amitié, de félicitations : on offre des cadeaux plutôt que de parler, ce qui participe à une consommation démesurée.

Une organisation qui reflète la mission

Au sein de l’UPop, il n’y a pas de recteur·rice ni d’administration : tous les membres du collectif bénévole proposent des chercheur·se·s à contacter et reçoivent les propositions de chercheur·se·s enthousiastes. La mission de l’UPop ne s’arrête d’ailleurs pas à l’organisation des rencontres : les séances sont publiées sur leur site sous forme de balados ou de vidéos. « On fait avec ce qu’on a! », s’enthousiasme Alex, membre du collectif organisationnel. Un pot est placé à la fin de la séance pour amasser des dons qui servent au bon fonctionnement de l’UPop, comme l’achat de micros-cravates pour enregistrer les prochaine séances.

Dans les universités classiques, des conférences ouvertes au public rendent accessibles des angles d’actualité aux citoyen·ne·s – souvent les étudiant·e·s de l’université – dans tous les départements. Au-delà des droits et des devoirs du ou de la citoyen·ne, l’éducation est un muscle d’empathie et d’émerveillement pour tout ce qui nous entoure au quotidien.

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Le brutalisme : appréciable ou détestable? https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/le-brutalisme-appreciable-ou-detestable/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57898 Point architecture sur ce style controversé

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HISTORIQUEMENT

Origine post-Seconde Guerre mondiale : regain de popularité du style international (courant qui désire construire des bâtiments en rupture totale avec les traditions du passé) introduit par Le Corbusier. Nécessité de reconstruire rapidement l’Europe dévastée. Besoin urgent de logements à haute densité tels que l’Unité d’habitation du Corbusier à Marseille.

Deuxième phase du modernisme : le style international développé par le CIAM (Congrès international d’architecture moderne) est présenté comme la solution ultime pour reconstruire les villes après la guerre en Europe. Il devient également la nouvelle norme aux États-Unis avec l’apparition de hautes tours aux façades entièrement recouvertes de fenêtres en verre.

Remise en question par le Team 10 : dans les années 50, au Royaume-Uni, un groupe d’architectes dont font partie Alison et Peter Smithson décide de s’écarter des dogmes du CIAM.
→ Ils rejettent l’approche trop rigide et désincarnée du style international.
→ Ils revendiquent une architecture enracinée dans le réel et le quotidien.
→ Les Smithson ont pour volonté de retrouver l’élan créatif du mouvement moderniste des années 1920, perdu après la guerre. Contrairement à ce que l’on pense souvent, leur conception du brutalisme n’est pas radicalement opposée au modernisme.

Début du brutalisme : le premier projet précurseur du brutalisme fut l’école Hunstanton, conçue par les Smithson et construite en 1954. C’est un bâtiment aux finitions brutes et aux matériaux apparents qui se veut architecturalement honnête, c’est-à-dire qu’il ne dissimule pas les éléments structuraux par des ornements superflus. Par la suite, les Robin Hood Gardens sont construits à Londres en 1972. Ce projet résidentiel à haute densité met en avant l’effet massif du béton brut. Avec ses fenêtres en retrait et sa monumentalité, ce bâtiment est reconnu pour son architecture brutaliste révolutionnaire.

EN THÉORIE

« La forme exprime l’usage » : ce principe fondateur hérité du modernisme incite les bâtiments brutalistes à répondre aux besoins concrets, pratiques, technologiques, sans décoration superflue ou références historiques.

Une réaction au modernisme lisse : si le brutalisme naît dans la continuité du modernisme, il s’en distingue par une esthétique plus rugueuse, texturée, radicale.

Pluralisme architectural : bien qu’il consiste en un style différent, le brutalisme n’a pas pour but d’effacer le modernisme. Au contraire, ils coexistent. Cette coexistence est particulièrement importante, car elle marque une période de pluralité des styles dans le milieu architectural.

Un nouveau départ idéologique : en se détachant progressivement du style international perçu comme trop rigide et abstrait, le brutalisme a pour volonté de renouer avec les idéaux des avant-gardes des années 1920. Il devient symbole d’espoir, d’engagement social et d’utopie du logement pour tous.

Un style avec une portée politique et sociale : l’architecture devient un outil de transformation du quotidien, en imaginant des structures qui permettent le vivre-ensemble. Logements collectifs, écoles, bibliothèques, bâtiments publics : l’idée est avant tout de rassembler.

ÉLÉMENTS PRINCIPAUX

Béton brut

Fenêtres en retrait

Géométrie lisible et symétrie

Masse et monumentalité

Honnêteté architecturale

Toscane Ralaimongo | Le Délit

APPRÉCIABLE OU DÉTESTABLE?

L’architecture brutaliste est particulièrement présente dans les institutions et les milieux académiques en Amérique du Nord. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle n’est pas très populaire, souvent critiquée pour sa monumentalité peu accueillante, son aspect grisâtre qui ne motive pas à l’apprentissage et son manque d’humanité. Le béton brut, lorsqu’il n’est pas poli, se détériore rapidement et se dégrade avec le temps. La raison pour laquelle de nombreux bâtiments sur le campus de McGill sont brutalistes est simple : après la Seconde Guerre mondiale, on observe une explosion du nombre d’étudiants aux États-Unis et au Canada. Il y a donc un besoin urgent de bâtiments afin de donner des cours et faire de la recherche. Le brutalisme est une solution peu coûteuse.

Pourtant, il existe aussi des éléments positifs à ce style d’architecture mal-aimé. En effet, son côté modulaire est un réel atout. Ce type de bâtiment peut être modifié et étendu rapidement et facilement, pour s’adapter en fonction des besoins de la population. Je vous invite à regarder au-delà de ces surfaces grises et à prendre un moment pour observer le rythme, la symétrie, l’emplacement des fenêtres. De trouver peut-être un peu de réconfort dans la régularité de Leacock ou la bibliothèque McLennan. Asseyez-vous devant le bâtiment de l’AÉUM et appréciez la fantaisie de la façade, le jeu de fenêtres, l’alternance ludique entre béton et verre qui crée un rythme singulier. Pour moi, ce bâtiment subversif et surprenant représente l’essence même du brutalisme.

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La sélection d’actus du Délit https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/la-selection-dactus-du-delit-11/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57892 Baie d'Hudson, projet de loi 89, et campagne électorale fédérale.

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LIQUIDATION DE LA BAIE D’HUDSON : LA FIN D’UNE ÉPOQUE ?

Le vendredi 14 mars dernier, la Baie d’Hudson, la plus importante chaîne de magasins grande surface au Canada, a annoncé la liquidation de l’ensemble de ses actifs. Elle est confrontée à d’importantes difficultés au cours des dernières années, notamment une baisse générale des ventes, aggravée par la pandémie. L’entreprise est lourdement endettée auprès de nombreux créanciers, incluant fournisseurs et propriétaires immobiliers. La compagnie a pris la décision de passer en liquidation alors qu’elle risquait de ne plus être capable de payer ses 9 364 employés, qui à leur tour, se retrouvent aujourd’hui dans une situation très précaire.

Le vendredi 21, l’entreprise a reçu l’approbation de la Cour supérieure de l’Ontario pour passer à la phase active de liquidation. Ils ont donc pu lancer cette dernière le lundi 24 mars. Cependant, La Baie semble rester relativement confiante en sa capacité à pouvoir survivre au sein du paysage commercial canadien. En effet, la compagnie a annoncé vouloir sauver six de ses 80 magasins, dont trois au Québec, incluant celui du centre-ville de Montréal. Ce rebond d’optimisme est en partie dû à une recrudescence de l’engouement des consommateurs. Après l’annonce initiale de liquidation, ces derniers se sont rués en masse sur les produits à rayures emblématiques de La Baie, de peur de ne plus jamais pouvoir mettre la main sur ces derniers.

À l’intérieur du magasin du centre-ville, l’ambiance reste positive : malgré les visages ternes de certains employés, la majorité reste souriante. Bien que les panneaux « liquidation » soient omniprésents, accompagnés de quelques portants vestimentaires abandonnés, le magasin est toujours dynamique, de nombreux clients arpentant ses couloirs. Reste à voir si la stratégie de dernière minute des dirigeants parviendra à sauver ce magasin, ainsi que les cinq autres « heureux élus ». Pour les autres, la liquidation s’étendra jusqu’au 15 juin, après quoi ils disparaîtront définitivement.

PROJET DE LOI 89 ET RÉSISTANCE SYNDICALE : LE GOUVERNEMENT JETTE-T-IL DE L’HUILE SUR LE FEU ?

En février dernier, le gouvernement du Québec a annoncé un nouveau projet de loi, numéro 89, sobrement intitulé « Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out ». Rédigé par le ministre du Travail Jean Boulet, le projet de loi semble à première vue mettre les intérêts des Québécois au premier plan. Il permettrait au gouvernement d’intervenir directement pour mettre fin aux conflits de travail entre patrons et employés, notamment en cas de grève dans des industries qui impactent la société québécoise dans son ensemble. Par exemple, les grèves dans le milieu de la construction ont souvent un impact très négatif sur l’économie, et le gouvernement juge donc nécessaire d’intervenir dans certains cas pour protéger la société. Le projet de loi est soutenu par de nombreux grands patrons dans plusieurs secteurs clés de l’économie québécoise.

Ce nouveau projet de loi fait cependant face à une résistance féroce des syndicats québécois. La Confédération des syndicats nationaux (CSN) a exprimé son scepticisme dans une lettre cosignée par les quatre centrales syndicales ainsi que cinq autres organisations syndicales. Caroline Senneville, présidente de la CSN, décrit le projet comme une « manœuvre explosive. » Elle explique que « non seulement [le] projet de loi vient brimer les travailleuses et les travailleurs dans leur droit de négocier et d’améliorer leurs conditions de travail, mais il vient en prime déstabiliser le fragile, mais important équilibre qui existait depuis l’adoption, en 1977, des dispositions anti-briseurs de grève prévues au Code du travail. »

Le mardi 18 mars dernier, une importante manifestation a été organisée en plein centre-ville, en face du portail Roddick de McGill (photographie). La CSN était présente, avec plusieurs autres syndicats. La circulation sur la portion adjacente de la rue Sherbrooke a dû être interrompue par les forces de l’ordre, présentes en nombre pour encadrer la manifestation.

Stu Doré | Le Délit

ÉLECTIONS FÉDÉRALES 2025 : UN DUEL POILIEVRE-CARNEY SOUS L’OMBRE DE TRUMP

C’est officiel, le Canada est maintenant en période de campagne électorale fédérale. Ce dimanche 23 mars, la gouverneure générale Mary Simon a accepté de dissoudre le Parlement à la demande du premier ministre Mark Carney. Le premier scrutin aura lieu le 28 avril, et pour l’instant, les résultats restent imprévisibles. Bien que le Parti libéral du Canada soit radicalement remonté dans les sondages depuis l’arrivée du nouveau chef, la course reste très serrée avec le Parti conservateur. Selon un sondage récent, les libéraux reçoivent un appui de 42%, contre 39% d’intentions de vote pour le parti de Pierre Poilievre. Cependant, les résultats dans les différents sondages d’opinion ont tellement fluctué ces derniers mois qu’il est impossible de faire une prévision fiable.

Eileen Davidson | Le Délit

Nous pouvons toutefois déterminer quels seront les enjeux les plus importants de cette campagne. Indéniablement, le débat phare gravitera autour des États-Unis de Donald Trump : la guerre commerciale qu’il a engagée avec nombre de ses partenaires internationaux est au centre de l’attention, et risque de desservir Pierre Poilievre, considéré comme aligné avec Trump sur plusieurs enjeux. Lors du lancement de sa campagne à Gatineau, le chef des conservateurs a néanmoins déclaré qu’il tiendrait tête à Trump et qu’il placerait les intérêts des Canadiens au cœur de son mandat.

Les partis restants naviguent au sein de ce duel majeur entre libéraux et conservateurs. Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti démocratique, a par exemple déclaré vouloir favoriser les intérêts des travailleurs et a critiqué à la fois Mark Carney et Pierre Poilievre pour leurs politiques, estimant qu’elles favorisent les ultra-riches.

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Une approche trop tiède pour un sujet brûlant https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/une-approche-trop-tiede-pour-un-sujet-brulant/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57891 Critique de Jouer avec le feu.

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L e dernier film des sœurs Delphine et Muriel Coulin, Jouer avec le feu, s’attaque à un sujet brûlant d’actualité : la radicalisation d’un jeune homme au sein de l’extrême droite. Le long-métrage adopte une approche intimiste en suivant le parcours d’un père veuf incarné par un Vincent Lindon bouleversant, confronté à la dérive de son fils aîné. Mais si l’ambition est louable, l’exécution laisse perplexe.

Un drame familial avant tout

« C’est un film sur l’amour filial plus que sur la menace que représente l’extrême droite, et c’est là que le bât blesse »

Plutôt que de documenter la radicalisation, le film en capte l’écho à travers le prisme familial. Si ce choix permet une plongée sensible dans la sidération et l’incompréhension du père, il frustre néanmoins par son refus d’aller au-delà de la sphère domestique. Tout comme Pierre, on ne peut qu’assembler des bribes, sans jamais être un témoin direct de l’endoctrinement de Fus (Benjamin Voisin). Ce parti pris narratif, bien que défendable, atténue la portée politique du récit : les antifascistes restent hors champ, les victimes de l’idéologie de Fus invisibles, et la violence qu’il perpétue, quasi inexistante à l’écran. C’est un film sur l’amour filial plus que sur la menace que représente l’extrême droite, et c’est là que le bât blesse.

Une radicalisation hors champ

Ce n’est pas par manque d’expertise ou par prudence que les réalisatrices se contentent de suggérer la déchéance du fils aîné : des documentaires sur la résurgence des discours masculinistes et du fascisme, en France ou ailleurs, il y en a d’excellents, comme Generation Hate (2018), qui ne filtrent pas cette réalité à travers le tamis de la fiction. Non, pour les Coulin, il s’agit plutôt d’observer les répercussions au sein de la famille de ce soudain virage à droite. Comment peut-on en arriver là? La réponse n’est jamais énoncée clairement. Pas par pudeur, mais parce qu’il n’y en a pas.

L’aveuglement involontaire du père est d’ailleurs évoqué subtilement à travers plusieurs scènes : lorsqu’il éteint la radio pile au moment où l’on aborde la désillusion politique des jeunes, ou quand il zappe sans un mot le téléjournal dénonçant la résurgence des rassemblements nazis pour se réfugier dans un match de foot. Ce n’est que lorsqu’il est déjà trop tard qu’il commence à s’opposer aux comportements de son fils. Sans condamner Pierre, le film pointe du doigt cet aveuglement, cette complaisance qui laisse le terrain libre aux idéologies toxiques. Et dans un monde où les réseaux sociaux jouent un rôle majeur dans la diffusion de ces discours, cette mise en garde résonne avec une acuité troublante.

Entre retenue et insuffisance

Malgré le souci catégorique des sœurs Coulin d’éviter le manichéisme, elles proposent pourtant un scénario assez bancal : le fils ainé se révolte, s’embrigade, se radicalise. Quelques moments doucereux en famille. Fus est peut-être fasciste, mais il n’est pas un si mauvais garçon. Oh! Il se fait tabasser par des antifas à un rassemblement nazi. Pauvre lui. Est-ce ce qui le convaincra enfin qu’être nazi, c’est mal? Et non, il se venge en s’en prenant à ses persécuteurs. Il écope d’une sentence de 20 ans en prison. Vincent Lindon est triste. Générique de fin. Conclusion : le nazisme, ça craint. Le meurtre, c’est mal. Je n’avais pas besoin de visionner un film de 120 minutes pour l’apprendre.

Jouer avec le feu laisse une impression d’inabouti. La nuance, revendiquée par les réalisatrices, se transforme parfois en esquive. Certes, on comprend que le but n’était pas d’humaniser Fus, mais de questionner jusqu’où l’amour parental peut survivre à l’horreur. Pourtant, en évacuant toute analyse approfondie de la radicalisation, le film semble contourner son propre sujet. S’intéresser aux relations familiales est une chose, mais quand le contexte implique le fascisme, peut-on vraiment se permettre de rester en surface? À vouloir éviter la démonstration frontale, Jouer avec le feu risque de minimiser l’ampleur du problème qu’il prétend observer.

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L’Université Columbia rend les armes https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/luniversite-columbia-rend-les-armes/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57889 Une ingérence politique inédite de l’administration Trump.

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Le vendredi 21 mars, l’Université Columbia à New York a annoncé son intention d’appliquer une série de mesures exigées par l’administration de Donald Trump. Cette décision intervient dans l’espoir de récupérer les 400 millions de dollars de fonds fédéraux que le gouvernement avait suspendus, accusant l’établissement de tolérer l’antisionisme et l’antisémitisme sur son campus.

Dans une lettre adressée au gouvernement américain, Columbia s’est engagée à revoir en profondeur sa gestion des manifestations étudiantes, à adopter une définition stricte de l’antisémitisme et à réformer plusieurs départements académiques, notamment ceux consacrés au Moyen-Orient, à l’Afrique et à l’Asie du Sud.

Depuis plusieurs semaines, Columbia tente de concilier les pressions gouvernementales avec la mobilisation persistante de ses étudiants, qui manifestent pour la liberté d’expression et la cause propalestinienne. La décision du 21 mars marque un tournant majeur, susceptible d’avoir des répercussions sur d’autres universités américaines confrontées aux mêmes tensions sous la gouvernance de Trump.

Le corps étudiant en colère

Depuis le début du mois de mars, des manifestations agitent le campus de Columbia et les rues de New York. Celles-ci s’attaquent aux mesures imposées par Trump, mais aussi à la réaction jugée trop conciliante de l’université. La semaine dernière déjà, pour apaiser la pression fédérale, Columbia avait pris la décision de sanctionner les étudiants impliqués dans le campement propalestinien de l’été 2024. Certains risquent l’expulsion ou la perte de leurs diplômes, tandis que d’autres font déjà face à des poursuites judiciaires.

« Il suffit de prendre la parole ou de participer à une manifestation où on se ferait prendre en photo pour risquer le renvoi ou la déportation »
Camille, étudiante à Columbia

L’affaire a pris une tournure dramatique début mars avec l’arrestation par la police fédérale de l’immigration (ICE) de Mahmoud Khalil, un Palestinien diplômé de Columbia et figure du mouvement étudiant. Son interpellation, qui pourrait conduire à son expulsion du pays, a provoqué une vague d’indignation dans le monde universitaire. À l’heure actuelle, Khalil est toujours détenu en Louisiane, bien qu’il possède les documents nécessaires pour justifier sa présence légale aux États-Unis.

Camille, étudiante en programme de maîtrise à Columbia, témoigne : « C’est difficile, parce qu’on a envie de prendre la parole pour exprimer notre colère face à la situation – que ce soit les coupes budgétaires ou les arrestations – mais le fait de lever la voix nous expose à beaucoup de dangers. Il suffit de prendre la parole ou de participer à une manifestation où on se ferait prendre en photo pour risquer le renvoi ou la déportation. » Elle ajoute que la situation actuelle sur le campus est très tendue et anxiogène : « C’est vraiment inquiétant, surtout en tant qu’étudiants étrangers, de se dire qu’à tout moment sur le campus ou aux abords on peut se retrouver face à l’ICE ou le DHS [Department of Homeland Security], qu’on peut assister à la déportation de quelqu’un », confie-t-elle.

Un élan de solidarité au-delà des frontières

Au Canada, des universitaires et associations étudiantes ont exprimé leur soutien aux étudiants de Columbia. L’association Étudiants pour l’honneur et la résistance de la Palestine (Students for Palestinian Honour and Resistance, SPHR) de l’Université McGill a publié un message de soutien à Mahmoud Khalil sur Instagram : « Depuis 16 mois, nous avons vu des administrateurs d’universités à travers l’Amérique du Nord collaborer avec la police, les gouvernements fédéraux et les groupes de pression sionistes pour tenter d’étouffer l’Intifada étudiante. […] Les étudiants canadiens ne sont ni inconscients ni immunisés contre la répression de l’État. Nous exigeons la libération de Mahmoud Khalil et le désinvestissement immédiat! (tdlr) »

Alors que les tensions ne faiblissent pas, la situation de Columbia illustre un climat de plus en plus hostile aux mouvements étudiants contestataires aux États-Unis, et pose la question de l’avenir de la liberté d’expression dans les campus américains.

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« Le néolibéralisme est un échec » https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/le-neoliberalisme-est-un-echec/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57886 Conférence avec Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie.

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Le mercredi 12 mars, à l’hôtel InterContinental de Montréal, se tenait une conférence autour de Joseph Stiglitz, récipiendaire du prix Nobel d’économie en 2001 et économiste en chef de la Banque mondiale de 1997 à 2000. Il est maintenant professeur à Columbia. L’économiste Christopher Ragan s’est entretenu avec lui pour discuter de son nouveau livre intitulé Les routes de la liberté (The Road to Freedom : Economics and the Good Society). Durant cet événement organisé par McGill, Stiglitz a pu réitérer ses thèses majeures et plus récentes, en relief avec l’actualité politique nord-américaine.

L’échec du néolibéralisme

L’auteur de La grande désillusion (Globalization and its Discontents) a d’abord exprimé sa farouche opposition au capitalisme néolibéral, qu’il définit comme « le retrait de toutes les régulations économiques et environnementales de l’État, et la libéralisation totale du commerce et de la finance (tldr) ». Notamment promu par des économistes tels que Milton Friedman ou Friedrich Hayek, cet ensemble de directives économiques vise à « rendre l’économie prospère » via « l’effet de ruissellement », grâce auquel l’accroissement des grandes richesses permises par la libéralisation finirait par bénéficier à l’ensemble de la société.

Cette politique, implantée dans la majorité des pays du monde depuis les années 1980, est largement un échec, selon Stiglitz. Prenant l’exemple des États-Unis, pionniers de la doctrine, il explique : « L’accroissement majeur des inégalités de revenu, la crise financière de 2008 et le manque de couverture médicale prouvent que les marchés ne sont pas la solution à tout ». Sur ce dernier exemple, il développe : « 20% du PIB américain correspond à des dépenses de santé. C’est quatre fois plus par habitant que Singapour, mais nous figurons parmi les derniers sur de nombreux indicateurs de santé parmi les pays développés.»

Une question d’idéologie

Comment expliquer, dans ce contexte, que les politiques économiques néolibérales restent en vigueur aujourd’hui? D’après Stiglitz, l’une des raisons principales est idéologique. L’économiste estime que les défenseurs du néolibéralisme ont mal interprété la notion de liberté : « Le terme “libéralisme” est dérivé de “liberté” […] cependant, la liberté que crée le néolibéralisme est d’abord celle d’exploiter les individus. » Il ajoute que « de manière générale, la liberté des uns peut être la non-liberté des autres. […] Par exemple, la liberté de polluer pour une entreprise restreint celle d’un asthmatique à vivre. […] Les néolibéraux agissent, à tort, comme si la liberté était un absolu, alors qu’il s’agit d’un compromis ».

Sur la question des inégalités, il explique : « D’un point de vue économique, la liberté consiste en l’ensemble des possibilités d’un individu. Si vous n’avez aucune opportunité, comme cela arrive dans nos sociétés inégalitaires, vous n’êtes pas libre. […] C’est aux politiques publiques d’offrir des opportunités à tous, au moyen de l’éducation publique et des soins de santé. » Ces politiques devraient être collectivement déterminées, selon lui, comme si « nous étions ignorants de toutes nos conditions de vie, d’où nous sommes placés dans la société. Si c’était le cas, nous serions tous en faveur de cette action publique, même si elle nécessite des taxes ».

Dans l’ère de Trump et de Musk

Comment raisonner à l’ère Trump-Musk, alors que les partisans de ces derniers érigent régulièrement la liberté, plus particulièrement notamment la liberté d’expression, comme un absolu justifiant leurs propos et positions? L’ancien prix Nobel étend alors son raisonnement : « La même logique de compromis s’applique ici. La dérégulation de la pluralité des médias dans les années 70, par exemple, a en réalité partiellement limité la parole publique aux opinions de leurs propriétaires. » En fin de conférence, nous avons pu l’interroger sur le rachat de Twitter (devenu X) par Elon Musk : « L’objectif plus large de Musk est la destruction totale de l’État pour prévenir toute entrave à ses opérations. Son influence majeure sur l’administration et l’opinion publique montre la nécessité de freiner l’enrichissement excessif, car il mène inévitablement à une influence politique démesurée. » Malgré la mise en place progressive de ce projet, les voix comme celles de Joseph Stiglitz proposent une vision du monde différente, et demeurent un contre-pouvoir important face à l’influence du milliardaire américain.

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Le combat invisible de Masafer Yatta https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/le-combat-invisible-de-masafer-yatta/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57876 No Other Land : une histoire d’injustice et de résilience.

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L e générique défile ; mes amis et moi sommes cloués à nos sièges, incapables de nous lever ou de nous regarder. En essuyant nos larmes, nous sommes restés assis plusieurs minutes en silence. Pendant 90 minutes, nous avons assisté à une violence inexplicable et injustifiable. Une violence sans logique, sans précédent. Mais surtout, une violence sournoise et vicieuse.

ظُلْم – dulm – Injustice

No Other Land, réalisé par un collectif palestino-israélien, regroupe le travail de Basel Adra, un activiste palestinien qui, depuis 2019, filme les opérations extrêmes d’expulsion menées par l’occupation israélienne dans son village, Masafer Yatta, situé en Cisjordanie.

Je ne crois pas nécessaire d’étaler le malheur des villageois de Masafer Yatta. La destruction constante de leurs maisons, de leurs écoles, de leurs poulaillers, de leurs sources d’eau, de leur village et de leur peuple, montrée dans ce long-métrage, n’a pas pour but de susciter la pitié. Ce qui est montré dans ce documentaire, c’est plutôt la tentative de Basel Adra, un jeune Palestinien coréalisateur de ce long métrage, de documenter sa réalité afin de justifier son existence. Comme l’exprime si bien un homme plus âgé dès le début du film, l’État israélien tente de réduire le peuple palestinien à des « étrangers sur leur propre terre (tdlr) ». Ce sentiment d’aliénation qui émerge dans l’esprit des villageois est exactement ce que Basel cherche à démontrer. Une existence constamment remise en question par des déplacements forcés, mais qui persiste néanmoins grâce à une force et un courage inédits.

صبر – sabr – Patience

Cette force, je ne saurais pas vous la décrire en français ; elle dépasse la portée linguistique de ce mot. Pour moi, la meilleure façon d’illustrer la résilience et le courage des villageois de Masafer Yatta, c’est « صبر (sabr) ». Traduit par « patience » en français, ce mot n’a pourtant pas tout à fait la même signification. Contrairement au français, il n’évoque pas la passivité ; il ne s’agit pas d’attendre ou de tolérer, mais d’avoir foi en quelque chose de plus grand que soi, tout en persistant dans sa lutte pour ce que l’on sait juste.

« Une histoire de survie se dessine, une histoire qui défie un système colonial et abusif, en n’utilisant que la patience, le courage et, surtout, الصبر (al-sabr) »

C’est cette qualité, qui réside dans l’âme des petits comme des grands, qui permet à Masafer Yatta de subsister. Chaque semaine, une nouvelle demeure est détruite. Chaque semaine, les villageois se confrontent aux soldats israéliens lourdement armés. Ceux qui se retrouvent sans abri se réfugient dans des grottes, et, dès qu’un certain calme retombe, ils se remettent tous à construire une nouvelle maison. L’armée israélienne revient alors, et sous prétexte d’une absence de permis de construction, elle détruit les chantiers érigés sur les terres palestiniennes. Ce mode de vie cyclique est entravé par des événements qui brisent les cœurs. Des mères perdent leurs enfants, des fils voient leurs parents emprisonnés, et pourtant, malgré les agressions coloniales sans cesse récidivées, le village continue d’exister. Une histoire de survie se dessine, une histoire qui défie un système colonial et abusif, en n’utilisant que la patience, le courage et, surtout, الصبر (al-sabr).

قوة – qua – Pouvoir

Ce documentaire a gagné en notoriété grâce au fameux discours à la 97e cérémonie des Oscars. Les réactions qu’il a suscitées furent diverses, mais l’identité binaire de l’équipe de production a souvent été mise en lumière, tantôt saluée, tantôt critiquée. Portée par les médias, l’histoire de l’amitié entre deux hommes, l’un de chaque côté du conflit, a pris des airs de tragédie à la Roméo et Juliette. Pourtant, ce documentaire s’efforce précisément de déconstruire cette image médiatique simpliste. En effet, il remet en question l’idée d’une relation égalitaire entre les protagonistes, une vision souvent véhiculée par les médias, qui ne reflète en rien la réalité complexe du conflit. Pour moi, il incarne parfaitement les relations de pouvoir sur un territoire occupé. Il est crucial de saisir qu’en Palestine, la liberté de vivre est une illusion. Les habitants subissent un système d’apartheid impitoyable. Leurs déplacements sont étroitement contrôlés, leurs besoins fondamentaux dépendent de l’État colonial israélien. Bien que leurs diplômes témoignent de leurs compétences, les opportunités d’emploi sont rares ; ils sont réduits à une main-d’œuvre exploitée, notamment dans le secteur de la construction.

À la lumière de cette dynamique raciste, il devient évident que, pour créer et diffuser un tel documentaire, l’appui d’Israéliens opposés à leur régime s’avère essentiel. Même Yuval Abraham, coréalisateur, qui se présente comme un activiste israélien, fait constamment l’objet de remises en question de la part des villageois. « C’est l’heure de rentrer chez toi », lui dit Basel chaque soir. Il monte dans sa voiture, arborant une plaque d’immatriculation qui lui garantit une certaine sécurité, et rentre chez lui, un chez-soi où la certitude et la protection prévalent. Malgré son soutien à Basel, il demeure privilégié. Il côtoie l’injustice infligée par son propre régime, il en est témoin, mais il ne pourra jamais pleinement comprendre la souffrance des Palestiniens, car il n’en fera jamais l’expérience de façon totale.

L’illusion du statu quo

Malgré les débats identitaires qui entourent ce documentaire, son véritable exploit réside dans la remise en question de tous les status quo imposés par l’image médiatique de ce système d’apartheid. En mettant en scène deux jeunes cinéastes, qui n’auraient jamais dû se croiser ni s’apprécier, le film défie un système de ségrégation et de discrimination profondément enraciné. Plus loin encore, il s’attaque à l’idée même de la vision selon laquelle le génocide n’aurait débuté qu’après l’attaque du 7 octobre 2023, dans un but de légitime défense. Il rejette ce mensonge, cette tentative de dissimuler la réalité : celle d’un peuple qui, depuis la Nakba qui a eu lieu il y a 76 ans, résiste inlassablement à une entité coloniale. Ce documentaire (qui n’a toujours pas de distributeur américain) réussit sa mission qui consiste à briser un narratif tordu et raciste, en exposant au grand jour les tactiques injustes du régime israélien. À travers son regard courageux, il fait naître une vérité que certains tentent d’effacer, mais que le monde ne peut plus ignorer.

« Malgré les débats identitaires qui entourent ce documentaire, son véritable exploit réside dans la remise en question de tous les statu quo imposés par l’image médiatique de ce système d’apartheid »

Malgré les acclamations et les prix, Hamdan Ballal reste une cible du régime israélien. Le 24 mars dernier, il aurait été lynché par un groupe de colons israéliens, avant d’être kidnappé au moment de son déplacement vers l’hôpital. Cette agression témoigne de l’acharnement et de la violence atroce auxquels l’État colonial israélien peut recourir afin de censurer tout message de libération palestinienne.

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24 heures sans téléphone https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/24-heures-sans-telephone/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57870 L’équipe du Délit relève un défi de taille.

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Q uelques membres de l’équipe du Délit ont relevé un défi de taille : 24 heures sans leur téléphone. Une journée entière sans musique, réseaux sociaux et même sans textos. Génération Z accro à notre téléphone, nous commençons à en avoir marre d’être dépendant d’un accessoire qui ne fait que voler notre temps, qui réduit notre habilité à nous concentrer, et qui augmente notre anxiété. Les règles du jeu étaient simples : déposer son cellulaire dans les locaux du journal, ne pas le récupérer pendant 24 heures et essayer d’utiliser son ordinateur le moins possible pour texter ses amis et sa famille. Alors, comment les participants ont-ils vécu cette trêve?

Les participant·e·s

Layla : Éditrice Bien-être

Juliette : Coordinatrice de la Correction

Béatrice : Éditrice Culture

Vincent : Rédacteur en Chef

Malo : Coordonnateur de la Correction

Jeanne : Éditrice Opinion

Pourquoi?

Le projet est venu d’un remue-méninge de toute l’équipe. Une idée banale s’est transformée en un réel défi. Semaine après semaine, l’équipe mentionnait l’idée de passer un 24h sans son téléphone, mais personne n’avait réellement la motivation de le relever. Obligations, examens, etc. : toutes les excuses étaient bonnes pour repousser la date. Mais pourquoi certains membres de l’équipe voulaient-ils tout de même participer à ce défi? La réponse est simple : nous sommes accros à nos téléphones et nous en sommes conscients. Au sein de nos conversations, la dépendance de notre génération à nos appareils était un fait que personne ne niait. Béatrice voulait se prouver à elle-même qu’elle pouvait passer 24 heures sans son téléphone. Juliette voulait arrêter de compter sur son téléphone pour des choses banales (Maps, Gmail) constamment, sans réel besoin de le faire. Du côté de Vincent, son téléphone était une source constante d’anxiété, donc, pour lui, l’idée de se déconnecter lui paraissait un soulagement possible. Il trouvait que son téléphone et surtout les réseaux sociaux étaient un poids pour lui, notamment la charge mentale nécessaire pour répondre à des textos toute la journée. Pour Jeanne, c’était un simple défi pour se prouver à elle-même qu’elle en était capable. Et pour moi? Toutes ces raisons combinées, car je suis sans cesse sur mon téléphone pour aucune bonne raison, et je rêve de m’en déconnecter sans me sentir démunie.

« La réponse est simple : nous sommes accros à nos téléphones et nous en sommes conscients »

Mais comment va-t-on faire?

Avant même de relever ce défi, plusieurs appréhensions se sont manifestées chez les joueurs. L’appréhension principale : comment vais-je me réveiller à l’heure? Une appréhension banale, mais pertinente. De nos jours, tout se retrouve sur le téléphone : Google Maps, la musique, la carte bancaire. Google Maps était une source d’inquiétude partagée par toute l’équipe, car nous sommes très dépendants de cette application pour nous dépanner dans nos trajets. Sans cela, il faut aller à l’arrêt de bus et attendre sans savoir combien de temps ou planifier son trajet sur son ordinateur en espérant que ni le bus ni le métro soient en retard. Mais ensuite, quel est le pire qui puisse arriver? Attendre 5–10 minutes de plus que d’habitude. Une appréhension qui n’a pas été soulevée, contrairement à ce qu’on aurait pu croire, est celle des réseaux sociaux. Des six membres de l’équipe ayant tenté le défi, personne n’a mentionné avoir peur de manquer quelque chose d’important sur les réseaux. Pour une génération si accro aux réseaux sociaux, il semble donc que cette dépendance soit ancrée dans un simple automatisme plutôt que par pur intérêt pour ces plateformes.

« Pour une génération si accro aux réseaux sociaux, il semble donc que cette dépendance soit ancrée dans un simple automatisme que par pur intérêt pour les plateformes »

24 heures plus tard

Le défi enfin terminé, comment se sent l’équipe? Les participants ont-ils ressenti de l’anxiété sans leur téléphone ou, au contraire, en sont-ils ressorti indifférents? Une impression partagée par l’équipe était celle d’avoir perdu son téléphone. En effet, nous sommes tellement habitués à l’avoir constamment sur nous que, lorsqu’on le cherche dans nos poches et qu’on ne le trouve pas, un sentiment d’anxiété nous envahit. En parallèle, nous avons aussi ressenti une impression de liberté après quelques heures sans téléphone. Ne pas avoir de téléphone, c’est aussi synonyme d’être déconnecté du reste du monde et de vivre dans le moment présent. Vincent en témoigne : « Quand on n’a pas de téléphone, on se libère de cette charge mentale liée aux textos, car on ne peut tout simplement pas y répondre. Ça m’a fait énormément de bien. C’était très agréable, car le soir, tu peux vraiment profiter de l’instant présent. » J’ai moi aussi trouvé que, sans téléphone, le temps semblait passer plus lentement. En tant que génération hyperconnectée, nous ne nous laissons pas le temps de nous ennuyer. Il y a beaucoup de plateformes de divertissements pour échapper à l’ennui. Sans téléphone, je n’avais pas le choix de vivre l’ennui, et même si c’était inconfortable, j’ai aimé l’expérience, car l’ennui nous permet d’apprécier les moments palpitants de la vie et de faire autres choses. Pour Béatrice, au contraire, le fait de ne pas avoir son téléphone était surtout anxiogène : « Étant donné que cela ne durait que 24 heures, c’était plutôt l’inverse : j’étais stressée de ne pas l’avoir, car je me disais que, bientôt, je le retrouverais et que j’aurais beaucoup de messages auxquels répondre. » Cela témoigne que ce défi a soulevé des expériences uniques pour chacun. Pour Jeanne et Malo, le défi n’a pas été très difficile, seuls les sentiments de chercher son téléphone ou de vouloir écouter de la musique se sont manifestés occasionnellement.

Alors, on refait ça?

Conclusion : tout le monde a aimé ce défi et serait prêt à le refaire pour une plus longue durée. L’expérience m’a révélé que j’étais accro à mon téléphone tout simplement parce que j’y avais toujours accès, mais que, sans celui-ci, je suis moins distraite et j’apprécie plus les petits moments. De même pour Béatrice, qui aimerait faire un été sans réseaux sociaux, pour en avoir l’expérience la plus complète possible. Pour Juliette, ce défi lui a montré qu’elle dépend beaucoup trop de son téléphone lors de moments où elle n’en a pas besoin, par simple automatisme. Vincent a adoré le défi, mais souligne que c’est la courte durée de que 24 heures qui l’a rendu à la fois intéressant et excitant. Il justifie la facilité du défi par sa planification : texter les copains avant, planifier ses remises, ses sorties. Malgré tout cela, Vincent aimerait aussi faire ce défi pour une durée indéterminée, sans organisation, afin de voir les réelles répercussions d’une vie déconnectée. Pour Malo, le défi ne s’est pas avéré difficile, ça ne faisait pas vraiment changement de son quotidien. Finalement, pour Jeanne, ce défi lui a permis d’être plus consciente de l’utilisation de son téléphone à des fins pratiques, pas par simple automatisme pour combler l’ennui. Alors, on se revoit la session prochaine pour une semaine sans téléphone?

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Quand l’armement américain ne fait plus l’unanimité https://www.delitfrancais.com/2025/03/26/quand-larmement-americain-ne-fait-plus-lunanimite/ Wed, 26 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57865 Washington inquiète ses alliés par son imprévisibilité.

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L es dernières semaines ont vu plusieurs alliés traditionnels des États-Unis remettre en question certains de leurs contrats d’armement avec le complexe militaro-industriel américain. En première ligne : le F‑35, l’avion de chasse de 5e génération ultra-connecté, mais aussi les sous-marins de type Virginia. Ces revirements soulèvent des questions sur une éventuelle perte d’attractivité de l’armement américain. L’incertitude liée à l’administration Trump suscite en effet crainte et méfiance chez les alliés traditionnels des États-Unis, notamment en matière de défense.

Au milieu d’une crise diplomatique et politique sans précédent entre les États-Unis et le Canada, le nouveau premier ministre canadien, Mark Carney, a ordonné le 15 mars dernier la réévaluation du contrat de 19 milliards de dollars conclu avec l’entreprise américaine Lockheed Martin pour l’acquisition des avions de combat F‑35. Cette décision s’inscrit notamment autour d’un litige avec le constructeur américain, qui refuse de donner l’accès au « code source » de l’aéronef. Une telle restriction empêche le Canada de disposer d’un contrôle total sur l’appareil, alimentant les craintes que Lockheed Martin et les États-Unis puissent en conserver un contrôle à distance, une dépendance technologique critique que l’industriel et le Pentagone ont toutefois démentie.

Des alliés sur la réserve

Mark R. Brawley, professeur à l’Université McGill au département des sciences politiques, rappelle que le F‑35 est au cœur de vifs débats à l’international : « Le F‑35 est compliqué, principalement parce qu’il a été conçu par et pour les Américains ; il ne correspond pas forcément aux besoins canadiens.(tdlr) »

Lorsqu’on lui demande ce que doit être capable de faire un avion de chasse moderne, il précise : « Il doit être capable de combattre de potentiels ennemis, comme la Chine, la Russie ou leurs pays relais. Dans ce domaine, le F‑35 excelle. Il y a peu d’alternatives. » Ces propos mettent en lumière le dilemme auquel sont confrontés les élus canadiens : aller au bout de ce contrat malgré toutes les incertitudes ou se tourner vers l’une des rares alternatives, au risque d’aggraver davantage la situation. Il est important de rappeler que le Canada collabore étroitement avec les États-Unis depuis plusieurs décennies sur les questions de défense (système de communication, formation, armement…) Un éventuel divorce diminuerait considérablement la force de projection du Canada à l’étranger, en plus d’affaiblir très largement sa défense.

« L’administration Trump se tire une balle dans le pied, au moment même où l’industrie américaine devrait dominer le marché »

Mark R. Brawley, professeur de sciences politiques

Un cas similaire s’est produit récemment au Portugal, où le gouvernement a décidé de ne plus se tourner vers le F‑35 pour remplacer sa flotte vieillissante de F‑16, par crainte que les États-Unis ne se montrent pas un allié aussi fiable qu’auparavant, a expliqué le ministre portugais de la Défense sortant, Nuno Melo. Ce dernier estime que la « prévisibilité » doit être un facteur essentiel lors d’un tel choix. Ce climat de doute a très certainement été renforcé après avoir observé la pression américaine exercée sur l’Ukraine, avec notamment l’interruption de l’aide promise. Une situation qui nourrit la crainte que le F‑35 soit confronté à de telles restrictions en termes de pièces de rechange ou de mise à jour logicielle si la coopération avec les Américains devait être interrompue.

De l’autre côté du globe, l’Australie connaît l’émergence d’une vague de critiques dans le cadre de l’accord AUKUS, qui prévoit l’achat de sous-marins américains et britanniques. D’anciens membres du gouvernement et de l’armée remettent désormais en question ce partenariat : coûts trop élevés, délais jugés déraisonnables et surtout des doutes sur la pertinence de ces sous-marins dans les eaux australiennes. Le professeur Brawley explique : « C’est un peu comme ce que j’avais dit vis-à-vis des F‑35 : ces sous-marins sont conçus initialement pour répondre aux besoins américains. »

L’Europe face à une opportunité stratégique historique

Face à ces remises en question, une question s’impose : assistons-nous à un déclin de l’influence du complexe militaro-industriel américain? « Absolument, oui », affirme le professeur Brawley. Il estime que l’administration Trump agit à contre-courant de ce que devrait faire une puissance militaire dominante : « L’administration Trump se tire une balle dans le pied, au moment même où l’industrie américaine devrait dominer le marché. Le matériel américain a pourtant largement fait ses preuves sur le terrain, notamment en Ukraine, en démontrant sa nette supériorité face à l’équipement soviétique. Ce conflit aurait dû lui servir de très bonne publicité. »

« Un éventuel divorce diminuerait considérablement la force de projection du Canada à l’étranger, en plus d’affaiblir très largement sa défense »

Mais à force de multiplier les tensions avec ses alliés, à travers ses politiques tarifaires et sa diplomatie, l’administration américaine ouvre la voie à d’autres fournisseurs rivaux : « Si les pays n’estiment pas pouvoir faire confiance aux États-Unis pour assurer l’approvisionnement de cet équipement, alors ils vont se tourner vers le peu d’alternatives de qualité similaire, et l’Europe est un candidat crédible. » Cette situation remet également en question la logique de dépendance technologique, et plus largement les choix en matière de défense, en ouvrant la voie à la promotion d’un modèle européen plus autosuffisant. Bien que dominant sur le marché, le géant américain perd progressivement du terrain, à cause de facteurs politiques et techniques, décourageant certaines nations à faire recours à leur service afin de se procurer leur matériel militaire.

Brawley ajoute : « Cela crée des opportunités pour les Européens, qui peuvent s’imposer sur des marchés où les acheteurs tournent le dos aux produits américains. Les industries françaises et allemandes risquent d’en bénéficier. »

L’Europe, qui revendique une volonté d’autonomie stratégique depuis plusieurs années, voit donc s’ouvrir une fenêtre d’opportunité. Si elle parvient à se coordonner et à proposer une offre crédible, elle pourrait profiter du recul de l’attractivité américaine pour renforcer sa propre base industrielle de défense et retrouver une place de choix sur la scène internationale. Plus qu’une remise en cause des seuls contrats, c’est une redéfinition profonde des alliances et de l’ordre mondial qui semble s’esquisser.

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Place au français! https://www.delitfrancais.com/2025/03/19/place-au-francais/ Wed, 19 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57805 L’équipe partage ses recommandations littéraires francophones.

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J’aime particulièrement les éditions Mémoire d’encrier, fondées à Montréal en 2003, qui réunissent auteurs de diverses origines. Leurs livres ont pour but de sensibiliser les lecteurs à l’histoire et aux inégalités. Si vous souhaitez découvrir des voix uniques et parvenir à apprécier le monde sous un regard différent, je ne peux que vous conseiller un de leurs livres!

Pierre Falardeau. Un vrai révolutionnaire. Son œuvre est le combat d’une vie – authentique, percutante, véritablement québécoise. Commencez par Octobre ou Rien n’est plus précieux que la liberté et l’indépendance et n’arrêtez jamais!

Je recommande les livres de René Barjavel à celles et ceux qui ont envie de rêver pendant un moment. Impossible de ne pas être marqué par son livre Ravage, le plus connu, mais je recommande avant tout son livre La Nuit des Temps, un chef‑d’œuvre qui fait aussi bien rire que pleurer. Les chemins de Katmandou est moins chargé en émotion, mais tout aussi agréable à la lecture!

J’aime la non-fiction d’Emmanuel Carrère, où les récits de vie se dévoilent dans leur crue réalité, chargés d’émotions puissantes. D’autres vies que la mienne est une mer déchaînée où la douleur du deuil se mêle à l’espoir. Dans L’adversaire, c’est une révélation psychanalytique, une plongée vertigineuse dans l’âme humaine. Mais il y a aussi la poésie, qui sculpte les mots comme des ornements délicats, suspendus dans le temps. Lisez Paul Éluard et Louis Aragon.

Je recommande vivement les pièces de théâtre de Yasmina Reza – Conversations après un enterrement, La traversée de l’hiver et Art ont de quoi plaire à tous les lecteurs. Reza parvient à construire de véritables drames, touchants et universels, à partir de sujets qui paraissent souvent banals au premier abord. Ses pièces vous feront rire et pleurer.

J’ai découvert un de mes récits coups de cœur à travers le film d’animation L’homme qui plantait des arbres (basé sur la nouvelle de Jean Giono) du réalisateur québécois Frédéric Back. L’histoire est par elle-même vivante, et les dessins ainsi que la narration du film magnifient son message en plongeant le spectateur dans un univers poétique et bouleversant, où la nature reprend peu à peu ses droits grâce à la détermination et l’altruisme d’un homme. C’est un court métrage à voir plusieurs fois dans sa vie, pour sa douceur et son rappel franc de la fragilité de l’environnement et notre indissociabilité avec celui-ci.

Yasmina Khadra, auteur algérien de renommée internationale et maintes fois primé, demeure pour moi l’un des meilleurs écrivains francophones. Il maîtrise l’art de décrire des réalités souvent ignorées ou incomprises avec une complexité et une profondeur rares. Ses œuvres, généralement ancrées dans des contextes musulmans, vont bien au-delà des stéréotypes et archétypes associés à l’image de l’arabe. Il dépeint des personnages d’une richesse, pris dans des dilemmes existentiels et des contradictions multiples. Ce qui m’impressionne toujours, c’est sa capacité à faire ressentir l’aliénation de façon aussi saisissante et vivante, plongeant le lecteur dans un questionnement qu’il ne peut oublier.

Je ne peux que soutenir ces propos. Si Ce que le jour doit à la nuit, le plus connu des romans de Yasmina Khadra, allie merveilleusement l’histoire de son protagoniste au contexte de la guerre d’Algérie, j’ai particulièrement aimé lire L’Écrivain. Dans cette autobiographie, l’auteur nous raconte son amour pour la langue française et la littérature, et narre le développement de son processus d’écriture au sein du cadre militaire rigide et disciplinaire qui l’a vu grandir.

Parce qu’à mes yeux, aucune œuvre ne peut égaler la gigantesque fresque d’Émile Zola des Rougon-Macquart, je vous recommande en particulier le roman Au Bonheur des Dames. Le récit décrit la naissance des grands magasins en pleine révolution industrielle en France à une époque qui n’avait encore jamais connu la surconsommation. Se replonger dans les classiques demande un peu d’effort, mais cela vaut toujours le coup. Dans le même registre, et pour un format plus court, je suggère la lecture de la nouvelle Boule de Suif de Maupassant.

La bande dessinée est un média accessible qui réussit à communiquer aux tout petits comme aux plus vieux. J’aime particulièrement Le petit astronaute de Jean-Paul Eid. C’est un récit qui touche le cœur et qui vient chercher la beauté par la tristesse.

Je trouve aussi que les bandes dessinées permettent d’explorer des sujets profonds, tout en gardant un élément visuel qui permet à nos cerveaux sursollicités de rester plongés dans des récits complexes. Un des classiques récents du genre est évidemment Le monde sans fin de Blain et Jancovici, qui offre une réflexion percutante sur le changement climatique. Je recommande aussi fortement Shenzhen, de Guy Delisle, une autobiographie visuelle savamment construite qui retrace la période de vie du Québécois dans cette ville chinoise bourdonnante, surprenante, et parfois incompréhensible.

Entièrement d’accord! L’univers de la BD nous emmène dans des réalités à la fois visuelles et narratives qui marquent durablement. Dans cette même lignée, je recommande J’y vais mais j’ai peur de Clarisse Crémer. Ce récit graphique explore avec sincérité et passion le monde de la voile, un domaine où les femmes sont encore trop peu représentées. C’est une BD qui parle d’aventure, mais aussi d’engagement et de dépassement de soi, le tout raconté avec une authenticité qui résonne. Aussi, je recommanderai toujours les livres que j’ai pu lire petite, et qui se relisent encore et encore, bien plus tard dans la vie. Ce sont ces livres-là qui m’ont le plus marqués, parce que je les ai lus ou écoutés en livre audio des dizaines de fois, et les relire plus tard leur fait prendre un tout autre sens. Je ne pourrais jamais me lasser de la version audio de Zazie dans le métro, par Raymond Queneau. C’est cru, c’est vivant, c’est drôle, et on en apprend beaucoup plus en redécouvrant ça des années plus tard.

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L’art de jouer avec la langue https://www.delitfrancais.com/2025/03/19/lart-de-jouer-avec-la-langue/ Wed, 19 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57801 Entretien avec l’auteur Francis Ouellette.

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Pour cette édition spéciale de la Francophonie, en Culture, nous avions l’embarras du choix : la langue française, qu’elle soit parlée ici ou ailleurs, est à la source d’une panoplie d’œuvres littéraires, cinématographiques, picturales, musicales, etc. Tellement d’artistes de talent la manient, la renouvellent, l’enrichissent.

Au Québec, je ne vous apprends rien, notre rapport à la langue française en est un bien particulier, qui conjugue honte et fierté. On nous martèle sans cesse que nous nous devons de « préserver le français au Québec ». Mais de quel français parlons-nous? Celui, joualisé, de Michel Tremblay? Celui, institutionnel, de Molière? Un franglais « contaminé »? Devons-nous à tout prix nous méfier de la « menace » de l’anglais et éviter ce français imprégné d’anglicismes qui nous caractérise pourtant si bien? Comment peut-on parler de préservation de la langue sans vraiment savoir quelle langue nous nous évertuons à défendre?

Une chose est claire, la langue est au cœur de notre identité, et, inévitablement, la littérature devient le reflet de cette obsession linguistique : dans Mélasse de fantaisie, premier roman de Francis Ouellette, récipiendaire du Prix des collégien·ne·s en 2022, le français québécois devient pleinement littéraire. Francis propose un rapport décomplexé à la langue, dans une prose qui manie la langue de façon presque instinctive. Pas de distinctions cantonnées entre la narration et les dialogues, les registres s’entrelacent, dans une hybridité où la langue populaire devient matière littéraire.

Le 26 mars prochain, c’est l’histoire du personnage de Frigo, l’attachant sans-abri de Mélasse de fantaisie, qui nous sera racontée dans Sirop de Poteau, à paraître chez les éditions La Mèche. Pour l’occasion, j’ai eu le privilège de rencontrer l’auteur, afin d’en apprendre plus sur son prochain roman, mais surtout pour discuter de littérature, de langue québécoise et de francophonie.

« Francis propose un rapport décomplexé à la langue, dans une prose qui manie la langue de façon presque instinctive »

Le Délit (LD) : Ton premier roman, Mélasse de fantaisie, a été récompensé du Prix littéraire des collégien·ne·s. Qu’est-ce que cette reconnaissance signifie pour toi, et qu’est-ce que cela t’a appris sur la réception de ton œuvre par un lectorat plus jeune?

Francis Ouellette (FO) : C’est le meilleur prix qu’une œuvre littéraire peut espérer recevoir. Ce qui est génial avec ce prix-là, c’est que tu es en contact avec la prochaine génération de lecteurs, mais aussi potentiellement avec une prochaine génération d’auteurs. Tu es en contact avec ce qui va former la littérature de demain. […] À chaque conférence que tu fais, à chaque classe que tu rencontres, il y a des germes d’idées qui s’installent dans les conversations. Je me rends compte, moi, que le troisième livre que je suis en train d’écrire est inspiré par plusieurs commentaires que j’ai reçus. Ça nourrit l’imaginaire.

C’est aussi la fréquentation avec les étudiants dans le contexte du prix des collégiens qui a fait que j’ai commencé à faire confiance à la possibilité que j’écrive un cycle qui se passe dans un même univers, avec les mêmes personnages, dans une espèce d’itération un peu involontaire de Michel Tremblay. Les chroniques du Centre-Sud, les chroniques du Faubourg à m’lasse! J’ai vraiment la possibilité de faire un cycle, avec la même langue, avec le même environnement, avec les mêmes personnages. J’ai envie de faire ça. Pourtant, c’est justement ce que j’essayais de contourner avec Mélasse de fantaisie. Je ne voulais pas être « coincé » ou cantonné à un seul style d’écriture. Mélasse de fantaisie, ce n’est pas mon style d’écriture en soi. C’est un exercice littéraire volontaire.

Je me rends compte en me promenant dans les cégeps que les gens ont peut-être envie de voir l’histoire d’autres personnages. Le monde veut en savoir plus sur Ti-criss, sur Frigo. Pour l’instant, j’ai Sirop de poteau qui sort dans deux semaines, que je préfère à Mélasse de fantaisie, en fait. J’ai eu du fun à l’écrire, celui-là. Je me suis permis d’aller dans de l’exploration littéraire plus poussée.

« J’ai toujours trouvé que l’idée que quelque chose soit une histoire vraie ou inspiré d’une histoire vraie, ça peut brouiller les codes de la personne qui lit, qui regarde le film. Ça devient obsessif, un peu »

LD : Comment appréhendes-tu l’étiquette de l’autofiction associée à ton roman?

FO : Je la revendique. Autofiction en réalisme magique. J’ai toujours trouvé que l’idée que quelque chose soit une histoire vraie ou inspiré d’une histoire vraie, ça peut brouiller les codes de la personne qui lit, qui regarde le film. Ça devient obsessif, un peu. […] Plus c’est farfelu, intense, violent et trash, plus c’est vrai. Là où il y a de l’invention, c’est dans la structure littéraire, dans la manière dont l’espace-temps est vécu ou perçu. Je ne peux pas être un narrateur omniscient. Dans le cas de Frigo, c’est un personnage qui est un peu « métaconscient ». Il y a une forme de communication intradiégétique entre le personnage et moi.

LD : J’imagine aussi que le réalisme magique te permet justement plus de liberté créative.

FO : Ça me permet effectivement de pousser l’exploration formelle. Ça me permet aussi – d’où le titre – de m’appuyer sur une notion de fantaisie, qui laisse avoir une certaine forme de distance. Mais ça me permet aussi, moi, en tant que narrateur et en tant qu’individu qui partage ses histoires personnelles, de me cacher, de trouver une zone de recul où tout ça n’est pas non plus totalement épidermique. Donc, j’ai toujours trouvé que le titre à lui tout seul évoque un peu cette espèce de bipolarité. La mélasse, c’est le réalisme, c’est le tangible, c’est le matériel. La fantaisie, c’est ce qui est déterré. Dans Sirop de Poteau, il y aura question d’endroits comme le fameux parc Belmont, qui était un centre d’attraction avant la Ronde, ou le Jardin des Merveilles, un jardin zoologique qui était au milieu du parc Lafontaine. À un moment donné, il y a un éléphant qui s’est sauvé sur la rue Dorchester. Ça va déjà dans l’espace du mythe un peu.

« J’ai vraiment la possibilité de faire un cycle, avec la même langue, avec le même environnement, avec les mêmes personnages. J’ai envie de faire ça »

LD : Penses-tu que la littérature qui se déroule en ville, comme Mélasse de fantaisie, par exemple, c’est un mouvement littéraire en soi?

FO : Peut-être un peu, mais surtout sous la bannière de l’éditeur. Sébastien Dulude, qui est l’éditeur de La Mèche, a écrit Amiante. Amiante, c’est du néo-terroir. Il a publié et épaulé beaucoup de romans qui sont dans des quartiers urbains, qui fonctionnent un peu comme des villages. Donc, ça finit par être une espèce de roman de néo-terroir, à cause de l’appartenance à l’environnement, à la terre, qui est un milieu urbain. La terre façonne le personnage et les individus, mais aussi, en même temps, les traumatismes, les abus, les violences. Il y a assurément des romans publiés à La Mèche qui sont dans cette mouvance-là, une espèce de néo-terroir traumatique.

LD : Crois-tu que l’écriture du trauma peut permettre de guérir un peu, ou du moins, que c’est un exutoire pour le traumatisme?

FO : Selon mon point de vue, totalement. Mais ça dépend de comment tu perçois cet exercice-là. Moi, l’exercice, dans ce cas-ci, il n’était pas que littéraire, il était aussi psychologique. Je n’ai pas juste écrit mon histoire, j’y ai replongé. C’est comme une volonté de reprise, dans mon cas, de reprise de pouvoir par la réinvention de la réalité. C’est de reprendre son histoire personnelle, puis de l’envoyer là où on veut. Un mot qui me plait beaucoup dans le féminisme, dans les autofictions féministes, souvent à caractère traumatique, c’est « empowerment », l”« empuissancement ». Je trouve ça beau « empuissancement ». Le mot est fort. C’est une reprise de pouvoir sur son destin, sur son histoire personnelle. […] Mais c’est intéressant que ça soit si féminin. Quand les hommes font dans le registre de l’autofiction, il n’est pas traumatique.

LD : Il est plus ludique.

FO : Oui, il est plus ludique. On parle de mariage, on parle de consommation d’alcool, de partys. Il y a assurément plus d’hommes victimes d’abus sexuels ou de viols que ce que les statistiques indiquent. Mais la culture patriarcale fait que l’homme autosuffisant trouve sa force intérieure pour se soigner et n’en parlera pas. C’est le vestiaire de hockey. Je n’osais pas croire que j’allais être un défricheur sur ce plan-là. Mais en écrivant Mélasse de fantaisie, je me rendais compte que pas beaucoup d’hommes l’avaient fait.

LD : Au Québec, certains défendent une approche plus puriste de la langue, d’autres prônent son adaptation aux réalités contemporaines, notamment face à l’influence de l’anglais. Où te positionnes-tu dans ce débat?

FO : […] Je ne vois pas ça d’un mauvais œil, la mutation. C’est important, c’est nécessaire. À partir du moment où l’anglais décrié dans mon environnement est entré dans ma propre culture, pour moi, ce n’était pas un effet de colonisation, ça a juste été un élargissement de la pensée, un enrichissement de la langue. Cette richesse polysémique, quand on la travaille bien, elle peut aller très loin.

Souvent, on me dit que j’ai un point de vue modéré. Mais pour moi, ce n’est pas modéré du tout comme point de vue, bien au contraire. C’est nécessaire. Les mutations, dans un futur presque imminent, sont incontournables. Ce n’est pas quelque chose qu’on va pouvoir négocier. Ça va se faire malgré nous. D’emblée, si on considère que le territoire modifie la langue, cette mutation-là est inévitable et je pense qu’il faut l’épouser.

Je pense que c’est mon thème obsessif, le déchirement identitaire. À toute échelle ; la crise identitaire du Québécois, la crise identitaire de l’individu né en milieu ouvrier et qui a eu accès à l’éducation, qui n’appartient plus à rien, qui est deux en même temps, dans deux environnements. La mixité entre la langue québécoise, la langue française, la mixité jusqu’au titre. Il y a une musicalité là-dedans. La musicalité du joual est très, très, très importante pour moi. La musicalité du joual, la trituration du langage. Je suis fasciné par toutes les formes d’expression du français qui ont été modifiées par leur environnement, la Louisiane, la Belgique […] Quand on parle de la musicalité, il y a aussi la conviction profonde que la langue québécoise est une contribution d’une richesse inouïe à la francophonie. Et là-dedans, j’ajoute aussi les fameux sacres, qui sont d’une richesse rare. Ce n’est pas un appauvrissement de la langue. Comme dit Fred Pellerin – en ce qui me concerne, une autre influence involontaire – « ce n’est pas une pauvreté de langage, c’est une puissance de sentiments ». Moi j’ai du plaisir à jouer avec la québécité, la langue québécoise, le français international et littéraire.

LD : Quand tu écris, est-ce que tu parles à voix haute?

FO : Tout le temps, puis je me relis à voix haute aussi. Le slam et le hip-hop ont une influence aussi. Straight out du Faubourg à m’lasse. Le jazz aussi. Beaucoup, beaucoup. Donc oui, vraiment, je fais beaucoup ça, ce sont quasiment des monologues de théâtre. Et ce n’est pas l’influence de Tremblay, vraiment. Mon rapport avec Tremblay est super ambigu. Il est fabuleusement important, mais ce n’est pas de lui que je m’inspirais quand j’écrivais. Étrangement, il y a des inspirations chez Tremblay, mais pas celles qu’on devrait croire.

« Je pense que c’est mon thème obsessif, le déchirement identitaire. À toute échelle ; la crise identitaire du Québécois, la crise identitaire de l’individu né en milieu ouvrier et qui a eu accès à l’éducation, qui n’appartient plus à rien, qui est deux en même temps, dans deux environnements »

LD : Pas celles qui sautent aux yeux du moins.

FO : Non, exact. C’est plus le fait d’être dans un quartier, d’avoir sa langue, d’avoir les « petites gens ». C’est beaucoup plus, pour moi, c’est la construction d’un univers, mais aussi sa capacité [à Tremblay] à donner à des histoires ouvrières d’un milieu pauvre, des accents de grandes tragédies grecques, de grandes comédies de Molière.

LD : Faire du grand avec du petit.

FO : Exact.

LD : Tu publies Sirop de poteau le 26 mars, qui va raconter l’histoire du personnage de Frigo. Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ce deuxième roman?

FO : Même niveau de langue, mais qui va parler plus de réalisme magique. De base, Sirop de poteau était paru dans la revue L’itinéraire, sous forme de roman-feuilleton mensuel. Donc, cette version-là – je vais encore utiliser un mot en anglais ici – c’était une version raw, une version crue. C’est un exercice littéraire intéressant d’écrire tous les mois un chapitre. Après ça, je ne pensais pas que ça serait publié, vraiment pas. Je pensais que ça existerait juste au sein de L’itinéraire, et qu’on allait peut-être sortir un livre à même la revue pour que les camelots le vendent et fassent de l’argent avec. Et c’est en partie ce qui va se passer, parce que les camelots vont avoir le livre avec eux ; le cash leur revient.

« Je veux être le porte-parole d’une seule chose : la fierté de cette langue-là. That’s it. Qu’on puisse utiliser cette langue-là, l’ennoblir, la traiter avec respect. Autant les idiomes que les expressions »

LD : Peut-on lire Sirop de poteau sans avoir lu Mélasse de fantaisie?

FO : Je crois que oui. Je crois que le travail éditorial a fait en sorte qu’on se retrouve dans une zone où il existe par lui-même, mais on a aussi travaillé de sorte qu’en lisant Sirop de poteau, le monde va avoir envie d’aller lire Mélasse de fantaisie. J’essaie vraiment de m’enligner pour quelque chose qui ressemble à un cycle. Je veux être le porte-parole d’une seule chose : la fierté de cette langue-là. That’s it. Qu’on puisse utiliser cette langue-là, l’ennoblir, la traiter avec respect. Autant les idiomes que les expressions.

Une phrase comme « les bottines suivent les babines », c’est magnifique. Ces choses-là sont magnifiques. Elles ne doivent pas se perdre, mais elles peuvent faire partie d’une mutation. Elles peuvent rester. Elles doivent rester, en fait.

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Concours d’écriture de chroniques journalistiques https://www.delitfrancais.com/2025/03/19/concours-decriture-de-chroniques-journalistiques-3/ Wed, 19 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57797 Cette semaine, Le Délit vous présente le fruit de la troisième édition de son projet collaboratif avec le Centre d’enseignement du français à McGill (CEF). Dans le cadre du cours « FRSL 449 : Le français des médias », les étudiant·e·s en apprentissage du français comme langue seconde ont été invité·e·s à soumettre des chroniques… Lire la suite »Concours d’écriture de chroniques journalistiques

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Cette semaine, Le Délit vous présente le fruit de la troisième édition de son projet collaboratif avec le Centre d’enseignement du français à McGill (CEF). Dans le cadre du cours « FRSL 449 : Le français des médias », les étudiant·e·s en apprentissage du français comme langue seconde ont été invité·e·s à soumettre des chroniques au sein de la section Bien-être. Les textes ont en commun d’explorer les thèmes de la santé physique et mentale, ainsi que ce qui influence leur quotidien en tant qu’étudiant·e·s à McGill. Ces textes, préalablement révisés dans un contexte de cours par la professeure Élisabeth Veilleux, ont par la suite été sélectionnés pour être publiés dans Le Délit. Nous vous présentons notre sélection des deux chroniques qui nous ont le plus marqué.

Une page par jour
Les bénéfices d’écrire dans un journal intime en tant qu’étudiant·e·s
Jade Thomas, Contributrice

Vous rappelez-vous de ce que vous avez fait le 1er janvier 2020? Pour beaucoup, ce jour marquait le début d’une nouvelle décennie. Mais, pour moi, il signifiait encore plus. En effet, ce fut le jour où j’ai écrit la première page de mon journal intime. Je voulais ancrer l’occasion spéciale du commencement des années 2020, alors je me suis emparée d’un stylo pour noter ce que j’ai fait ce 1er janvier. Je me disais qu’une ou plusieurs années plus tard je pourrais ainsi relire la page et me rappeler ce point important de mon adolescence. Aujourd’hui, j’ai 12 journaux remplis, soit plus de 2 000 pages couvertes de mes pensées et aventures! Curieusement, au fil du temps, mon objectif d’écriture a évolué d’une simple description de ma journée à une réelle réflexion. Mon journal est devenu une manière de me libérer à la fin de chaque longue journée.

L’idée d’écrire dans un journal intime évoque souvent le stéréotype d’une petite fille rêvant de son amoureux. Pourtant, en tant qu’être humain, chacun·e est capable de ressentir des émotions fortes et puissantes. Nous portons indéniablement des pensées plus lourdes et compliquées que toute autre espèce. Ainsi, avoir un endroit sécurisé pour déposer ce poids est indispensable et, selon James Pennebacker – chercheur et psychologue renommé – la page blanche d’un journal intime est un lieu parfait pour démêler nos sentiments.

À l’instar du psychologue Daryl Bem, je suis d’avis que nous en apprenons beaucoup sur nous-mêmes en observant nos propres actions, émotions et décisions. Cet apprentissage contribue à un gain de connaissance de soi-même qui peut affecter profondément notre vie. Connaître ses valeurs personnelles mène à être plus efficace au travail, dans les relations interpersonnelles et dans les projets créatifs. Ainsi, en comprenant mieux nos procédés cognitifs, nous devenons plus investi·e·s, de manière positive et constructive, dans notre vie quotidienne.

En tant qu’étudiante, prendre un peu de temps chaque jour pour noter mes expériences et pensées m’aide surtout à gérer mon stress. Pendant la semaine, le travail s’accumule et, comme vous tous·tes, je sens de temps en temps qu’un devoir est impossible à compléter. Or, dès que je remplis une autre page dans mon journal, j’ai une impression de contrôle et une nouvelle perspective sur ce qui se passe dans ma vie. D’ailleurs, cette impression n’existe pas seulement dans ma tête. En effet, d’après le psychologue David Lieberman, l’activité dans notre complexe amygdalien (région de notre cerveau associée aux sentiments comme la peur et l’inquiétude) se calme lorsqu’on écrit dans un journal. Si nous ne prenons pas le temps de reconnaître notre stress et nos sentiments troublants, ils risquent de sortir par la porte et de revenir par la fenêtre!

Pour conclure, tenir un journal comme étudiant·e est un acte simple pour chacun, mais s’avère extrêmement puissant. À travers les mots écrits, on démêle nos sentiments, on apprend à mieux se connaître, on gère notre stress et, en somme, on garde une trace de notre développement personnel. Alors, qu’attendez-vous pour vous jeter à l’encre? Allez chercher un stylo et du papier et voyez ce que vous pouvez apprendre sur vous-mêmes!

Toscane Ralaimongo | Le Délit

Une soirée ciné : À vivre une fois par semaine
Charlotte Livingston, Contributrice

Cela fait maintenant un an que je dédie mes mardis soirs aux sorties cinéma. L’idée d’aller regarder un film sur grand écran n’est pas révolutionnaire. Nous avons toutes et tous déjà passé des soirées au cinéma. Peut-être entre amis pour profiter d’un programme double de Barbenheimer ou lors d’un premier rendez-vous en allant voir Challengers. Depuis mon arrivée à McGill, j’ai vu plus de 30 films. Plusieurs m’ont impressionnée, certains m’ont émue aux larmes, d’autres m’ont déçue. Pourtant, ce n’est pas (juste) parce que je suis cinéphile que j’y vais autant. Pour moi, ces soirées sont devenues plus que de simples moments de divertissement : elles sont devenues une manière de stabiliser ma santé mentale en m’offrant un moyen de déstresser et de faire partie d’une communauté.

En octobre dernier, alors que je venais de commencer ma deu-xième année à McGill, j’ai vécu une période de stress intense. Je naviguais à travers de multiples sources d’angoisses : les notes, les amitiés et mon avenir en général. À l’époque, je me suis retrouvée complètement bloquée par ce stress quotidien. Je ne suis néanmoins pas la seule à vivre de telles périodes : selon une étude réalisée par l’Université de Sherbrooke, environ 40% des étudiants universitaires ont des sentiments d’angoisse et de solitude plus élevés qu’avant d’arriver à université. De plus, cette statistique augmente chaque année.

Un jour, après avoir appris que les billets ne coûtaient que 8$ le mardi, une amie m’a proposé d’aller regarder le film Past Lives au Cinéma du Parc. Je me souviens à quel point le film m’avait captivée et la sensation d’être apaisée que j’ai éprouvé après la séance. Je me suis sentie libérée du stress et de l’anxiété de ma journée.

La semaine suivante, j’ai donc proposé à mon amie d’y retourner. C’est ainsi qu’aller au cinéma est devenu une nouvelle habitude. Durant les mois suivants, on a découvert une nouvelle communauté : celle des habitués du Cinéma du Parc. Pendant l’entracte de The Brutalist, réalisé par Brady Corbet, on a par exemple rencontré des étudiants de l’Université de Montréal, avec qui on a pu sympathiser et discuter du film. C’est avec eux que j’ai pu, la semaine suivante, débattre du film Queer sur le chemin du retour du cinéma. Ainsi, c’est à travers ces courtes – mais passionnantes – discussions inspirées par les films, que j’ai ressenti ce sentiment de communauté, et que nous en sommes devenues des membres.

Aujourd’hui, avoir cette pause de stress et voir ce groupe régulièrement m’aide à éviter de rester bloquée dans des situations de stress et d’anxiété interminables, comme je le faisais quelques mois plus tôt. Je ne souhaite pas donner l’impression qu’aller au cinéma est la solution pour vaincre tous les sentiments de solitude et de stress en tant qu’étudiante. À mon avis, cette échappatoire et ce sentiment de communauté que le Cinéma du Parc m’apporte peut se retrouver dans n’importe quel passe-temps. Alors je t’encourage, toi aussi, à trouver ton Cinéma du Parc!

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L’art de convaincre https://www.delitfrancais.com/2025/03/19/lart-de-convaincre/ Wed, 19 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57793 Deuxième tour du concours d’éloquence de McGill.

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Ce vendredi 14 mars, le club francophone d’éloquence de McGill organisait le deuxième tour de la première édition de son concours. Au rez-de-chaussée du bâtiment Leacock, huit étudiant·e·s construisaient en une trentaine de minutes leur argumentaire pour répondre aux questions suivantes : « Le conformisme est-il un moteur ou un frein? », « La passion est-elle solitaire? », « Le collectif est-il un refuge ou une prison? », « L’union dépend-elle d’une seule voix? ». Les participant·e·s se sont ensuite affronté·e·s au sein de joutes verbales par binôme. Le mois dernier, ils·elles avaient été sélectionné·e·s parmi une dizaine de candidat·e·s lors du premier tour en défendant leur plaidoirie sur le thème « L’un dans le Tout : Cohabiter entre Soi et le Monde ».

Une opportunité de s’exprimer en français à McGill

Le Délit s’est entretenu avec Salomé Bourdet, actuellement vice-présidente et chargée des affaires internes de McGill Éloquence. En février 2024, elle a fait partie des quelques étudiant·e·s qui ont donné naissance à l’association. Elle raconte avoir constaté en arrivant à McGill un manque de « structures où s’exprimer en français ». Le club a alors pris ancrage dans ce qu’elle décrit comme « une volonté générale à McGill de développer davantage d’opportunités pour les francophones ». Les jurys de chacun des tours étaient composés d’une avocate, d’un animateur radio et de professeur·e·s et doctorant·e·s en français et en droit, comme Élisabeth Veilleux, Jérémie Torres-Ceyte ou Célia Hadid. Ils·elles ont unanimement exprimé leur engagement à soutenir les initiatives faisant la promotion de l’usage de la langue française sur le campus.

Tao Ramiandrasoa, participant du concours et désormais finaliste, nous explique pourquoi il s’est inscrit : « Comme on est dans un univers anglophone où on parle en permanence anglais […] ça me donnait un cadre dans lequel parler et produire des écrits plus académiques en français ». Salomé indique que, bien que le français soit la langue maternelle de la totalité des participant·e·s du concours, « le club aimerait attirer de plus en plus de gens dont ce n’est pas forcément la première langue mais qui souhaitent prendre confiance, développer leurs compétences » ou simplement se familiariser avec son usage.

Plus qu’une pratique formatrice

Être à l’aise à l’oral, c’est un atout au quotidien et « prendre confiance » est un des enjeux de la discipline de l’éloquence. Salomé explique que l’association aspire à mettre à disposition des étudiant·e·s qui le souhaitent les clés nécessaires pour se démarquer en entretien d’embauche, lors d’une présentation orale en cours, ou en postulant en maîtrise.

« Comme on est dans un univers anglophone où on parle en permanence anglais […] ça me donnait un cadre dans lequel parler et produire des écrits plus académiques en français »
Tao Ramiandrasoa, finaliste du concours

Mais au-delà de son aspect pratique, l’éloquence est un art ; celui de manier les mots pour convaincre, d’user les procédés rhétoriques pour réfuter, d’exploiter les regards, les silences, la gestuelle, les intonations, l’humour. Chacun des ateliers bi-mensuels tenus par McGill Éloquence se concentre sur un de ces points. Au semestre d’automne, les membres ont participé au procès fictif d’Astérix et Obélix, et des ateliers sur la narration et l’utilisation du ton sont proposés ce semestre.

La finale du concours aura lieu le vendredi 4 avril et sera ouverte au public! Salomé espère que cette édition sera la première d’une « série de concours annuels » et que l’association sera bientôt capable de prendre part à des compétitions inter-universités au Canada, voire peut-être en France.

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10 chansons qui vous feront pleurer https://www.delitfrancais.com/2025/03/19/10-chansons-qui-vous-feront-pleurer/ Wed, 19 Mar 2025 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=57785 Le nouveau concert de Pierre Lapointe.

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A cclamé par la critique à la suite des premières représentations de son plus récent album Dix chansons démodées pour ceux qui ont le cœur abîmé, Pierre Lapointe entame au Québec la tournée de son 15e album. J’ai eu l’immense privilège d’assister à la deuxième représentation de son spectacle le 15 février, à Mont-Tremblant.

Pierre Lapointe est une véritable icône de la musique québécoise, un monument que dis-je! L’artiste flamboyant, connu pour ses mélodies inspirées de la chanson classique française mêlées aux rythmes pop, a sous son chapeau 15 prix Félix et plus d’une dizaine d’albums certifiés disques d’or. À l’âge de 24 ans, Pierre Lapointe connaît son plus grand succès en écrivant La Forêt des mal-aimés. Les pièces comme Deux par deux rassemblés ou Au 27–100 rue des Partances demeurent parmi les titres forts qu’il emportera avec lui de l’autre côté de l’océan pour agrandir sa renommée auprès des Français. Ce soir-là, à Mont-Tremblant, j’ai bravé la tempête jusqu’à la somptueuse église du lac Mercier, reconvertie en salle de spectacle, pour me laisser transporter par les paroles mélancoliques de Pierre Lapointe, cette icône toujours au sommet de son art, de retour en force après une pause musicale bien méritée.

L’auteur-compositeur-interprète nous revient avec des paroles intimes accompagnées de mélodies épurées. Détonnant des accents excentriques ou « grandioses » de ses albums précédents, celui-ci est percutant et émouvant. Pas très loin de sa trame narrative habituelle, le chanteur explore des thèmes qui lui sont chers – l’enfance, la mort et les relations amoureuses – qu’il réinvente d’une main de poète en nous amenant plus loin dans son univers.

Que le spectacle commence…

Pierre Lapointe entame de grands pas théâtraux vers le public, immédiatement subjugué par son charisme naturel. Avec son premier morceau Le secret, il nous plonge au cœur de sa vie amoureuse sans pour autant révéler l’identité de sa nouvelle muse. Les paroles de sa chanson ne font que suggérer le mystérieux prétendant : « Mon cœur veut crier le nom de celui que j’aime, mais je ne lui en donne pas le droit. » Accompagnée de seulement un piano, sa voix résonne harmonieusement au son du duo de pianistes, composé de Amélie Fortin et Marie-Christine Poirier, à qui il dédiera, à la grande surprise du public, une pièce de leur spectacle qu’elles exécuteront sans préparation! Ce moment spontané fut tout simplement incroyable!

Les mots « authenticité » et « intimité » résument à merveille le spectacle de près de deux heures. Pierre Lapointe renoue avec les influences classiques de la musique française qui ne l’ont jamais quitté pour présenter sur un ton nouveau les 10 chansons de son nouvel album. Chaque pièce musicale renferme un tableau dépeignant un passage charnière de la vie de Pierre, mais à travers lequel chacun d’entre nous peut s’identifier. Le public se retrouve plongé au cœur de l’enfance, l’adolescence et même l’entrée dans l’âge adulte de l’artiste. Au fil de ses chansons, le chanteur de La Forêt des mal-aimés explore des thèmes éminemment personnels et profondément humains : la vieillesse, les blessures d’enfance, les remises en question douloureuses et la quête imparfaite du bonheur. Assister au spectacle de Pierre Lapointe est un véritable manège d’émotions.

« Chaque pièce musicale renferme un tableau dépeignant un passage charnière de la vie de Pierre, mais à travers lequel chacun d’entre nous peut s’identifier »

Comme il l’affirme à la blague à maintes reprises, il s’agit d’un de « nos doux moments de déprime ». Une chose demeure certaine, on ne se lasse guère de sa voix singulière et enveloppante, qui accompagne une poésie classique, mais assumée. Le clou du spectacle est sans aucun doute la pièce Comme les pigeons d’argile. La réalité chantée d’un fils promettant à sa mère atteinte d’Alzheimer de veiller à son chevet en émeut plus d’un parmi l’assemblée. Les larmes vous couleront, c’est certain.

J’ai eu un faible tout particulier pour Dans nos veines, un morceau qui, selon Pierre, requiert presque un entraînement « sportif » afin de le livrer à la perfection. Il va sans dire que Pierre Lapointe nous démontre encore une fois le travail méticuleux qu’il fournit pour chaque prestation. De toute évidence, ce monument de la chanson québécoise réaffirme sa place en tant que génie du classicisme réinventé dans son nouveau spectacle Dix chansons démodées pour ceux qui ont le cœur abîmé présenté partout au Québec dès maintenant, et ce, jusqu’au 14 février 2026. Il sera de passage à Montréal le 13 et 14 juin 2025 au Théâtre du Nouveau Monde.

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